L' »antisémitisme » est « résiduel » en France, selon Mélenchon

Mélenchon fait du Jean-Marie Le Pen, sans indigner Faure, Roussel ou Tondelier

En estimant, sur son blog, que l’antisémitisme en France reste «résiduel», Jean-Luc Mélenchon nie la réalité de la flambée des actes antisémites depuis le 7 octobre, explique la journaliste Noémie Halioua.

Noémie Halioua est journaliste. Elle a coécrit Le Nouvel Antisémitisme en France (éd. Albin Michel, 2018), écrit L’affaire Sarah Halimi (éd. du Cerf, 2018) et Les uns contre les autres – Sarcelles, du vivre-ensemble au vivre séparé (éd. du Cerf). Son dernier essai : La terreur jusque sous nos draps (éd. Plon, 2024).


En cette période de déchirement identitaire, où le printemps semble avoir déserté le ciel parisien, le patron de La France insoumise n’a rien trouvé de mieux à faire que d’enfoncer le clou sur nos compatriotes de confession juive.

Dans un billet de blog daté du 2 juin, consacré à l’entretien de Benyamin Netanyahou accordé à la chaîne LCI, le patron de la mélenchonie a jugé opportun d’affirmer que la folie antijuive était anecdotique dans notre pays. «Contrairement à ce que dit la propagande de l’officialité, l’antisémitisme reste résiduel en France. Il est, en tout cas, totalement absent des rassemblements populaires», considère-t-il. Comprenez : la furie haineuse qui vise ce segment de population depuis le pogrom du 7 octobre, dans la foulée de la guerre israélo-Hamas, est une réalité alternative artificiellement montée en épingle par des sphères de pouvoir. La douleur sourde formulée par des personnalités comme Bernard-Henri Levy et Gilles-William Goldnadel, l’empilement de plaintes des gens ordinaires recensées par l’Organisation juive européenne (OJE) et sa directrice, Muriel Ouaknine-Melki, le déchaînement virulent sur les réseaux sociaux, les témoignages qui s’accumulent d’agressions verbales de chauffeurs Uber et de livreurs UberEats au nom de Gaza, les étudiants juifs refoulés en amphithéâtre à l’université, tout cela est, pour lui, une preuve de mythomanie généralisée.

Mélenchon nous dit en sous-texte que nos compatriotes de confession juive sont des paranoïaques en puissance, que ces milliers de tags sur les façades d’immeubles et les insultes quotidiennes sont des affabulations, une invention d’esprits imaginatifs, une comédie humaine. Mélenchon affirme, en somme, que les chiffres du ministère de l’Intérieur, qui attestent d’une hausse de 300% des actes antijuifs sur le premier trimestre 2024, sont falsifiés. Pour le patron de La France insoumise, ce tourbillon d’agressions qui se succèdent si vite que nos compatriotes en sont déboussolés, qui les fait traverser une crise existentielle comme jamais depuis la Shoah, n’existe pas. Il nous dit de circuler, qu’il n’y a rien à voir.

Ainsi, le fondateur de La France insoumise ne se contente pas d’armer idéologiquement les antisémites, en présentant le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) comme une antichambre du pouvoir, en excitant les foules et en diabolisant l’Etat juif, il voudrait en plus étouffer le cri de nos compatriotes juifs qui souffrent. Alors que beaucoup d’entre eux s’enferment dans la solitude et le mutisme, qu’ils ont presque honte de leur malheur et craignent de s’en plaindre trop ouvertement, Mélenchon voudrait que ceux qui ont le courage de se révolter s’émeuvent en silence.

Chaque époque voit naître sa poignée de soumis et de glorieux résistants. Chaque époque voit apparaître des personnages incarner ces aspérités humaines que sont le courage et la pleutrerie, la force morale et la soumission. (Noémie Halioua)

Se pose alors une interrogation naturelle, à savoir : pourquoi ? Pourquoi dit-il cela maintenant ? Pourquoi ce politicien expérimenté voit comme une urgence d’en rajouter une couche sur une communauté numériquement minuscule, discriminée, souillée, en des temps où celle-ci n’a jamais été aussi pointée du doigt depuis la Shoah ? Que nous dit cette façon d’embrasser et de légitimer une haine ancestrale irrationnelle, en réservant tous ses coups aux 1% de nos compatriotes déchirés depuis le 7 octobre ? La folie du personnage, fort bien croquée par Eric Naulleau dans un pamphlet qui lui est consacré, n’empêche pas une forme de rationalité dans ses prises de position. Si dans son texte Mélenchon nie la véracité de la bouffée antijuive actuelle, c’est d’abord pour prendre la défense des rassemblements propalestiniens, y compris ses dérives, son caractère obsessionnel, pulsionnel, incontrôlable et ses aspérités totalitaires. Pour ce faire, il défend aussi ceux qui, à longueur de journée, traitent les Juifs et ceux – nombreux – qui ont encore le courage de les défendre, de «génocideurs» et de «massacreurs d’enfants» pour les couvrir de honte et les obliger à fermer leur bouche.

Ce n’est pas nouveau, Mélenchon s’inscrit dans une longue tradition historique. Chaque époque voit naître sa poignée de soumis et de glorieux résistants. Chaque époque voit apparaître des personnages incarner ces aspérités humaines que sont le courage et la pleutrerie, la force morale et la soumission. Il n’est pas nécessaire d’être devin pour savoir que Mélenchon restera comme l’homme qui a fait sauter tous les verrous de l’ignominie, ouvrant la voie à une génération de politiciens à la limite de l’analphabétisme, défendant avec une écharpe tricolore tous les intérêts étrangers, hostiles à la France, à ses racines judéo-chrétiennes et plus largement à l’Occident dont elle est l’héritière.

Son parti restera comme celui qui, pour la première fois à l’Assemblée nationale, a brandi tel un étendard au milieu de l’hémicycle un drapeau étranger. Son parti restera celui qui aura accentué la fracture identitaire, soutenu les manifestations haineuses et l’isolement de nos compatriotes juifs. La France insoumise est une illustration grandeur nature de la promotion du mensonge propre aux régimes dénoncés par Georges Orwell dans 1984. «La vérité, c’est le mensonge ; la guerre, c’est la paix ; la liberté, c’est l’esclavage», y clament les partisans du totalitarisme. À cela, nous pourrions ajouter : l’insoumission, c’est le parti de La France insoumise.

En cela, Mélenchon s’inscrit dans l’héritage de Jean-Marie Le Pen, lorsqu’il affirmait que la Shoah était un point de détail de l’Histoire.

L’acteur, réalisateur, animateur et chanteur israélo-français Philippe Lellouche qualifie quelques figures de La France insoumise :

« Varsovie, Tréblinka et maintenant Gaza » : ignominie des révisionnistes pro-palestiniens, Place de la République

Négationnisme de la Shoah sur la place publique à Paris

Quand Macron pava la voie de Mélenchon

Hier après-midi mardi, veille de l’Armistice du 8-Mai 1945, une manifestation pro-palestinienne avait lieu Place de la République à Paris. Des slogans révisionnistes y ont été scandés par une jeunesse inculte et grégaire aux esprits colonisés par LFI.

Savent-ils ce qu’ils disent sans honte, ces déficients à qui personne n’a le cran de dire qu’ils sont des buses ? On a ainsi entendu: ”Varsovie, Treblinka et maintenant Gaza, on avait dit plus jamais ça!”.

Par ailleurs, des banderoles appelant explicitement à la destruction d’Israël ont été brandis: ”Palestine martyrisée, Israël expulsé” pouvait-on lire.

Et si les pro-palestiniens de Scienes Po et de La Sorbonne se mettaient au travail

Le journaliste français, Claude Moniquet, spécialiste du terrorisme et des renseignements, s’est indigné sur X: ”A Paris, Place de la République, cet après-midi. Un nouveau seuil a été franchi dans la connerie et l’ignominie par ceux qui hurlent ”Varsovie, Treblinka et maintenant Gaza! On avait dit plus jamais ça”. Que dire devant une telle haine des juifs et un tel révisionnisme?”.

La haine antisémite s’étend en France: aux manifestations dans les universités s’ajoutent maintenant les profanations de tombes. Ainsi dans un cimetière en Dordogne, des inscriptions ”Habib, sioniste”, ”Zemmour, juif”, ”Hanouna, juif” ont été taguées.

En Grèce, un groupe de touristes israéliens a échappé de peu au lynchage par une foule pro-palestinienne qui manifestait devant un hôtel appartenant à des Israéliens.

Gilles Kepel avait mis en garde contre la prévalence de l’idéologie sur le savoir dans l’enseignement de nos universités:

Affaire Guillaume Meurice: un droit à l’antisémitisme des syndicalistes de Sud

La liberté d’expression n’est pas un casse-tête pour l’Arcom, soumise à l’extrême gauche révolutionnaire

L’antisémitisme est un sujet de « blagues« , selon l’AFP
et le groupe Les Echos-Le Parisien de Bernard Arnault, qui avait expliqué dès 2017 combien le programme de Macron lui paraissait « éminemment souhaitable »

Pourquoi Guillaume Meurice est-il toujours à Radio France? La direction des chaînes de service public avait peu d’options de sanctions, l’humoriste bénéficiant du statut de …«salarié protégé».

«Si j’attaquais mon employeur, je ne suis pas sûr que l’on me laisserait à l’antenne», confie un salarié d’un groupe audiovisuel privé. «Dans n’importe quelle entreprise, cette situation serait intenable», souligne un autre. Depuis la diffusion de son sketch, le 29 octobre dernier, qualifiant le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, de «Nazi sans prépuce», Radio France a reçu des centaines de messages d’indignation en provenance des auditeurs pourtant blasés par les attaques tous azimuths de France inter, chaîne militant à l’extrême gauche, par le biais notamment de chroniqueurs classés humoristes et protégés par ce viatique sacré de la liberté d’expression en démocratie.

France inter, victime consentante de l’« humour vache » de ses humoristes et protectrice de son agresseur tout azimuth

Sibyle Veil, la présidente de la Maison de la Radio, a tenté de raisonner son protégé pour qu’il reconnaisse une erreur d’appréciation, compte tenu du contexte de tensions extrêmes sur toutes les questions ayant trait au conflit entre Israël et le Hamas. Hors tensions extrêmes, l’erreur, si ce n’était que çà, était en soi suffisamment répréhensible, avec ou sans prépuce, en tant qu’accusation de nazisme, la Shoah étant un génocide historique de Juifs par les Nazis. Guillaume Meurice ayant refusé, il a écopé d’un simple… avertissement qu’il a même décidé de contester en justice. La pédégère de Radio France est l’épouse de Sébastien Veil, petit-fils de Simone Veil, laquelle fut déportée à Auschwitz à l’âge de 16 ans, durant la Shoah, où  son père, son frère et sa mère furent exterminés. 

L’Arcom saisie pour des propos de Guillaume Meurice et Caroline Fourest

Le régulateur de l’audiovisuel va instruire deux dossiers concernant deux séquences impliquant l’humoriste sur France Inter d’une part, l’essayiste sur BFMTV d’autre part. Ils sont accusés respectivement d’antisémitisme et de relativisme dans la mort d’enfants palestiniens.

En cause, une « sortie » de Guillaume Meurice, selon Telerama, groupe Le Monde, à propos du premier ministre israélien Benjamin Netanyahu : suggérant une idée de « déguisement pour faire peur » à l’occasion d’Halloween, l’humoriste a évoqué un « déguisement Netanyahu »« une sorte de nazi mais sans prépuce ». S’en est suivie une simple « polémique » pzrmi d’autre, toujours selon le groupe du milliardaire Xavier Niel, gendre de Bernard Arnault, sur les réseaux sociaux. « Prépuce ou pas : Moi je serais plutôt en faveur de circoncire le temps d’antenne de Guillaume Meurice. (Et le mandat de Netanyahou aussi, mais c’est une autre histoire) », a notamment déploré sur X la rabbin et écrivaine Delphine Horvilleur.

« Je trouve invraisemblable que trois semaines après le plus grand massacre de juifs depuis la Seconde guerre mondiale, dans une radio publique, on en vienne à comparer un juif à un nazi » a abondé sur BFMTV le président des éclaireuses et éclaireurs israélites de France, Jérémie Haddad, fustigeant également les « réactions du plateau (de France inter) qui rit à gorge déployée ».

Adèle Van Reeth, la directrice de France Inter, a répondu aux auditeurs de la station dans un texte publié sur le site de la médiatrice : « Vous avez été très nombreux à réagir aux propos de Guillaume Meurice. […] Je rejoins le malaise [sic] que vous avez été nombreux à exprimer. […] Pour beaucoup, une limite a été franchie : non pas celle du droit, qu’il reste à établir, mais celle du respect et de la dignité. Si je suis garante de la liberté d’expression sur France Inter, je le suis aussi des propos qui s’y tiennent. C’est ce que j’ai rappelé aujourd’hui à Guillaume Meurice. » L’une et l’autre sont toujours à leur poste…

Meurice devrait s’exprimer à l’antenne ce dimanche sur son sketch accusant Benyamin Netanyahou de …nazisme.

Candidat aux élections des représentants du personnel, Guillaume Meurice est devenu intouchable

La direction de France Inter ne peut rien contre un syndicaliste de SUD, branche « armée » du NPA, Nouveau Parti anticapitaliste, révolutionnaire trotskiste.

En se présentant aux élections professionnelles des représentants du personnel, « l’humoriste » Guillaume Meurice est devenu quasiment intouchable par la direction de France Inter. Mais est-elle motivée ? Une enquête du Figaro est consacrée à cette affaire qui au-delà de la radio publique, secoue l’opinion. Signe de la tension qui entoure ses propos, dans le contexte très sensible des massacres initiés par les terroristes islamistes du Hamas en Israël, cette émission, « Le grand dimanche soir », présentée par Charline Vanhoenacker, aura exceptionnellement lieu sans public, de 18h à 20h.

Une décision prise « pour la sécurité des équipes », selon le groupe public de Radio France, à cause de menaces de mort reçues par Guillaume Meurice. Point de départ de l’affaire: une « blague » qu’il a faite lors du précédent numéro, le 29 octobre.

En évoquant des idées de « déguisement pour faire peur » à Halloween, le blagueur a imaginé un « déguisement Netanyahu », « une sorte de nazi mais sans prépuce », selon le trotskiste et sous les éclats de rires de ses camarades, sélectionnés par Charline Vanhoenacker, louve belge introduite dans le noeud de vipères par l’agressive Pascale Clark, cooptée par Daniel Schneidermann (en avril 2023, pour sa couleur de peau, il compare Christine Kelly à Pépita, « hôtesse » dans le jeu Pyramide sur France 2), qui a aussi infiltré Mehdi Meklat, un blogueur du Bondy Blog connu pour des tweets racistes, antisémites, homophobes et misogynes, faisant l’apologie d’Hitler et de Ben Laden, menaçant de mort Marine Le Pen ou les journalistes de Charlie Hebdo… Cette dernière séquence de Meurice a suscité de nombreuses réactions indignées d’auditeurs, qui y ont vu une dimension antisémite, et des saisines de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel. Elle a également valu au « petit taquin » de 42 ans un « avertissement » de la direction de Radio France lundi, qu’il entend contester en justice.

Mais Le Figaro rappelle ce qui s’est vraiment passé : 

« Si la question de son licenciement s’est bien posée, la direction de Radio France n’a pas vraiment eu le choix, en définitive. Selon nos informations, Guillaume Meurice bénéficie depuis quelques mois du statut de « salarié protégé« Il s’était présenté sur la liste SUD aux dernières élections professionnelles des représentants du personnel. Il est donc intouchable pour le moment. En plus de la liberté d’expression, droit de dire n’importe quoi, de blesser et donc d’inciter à la haine antisémite.

Dans l’arsenal des pénalités possibles, seul l’avertissement permettait d’agir vite. Mais il n’est pas de nature à interdire d’antenne un salarié. L’ensemble des autres sanctions prévues dans le règlement doit passer par un avis conforme de l’Inspection du travail et une consultation des élus du personnel. Autant dire que Meurice peut dormir l’âme en paix…

S’engager dans cette voie aurait pris des semaines, voire des mois, avec un résultat incertain. Contactée, la direction de Radio France s’est refusée à tout commentaire. » Sans blague ? Elle n’abuse pas de sa liberté d’expression…

Alain Finkielkraut confie sa peur de l’antisémitisme

« Partout dans le monde, les Juifs comprennent qu’ils ne font pas le poids »

Le philosophe réagit à la menace que constitue la judéophobie qui se répand sur l’ensemble de la planète.

Des étoiles de David ont été taguées au pochoir sur des façades d’immeubles – des habitations et des commerces juifs – à Paris et dans plusieurs villes de banlieue. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Je suis épouvanté, mais je ne suis pas étonné. Dans son livre, Une tragédie française, Franz-Olivier Giesbert rappelle opportunément que le 20 juillet 2014, alors que la guerre faisait rage à Gaza, un véritable pogrom a eu lieu à Garges-lès-Gonesses et à Sarcelles. Sous une flopée de drapeaux turcs, les manifestants criaient : « Mort aux Juifs », « Hitler avait raison ». Ils ont attaqué la synagogue de Sarcelles avec des cocktails Molotov. Le maire de l’époque, François Pupponi, déclarait : « Le conflit israélo-palestinien n’est que l’excuse pour exprimer la haine du Juif et des institutions. » 

Les Moldaves sont
un peuple roumanophone

Dix ans plus tôt, le doyen des inspecteurs de l’éducation nationale, qui menait une enquête sur les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les écoles, s’est rendu dans un lycée de banlieue. On lui a appris qu’il n’y avait plus d’élèves juifs. Il a demandé la raison de cette fuite et les professeurs lui ont répondu : « C’est bien simple, ils n’étaient plus assez nombreux pour se défendre. » Tout était là, mais la bien-pensance refusait obstinément de regarder la réalité en face. Ces sociologues, ces philosophes, ces journalistes voulaient nous convaincre que les années 1930 étaient de retour et que dans le nouveau racisme, l’islamophobie occupait la place de l’antisémitisme. La réalité est différente. C’est encore l’antisémitisme qui occupe la place de l’antisémitisme, et cet antisémitisme est désinhibé par la nouvelle guerre à Gaza.

Une vidéo virale sur les réseaux montre des jeunes chantant : « N*que les Juifs, vive la Palestine […] On est des nazis. »

Le Figaro

On a d’abord, et depuis quelque temps déjà, identifié les Israéliens à des nazis. Voici, par exemple, ce que disait le romancier chilien Luis Sepúlveda : « A Auschwitz et Mauthausen, à Sabra, Chatila et Gaza, sionisme et nazisme se donnent la main », (Une sale histoire, 2005). L’antisionisme était le droit de haïr les Juifs en toute bonne conscience. Maintenant, un pas de plus est franchi et les antisémites les plus virulents se réclament directement de Hitler.

Il faut ajouter que ces jeunes, comme vous dites, ont crié : « Vive le 9.3 ! » Le 9.3 constitue leur appartenance. Or, les deux injures les plus fréquentes dans les territoires perdus de la République, devenus, comme l’a montré Bernard Rougier, les territoires conquis par l’islamisme, sont : « Sale Juif ! » et « Sale Français ! ». Les Juifs et les autres Français se trouvent exposés à deux variantes de la même haine. Autrefois, les Juifs voyaient dans la France le pays où se réalisaient leurs aspirations messianiques. Un nouveau franco-judaïsme apparaît. Les Français juifs et les Français d’origine française se retrouvent dans le même bateau. Et le bateau coule. 

N’est-ce pas aussi lié à une méconnaissance de l’histoire de la Shoah ?

L’enseignement de la Shoah [prévention ?] aujourd’hui à l’école est obligatoire et il tend à devenir impossible. Certains professeurs parlent de Hitler et du nazisme sans évoquer les Juifs. Cela ne favorise pas la transmission. On assiste de surcroît au dévergondage généralisé de l’antinazisme. Aujourd’hui, ce sont des experts de l’ONU qui osent qualifier l’action militaire de Tsahal à Gaza de génocide. Ces experts ont fait des études. Comment voulez-vous, dans ces conditions, que la jeunesse des quartiers puisse connaître quelque chose de cette histoire ?

Cette augmentation des actes antisémites se répand sur l’ensemble de la planète et des sociétés occidentales. 

Ce qui me frappe surtout, c’est la mondialisation de la haine. Il y a en France les étoiles de David et ces jeunes qui s’autorisent à clamer leur détestation des Juifs dans le métro. Mais il y a aussi une tentative de pogroms au Daghestan, des manifestations propalestiniennes à Sydney, à Londres, à Tunis, à Istanbul. La planète tout entière est saisie par une sorte de passion meurtrière. 

Alors que nul n’a songé à descendre dans la rue quand l’Arabie saoudite a bombardé le Yémen, quand la coalition contre l’État islamique a bombardé Raqqa et Mossoul, ni aujourd’hui quand 1,7 million d’Afghans sont chassés manu militari du Pakistan. « No Jews, no news. » Six cent mille Juifs, cela ne compte pour presque rien à côté de l’immigration maghrébine et subsaharienne. Partout dans le monde, les Juifs comprennent qu’ils ne font pas le poids. C’est une prise de conscience terriblement douloureuse. Lien X

En qualifiant de « nazi sans prépuce » le Premier ministre israélien sur France Inter, le chroniqueur Guillaume Meurice a suscité une vive polémique. L’humour ne peut-il pas choquer ?

21 février 2019

L’humour, ce n’est pas le rire. L’humour, dit Kundera, c’est « le plaisir étrange issu de la certitude qu’il n’y a pas de certitude ». Avec le gai luron de France Inter, on a affaire une nouvelle fois à une manifestation de rire barbare. Mais il faut saluer sa blague repoussante comme un moment historique, celui de la jonction entre l’antinazisme et l’antisémitisme.

Après avoir dit : « Hitler, c’est un enfant de chœur à côté de Netanyahou », l’ancien athlète Mahiedine Mekhissi a présenté ses excuses. Ce geste n’était peut-être pas sincère. Mais peu importe. L’hypocrisie, nous dit La Rochefoucauld, est « l’hommage du vice à la vertu ». Guillaume Meurice est dispensé de cet hommage. Le vice antisémite, avec lui, s’affiche sans vergogne. Sympathisant de La France insoumise, il se croit porté par l’histoire et il pense être soutenu par les syndicats. Qu’une telle abjection ait pignon sur rue à Radio France, cela me déchire le cœur, car c’est ma maison depuis 1985. Je me sens moi-même sali par cette blague.

Lien X

On entend beaucoup aujourd’hui parler du retour de nos vieux démons. Est-ce que vous pensez qu’il existe encore un antisémitisme chrétien ?

L’antisémitisme chrétien existe peut-être, mais il est résiduel. Catholiques ou protestants, les chrétiens aujourd’hui sont solidaires des Juifs. 

Ce qui suscite l’inquiétude, c’est l’alliance naissante de la judéophobie islamiste et du wokisme. La pensée woke a substitué à la classique lutte des classes le conflit des dominés et des dominants, et à l’anticapitalisme, l’anti-impérialisme. Aux yeux des wokes, la personnification ultime de l’impérialisme, c’est Israël. L’Israélien conquérant remplace dans l’imaginaire de cette gauche le ploutocrate juif. Et cela alors même, qu’Israël s’est retiré du Sinaï, du Sud Liban et de Gaza. Etrange expansionnisme, on en conviendra. 

Sur les campus américains, mais aussi déjà dans certaines universités françaises, on se mobilise pour une Palestine libre « de la rivière jusqu’à la mer ». Une Palestine sans Juifs, donc. Victime superlative tant que gisait la mémoire de la Shoah, le Juif apparaît maintenant comme l’ennemi du genre humain. L’antisémitisme est le stade suprême du wokisme.

Alain Finkielkraut,
de l’Académie française

Avez-vous peur ?

Quand on voit ce qui se passe, on se dit que les Juifs ne seront plus en sécurité nulle part. Ils ne font pas le poids, et la possibilité du pogrom est partout. Comment ne pas avoir peur ?

Les perturbateurs perturbés du collectif «Dernière Rénovation» ont aspergé la pyramide du Louvre de peinture orange

Subventionnés par Climate Emergency Fund pour dégrader

Dégradations perpétrées ce vendredi 27 octobre

Ce vendredi 27 octobre, plusieurs militants du collectif Dernière Rénovation sont parvenus à monter sur la pyramide du Louvre. Une fois sur la structure, ces derniers ont jeté de la peinture orange fluo.

06/09/2023

Par ce geste, ces activistes ont pour «objectif» de défendre la cause de «rénovation thermique des bâtiments». «Tandis qu’à l’Assemblée nationale, le gouvernement continue sa politique destructrice pour notre humanité en refusant de voter des amendements favorables à la rénovation thermique et à des vies sauvées , Dernière Rénovation alerte : «La rénovation, c’est maintenant !»», a indiqué le collectif sur X.

Qui est Roger Hallam, l’inspirateur sulfureux de Dernière rénovation ?

   Le collectif Dernière rénovation est inspiré par un activiste britannique, Roger Hallam, aussi cofondateur d’Extinction Rebellion. Ce stratège du mouvement climat est animé par une idéologie controversée.


Ils ont interrompu la demi-finale de Roland-Garros, certaines étapes du Tour de France et bloquent régulièrement des autoroutes ou des périphériques, mais se veulent pacifiques. Ils revendiquent du gouvernement un plan majeur pour la rénovation thermique des bâtiments, mais ne font rien d’autre que de la com’. En France, le collectif climatique Dernière rénovation attire les media, énerve nombre d’automobilistes et questionne les autres acteurs de la lutte climatique. La « résistance civile non violente » est sa ligne, comme on peut le lire sur leur site internet, mais résister, en dérangeant ses concitoyens, c’est en réalité agresser. Concrètement, cela signifie que ses membres multiplient les actions hautement perturbatrices et répétitives — et prennent ainsi le risque théorique d’aller en prison. Pour comprendre d’où vient cette stratégie bien rodée, il faut traverser la Manche à la rencontre de celui qui en est le principal instigateur : Roger Hallam, 57 ans, qui estime que « même ceux qui pensent un peu de manière sexiste ou raciste peuvent nous rejoindre »…

Cet activiste britannique est un personnage central du mouvement climat. Cofondateur d’Extinction Rebellion, XR, le mouvement au sablier inséré dans un cercle, il a aussi inspiré la création de nombreux collectifs partout en Europe, comme Dernière rénovation donc, mais aussi Just Stop Oil — les jets de soupe sur les Van Gogh, c’est eux — au Royaume-Uni. La recette miracle de Roger Hallam ? Un discours catastrophiste, qui le fait comparer la crise climatique à… la Shoah (en la banalisant), des actions coups de poing qui séduisent une certaine jeunesse, et la constitution d’un réseau international. Hallam a été incarcéré et devait être jugé le 17 février 2020.

Entraver la libre circulation de ses concitoyens,
une action pacifique de désobéissance civile?

Comment est née cette stratégie ? Dès le début des années 2000, Roger Hallam, 56 ans aujourd’hui, a saisi la gravité du changement climatique. Le maraîcher bio dans le sud du Pays du Galles, près de Carmarthen, qui employait vingt-cinq personnes, était alors confronté à une météo imprévisible. Chaque année, les récoltes de sa ferme coopérative Organics to go — à laquelle il participe toujours — étaient durement abîmées par de longs mois de pluie.

Le signe, selon lui, d’un désastre global : si rien n’était fait, l’agriculteur en était persuadé, de grandes famines adviendraient et des guerres civiles, des grèves de la faim, éclateraient. Il décida alors d’abandonner sa ferme de quatre hectares pour reprendre des études au King’s College de Londres. Pendant quatre ans, il s’est plongé dans les plus célèbres contestations radicales, comme le mouvement indépendantiste lancé par Gandhi en Inde ou la lutte des suffragettes pour les droits des femmes au Royaume-Uni. Lui-même s’était déjà frotté au militantisme en participant, ado, aux marches contre l’armement nucléaire dans les années 1980. Derrière ce studieux épluchage théorique, il s’interroge sur le moyen de mobiliser les gens et les engager dans une contestation de masse ?

« Voilà le prototype pour sauver le monde »

Autoroute M25, Londres,
bloquée par Insulate (isolez) Britain,
septembre 2021

De cette étude, Roger Hallam conclut en 2020 que « le moyen le plus efficace de provoquer un changement politique rapide [est] la désobéissance civile massive et non violente ». Le fauteur de troubles a une recette qu’il jugeait imparable pour faire plier les gouvernements : « Perturbations, sacrifices et respect [de l’adversaire] jusqu’à l’emporter. Ensuite, répète inlassablement et étends le mouvement. Voilà le prototype pour sauver le monde ». Pour que cela fonctionne, l’incarcération des militants est, selon lui, un ingrédient indispensable. Pour dramatiser les situations. Plus il y aura d’arrestations, plus le soutien de la population – et donc la pression sur l’Etat ou l’entreprise visée – serait important.

Fort de ces principes, Roger Hallam a cofondé Extinction Rebellion en octobre 2018. Le mouvement au logo de sablier a connu un vif succès, et est aujourd’hui présent dans quatre-vingt-six pays. C’est quasiment avec ces mêmes méthodes qu’il a fondé Insulate Britain, trois ans plus tard. En octobre 2021 un sondage révéla que 72% des sondés désappouvaient les manifestants et sa stratégie a quelque peu évolué.

Théâtralité de la manifestation d’Extinction Rebellion,
en 2020, à Londres, contre le pétrolier Shell. © Nina Guérineau de Lamérie/Reporterre
Théâtralité de la manifestation d’Extinction Rebellion,
en 2020, à Londres, contre le pétrolier Shell. © Nina Guérineau de Lamérie/Reporterre

Contrairement à XR, le collectif se dote d’une revendication ciblée : l’isolation des logements. Son organisation est aussi plus verticale pour améliorer l’efficacité dans les prises de décision. Enfin, il mise sur des petits groupes d’activistes pour mener des actions très perturbatrices, comme le blocage du trafic routier. Ce ‘soft power’ écolo est en vérité un terrorisme psychologique.

Provoquer un maximum de perturbation avec un minimum d’effort. Cette stratégie a rapidement essaimé outre-Manche et attiré une partie de la jeunesse éco-anxieuse et avide de changements. Extrêmement actif sur les réseaux sociaux, où des dizaines de milliers le suivent, Roger Hallam interpelle cette nouvelle génération dans une vidéo intitulée How to stop climate crisis in six months (chiche !), l’incitant à entrer en résistance malveillante. En France, Thibaut Cantet, un jeune homme de 28 ans, ancien militant dans la branche française d’Extinction Rebellion, l’a découverte par hasard.

Gourou écolo, sorte de prophète Philippulus,
ancien collaborateur illuminé du professeur Calys,
dans les Aventures de Tintin, L’Etoile mystérieuse  

Rodé aux codes de la désobéissance civile, le Parisien suivait déjà de près les actions d’Insulate Britain au Royaum6e-Uni. La vidéo de Hallam, postée en novembre 2021, a été un déclic. En quelques semaines, il a monté une équipe de quelques personnes – des anciens camarades d’XR France — et lancé Dernière rénovation (DR).

Le “réseau A22” : une organisation internationale

Habituellement discret, le cofondateur de DR a exceptionnellement accepté de s’exprimer. Quand on l’interroge sur ses liens avec Roger Hallam, il reste prudent et ne s’épanche pas : « J’ai regardé pas mal de ses vidéos, je me retrouvais dans sa pensée. » Le jeune homme admet toutefois avoir été en contact avec le stratège britannique et reconnaît qu’il les a aidés à intégrer le “réseau A22”, référence à avril 2022, date des premières actions. Cette organisation internationale regroupe tous les mouvements inspirés par les théories de Hallam, une nébuleuse.

Parmi eux, on retrouve notamment Just Stop Oil, le petit frère d’Insulate Britain, fondé et piloté par Roger Hallam lui-même, mais aussi Ultima Generazione en Italie, Letzte Generation en Allemagne, Renovate Switzerland en Suisse… Tous suivent la même ligne stratégique, résumée dans un manifeste au ton solennel, publié sur le site du réseau A22 : « Nous sommes ici pour forcer les gouvernements démocratiquement élus (ce que les agitateurs verts ne sont pas !) à réduire les émissions de carbone, rien de moins. […] Nous sommes ouverts et non violents. » Il existe une véritable synergie entre ces campagnes : « On a une identité commune et une stratégie commune », explique Pierre, un membre de Dernière rénovation qui connaît bien le fonctionnement du réseau A22.

Tous les jours, les différentes organisations sont en contact par Zoom. Elles partagent leurs expériences et leurs ressources dans différents domaines. Elles essayent aussi de se coordonner, d’où le nom A22, qui vient d’avril 2022 : la date de la première vague d’actions. Cependant, chaque mouvement conserve une certaine marge de manœuvre par rapport à A22 : « Personne ne nous dicte ce qu’on doit faire. Il n’y a pas de processus de validation du réseau », nuance Pierre, de DR. D’ailleurs, leurs revendications ne sont pas les mêmes en fonction des pays : rénovation des bâtiments en France, la fin de l’extraction des hydrocarbures au Royaume-Uni, la restauration des zones humides en Suède…

La dépendance est plus forte au niveau des ressources financières. Le réseau A22 leur permet d’accéder aux subventions du Climate Emergency Fund (le fonds d’urgence climatique) alimenté par de riches philanthropes américains, notamment la fondation Aileen Getty, petite fille de l’entrepreneur dans la filière du pétrole J. Paul Getty. En 2022, le CEF a déboursé plus de 4 millions de dollars (3,7 millions d’euros) pour soutenir quarante-trois groupes d’activistes climatiques non violents a leur mznière. « Au début, on a reçu 50 000 euros pour financer les six premiers mois de la campagne », confie Thibaut Cantet. Mais impossible de connaître le montant total des aides du CEF versées à Dernière Rénovation. On sait seulement qu’elles représentent quasiment les deux tiers de leur caisse, le solde provenant de dons de particuliers.

Le système de financement A22 reste opaque, comme le trajet de l’argent jusqu’à Dernière rénovation: la question est sensible. Le collectif juge confidentielles ces informations, comme si elles étaient inavouables. « Il y a un enjeu de sécurité assez fort », se justifie Pierre, qui reconnaît qu’il y a bien une coordination internationale des financements.

La Shoah n’est « qu’une connerie de plus dans l’histoire humaine »

Ainsi organisé, le réseau A22, impulsé par Roger Hallam, se veut le nouveau fer de lance de la lutte pour le climat. Et la recette fonctionne, puisque partout dans le monde, onze collectifs ont rejoint le réseau. Ce parcours rappelle celui du mouvement Extinction Rebellion (XR), qui s’est également internationalisé rapidement. Sauf que XR a ensuite pris ses distances de son charismatique leader. Pire, désormais, le nom du stratège est presque tabou chez XR au Royaume-Uni. Personne ne souhaite s’exprimer à son sujet, car « Roger ne fait plus partie d’XR depuis longtemps », se justifie l’une de ses porte-parole. Cela fait trois ans que l’organisation s’est définitivement désolidarisée de ce cofondateur devenu trop encombrant. En cause, des propos dans les media et sur les réseaux sociaux qui ont, à plusieurs reprises, choqué l’opinion et terni l’image du mouvement au sablier.

Le mouvement Extinction Rebellion s’est désolidarisé
de son cofondateur, à la suite de ses multiples propos choquants. © NnoMan Cadoret/Reporterre

La véritable rupture est survenue en 2019. Dans une interview à l’hebdomadaire allemand Die Zeit, Hallam a affirmé que la Shoah n’avait été « qu’une connerie de plus dans l’histoire humaine ». Deux jours plus tard, il récidivait dans les pages de Der Spiegel en affirmant : « Le changement climatique n’est que le tuyau par lequel le gaz pénètre dans la chambre à gaz. C’est juste le mécanisme par lequel une génération en tue une autre. »

Ces propos ont indigné la branche allemande de XR et de la classe politique du pays, qui lui ont reproché de minimiser l’Holocauste et l’ont accusé d’antisémitisme. De nombreux militants ont alors claqué la porte d’Extinction Rebellion, et certains donateurs ont arrêté leurs financements. Acculé, Hallam s’est excusé du bout des lèvres : « Je suis désolé pour les mots utilisés. Mais je ne ressens pas le besoin de m’excuser d’avoir attiré l’attention sur le génocide [climatique] qui se déroule actuellement. » 

Des discours choquants censés tirer « les gens » de l’apathie

En réalité, ces sorties de route font partie d’une stratégie de communication savamment calculée visant à choquer, comme l’ont révélé le journal Les Jours (site web d’information lancé en 2016 par une équipe d’anciens journalistes de Libération) et l’hebdo d’outre-Rhin Der Freitag. L’activiste britannique ne s’impose d’ailleurs aucune limite. Pour rallier à la cause, réelle, de l’urgence climatique, il use abondamment de discours apocalyptiques. Famines, guerres, abus sexuels, etc… seraient l’unique avenir des sociétés occidentales, vouées à l’effondrement dans les prochaines années.

Roger Hallam va ainsi jusqu’à comparer le Royaume-Uni à un goulag anglais ou raconter un viol collectif dans ses moindres détails dans une vidéo destinée à la jeunesse : « Une bande de mecs défoncera ta porte et te demandera à manger. Ils verront ta mère, ta sœur, ta petite amie, et ils la violeront à tour de rôle sur la table de la cuisine. Ils te forceront à regarder, et se moqueront de toi. C’est ça, la réalité du changement climatique. » Le gars est dérangé, aurait-on dit jusqu’au 7 octobre dernier, sans le Hamas…

Ces terribles présages, crus et violents, ont un objectif bien précis : faire sortir les gens de l’apathie collective en les forçant à prendre conscience des terribles conséquences du changement climatique.

En 2020, des activistes ‘gore’ de XR 
dénonçaient, devant le ministère de l’Economie,
les « milliards d’euros investis dans des industries
qui tuent les écosystèmes planétaires et les vies humaines
 ».
 © NnoMan Cadoret / Reporterre

Dans une moindre mesure, cette technique est reprise par Dernière rénovation, lors des réunions publiques qui permettent de recruter de nouveaux activistes. Dans ces présentations de deux heures, les organisateurs invitent à sortir du « déni climatique léger » et à « regarder la vérité en face ». Pour ce faire, ils misent sur un savant cocktail d’émotions et d’informations scientifiques anxiogènes. « Avec les informations qu’on a eues, il y a des sentiments qui étaient latents et qui prennent le dessus, comme la tristesse et la colère, et vers la fin, la détermination de participer aux actions de blocage », témoignait l’une des participantes.

Cela peut aller très loin : il n’est pas rare de voir des membres de Dernière rénovation ou de Just Stop Oil se filmer en pleurs lors d’une action, intimant au gouvernement l’ordre d’agir. Dans une vidéo publiée sur Twitter, par exemple, Charlotte, 20 ans, membre de DR, déclare dans de gros sanglots : « J’ai envie de vivre et j’ai envie que mon petit frère puisse avoir une vie aussi. »

« Aucun espace pour le débat, sous prétexte qu’on vit la fin du monde »

Message de Hergé:
Ne pas trop écouter les prophètes de malheur

Un ton que critiquaient déjà certains activistes d’XR France, rodés à ces méthodes de communication. Hélène Assekour, qui a aujourd’hui pris ses distances avec XR pour ces raisons, raconte son malaise face au rabâchage des discours catastrophistes lors des réunions internes. « Voir des gens privilégiés à l’échelle de la planète se mettre dans des états incroyables pour des choses qu’ils n’ont pas vécues, c’était très gênant. La situation est déjà assez grave, pas besoin d’en rajouter », s’exaspérait-elle début janvier. Sur Twitter, elle dit retrouver ce côté « quasi millénariste »  chez Dernière rénovation. Clément, ex-membre d’XR France, met, lui aussi, en garde contre la stratégie de la peur : « Le risque, à valoriser un discours de fin du monde, c’est que ça va créer une génération de militants qui adhèrent à ces idées sans forcément les remettre en question, ni les critiquer. »

Durant leurs années à XR, les deux militants ont d’ailleurs relevé une sorte « d’orthodoxie vis-à-vis de Roger Hallam », rapporte Hélène Assekour. « C’était dur de remettre en question un mouvement qui apporte une “recette miracle”. Il n’y avait pas d’espace pour le débat, sous prétexte qu’on vit la fin du monde. » Les deux anciens de XR perçoivent les similitudes entre les deux organisations, et craignent que l’histoire ne se répète à Dernière rénovation.

« Même si on s’inspire de sa pensée, on a quand même le sentiment d’être autonome par rapport à Roger Hallam, assure pourtant Lucio, un membre de DR. Personne ne tire les ficelles, on est indépendants et l’engagement des militants est sincère. » Et Thibaut Cantet (cofondateur du mouvement DR) de renchérir : « Roger Hallam le dit lui-même : on a le droit de ne pas être d’accord avec lui et de proposer autre chose. » Pour Pierre, lui aussi à Dernière rénovation, le lien avec Hallam est très indirect : « La dernière fois qu’on a été en contact avec lui, c’était il y a six ou sept mois. » Selon lui, le mouvement s’inspire aussi d’autres personnalités, dont il ne souhaite pas dévoiler le nom.

Cependant, il reconnaît les apports du stratège britannique, qui a « réactualisé le principe de la résistance civile ». Un souffle qui bouleverse le monde du militantisme climatique, selon l’universitaire britannique Oscar Berglund, spécialiste des mouvements de désobéissance civile et de l’activisme, pour qui  « ces mouvements n’ont pas besoin d’être populaires » : « Roger Hallam a modifié la façon dont les mouvements climats traditionnels se positionnent vis-à-vis de ce genre d’activisme. » Reste à savoir si cette stratégie n’est qu’une mode, vouée à sa ringardisation, ou si elle se pérennisera dans le mouvement climat français.

Savoir enfin si ce réseau d’agitateurs stériles va un jour devoir réparer les dégâts qu’il occasionne, plutôt que de les laisser à la charge des populations qui pourtant les condamnent.

Médine clive aussi EELV pour ses journées d’été

Mélenchon vole au secours de l’antisémite

Pour s’être démasqué avec un « tweet antisémite », le rappeur islamiste Médine divise les écologistes, dont plusieurs figures regrettent son invitation aux journées d’été d’EELV.

Il lui est notamment reproché d’avoir posté un tweet jugé «antisémite» visant Rachel Khan, de confession juive. Médine est accusé d’avoir traité la petite fille de déportée de «resKHANpée». Un jeu de mots rappelant ceux de Jean-Marie Le Pen (« Durafour crématoire » ou la Shoah, « détail de l’Histoire ») et qui finit de souiller l’image déjà controversée de la NUPES, dont EELV est une composante.

La paire Tondelier / Rousseau juge insuffisantes les excuses du macho homophobe, amateur de méchoui.

La n°1 d’EELV, Marine Tondelier, a haussé le ton. « Fallait pas l’inviter » : née comme lui de père algérien, l’eurodéputée Karima Delli a tenté de mettre les choses au point, vendredi matin. En tant qu’« écologiste et femme de gauche, viscéralement attachée au respect des gens, à la liberté, l’égalité, la solidarité et la laïcité […], je ne peux soutenir et encore moins cautionner l’invitation de Médine », s’est désolidarisée l’eurodéputée, soucieuse, sur X (ex-Twitter), de sa carrièr.

Je suis une écologiste et une femme de gauche, viscéralement attachée au respect des gens, à la liberté, l’égalité, la solidarité & la laïcité.

Dès lors, je ne peux soutenir & encore moins cautionner, l’invitation de Médine.
Oui, #MedineFallaitPasLInviter

Pour acheter la paix sociale dans leur électorat, les grandes gueules avalent la couleuvre.

Mélenchon, l’ancien leader de la France insoumise, a pris la défense de l’antisémite

Quenelle de Médine

«Médine n’est pas raciste [il est question d’antisémitime]. Pourquoi vouloir lui faire avouer des positions qui ne sont pas les siennes après l’avoir invité ? Les admirateurs macronistes de Barrès, de Maurras et de Pétain ont de la chance d’avoir des opposants aussi soumis au qu’en-dira-t-on des hypocrites», a polémiqué l’ancien candidat l’élection présidentielle, tentant de faire diversion. Pourquoi n’évoque-t-il pas l’antisémitisme de Staline ?

Pour l’heure, la participation de Médine aux journées d’été d’Europe-Ecologie-Les Verts est toujours maintenue, toutefois la secrétaire du parti et initiatrice de l’invitation, Marine Tondelier, a prévenu ce vendredi sur …France Inter qu’elle sera «extrêmement attentive à ce que Médine dira le 24 août et à ce qu’il dira tous les jours qui suivront». Une cheffe de parti qui s’accommode de la présence d’un islamiste notoire, doublé d’un antisémite.

Passe sanitaire: des politiques défilent avec les rebelles?

Le Huffington Post ne ciblent que certains

Activistes marginaux anti-tout: sont-ils de droite,
au vu des slogans?

Wonner, élue LREM, ou Philippot, ex-RN, ou Dupont-Aignan, mais pas Panot, LFI, ni , pourquoi?…

« Plusieurs responsables politiques deviennent les égéries du mouvement covido-sceptique, » selon le regard sélectif de l’AFF: un cheval de bataille séléctif, inspiré des réseaux sociaux.

L’Express décrédibilise le mouvement anti-passe en citant les réseaux sociaux: « Les manifestations anti-pass sanitaire reflètent dans la rue ce qui s’observe depuis des mois sur les réseaux sociaux où prolifèrent comptes anti-masques, anti-vaccins, anti-confinement, aux millions d’abonnés, une galaxie protéiforme dotée de relais et d’influenceurs puissants. » Le Huffington Post préfère la caricature : « Un chanteur, un avocat et deux parlementaires sont en manif… ce pourrait être le début d’une blague, mais il s’agit surtout du casting des chefs de file du mouvement anti-pass sanitaire.  » Et de citer les agitateurs : « Comme il y a une semaine, Francis Lalanne, Fabrice Di Vizio ou les députés Martine Wonner et Nicolas Dupont-Aignan devraient rejoindre, ce samedi 24 juillet, les dizaines de milliers de Français qui manifestent contre la nouvelle politique sanitaire du gouvernement. » Tout le monde en prend pour son grade. Mais où est la gauche? Elle serait simplement observatrice inactive, à en croire le site qui se dit neutre et indépendant… L’instrumentalisation politicienne est grossière, mais sans honte.

Adama Traoré, avant les libertés:

Les esprits afûtés objecteront que le député Coquerel ni aucun LFI ou Generation.s ne descend dans la rue pour s’opposer aux lois de la République:

Les slogans sont estampilkés de la gauche radicale

Une certaine presse n’assume pas sa manipulation de l’opinion, assimilant anti-vaccin/ anti-vaccination obligatoire ou anti-vaccination/anti-pass:

L’Express, qui n’est pas aussi trompeur, ne porte pas les oeillères sectaires du HuffPost. Il apporte la nuance qu’impose la vérité objective : »Les « covidosceptiques » trouvent sur les réseaux une chambre d’écho d’autant plus efficace qu’elle profite de mouvements déjà structurés sur internet avant le Covid: les anti-vaccins et les « gilets jaunes« . 

Le magazine cite Coralie Richaud, enseignante en Droit public à l’Université de Limoges, laquelle note « le caractère « extrêmement hétéroclite » des profils, de l’extrême gauche à l’extrême droite, certains versant dans le complotisme, d’autres non, avec beaucoup d’anti-vaccins mais aussi des vaccinés. »  « Leur seul dénominateur commun, c’est d’être +anti+« , poursuit cette spécialiste des mouvements de contestation sur internet.

Le HuffPost est résolument primaire

Que cherchent ces politiques qui défilent avec les anti-pass (photo de Florian Philippot et Nicolas...
Des leaders de la droite radicale sont également présents

« A Paris, le rassemblement se fait à l’appel de l’ancien numéro deux du Front national Florian Philippot, en pointe contre ce qu’il appelle la “coronafolie”, lequel va battre le pavé pour le 36e week-end de suite. Façon gilet jaune. Jacline Mouraud, connue du grand public pour avoir été l’une des figures éphémères de ce mouvement protestataire est d’ailleurs également de la partie.

Lalanne, ex-MoDem et écologiste, Wonner, ex-LREM, Fabrice di Vizio, avocat spécialisé en santé publique, porte-étendard des antivax et anti-pass

Pour certains spécialistes, le profil hétérogène des “Français en colère” qui ont défilé samedi dernier vient inscrire leur fronde dans la continuité du mouvement mené, jadis , par Jérôme Rodrigues [toujours] ou Eric Drouet. A plusieurs différences près, tout de même. Contrairement à 2018, les responsables politiques semblent, pour le moment, avoir leur place dans la mobilisation estivale contre le pass sanitaire.

Dès lors, si la totalité des membres de l’opposition [Pacôme Rupin, LREM, a-t-il traversé la rue ? ] se dit hostile à la nouvelle stratégie de l’exécutif, une poignée [exact mais méprisant, vu la cible considérée] d’entre-eux [échantillon partiel: partialité du propos] seulement [] descend dans la rue, au risque de marcher au côté de pancartes outrancières et nauséabondes, certes marginales mais récurrentes. Et de s’exposer in fine à une forme d’isolement politique. Mais pour quels intérêts?

Tristan Mendès France, maître de conférences associé à l’université de Paris Diderot, n’est pas surpris de retrouver Florian Philippot, ou quelques autres, à la manœuvre. “De façon générale, il y a un capital contestataire en France sur lequel une frange a toujours essayé de surfer”, nous dit-il, listant, les revendications des gilets jaunes, le problème des masques en 2020, les confinement ou la 5G comme autant de sujets récents, avant d’ajouter, un brin fataliste: “on savait que le prochain moment d’exploitation politique serait les vaccins. C’était quasi inévitable.” 

On savait [sic, part-pris du sachant militant] que le prochain moment d’exploitation politique serait les vaccins. C’était quasi inévitable. » (Tristan Mendès France, petit-fils de Pierre Mendès France, maître de conférences associé à l’université de… Paris Diderot, foyer de la contestation permanente)

Pour ce spécialiste des cultures numériques, qui ne témoigne pas sur la base de sa compétence, il faut se tourner vers les réseaux sociaux et leurs “soldats digitaux” pour mieux comprendre l’implication de certaines personnalités dans le mouvement anti-pass, à quelques encablures de l’élection présidentielle. D’un côté, Nicolas Dupont-Aignan et Florian Philippot ont déjà annoncé leur intention d’être candidat, de l’autre, Martine Wonner, exflitrée, mardi, de son troisième groupe politique en quatre ans à l’Assemblée nationale, pour de nouveaux propos polémiques, dit vouloir monter son propre mouvement “apolitique et citoyen.”

Lien PaSiDupes mettant en évidence l’exploitation malveillante d’une compétence a des fins de manipulation politicienne: cf. « Mise en examen d’une pompe à fric de Mélenchon pour sa campagne 2017  »

Car, à l’image de plusieurs mobilisations récentes, les réseaux sociaux prennent une place singulière dans cette grogne, sur les pages Facebook, en particulier, où les discours enflammés viennent souvent s’ajouter au partage de théories fumeuses.

Quel débouché aux “soldats digitaux”?

“On peut être contre le pass sanitaire et se poser des questions légitimes, mais la frange la plus militante, la plus radicale est souvent en ligne. Et cette population contestatrice est un vecteur de viralité assez porteur, c’est un pôle de soldats digitaux avec un potentiel très intéressant si on est candidat”, décrypypte Tristan Mendès France, avant de citer les exemples de Florian Philippot ou Nicolas Dupont Aignan: le second, député de l’Essone et président de Debout la France “a plus d’engagements sur sa page Facebook que la page officielle d’Emmanuel Macron alors qu’il a infiniment moins d’abonnés.” En d’autres termes: ses publications font davantage “le buzz”, suscitent plus de partages etc…

Mais l’implication de ces responsables dans la sphère anti-pass ou anti-vaccin peut-elle se traduire en bulletins de vote? Leur popularité numérique -ou non- acquise au fil de leurs prises de position à l’Assemblée, dans les manifs ou sur les réseaux sociaux, peut-elle avoir des répercussions dans les urnes? 

Toutes les opinions politiques étaient représentées samedi dans la foule. Les préoccupations sont solides, profondesNicolas Dupont-Aignan, député de l’Essone

Florian Philippot, lui, ne se fait pas vraiment d’illusions. “Je pense que la présidentielle, c’est important d’y être de toute façon, pour porter notre message. Mais si le pays n’est pas mûr pour un changement réel, ce n’est pas cette mobilisation qui va changer les choses, il faut une prise de conscience profonde”, déclare au HuffPost celui qui “réfléchissait à sa candidature depuis longtemps.”

“C’est n’importe quoi”, tranche de son côté Nicolas Dupont-Aignan, quand on lui parle de récupération politique. Il préfère plutôt mettre en avant le profil très hétéroclite des manifestants, et y voit un débat “moral” plutôt que politique. “C’est une considération morale. Toutes les opinions politiques étaient représentées samedi dans la foule. Et on ne parle pas du prix de l’essence, on parle de l’intégrité physique de leurs gamins, les préoccupations sont solides, profondes”, nous dit-il.

Plutôt qu’un entrain vers les urnes, les spécialistes pointent surtout le risque d’une flambée de violence. Selon plusieurs médias dont Le Parisien, une note rédigée par le renseignement territorial, après la première manifestation samedi 17 juin, alerte sur une possible “radicalisation” du mouvement des anti-pass. D’autant qu’il est bien parti pour s’inscrire dans la durée tant le discours parfois complotiste qui constitue son terreau comme son carburant, semble inépuisable en temps de pandémie.

De premières dissensions entre têtes d’affiche

“On est dans un moment avec un capital d’audience complotiste inédit”, constate Tristan Mendès France, ajoutant: “avant le coronavirus, cette effervescence apparaissait après des drames, comme le 11 septembre, ou les attentats, avec des gens qui cherchaient à la capter, et puis elle se tarissait.” “Là, c’est comme si on avait une sorte de drame continue. Si vous êtes sur un profil de bascule complotiste, vous êtes ramené tous les jours à vos craintes”, poursuit le spécialiste: “c’est comme si on grattait une plaie toujours ouverte.”

Pour Florian Philippot, une chose est certaine: “il y a un désarroi profond dans le pays, on a senti une forte mobilisation le 17, alors qu’on est en plein mois de juillet.” “Et l’intransigeance ou la brutalité du gouvernement au Parlement cette semaine va contribuer à ouvrir les yeux de certains”, veut-il croire, pariant sur le temps long. 

Mais malgré ces discours mobilisateurs, les premières dissensions couvent. De fait, si ces responsables politiques se défendent de lorgner sur d’éventuels électeurs, leur omniprésence n’est, déjà, plus du goût de certains, à l’heure où des manifestations parallèles s’organisent pour éviter de marcher derrière la bannière d’un parti. Dans un live Twitch, repéré par nos confrères de Libération, l’ancien journaliste Richard Boutry, une autre figure de la galaxie covido-sceptique expliquait, dimanche 19 juillet, vouloir se “priver de politiques volontairement pour ne pas servir la soupe à ceux qui, tous, nous ont trahis”, citant l’ancien bras droit de Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan.

Invité à s’exprimer, Francis Lalanne a dénoncé de son côté la tentative de “récupération politicienne” des anti-pass par le président des Patriotes. Réponse du principal intéressé: ”c’est risible et indécent, car s’il y en a bien un qui est là depuis le début, c’est moi.” Une forme de constance, certainement, dans son opposition au gouvernement. De cohérence? Pas toujours, quand il manifestait, semaine après semaine, contre le port du masque obligatoire en oubliant qu’il l’avait réclamé plusieurs mois auparavant. Restera à savoir qui du chanteur, de l’avocat ou des parlementaire tombera à l’eau le premier.

Le 17 juillet 2021 à Nantes, foyer bien connu de l’activisme de droite !

Pour les benêts, ce document qui éclairera peur-être les manipulés de la gauche experte en agit-prop à partir du détournement de l’étoile jaune: un affichage abject en Israël

Shoah, immatriculation tatouée

Arrêtez de comparer la campagne de vaccination à la Shoah: un appel de Mediapart à ses suiveurs

Le site trotskiste tente de déplacer les délires antisémites des siens sur l’extrême droite

L’extrême gauche se livre à une mascarade indigne : en même temps, elle est islamogauchiste!

« Certain·e·s abonné·e·s sont choqué·e·s par les comparaisons entre vaccination et Holocauste [mais aussi par l’écriture inclusive évidemment pratiquée par Mediapart], et nous alertent, ce qui mène à des dé-publications systématiquement mal comprises, » reconnaît Mediapart, doutant des capacités intellectuelles de ses lecteurs. Ce qui se conçoit bien s’énonce pourtant clairement, mais quid des raisonnements tordus qui reviennent en boomerang en pleine face? « C’est pourquoi nous allons vous exposer notre ligne concernant ces décisions de modération. » Auto-exegèse…

« Depuis le début de la crise du Covid [de la covid], nous pouvons lire dans les fils de commentaires des contributions comparant la pandémie et la vaccination à la Shoah : « Le Covid a été créé pour tuer une partie de la population »« l’épidémie de Covid est mal gérée pour se débarrasser des plus vieux »« la campagne de vaccination a pour but de se débarrasser d’un maximum de personnes »« ceux qui ne sont pas vaccinés vont être persécutés comme les juifs pendant la guerre »« à quand un procès de Nuremberg pour le gouvernement français ? », « le pass sanitaire est la nouvelle étoile jaune ».

Reductio ad Hitlerum

Le point Godwin (recours systématique à une comparaison avec Hitler ou le nazisme) est largement atteint dans les discussions en ligne, peu importe le sujet abordé. Au-delà du fait qu’elle n’est souvent pas pertinente, cette tactique [sic] minore les horreurs de crimes contre l’humanité.

Cela relève souvent d’une forme de paresse intellectuelle : pas la peine de creuser le sujet initial, on sort la carte « nazisme » comme un joker qui est censé mettre fin à toute forme d’argumentation. [décrédibilisation et diabolisation sont les deux mamelles léninistes]

Mais en comparant tout et n’importe quoi à l’Holocauste, on participe à la banalisation du génocide de 6 millions de juifs,[et surtout !] de tziganes, d’homosexuels.

Comme souvent, les espaces de discussion sont un miroir des débats qui agitent la société. Il y a quelques mois, la commercialisation d’étoiles jaunes « non-vacciné » avait fait scandale aux Etats-Unis [les révolutionnaires d’ici rejetteraient-ils désormais les délires de là-bas?]. Dans la foulée, une élue trumpiste avait comparé le passeport vaccinal au port de l’étoile jaune.[trumpistes et trotskistes, mêmes facilités et égarements]

Il est bon de se rappeler que les personnes publiques qui utilisent cette rhétorique sont souvent des figures d’extrême droite [ce qui demande à être démontré] qui n’en ont strictement rien à faire de l’antisémitisme [à la différence de Mediapart?], du racisme et de l’autoritarisme.

En lisant ces commentaires dans les espaces participatifs de Mediapart, nous voyons bien que les personnes qui usent du point Godwin ont souvent les meilleures intentions du monde [ne pas braquer le lecteur demeuré: le site en a financièrement besoin]. Elles veulent défendre nos libertés, mises en péril par une politique sécuritaire déjà bien installée depuis la lutte contre le terrorisme [le terrorisme islamiste le justifie]. Mais cela ne rend pas acceptables [ou sans ambiguïtés] ces comparaisons pour autant. 

Sans s’en rendre compte [demeurés et inconscients], elles participent à une forme de négationnisme.

Ce billet est un appel à la décence

« I » en gras, pour « Internationale »

Non, la campagne de vaccination n’est pas comparable aux expériences de Mengele [fallait-il le préciser?!]. Non, les personnes qui ne sont pas vaccinées ne vont pas se faire rafler pour être emmenées dans des camps de concentration. Non, derrière la mauvaise gestion de l’épidémie, il n’y a pas la volonté systématique de faire disparaître de la surface du globe les personnes d’une même religion ou origine.

Faire un parallèle entre l’étoile jaune et le passe vaccinal n’a aucun sens. Les personnes qui n’ont pas de passe vaccinal ne vont pas être privées de leur nationalité, de leurs droits civiques, de leur maison, de leur famille…

A ceux qui pensent que leur liberté d’expression est mise à mal, que l’on ne peut plus rien dire, voici la définition d’un génocide : un génocide est un crime consistant en l’élimination concrète intentionnelle, totale ou partielle, d’un groupe national, ethnique ou encore religieux, en tant que tel, ce qui veut dire que des membres du groupe sont tués, brisés mentalement et physiquement, ou rendus incapables de procréer, en vue de rendre difficile ou impossible la vie du groupe ainsi réduit. Le génocide peut être perpétré par divers moyens, le plus répandu et le plus évident étant le meurtre collectif.

La situation politique en France est alarmante mais nous ne vivons pas une situation de génocide. Ces comparaisons toujours plus extrêmes sont symptomatiques de la polarisation [bipolarisation] des débats et des opinions [et des classes sociales en lutte: riches et pauvres !]. Enfermés dans nos bulles informationnelles [schémas idéologiques simplistes], nous partageons des avis toujours plus tranchés et de moins en moins réconciliables avec les opinions opposées. Tout est préférable à l’indifférence d’un post sans réponse ou sans « j’aime » [Les réseaux sociaux ont bon dos et sont des exutoires faciles: cf. les antifas].

Il est possible de critiquer la gestion de la crise sanitaire sans faire appel à l’instrumentalisation et la relativisation du génocide contre les juifs, qui sont une insulte pour les familles des millions de personnes exterminées [notamment des Juifs, si Mediapart répugne à les nommer]. »

Lien PaSiDupes: les convergences qui mettent Mediapart en alerte.

La politique de la Turquie pendant la Shoah: qu’en savent les jeunes arabo-musulmans?

Le gouvernement turc a aidé les Juifs européens à
venir en Turquie pendant le génocide des Juifs: réalité ou mythe turc ?

Quand des musulmans flirtaient avec le nazisme (lien VA): la 13e division SS « Handschar » était composée presque
entièrement de musulmans de Bosnie, alors annexée par l’Etat indépendant de Croatie.
Le grand mufti de Jérusalem, Mohammed Amin al-Husseini, ainsi que le mufti de Mostar,
participèrent activement au recrutement de ses membres

Le pacte d’amitié turco-allemand est-il une désinformation ou une occultation des universitaires islamo-gauchistes ? C’est un traité de non-agression signé à Ankara entre l’Allemagne nazie et la Turquie le 18 juin 1941, dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, par l’ambassadeur de Hitler en Turquie, Franz von Papen, et le ministre des Affaires étrangères de Turquie, Şükrü Saracoğlu. Entré en vigueur le même jour, il durera quatre ans.

Une analyse suggère par ailleurs que Hitler aurait voulu voir la Turquie rejoindre l’Axe (l’Empire ottoman – colonisateur de l’Algérie – avait fait partie intégrante des Empires centraux et combattu aux côtés des Allemands lors de la Première Guerre mondiale). Le pacte devait durer dix ans, mais il est dissous le 24 octobre 1945, après la chute du Troisième Reich, lorsque la Turquie rejoint… l’Organisation des Nations unies. Elle sera même candidate à l’adhésion à l’Union européenne.

Lors de la cérémonie de commémoration de la Shoah organisée le 27 janvier 2014, Mevlüt Çavusoglu (actuel ministre des Affaires étrangères, à l’époque ministre chargé des négociations d’adhésion à l’Union européenne), s’exprima en ces termes :
De la même manière que l’Empire ottoman a accueilli en 1492 les Juifs chassés d’Espagne, la Turquie a empêché, pendant la Seconde Guerre mondiale, que ses Juifs soient envoyés dans les camps de concentration ; pour les universitaires juifs et pour les Juifs de toutes les catégories sociales, elle est devenue un havre face à la persécution. […] Il n’existe pas de génocide dans notre histoire. […] Dans notre culture, il n’existe pas de discrimination à l’égard d’autrui.Quelle forme a prise la politique turque de ces années-là à l’égard des Juifs ? La politique d’Ankara a-t-elle réellement été « sans discrimination » ? Et dans quelle mesure la Turquie a-t-elle été un « havre » pour les Juifs persécutés ? Tout comme l’attitude d’autres États neutres envers les réfugiés juifs, la politique de la Turquie joua un rôle immense, dans la mesure où ce pays était un refuge possible pour les Juifs persécutés. En outre – et cela distingue la Turquie de la Suède, du Portugal ou de l’Espagne –, plusieurs dizaines de milliers d’émigrés judéo-turcs qui, pendant la Shoah, eurent besoin de la protection de leur pays natal, vivaient en Europe centrale et occidentale. Enfin, la communauté juive vivant à l’intérieur de la Turquie était nettement plus nombreuse que celle des autres États neutres. Plus de 75 000 Juifs vivaient en Turquie en 1935 et se demandaient avec inquiétude dans quelle mesure le pays s’engagerait dans une collaboration avec l’Allemagne nazie et reprendrait à son compte la politique antisémite.

« Ce pays appartient aux Turcs »

En 1933, au début du pouvoir national-socialiste en Allemagne, la Turquie se préparait à célébrer le dixième anniversaire de la fondation de la République. La République de Turquie était issue, en 1923, du long processus de désagrégation de l’empire ottoman. La période qui alla de 1911 à 1922 fut une phase de guerres presque ininterrompue, pendant laquelle l’empire perdit à peu près la moitié de son ancien territoire, tandis que des centaines de milliers de réfugiés musulmans provenant des Balkans et du Caucase arrivaient en Anatolie. Ces années sont également marquées par l’expulsion violente des Grecs anatoliens et par le génocide des Arméniens et des Assyriens [2]. Le traité de paix de Lausanne sanctionna cette politique après coup et prescrivit le déplacement hors d’Anatolie des Grecs qui y vivaient encore – et, par contrecoup, celle des Turcs hors de Grèce. La création d’« États nations » définis selon des critères ethniques fut après la Première Guerre mondiale le credo de la politique internationale. La politique turque de l’entre-deux-guerres ne fut donc pas sans analogie avec celle des autres États-nations apparus après la désagrégation des États multiethniques d’Europe orientale. Dans ces États aussi, régime autoritaire et nationalisme militant régnaient en maîtres.

Jusqu’en 1914, les non-musulmans représentaient encore plus de 20 % de la population de l’Anatolie ; dans la nouvelle république, ils étaient tout juste 2 %. L’objectif central de la politique turque au début de la République était de cimenter la turquisation de l’Anatolie, qui avait eu lieu par le biais de l’expulsion et de l’élimination des chrétiens : « Ce pays vous appartient, à vous les Turcs. Cette patrie a été turque dans l’histoire, elle est turque et restera turque à tout jamais. Elle est enfin revenue entre les mains de ses véritables propriétaires », déclara le chef de l’État, Mustafa Kemal, en 1923 à Adana [3].

Pour créer un Etat-nation homogène sur les ruines de l’Empire multiethnique ottoman, on eut recours à une « politique de turquisation » dont l’objectif était de turquiser l’économie, la culture, l’historiographie et la population, et d’imposer sans compromis la prédominance turque dans tous les domaines de la société [4]. Cette politique visait aussi à assimiler par la force le grand nombre des musulmans arrivés dans le pays en tant que réfugiés et les musulmans non turcs d’Anatolie. Les Kurdes, en particulier, furent à cette occasion régulièrement victimes d’une violence massive exercée par l’Etat.

« L’opération Gertrude est un plan allemand d’invasion de la Turquie lors de la Seconde Guerre mondiale. Bien que l’Allemagne nazie ait signé un pacte de non-agression avec la Turquie en 1941, juste avant l’opération Barbarossa, Adolf Hitler était résolu à conquérir l’Anatolie, dans le cadre de la planification d’une Grande-Arménie dans le Caucase. En fin de compte, Hitler, en sécurisant le flanc sud du Caucase, voulait se garantir l’accès au pétrole de l’Azerbaïdjan. »

Interdictions professionnelles

Un projet central de la politique kémaliste fut la mise en place d’une bourgeoisie turco-musulmane. Pour chasser les non-musulmans de l’économie, on força les chefs à licencier une majorité de leurs employés non musulmans et l’on promulgua des mesures d’interdictions professionnelles contre les non-musulmans. La loi sur les fonctionnaires de 1926 affirmait que seuls des « Turcs » pourraient travailler au service de l’État. Ces consignes concernaient aussi des professions comme les conducteurs de tramway ou les ouvriers du port. Dans des interviews que l’auteur de ce texte a menées avec des Juifs d’origine turque en France, en Italie et en Belgique, un grand nombre des personnes interrogées relatent que leurs parents ont été licenciés d’emplois simples de ce type et ont émigré pour cette raison.

Le traité de Lausanne, qui accordait certains droits aux minorités grecque, arménienne et juive, tels l’autonomie communale, l’entretien de leurs propres institutions éducatives, l’usage de leur propre langue, etc., fut vidé de son sens, et l’on fit pression sur les représentants de ces communautés afin qu’ils renoncent « volontairement » à ces droits. Les non-musulmans furent aussi soumis à de nombreuses restrictions légales, comme de sérieuses limitations de leur liberté de déplacement.

À la fin des années 1930, des organisations juives mondiales (par exemple des clubs de jeunesse, des associations culturelles ou sportives) furent interdites, la loi de juin 1938 sur les associations proscrivant les groupes qui reposaient sur « une base ethnique, religieuse ou de classe ». Alors que l’on créait partout des organisations nationalistes turques, et que celles-ci bénéficiaient de subventions de l’État, on refusait aux membres des minorités le droit de fonder leurs propres associations, mais aussi celui de collaborer à des organisations internationales.

Assimilation forcée

Les critères qui définissaient l’appartenance à la nation turque varièrent selon les aléas politiques. Pendant la « guerre de libération », l’islam avait servi à mobiliser des musulmans de différentes appartenances ethniques. Lorsque la politique kémaliste commença à refouler l’islam, à partir du milieu des années 1920, la langue turque devint la première caractéristique de la « turquité ». Sous le slogan « Vatandas Türkçe konus » (« Citoyen, parle turc »), on mena des campagnes visant à la turquisation linguistique de la population, et elles eurent fréquemment un caractère discriminatoire. Des panneaux installés sur les lieux publics invitaient les membres des minorités à parler le turc, les gens qui s’exprimaient dans une autre langue faisaient parfois l’objet d’agressions physiques. Les Juifs devinrent une cible privilégiée : la presse et les politiciens utilisaient en permanence l’emploi que faisaient les Juifs du judéo-espagnol ou du français pour les accuser de manquer de loyauté envers l’État.

La campagne Vatandas Türkçe konus ne fut qu’un élément d’une mobilisation nationaliste permanente. Le grand nombre de jours fériés et autres semaines d’action nationaliste produisit un climat de tension permanente. Tout cela inspira des peurs puissantes aux Juifs et aux autres minorités. En avril, le consul américain relata, depuis Izmir, que les Juifs, par peur des agressions quotidiennes, s’étaient enfermés dans leurs maisons pendant quelques jours [5].

Déception et émigration des Juifs

La situation des Juifs en Turquie était ambiguë. Depuis le xixe siècle, ils avaient fréquemment été exposés aux agressions des chrétiens, et s’étaient retrouvés tributaires de la protection des forces de sécurité turco-ottomanes. Compte tenu des exactions commises par les troupes grecques au cours des derniers mois de la guerre helléno-turque, beaucoup de Juifs de la région de l’Égée avaient considéré les Turcs comme des libérateurs. De nombreux intellectuels juifs partageaient l’enthousiasme des kémalistes envers le progrès et la sécularisation. Beaucoup de Juifs accueillirent donc dans un premier temps la nouvelle république avec espoir. À l’inverse, les hommes politiques kémalistes instrumentalisèrent à plusieurs reprises les Juifs en les présentant comme une « minorité exemplaire ». Certaines des restrictions touchant les non-musulmans ne furent pas appliquées aux Juifs avec la même dureté qu’aux Grecs et aux Arméniens. Les Juifs furent toutefois bientôt contraints de constater que le chauvinisme qui s’était d’abord tourné contre les groupes chrétiens de la population s’en prenait désormais à eux.

Dès le début de la République, il y eut dans quelques régions des campagnes de presse antijuives, on présenta les Juifs comme des sangsues et des profiteurs de guerre. Les représentants de la communauté juive tentèrent, en vain, de témoigner de leur fidélité à l’État turc en envoyant des textes d’allégeance ou des dons d’argent.

Tout cela incita de nombreux Juifs à émigrer hors de Turquie : entre un tiers et la moitié d’entre eux quitta le pays au cours des années 1920 et 1930 [6]. Avant le début de la Première Guerre mondiale, ce sont environ 130 000 Juifs qui vivaient sur le territoire de la future République de Turquie ; selon les estimations d’Avner Levi, ils étaient même 150 000 en 1918. Au premier recensement, en 1927, ils n’étaient plus que 81 872 ; en 1935, ce chiffre était descendu à 78 730 [7].

Les années 1930 en Turquie

Pendant les années 1930, le caractère autoritaire du régime se renforça. Le congrès du CHP (Cumhuriyet Halk Patisi, Parti républicain du peuple ou CHP) décréta ainsi en 1935 l’unité du parti et de l’État ; la Turquie reprenait ainsi le modèle des États fascistes italien et allemand, ou de l’Union soviétique. Les libertés publiques, déjà réduites, furent encore restreintes. Le nationalisme prit des traits parfois racistes. La « thèse d’histoire turque » (Türk Tarih Tezi), élaborée d’après les principes de Mustafa Kemal, présentait les Turcs comme le peuple civilisé le plus ancien de tout le Proche-Orient, et si l’on en croit la « théorie de la langue du Soleil » (Günes Dil Teorisi), le turc était la langue originelle de toutes les autres langues. Aussi absurdes que puissent paraître ces théories, elles étaient, au fond, une réaction à des théories racistes européennes qui furent copiées et adaptées aux besoins turcs.

À la fin des années 1930, de nombreuses associations turques turanistes et racistes étaient en activité et bénéficiaient parfois du soutien des cercles les plus élevés du parti et de l’armée. Dans leurs revues, elles célébraient le sang turc et la supériorité de la race turque.

Au cours de ces années, la « politique de turquisation » fut intensifiée. L’une des mesures les plus lourdes de conséquences fut l’Iskân Kanunu (loi sur l’installation), promulguée le 10 juin 1934. Elle était censée réguler l’implantation et l’assimilation des immigrés musulmans, les Muhacirs. Dans le même temps, la loi donnait au gouvernement le pouvoir de déplacer sous la contrainte des groupes de la population dont on considérait qu’ils « n’appartenaient pas à la culture turque ». À moyen terme, ces mesures furent avant tout dirigées contre les Kurdes : de 1937 à 1938, la région de Dersim, dont la population kurde alévite résistait au déplacement forcé, fut bombardée et détruite ; 10 % environ de la population (selon des chiffres turcs) périt à cette occasion.

En 1934, cette loi joua un rôle dans les événements antijuifs survenus en Thrace (voir infra). Les hommes politiques turcs utilisèrent aussi l’Iskân Kanunu pour justifier le rejet des réfugiés juifs pendant la Shoah.

Antisémitisme

Pendant les années 1930, on traduisit des textes centraux de l’antisémitisme moderne, et on les publia en Turquie. Ce fut le cas des textes de Theodor Fritsch, ou d’une traduction des Protocoles des Sages de Sion. Cette dernière parue sous forme de feuilleton dans la revue Millî Inkilâp, qui reprit aussi des caricatures publiées dans le Stürmer. Certaines de ces publications furent financées par l’Allemagne nazie. Le gouvernement turc en interdit certes plusieurs et se démarqua de plus en plus de l’antisémitisme, mais la grande presse utilisa elle aussi, de plus en plus souvent, des lieux communs antisémites. Dans les moments de raréfaction des ressources économiques, ou lorsqu’il était question des réfugiés juifs en provenance d’Europe de l’Est, on vit émerger dans la presse quotidienne des polémiques contre les « marchands juifs » et les « Juifs apatrides et errants ». En 1942, pour préparer la promulgation de l’impôt spécial discriminatoire Varlik Vergisi (voir infra), la presse turque contrôlée par l’État lança à l’unisson une agitation antisémite tellement massive que même des observateurs allemands s’en étonnèrent.

La situation n’était pourtant pas comparable à celle de l’Allemagne. L’antisémitisme raciste et meurtrier des nationaux-socialistes se heurtait à un rejet sans ambiguïté au sein de l’opinion publique turque. Pourtant, les traductions que nous avons mentionnées ouvrirent la porte à l’antisémitisme moderne en Turquie. Les textes traduits à cette époque sont encore réimprimés de nos jours.

L’influence de l’Allemagne nationale-socialiste

L’influence de l’Allemagne nationale-socialiste renforça encore ces tendances autoritaires et ultranationalistes. Pendant les années 1930, l’Allemagne était, de loin, le principal partenaire commercial de la Turquie. L’arrivée au pouvoir de Hitler, en 1933, et la politique nationale-socialiste menée jusqu’en 1939, ne provoquèrent pas de troubles en Turquie dans un premier temps. Les violations systématiques du traité de Versailles commises par l’allié de la Première Guerre mondiale furent accueillies avec beaucoup de compréhension : elles étaient le pendant à l’attitude turque à l’égard de l’accord de Sèvres.

De nombreux hommes politiques turcs sympathisèrent avec le système national-socialiste [8]. Recep Peker, secrétaire général de la CHP jusqu’en 1937 et ministre de l’Intérieur à partir de 1942, proposa que l’on reprenne des modèles d’organisation fascistes. Au sein de l’appareil de sécurité, en particulier, et parmi les dirigeants militaires, on trouvait de nombreux sympathisants nationaux-socialistes affichés. L’ambassadeur allemand à Ankara, Franz von Papen, joua un rôle clef pour l’influence de l’Allemagne nationale-socialiste sur la Turquie : Franz von Papen disposait de nombreux contacts en raison de la position qu’il avait occupée dans l’armée ottomane pendant la Première Guerre mondiale. Les moyens financiers dont il bénéficiait pour la propagande contribuèrent considérablement à son influence [9]. Pour agir sur l’opinion publique, les nationaux-socialistes publièrent eux-mêmes plusieurs journaux et exercèrent sur d’autres un large contrôle financier. Il ne faudrait cependant pas surestimer l’influence de la propagande nationale-socialiste. À partir de l’été 1939, c’est-à-dire après l’attaque allemande contre la Pologne et la conclusion du pacte d’assistance anglo-turc, les voix critiques à l’égard de l’Allemagne furent plus nombreuses à s’exprimer dans la presse turque, et la propagande ouvertement nationale-socialiste fut interdite à plusieurs reprises. Après la conclusion du traité d’amitié germano-turc, en juin 1941, la propagande allemande reprit de la vigueur – ce texte interdisait en outre la publication d’articles critiques sur l’Allemagne en Turquie.

L’affinité avec l’Allemagne nationale-socialiste ou les contacts avec les instances allemandes ne sont cependant pas le principal indicateur des tendances fascistes et racistes en Turquie. Quand on était persuadé de la supériorité de la race turque, on ne pouvait que rejeter l’idéologie nazie, du seul fait qu’elle n’accordait aux Turcs qu’une place bien inférieure à celle des Germains.

Même si la Turquie ne s’engagea que partiellement dans une coopération avec l’Allemagne nationale-socialiste, même si l’antisémitisme était loin de constituer, à l’époque, l’idéologie dominante, les années 1933-1945 furent pour les Juifs de Turquie les « années les plus sombres » de leur histoire. L’historiographie turque a expliqué la politique antijuive menée par la Turquie à cette époque par l’influence de l’Allemagne nationale-socialiste. Mais si l’on regarde les choses de près, cette assertion est infondée. L’attitude de rejet à l’égard des réfugiés juifs, aussi bien que les mesures prises contre les Juifs de Turquie, s’inscrivaient dans la politique nationaliste turque, elles étaient donc « maison ». Trois épisodes en témoignent en particulier.

La Turquie n’entre dans la Seconde Guerre mondiale aux côtés des Alliés qu’en février 1945, mesure tellement tardive qu’elle est insignifiante sur le plan militaire. Sur le plan diplomatique cependant, elle permet à la Turquie de participer aux conférences de paix de l’après-guerre dans le camp des vainqueurs. Lien

Trakya Olaylari (les événements de Thrace)

Au début de l’été 1934, les habitants de la Thrace et des Dardanelles furent victimes d’actions violentes et massives [10]. Celles-ci allèrent des lettres de menaces aux agressions physiques, en passant par des opérations de boycott, et se produisirent sous les yeux très tolérants des forces de la sécurité publique. En plusieurs endroits, des policiers forcèrent les Juifs à quitter leurs lieux d’habitation. À Kirklareli eut lieu un véritable pogrom : une populace antisémite attaqua les boutiques et les maisons, les pilla et s’en prit violemment aux habitants. Pris de panique, des milliers de Juifs quittèrent la région pour Istanbul, où la communauté juive locale les logea dans des institutions communautaires. D’autres franchirent la frontière toute proche pour rejoindre la Grèce ou la Bulgarie.

Il fallut que la presse internationale relate ces événements pour que le gouvernement turc réagisse. Il minimisa l’ampleur des exactions et souligna que les Turcs n’étaient jamais antisémites. Mais le déclenchement presque simultané des opérations dans toute la Thrace laisse penser qu’ils avaient bénéficié d’une organisation centrale. Les diplomates étrangers furent ainsi presque unanimes pour considérer que l’expulsion des Juifs était planifiée par l’État [11].

Une semaine seulement avant le début des événements avait été promulgué l’Iskân Kanunu mentionné plus haut. Il donnait au gouvernement le pouvoir de transférer les parties de la population considérées comme « n’appartenant pas à la culture turque » et de les éloigner des régions stratégiquement importantes. En 1934, la situation était caractérisée par des tensions entre la Turquie et la Bulgarie, ainsi que par la peur qu’inspiraient aux Turcs les velléités expansionnistes de l’Italie. En 1934, la Turquie avait secrètement entamé la consolidation militaire des Dardanelles, qui lui était encore interdite à l’époque par les traités internationaux [12]. On peut tout à fait imaginer que les Juifs de Thrace aient été considérés comme « peu fiables » et que c’est pour cette raison qu’on les poussa à quitter le secteur. Manifestement, les autorités turques avaient misé sur le fait que des opérations de boycott et des menaces « provenant de la population » pourraient les forcer à quitter « volontairement » le territoire [13].

Quelques semaines avant le pogrom, cette zone avait été placée sous l’autorité d’une administration spéciale (« Inspection générale »), et l’on avait placé Ibrahim Tali [Öngören] à la tête ce celle-ci. Tali effectua dans la région une tournée d’inspection qui dura plusieurs semaines et à propos de laquelle il rédigea un rapport bardé de stéréotypes antisémites, qui culminait avec l’exigence de « résoudre enfin, et de la manière la plus radicale, le problème [juif] [14] ».Le Juif de Thrace est d’une telle corruption morale et d’une telle absence de caractère qu’elles vous sautent aux yeux. Il est nuisible. […] Dans la conception juive du monde, honneur et dignité n’ont pas de place. […]
Les Juifs de Thrace s’appliquent à rendre la Thrace identique à la Palestine. Pour le développement de la Thrace, il est de la plus grande nécessité de ne pas tolérer que cet élément [les Juifs], […] continue à sucer le sang des Turcs. [Les Juifs] constituent ce danger secret et veulent peut-être, par le biais de leurs clubs de travailleurs, construire dans notre pays des noyaux du communisme ; c’est la raison pour laquelle c’est une nécessité absolue […] de résoudre enfin, et de la manière la plus radicale, le problème [juif].

Ce rapport ne réfute pas seulement l’affirmation du gouvernement turc, selon lequel il n’existait pas d’antisémitisme en Turquie : il constitue aussi l’indice d’une responsabilité de l’État dans l’expulsion des Juifs. Tali était le plus haut fonctionnaire de ce secteur, et il disposait de larges pouvoirs politiques et militaires.

Ces événements représentent la césure la plus sévère que les Juifs de Turquie aient subie, jusqu’alors, dans toute leur histoire. Le gouvernement invita les Juifs à revenir dans leurs lieux d’origine, mais ne leur en donna pas les moyens et ne leur versa pas d’indemnités. Une grande partie des Juifs réfugiés resta à Istanbul ou quitta la Turquie. Les menaces les avaient contraints à vendre leurs biens à des prix ridicules et ils avaient ainsi perdu la base de leur existence. Pour les communautés de plus petite taille, en Thrace, ces événements scellèrent la fin d’une présence séculaire.

Le travail obligatoire pour les hommes juifs

Autre mesure qui toucha les Juifs de Turquie : l’enrôlement forcé de vingt classes d’âge, parmi les non-musulmans, au service du travail obligatoire. En mai 1941, on décida sans aucun préavis d’enrôler les hommes non musulmans âgés de vingt-cinq à quarante-cinq ans. Ils furent convoyés en Anatolie centrale, où ils durent travailler dans des carrières ou construire des routes, sans armes, sous la surveillance de militaires turcs. Les personnes concernées le ressentirent comme une mesure discriminatoire et dangereuse [15]. Le motif de cette décision n’est pas acté. Elle rappelle les bataillons de travail (Amele Taburlari) destinés aux non-musulmans pendant la Première Guerre mondiale et la guerre gréco-turque. En juillet 1942, les premiers « soldats du travail » furent libérés – là encore, sans aucune annonce préalable. Des non-musulmans furent toutefois encore enrôlés en 1943 pour des travaux de voirie [16].

Varlik Vergisi (l’impôt sur le patrimoine)

La mesure la plus lourde qui ait frappé les minorités, et en particulier les Juifs de Turquie, fut l’impôt sur le patrimoine, en turc Varlik Vergisi[17]. Bien que la Turquie n’ait pas participé à la guerre, le poids des immenses dépenses militaires provoqua une dégradation de la situation alimentaire au sein de la population. La raréfaction des marchandises entraîna des augmentations de prix pouvant atteindre les 500 % et les produits de première nécessité furent rationnés. Dès l’été 1942, la presse mena une campagne de diffamation organisée qui présentait les non-musulmans comme des « usuriers » et des « parasites », et les rendait responsables de la crise économique. Cette campagne était dirigée contre les non-musulmans en général, mais les Juifs étaient la cible privilégiée des articles de presse et des caricatures, qui reprenaient des clichés typiquement antisémites.

Après ce prélude dans le domaine de la propagande, le parlement turc décida, le 11 novembre 1942, l’introduction d’un impôt spécial. Celui-ci prévoyait un prélèvement unique sur les indépendants et les commerçants, pour absorber les « profits exceptionnels » et endiguer le marché noir. Pour le calcul des impôts, les contribuables furent répartis en quatre catégories différentes : M pour les musulmans et G pour les non-musulmans (Gayri Müslim), E pour les étrangers (Ecnebi) et D pour les membres de la Dönme ou les convertis [18]. Selon la catégorie, on appliquait des clefs différentes pour le calcul des impôts. Ceux des non-musulmans furent multipliés plusieurs fois, si bien que beaucoup de Juifs et de chrétiens furent, dans les faits, dépouillés de tous leurs biens.

87 % des personnes imposées étaient des non-musulmans, alors que leur part dans la population de Turquie était inférieure à 2 %. Pour Istanbul, on fixa le montant des impôts à 349,5 millions de lira [livres turques], dont 90 % durent être apportés par des non-musulmans. Dans les groupes de revenus inférieurs des professions indépendantes, seuls les non-musulmans furent touchés par la Varlik Vergisi. On décréta aussi un taux d’imposition particulièrement élevé sur les étrangers – des négociations menées par les différentes ambassades permirent toutefois de réduire considérablement les sommes prélevées. Pour l’essentiel, la Varlik Vergisi ne frappa pas les étrangers, mais les citoyens non musulmans de Turquie.

Les personnes concernées obtinrent un délai de quatorze jours pour rassembler la somme fixée. Quand elles n’y parvinrent pas, leurs biens furent pris en gage et elles-mêmes furent contraintes de participer au service du travail obligatoire. Beaucoup de familles durent vendre leurs boutiques et leurs entreprises, leur logement et même leurs tapis, meubles et autres objets ménagers, pour réunir la somme exigée. À Istanbul, 543 biens immobiliers furent vendus par ce biais, dont dix appartenaient à des musulmans, tous les autres à des membres de minorités ou à des étrangers (27) [19]. L’article 14 de la loi sur la Varlik Vergisi donnait à l’État le pouvoir de confisquer aussi les biens de proches parents des contribuables concernés.

À partir du 27 janvier 1943, plus de 1 400 personnes – tous des Juifs, Arméniens et Grecs – escortées par des militaires furent convoyées en train à Erzurum, en Anatolie orientale, d’où elles durent se rendre à pied à Askale. Une large majorité des déportés (1 229) provenait d’Istanbul, d’Izmir, Bursa et d’autres villes, ce sont au total quelque 200 personnes supplémentaires qui furent internées dans les camps de travail [20]. Contrairement à ce que stipulait la loi, on emmena aussi les hommes de plus de soixante-quinze ans, et même des malades. Askale se situe dans les montagnes, les températures y descendent, l’hiver, jusqu’à -30 ou -40° C. Les déportés devaient effectuer des travaux dans des carrières ou pelleter de la neige, travail qui leur valait un « salaire » quotidien de 2,5 lira, dont la moitié était prélevée pour régler les « dettes fiscales ». Vingt et une personnes moururent des conditions inhumaines qui régnaient dans les camps.

En décembre 1943, les déportés furent finalement libérés, et la loi Varlik Vergisi fut suspendue en mars 1944. À ce jour, aucun dédommagement, aucune restitution des biens confisqués n’a cependant eu lieu.

Dans les faits, la Varlik Vergisi fut une confiscation par l’État des biens des non-musulmans. Elle provoqua la paupérisation fulgurante des classes moyennes de ces catégories. Le logement de beaucoup d’entre eux avait littéralement été vidé. Ishak Alaton raconte ainsi dans ses Mémoires que tous les objets servant à l’aménagement de l’appartement de ses parents, jusqu’aux ampoules électriques, ont été confisqués, si bien qu’ils se retrouvèrent assis par terre à la lueur des bougies [21].

L’ensemble de ces trois mesures, ainsi que le climat nationaliste qui régna au cours de ces années, poussèrent la majorité des Juifs restés dans le pays à quitter celui-ci après la fondation d’Israël.

La Turquie, pays d’exil ou de transit ?

Les premiers jours qui suivirent la remise du pouvoir à Hitler, le 30 janvier 1933, furent marqués par les violences commises par les organisations nationales-socialistes contre les Juifs et les opposants politiques. Les intellectuels furent les cibles privilégiées des agressions fascistes. Avec la « loi sur le rétablissement de la fonction publique » du 7 avril 1933, les Juifs et les opposants furent licenciés de leurs postes dans les institutions politiques d’Allemagne. Parmi les premiers émigrés en provenance de l’Allemagne nazie, on trouvait ainsi un nombre particulièrement élevé d’universitaires juifs (et d’opposition).

À peu près à la même époque, le gouvernement turc décida une réforme de l’enseignement supérieur. Celle-ci prévoyait la fermeture de l’université fondée au xixe siècle, la Dârülfünun, et la création d’une université moderne. Pour cette nouvelle institution, mais aussi plus généralement pour ses projets ambitieux de modernisation, la Turquie chercha un personnel enseignant jouissant d’une réputation internationale. Un comité de soutien fondé en Suisse et composé de scientifiques qui avaient fui l’Allemagne put ainsi trouver des postes en Turquie à de nombreux universitaires [22].

La convergence de ces deux facteurs – les projets ambitieux de la direction kémaliste et l’éviction soudaine de toute une élite scientifique hors de l’Allemagne hitlérienne – eut pour conséquence qu’à partir du semestre d’hiver 1933-1934, 82 professeurs allemands enseignaient en Turquie, faisant d’Istanbul « la plus grande et la meilleure université allemande », comme l’écrit Widmann. Ces professeurs firent venir entre 70 et 100 personnes supplémentaires (assistants, personnel médical et technique) dont la majorité provenait du cercle des personnes persécutées. Horst Widmann cite 144 émigrés de langue allemande actifs dans l’enseignement supérieur à Ankara et Istanbul, avec des titres de professeur titulaire, de maître de conférence et de collaborateur scientifique [23].

La Turquie, pays d’exil ?

Les Mémoires de quelques anciennes personnalités de premier plan exilées dans le pays, et de nombreuses publications consacrées à l’« exil en Turquie », peuvent facilement donner l’impression que la Turquie a été pour les persécutés juifs un important pays de refuge, image que la propagande turque reprend elle aussi volontiers à son compte. La réalité est à l’opposé. Une exploitation des documents conservés dans les archives allemandes et turques [24] permet d’évaluer à 550 ou 600 le nombre de personnes persécutées en tant que Juifs dans la grande Allemagne nationale-socialiste qui trouvèrent un exil légal en Turquie. Les membres des familles qui suivirent après coup sont décomptés dans ce nombre [25].

Hormis les scientifiques de premier plan, dont la Turquie accepta volontiers l’aide pour mettre en place des universités modernes, et qu’elle employa comme conseillers des administrations et des ministères, les fugitifs juifs ordinaires ne purent pratiquement pas trouver asile en Turquie. On ne connaît pas précisément le nombre des réfugiés juifs qui, en provenance de la Grande Allemagne et que l’on ne peut classer dans les personnalités, purent arriver en Turquie malgré les conditions d’immigration restrictives – on l’évalue entre 300 et 400 personnes [26]. Le nombre total des réfugiés et émigrés juifs allemands en Turquie se situe ainsi autour du millier, soit 2,5 ‰ des 400 000 personnes persécutées en tant que Juifs qui purent quitter la Grande Allemagne avant l’interdiction d’émigrer, promulguée en octobre 1941.

Différentes initiatives de personnalités juives visant à inciter la Turquie à accepter un plus grand nombre de réfugiés juifs échouèrent. En 1933, dans une démarche non concertée, le directeur du lycée juif d’Istanbul, le rabbin David Marcus, et Albert Einstein, président d’honneur de l’organisation de bienfaisance juive O.S.E. (Œuvre de secours aux enfants), proposèrent au président du Conseil turc, Ismet Inönü, de faire venir en Turquie un plus grand nombre de médecins juifs en provenance d’Allemagne, mais le gouvernement turc repoussa ces offres [27]. En 1938, une initiative analogue du président de l’Agence juive, Chaim Weizmann, fut elle aussi rejetée par le gouvernement turc [28].

Mesures turques pour empêcher une immigration juive

Bien que le nombre de réfugiés juifs en Turquie eût été infime, le gouvernement turc prit dès 1937 des mesures préventives visant à barrer l’entrée aux immigrés juifs. Des dossiers de l’ambassade d’Allemagne à Ankara, il ressort que le ministère turc des Affaires étrangères a ordonné au début 1937 que l’on empêche l’émigration des Juifs et que l’on expulse les immigrés juifs [29]. La politique turque s’appuyait sur la loi sur l’installation (Iskân Kanunu) de juin 1934, déjà mentionnée, aux termes de laquelle le droit à l’immigration était réservé aux membres de la « race et de la culture turques », tandis que les Juifs étaient considérés comme des « éléments indésirables ».

Au mois d’août 1937, trois Juifs allemands informèrent le consulat allemand à Istanbul qu’une semaine plus tôt, la police secrète turque était venue les prendre et leur avait ordonné de quitter la Turquie. Un secrétaire du ministère de l’Intérieur leur avait appris que l’on avait programmé l’expulsion de 300 à 400 personnes arrivées en Turquie après 1933 [30]. Des documents issus des archives turques le confirment. On lit ainsi, dans les motifs présentés par le ministère turc de l’Intérieur pour expulser « la Juive allemande » E. Norden, que les Juifs allemands arrivés en Turquie après l’instauration du pouvoir national-socialiste étaient expulsés « pour empêcher une concentration de Juifs [31] ».

Au cours de l’année 1938, le nombre des réfugiés juifs augmenta fortement sur le plan international. Le contexte en était d’une part l’Anschluss de l’Autriche en mars 1938, qui fut accompagné par un pogrom contre les Juifs locaux, et l’adoption dans le pays annexé des lois antijuives en vigueur en Allemagne. En Roumanie, une loi de l’antisémite Goga prévoyait de déchoir de leur nationalité quelque 250 000 Juifs [32] ; d’autres États du sud et de l’est de l’Europe introduisirent aussi des textes antisémites dans leur législation. Les consulats allemands commencèrent à recenser les Juifs parmi les émigrés et à retirer leur citoyenneté à certains d’entre eux [33]. Dans ce contexte, la Turquie promulgua en juin 1938 deux lois destinées à protéger le pays contre l’afflux des réfugiés juifs : la « loi sur le passeport » et la « loi sur le “séjour et le voyage des étrangers en Turquie” ». Ces textes interdisaient respectivement l’entrée ou le séjour en Turquie aux personnes qui n’étaient pas en possession d’un passeport en cours de validité ou d’un certificat de nationalité. Même si ces lois, si l’on s’en tient à leur lettre, étaient dirigées d’une manière générale contre les réfugiés indésirables, on voit, dans le contexte de l’époque, combien la Turquie souhaitait surtout « se défendre » contre les Juifs et les « Tsiganes » – car l’une des mesures de persécution prises par le régime national-socialiste et les États alliés à l’Allemagne consistait précisément à déchoir les Juifs de leur nationalité.

La Turquie demande un « signe secret » dans les passeports des Juifs

Une demande turque adressée au consulat général d’Allemagne à Istanbul quelques jours après la promulgation de ces lois le souligne : comme les passeports allemands ne mentionnaient pas la religion de leurs détenteurs, les instances turques ne pouvaient pas reconnaître qui était juif et qui ne l’était pas. La police turque demanda alors aux Allemands de marquer les passeports des Juifs avec un « signe qui ne serait connu que de la police [turque] et du consulat général [allemand] [34] ».

La Suisse et la Suède adressèrent elles aussi aux instances allemandes la même demande. En octobre 1938, les autorités nationales-socialistes proclamèrent l’invalidité de tous les passeports détenus par les Juifs allemands. Les détenteurs de passeports devaient les faire frapper du tristement fameux grand « J » rouge.

En juillet 1938 eut lieu dans la ville thermale française d’Évian-les-Bains, à l’initiative du président des États-Unis, Roosevelt, une conférence internationale rassemblant des délégués de trente-deux États venus traiter de la question des réfugiés juifs. Mais à l’exception de la République dominicaine, tous les représentants ne fournirent que des explications verbeuses au fait que leur État ne pouvait pas accueillir de persécutés. La Turquie n’était représentée ni à Évian, ni à la conférence de suite. Les journaux turcs publièrent des articles et caricatures antisémites pour mettre en garde contre un « afflux de réfugiés juifs ». Mais les autorités turques firent encore un pas de plus.

Le décret secret n° 2/9498

Le 29 août 1938, le gouvernement turc publia un décret explicitement tourné contre les Juifs : il interdisait l’entrée en Turquie « aux Juifs étrangers soumis à des restrictions dans leurs pays d’origine, indépendamment de la religion à laquelle ils appartiennent actuellement ». En reprenant cette formulation, le décret se référait à la législation antijuive de l’Allemagne nationale-socialiste et des États alliés à l’Allemagne, qui persécutaient aussi des Juifs convertis et des hommes d’origine juive [35]. En 1938, la Turquie commença ainsi à refouler des réfugiés juifs, y compris lorsque ceux-ci étaient (encore) en possession de passeports. Même des exilés qui vivaient déjà en Turquie durent prouver qu’ils n’étaient pas juifs. L’un d’entre eux, l’assyriologue Fritz Rudolf Kraus, décrit son état d’esprit dans une lettre d’octobre 1938 :Ce qui, en ces lieux, fait de l’expansion allemande plus qu’un spectacle historique, c’est que la Turquie applique désormais aux Allemands du Reich les lois raciales allemandes, de telle sorte qu’un Allemand du Reich ne peut recevoir d’autorisation de séjour ou de prolongation de celle-ci que s’il obtient du consul allemand la preuve d’aryanité. Des gens, c’est-à-dire des émigrants, qui étaient installés ici depuis 1933 ont ainsi été expulsés sans préavis et sans avoir commis la moindre faute, en l’espace de vingt-quatre heures ; seuls quelques-uns ont pu obtenir quinze jours de délai de grâce ! Les seuls à en avoir été exclus sont pour l’instant les gens qui ont été engagés par le gouvernement. […] Il m’arrive de ressentir une pression semblable à celle que j’éprouvais au cours des premières journées de Hitler en 1933 [36].

Seuls les spécialistes dont la Turquie avait intérêt à s’attacher la collaboration pouvaient obtenir un permis de séjour exceptionnel en Turquie. Mais il fallait pour cela une décision gouvernementale [37].

Les représentations diplomatiques de la Turquie à l’étranger reçurent pour instruction de ne pas délivrer de visa d’entrée aux Juifs provenant d’États dotés d’une législation antijuive (c’est-à-dire aux Juifs allemands, anciennement autrichiens, italiens, roumains, slovaques et hongrois) [38].

Sur le plan des statistiques, la Turquie ne joua en réalité aucun rôle en tant que pays de refuge pour les Juifs. La Turquie n’est pas mentionnée parmi les destinations de fuite des Juifs allemands sous le national-socialisme. La politique hostile aux minorités que mena la Turquie déboucha au contraire sur un prolongement de l’émigration des Juifs turcs hors de la Turquie.

Le rejet des réfugiés juifs par la Turquie ne se fit nullement (du moins jusqu’en 1941) sous la pression de l’Allemagne nazie, qui tenta au cours de cette phase de pousser les Juifs à quitter l’Allemagne et se prononça donc à plusieurs reprises contre une expulsion des Juifs allemands hors de Turquie. La politique restrictive de la Turquie est plutôt le résultat de sa politique démographique nationaliste. À la même époque, la Turquie tenta de recruter jusqu’à un million de musulmans des Balkans pour qu’ils immigrent en Turquie.

La Turquie, pays de transit vers la terre d’Israël

Sa situation géographique faisait aussi de la Turquie un pays de transit de premier ordre pour les réfugiés juifs en route vers la Palestine. Mais de nombreux obstacles s’opposaient à leur entrée en Palestine. Puissance mandataire, la Grande-Bretagne contrôlait et limitait l’immigration des Juifs vers ce territoire. Les autorisations d’immigration (« certificats ») en Palestine étaient attribuées au cours d’une procédure complexe par l’Agence juive et les autorités britanniques. En temps de paix déjà, il s’agissait d’une procédure qui demandait un temps considérable. L’immigration de plus de 170 000 Juifs dans les années 1933-1937 [39] déclencha des protestations massives et des insurrections armées de la population arabe de Palestine. Après ces réactions, la Grande-Bretagne limita, avec le Livre blanc de 1939, le nombre des immigrés juifs à 75 000 pour les cinq années suivantes.

Le début de la guerre provoqua la fermeture de la principale route maritime vers la Palestine, qui partait de ports français ou italiens et traversait la Méditerranée. Le trajet par la Turquie (depuis des ports bulgares ou roumains) devint ainsi la plus importante route de fuite. Mais conformément aux règles en vigueur depuis 1938 en Turquie, l’entrée dans le pays et, donc, le transit par celui-ci étaient généralement interdits. Toute autorisation exceptionnelle était soumise à une décision du gouvernement. Dans les archives du président du Conseil, à Ankara, on a pour l’année 1940 la trace de neuf décisions positives concernant des visas de transit pour des individus et des familles juifs, ainsi qu’une autorisation de passage pour un groupe de 450 enfants germano-juifs et leurs accompagnateurs, passage qui fut effectif au mois de décembre [40].

Immigration officielle via la Turquie

Haim Barlas, qui était accrédité à partir du mois d’août 1940 comme représentant officiel de l’Agence juive en Turquie, témoigne de la situation qui régnait à l’automne 1940 : « Des milliers de réfugiés juifs étaient bloqués à Kovno, Bucarest et dans d’autres villes européennes. Ils étaient en possession de passeports, de certificats pour la Palestine, et avaient l’accord pour le visa de transit en syrien. L’unique obstacle qui se fût encore dressé devant eux était l’interdiction de leur transit par la Turquie[41]. » Pendant quatre mois, Barlas négocia avec les autorités turques, qui ne cessèrent d’opposer de nouvelles objections et d’émettre de nouveaux refus. Dans un mémorandum, Barlas demanda que l’on accorde l’autorisation de transit au moins à ces Juifs qui détenaient des certificats pour la Palestine, passeports et visa pour la suite du voyage (par la Syrie) qui avaient été établis avant la guerre [42].

Pour finir, le 30 janvier 1941, par le décret 2/15132, les Turcs assouplirent les règles fixées par le décret en question. Ensuite, les consulats turcs purent établir des visas de transit aux réfugiés juifs, pour autant que ceux-ci remplissaient les conditions énumérées dans le mémorandum de Barlas. Bien que le décret commence par la phrase explicite : « L’entrée en Turquie […] est interdite aux Juifs soumis à des restrictions dans leur pays natal », et qu’il ait seulement défini des exceptions limitées, plusieurs publications portant sur les activités de sauvetage pendant la Shoah le mentionnent à tort comme le décret qui autorisa la traversée de la Turquie aux réfugiés juifs [43].

Les réfugiés devaient quitter la Turquie dans un délai de quinze jours après leur arrivée. Leur séjour à Istanbul ou dans d’autres villes était limité à vingt-quatre heures. Le non-respect de ces règles ou une entrée illégale en Turquie entraînerait l’expulsion ou des peines de prison. Cette nouvelle règle ne constitua pas une modification fondamentale de l’attitude turque, mais réduisit pour un temps l’ampleur du travail bureaucratique, les consulats – en Hongrie, Roumanie et Bulgarie – ne pouvant remettre de manière autonome que des visas de transit, dans le cadre des quotas qui avaient été fixés. Selon un rapport de Barlas, en juin 1941, ce sont 4 850 Juifs qui atteignirent la Palestine en passant par la Turquie, au cours des dix mois qui suivirent leur arrivée [44]. Les difficultés que Barlas espérait avoir dépassées allaient pourtant s’aggraver de nouveau au cours des années suivantes. L’attitude restrictive de la Turquie ne fut cependant que l’un des nombreux obstacles qui s’opposèrent à la fuite des Juifs, à côté des restrictions britanniques, de la pression de l’Allemagne nationale-socialiste sur ses alliés dans les Balkans ainsi que de la politique fluctuante de ces derniers.

L’immigration illégale par bateau

Pour contourner les restrictions légales et les obstacles bureaucratiques, différentes organisations sionistes structurèrent l’immigration illégale vers la Palestine, l’Aliya Bet. Son importance s’accrut après le début de la guerre. Entre septembre 1939 et le début 1942, quinze navires emportant plus de 12 000 Juifs quittèrent les ports en direction de la Palestine. La moitié environ – en provenance de Roumanie ou de Bulgarie, et en traversant la mer Noire – emprunta les détroits turcs [45].

La Turquie compliqua la tâche de ceux qui empruntaient cet itinéraire de fuite en ne laissant pas les navires faire escale dans ses ports. En août 1939, la Parita, avec à son bord 800 réfugiés juifs venus d’Allemagne, de Pologne et de Tchécoslovaquie, resta une semaine durant devant la côte d’Izmir, sans charbon, sans eau et sans alimentation. Ce sont les organisations d’assistance juive qui fournirent aux passagers les produits de première nécessité. L’escale dans le port fut interdite au navire, et le capitaine dut finalement reprendre sa route. D’autres bateaux connurent le même sort.

Les Anglais tentèrent, par tous les moyens imaginables, d’empêcher l’immigration des Juifs en Palestine. Des réfugiés qui voulaient entrer dans le pays sans certificat pour la Palestine furent refoulés par les Britanniques, ou bien internés à Chypre, sur l’île Maurice et, parfois, en Palestine.

La tragédie du Struma[46]

La catastrophe de la Struma, un paquebot roumain battant pavillon panaméen, qui atteignit Istanbul le 15 décembre 1941 avec 769 réfugiés juifs à son bord, fut une tragédie sans égale. La plupart des passagers provenaient de Boukhovine et de Bessarabie, où des unités militaires allemandes et roumaines, soutenues par les Einsatzgruppen, avaient assassiné environ 150 000 Juifs au cours du seul deuxième semestre 1941.

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Le navire n’était pas seulement surchargé : il était aussi incapable de prendre la mer en raison d’une avarie de machine. Les passagers n’avaient pas de certificats pour la Palestine, la Grande-Bretagne refusait de leur en attribuer et fit pression sur la Turquie pour qu’elle empêche les réfugiés de poursuivre leur voyage. Pendant les mois d’hiver 1941-1942, le Struma resta soixante-dix jours bloqué sur le Bosphore. Bien que les organisations juives aient proposé d’assumer tous les frais de logement et d’approvisionnement des passagers, la Turquie refusa de les laisser débarquer. Seules neuf personnes obtinrent des autorisations exceptionnelles [47]. Le 15 janvier, lorsque la Grande-Bretagne autorisa finalement au moins les enfants et les adolescents embarqués sur le Struma à immigrer en Palestine, la Turquie ne les laissa pas débarquer pour autant.

Le soir du 23 février 1942, les garde-côtes turcs firent usage de la force et remorquèrent en haute mer le Struma incapable de manœuvrer. Quelques heures plus tard, le navire fut touché par une torpille soviétique. À l’exception de David Stoliar, sauvé après avoir passé 24 heures dans l’eau, tous les réfugiés trouvèrent la mort au large d’Istanbul [48].

Pendant la Shoah

Les pays alliés à l’Allemagne nationale-socialiste ou à ses États satellites, avaient les uns après les autres adopté une législation hostile aux Juifs. L’attaque contre l’Union soviétique, à l’été 1941, marqua le début du génocide systématique des Juifs européens. Lorsque, en janvier 1942, lors de la conférence de Wannsee, on en planifia les étapes, toute l’Europe de l’Est et du Sud se trouvait déjà sous occupation allemande où sous la botte de régimes alliés au national-socialisme.

Bien que la Turquie ait été informée de ces meurtres de masse – cela ressort de la correspondance diplomatique –, elle ne modifia pas sa politique restrictive : en septembre 1942 – sept mois après le naufrage du Struma –, l’ambassade de Turquie à Bucarest alerta le ministère des Affaires étrangères à Ankara : 4 000 à 5 000 Juifs s’apprêtaient à fuir la Roumanie. Le ministre des Affaires étrangères répondit que les navires de réfugiés ne pourraient traverser les détroits qu’à la condition de franchir les eaux turques sans escale. La moindre tentative des réfugiés pour débarquer sur le sol turc susciterait « les mesures de rétorsion les plus dures », et les réfugiés seraient renvoyés en Roumanie [49]. Interdiction était faite aux armateurs turcs de collaborer avec l’Agence juive et de transporter des réfugiés juifs [50].

En novembre 1942, la direction exécutive de l’Agence juive déclara lors d’une conférence de presse à Jérusalem qu’elle détenait des preuves de l’assassinat systématique des Juifs européens par les nationaux-socialistes. Le 18 décembre, les douze gouvernements alliés publièrent une déclaration commune sur l’extermination de la population juive d’Europe par le régime allemand. On peut considérer que non seulement ces déclarations, mais aussi la présence de journalistes juifs et de comités de soutien en Turquie (minutieusement surveillés par l’appareil de sécurité turc) permirent au gouvernement turc d’être informé de très bonne heure de l’ampleur du génocide des Juifs perpétré par les Allemands. Teddy Kollek, le futur maire de Jérusalem, note ainsi dans ses Mémoires :C’est à Istanbul que nous avons entendu parler pour la première fois de l’extermination massive des Juifs. Nous avons vu arriver quasiment […] au compte-goutte à Istanbul des Juifs qui étaient parvenus, d’une manière ou d’une autre, à échapper au camp de concentration. Je n’oublierai jamais leur aspect, ni les choses atroces qu’ils racontaient. […] Nous avons écrit des lettres à Dieu et au monde entier – des milliers de lettres qui sont parties vers tous les pays du monde –, dans l’espoir […] d’ouvrir les yeux du monde sur ce qui se passait en Allemagne. […] Nous avons été les premiers à apprendre ce qui s’était réellement passé.

Tentatives de sauvetage et comités de soutien

L’évolution dramatique des années 1941-1942 accrut considérablement le rôle de la Turquie comme voie d’évasion potentielle pour les Juifs d’Europe de l’Est et du Sud. Pour sauver les Juifs, les organisations juives envoyèrent leurs délégués en Turquie. Fin 1942 fut créé un comité de sauvetage au sein duquel les représentants des différents groupements juifs travaillaient de conserve. Si Haim Barlas et Joseph Goldin séjournèrent dans le pays avec l’autorisation des Turcs, les autres accomplirent leur travail camouflés en journalistes, en hommes d’affaire ou en touristes. Des organisations internationales juives et d’autres organisations de secours envoyèrent elles aussi des représentants en Turquie, tels Edmond Simond, comme délégué de la Croix-Rouge internationale, et Reuben Resnik comme représentant de l’American Jewish Joint Distribution Committee (Joint).

En dépit des restrictions apportées par la Turquie, que nous avons décrites plus haut, des réfugiés juifs venus de différents États parvinrent à entrer dans le pays en contournant les contrôles. Les membres de la communauté juive d’Istanbul formèrent un comité de soutien qui s’occupa de loger et d’approvisionner les réfugiés obligés de séjourner clandestinement à Istanbul.

1942-1944 : la Turquie, un chas d’aiguille

Signature du pacte d’amitié turco-allemand le 18 juin 1941 à Ankara

Lorsque les nazis commencèrent leur génocide systématique, la plupart des chemins de fuite étaient barrés aux Juifs : fin octobre 1941, les Allemands leur interdirent de quitter leur zone de pouvoir et exigèrent de leurs alliés bulgares et roumains qu’ils appliquent cette interdiction. La Méditerranée et la mer Noire étaient devenues des zones de guerre. Pendant longtemps, la Grande-Bretagne ne se montra pas disposée à modifier son attitude de rejet vis-à-vis de l’immigration juive en Palestine. Il fallut attendre le début de l’été 1943 pour que le gouvernement britannique décide que les réfugiés juifs qui parvenaient en Turquie obtiendraient des certificats ouverts pour la Palestine. Mais la politique des autorités turques gêna considérablement les activités de sauvetage. Les facilités accordées en décembre 1940 n’avaient valu un soulagement à court terme qu’aux Juifs qui détenaient des certificats pour la Palestine établis avant la guerre. Lorsque ce groupe de personnes eut traversé la Turquie, c’est-à-dire avant l’été 1941, il fallut de nouveau déposer des listes pour chaque groupe en transit auprès du ministère, à Ankara. La bureaucratie était exténuante – elle se révéla mortifère. Alors que des milliers de Juifs étaient déportés chaque jour vers les centres de mise à mort, les collaborateurs du comité de soutien couraient d’un consulat britannique à l’autre pour se procurer les certificats d’immigration britanniques et les visas de transit français (pour la Syrie) et turcs. À elle seule, la vérification tatillonne qu’effectuait la bureaucratie turque sur les visas de transit pour la Syrie prenait souvent plusieurs mois. Avant que tous les papiers ne soient rassemblés, les personnes au nom desquelles étaient établis les certificats et les visas étaient souvent passées dans la clandestinité ou avaient déjà été déportées [51].

Pour évacuer autant de Juifs que possible dans des conditions politiques en mutation, l’Agence juive et le comité de sauvetage à Istanbul ne cessèrent d’élaborer de nouveaux plans [52]. Après le tournant de Stalingrad, le gouvernement roumain commença à chercher prudemment le contact avec les Alliés et, dès le début 1943, se déclara prêt à autoriser l’émigration des Juifs. La Grande-Bretagne avait accepté d’accorder des certificats pour la Palestine à 5 000 orphelins juifs provenant de Bulgarie, de Hongrie et de Roumanie, mais ils devraient être décomptés des certificats encore ouverts parmi ceux prévus par le Livre blanc. Les autorités turques n’accordèrent toutefois que tous les dix jours des visas de transit pour soixante-quinze enfants à chaque fois avec leurs accompagnateurs, et sous des conditions extrêmement vétilleuses. La Turquie refusa aussi d’aménager à proximité de la frontière bulgare des camps depuis lesquels les enfants auraient pu faire la suite du voyage. Dès qu’un retard intervenait dans l’émigration de l’un des groupes prévus, ce qui arrivait souvent et était inéluctable compte tenu des représailles et de la situation de guerre qui régnait dans tous ces États, les visas de transit devenaient caducs. Les autorités allemandes exercèrent à plusieurs reprises une pression massive sur les gouvernements roumain et bulgare, dans les années 1943 et 1944, pour empêcher l’émigration des Juifs. Les diplomates nationaux-socialistes intervinrent constamment dans ce sens [53].

Seuls 1 352 Juifs au total atteignirent ainsi la Palestine via la Turquie pour toute l’année 1943 ; 327 d’entre eux avaient pris la fuite depuis la Grèce, en passant par Çesme et Izmir. Seuls un millier de Juifs d’Europe de l’Est environ avaient franchi la Turquie par la « route officielle », ce qui correspond à un quota de tout juste vingt personnes par semaine. En revanche, la même année (1943), un nombre bien supérieur, 2 138 Juifs turcs, avait émigré de Turquie vers la Palestine, ce qui tenait aux mesures antijuives de la Turquie, et tout spécialement à la Varlik Vergisi. Ce tableau ne changea pratiquement pas jusqu’à l’été 1944 [54].

En mars 1944, les Allemands occupaient la Hongrie ; en mai débuta la déportation des Juifs hongrois à Auschwitz. Les efforts internationaux se concentrèrent sur la nécessité de faire échapper le plus grand nombre possible de Juifs hongrois à l’extermination. Le War Refugee Board, fondé en janvier 1944, s’engagea tout particulièrement dans cette direction. Dans une note interne du WJC (World Jewish Congress), on lit à propos de l’attitude de la Turquie dans cette situation exacerbée : « Il n’est pas nécessaire d’insister sur le rôle croissant qui revient à la Turquie à la suite des développements récents, en tant que ligne de vie pour ceux qui se sont évadés de Hongrie, de Slovaquie et des Balkans […] il n’y a pas eu de changement fondamental dans la politique du gouvernement turc sur la question des visas de transit pour adultes. Que la Turquie puisse rester l’unique pays neutre en Europe où il est impossible, pour un réfugié, d’entrer sans visa, est une situation révoltante et insupportable [55]. »

Opération de sauvetages des Juifs grecs

Les tentatives de sauvetage des Juifs grecs sur la côte de l’Égée connurent plus de succès. À partir de 1943 y débuta une collaboration entre des activistes juifs, la Résistance grecque et des unités du MI11 britannique, qui permit le sauvetage de Juifs en provenance de Grèce. L’île grecque d’Euböa servit de cachette à beaucoup de Juifs qui avaient échappé à la déportation depuis Salonique et Athènes. La Résistance grecque y était bien organisée, et l’on trouvait parmi les partisans une proportion importante de Juifs. À bord de petits bateaux, les partisans grecs conduisirent les Juifs et d’autres réfugiés jusqu’à Çesme, sur la côte turque de la mer Égée, où opéraient des unités du MI11. En contrepartie, du matériel destiné à la Résistance fut envoyé en Grèce. Les réfugiés juifs furent approvisionnés par la communauté juive d’Izmir jusqu’à ce que ses agents de liaison leur aient fourni les papiers nécessaires, obtenus auprès des autorités britanniques à Istanbul. Ces activités débutèrent à l’automne 1943 ; plus de mille Juifs grecs furent sauvés par ce canal [56]. La tolérance tacite de ces activités de sauvetage est en contradiction avec la politique restrictive menée, pour le reste, par la Turquie.

Pas de percée avant le début de l’été 1944

Pour justifier les restrictions aux autorisations de transit pour les réfugiés juifs, les hommes politiques turcs soulignaient constamment les capacités de transport défaillantes de leur pays. Les représentants de l’Agence juive et du War Refugee Board [57] concentrèrent leurs efforts sur la nécessité d’affréter ou d’acheter des navires offrant des capacités de transport suffisantes. Après plusieurs tentatives inabouties, l’ambassadeur américain Laurence Steinhardt obtint, début 1944, des autorités turques, l’autorisation de louer le cargo Tari, qui était apte à transporter 1 500 personnes. Officiellement, le navire devait être affrété au nom de l’ICRC. Mais les Allemands refusèrent de donner une garantie de sauf-conduit, si bien qu’au bout du compte le Tari ne put être engagé dans l’opération [58].

Pendant ce temps-là, le comité de sauvetage, à Istanbul, avait acheté plusieurs navires d’assez petite taille (le Milka, le Maritza et le Bellacitta). Ils devaient avant tout acheminer des enfants juifs à Istanbul. Les premiers trajets du Milka et du Maritza, en février 1944, n’aboutirent pas [59]. Mais début avril, ils réussirent enfin la percée. Le 30 mars, le Milka atteignit Istanbul, chargé de quelque 250 Juifs de Roumanie ; ni les passagers, ni le navire n’avaient de papiers en règle. Dans un premier temps, le ministre turc des Affaires étrangères, Menemencioglu, refusa au bateau l’autorisation d’entrer au port. La pression conjointe des Américains et des Britanniques permit finalement d’obtenir une « autorisation exceptionnelle [60] ». Les réfugiés furent conduits, sous surveillance de la police turque, jusqu’à la gare de Haydarpasa, d’où ils partirent en train pour la Syrie. La digue était rompue. Suivirent d’autres traversées du Maritza et du Bellacitta, qui conduisirent à Istanbul un millier de Juifs – des enfants, pour l’essentiel – ; de là, ils prirent le train pour se rendre en Palestine. Selon une liste établie par Joseph Goldin, qui remplaça Haim Barlas comme représentant de l’Agence juive, ce sont près de 6 000 réfugiés qui passèrent des Balkans vers la Turquie au cours de l’année 1944 [61].

De 1940 à 1944, 13 240 Juifs au total purent bénéficier d’un visa ou du moins de la tolérance de la Turquie pour gagner Eretz Israël [62]. Parmi eux, 4 850 détenaient des certificats pour la Palestine établis avant la guerre ; leur transit eut lieu entre l’automne 1940 et l’été 1941 ; 6 800 Juifs traversèrent la Turquie en 1944, essentiellement dans la deuxième moitié de l’année, c’est-à-dire après que la Bulgarie et la Roumanie eurent changé de camp et que la majeure partie des Balkans eut été libérée. Au cours des années décisives que furent 1942 et 1943, la fuite par la Turquie fut en bonne partie bloquée. Les restrictions turques ne furent qu’un facteur parmi d’autres dans ce phénomène, avec les interventions massives de l’Allemagne nationale-socialiste pour fermer les routes permettant aux Juifs de s’enfuir et la politique de la Grande-Bretagne.

Les Juifs turcs pendant la Shoah

De 20 000 à 30 000 Juifs d’origine turque vivaient en Europe au début de la Seconde Guerre mondiale. Leur chiffre précis est difficile à déterminer. Dans ses recensements, la France ne relevait pas de données concernant la religion. Le processus de migration s’étendit en outre sur une période de plusieurs décennies et de plusieurs générations, et se déroula parallèlement à la désagrégation de l’empire ottoman.

La première destination de cette migration était la France [63]. Paris devint notamment dans l’entre-deux-guerres un nouveau centre de la vie des séfarades : des Juifs venus de Turquie et de l’empire ottoman y fondèrent plusieurs synagogues ainsi que de nombreuses associations sociales et culturelles. Au sein des organisations séfarades, comme la Confédération universelle des Juifs sépharadim, dont le siège se trouva à Paris à partir de 1931, et dans leur revue Le Judaïsme sépharadi, les Juifs de Turquie jouaient un rôle prépondérant. À Lyon, à Marseille et dans de nombreuses autres villes se créèrent aussi des communautés turco-juives, tout comme à Bruxelles, Anvers, Amsterdam, Milan et Berlin. Le nombre total des Juifs de Turquie vivant en Europe avant la Shoah était nettement plus élevé que celui des citoyens juifs de la Turquie actuelle.

Dès 1933 en Allemagne, puis après l’occupation allemande des États européens, ces Juifs turcs furent victimes de la persécution nazie dans leurs pays de séjour. En tant qu’étrangers, ils étaient soumis dès avant 1933 ou 1940 à des restrictions et obligations spécifiques qui, plus tard, facilitèrent le travail de la police lorsque celle-ci voulut s’emparer d’eux. Nombre des lois antisémites du régime de Vichy étaient spécifiquement dirigées contre les Juifs étrangers. Par ailleurs, le fait de jouir de la citoyenneté d’un pays étranger pouvait aussi représenter une protection.

Bien que l’idéologie nationale-socialiste n’ait fait aucune différence entre les Juifs de différentes nationalités, des impératifs de politique étrangère forcèrent régulièrement le régime national-socialiste à appliquer des règles d’exception. Après les protestations de diplomates d’autres pays, les Juifs étrangers vivant en Allemagne furent exemptés de quelques mesures anti-juives. Avec l’occupation des États d’Europe de l’Ouest, en 1940, la question revêtit une bien plus grande importance. En France, environ la moitié des 300 000 Juifs n’étaient pas des citoyens français ; en Belgique, la part des étrangers parmi les Juifs atteignait même 90 %. Des milliers d’entre eux étaient citoyens d’États alliés à l’Allemagne ou neutres.

Protestations de consulats étrangers

Dès l’automne 1940, après l’introduction des premières mesures antisémites en France, les représentations de plusieurs États intervinrent contre la violation des droits de leurs citoyens juifs. Le consulat général turc à Paris protesta ainsi, dans une lettre du 28 décembre 1940, contre la mise en œuvre du décret prévoyant l’enregistrement des entreprises dirigées par des Juifs et la mise en place d’administrateurs provisoires. Le consul invoqua la constitution turque, qui ne faisait selon lui aucune différence entre les citoyens des différentes religions [64]. Avant même cette date, les consulats des États-Unis, d’Espagne et d’autres États avaient déjà protesté dans des notes presque identiques ; ces démarches avaient manifestement fait l’objet d’un accord entre les représentations de ces pays [65]. Après d’assez longues négociations, les entreprises et les biens des Juifs citoyens d’États neutres ne furent pas confisqués par les Allemands ou le gouvernement de Vichy, mais placés sous l’autorité d’administrateurs non juifs des consulats en question. Ce fut le cas pour de nombreuses entreprises appartenant à des Juifs turcs, pour lesquels le consulat de Turquie nomma des administrateurs.

Plus de 4 000 Juifs furent arrêtés lors de la rafle menée contre les Juifs étrangers à Paris, en août 1941. Des diplomates de plusieurs pays protestèrent contre l’interpellation de leurs ressortissants [66]. Le consul de Turquie réclama lui aussi, dès le 21 août, la libération de seize Juifs turcs arrêtés [67]. Dans un premier temps, les autorités allemandes ne jugèrent pas nécessaire de s’arrêter sur ces protestations [68]. Il fallut les interventions réitérées des consulats concernés pour que les Juifs des États neutres soient relâchés.

Ces protestations déclenchèrent au sein de l’appareil national-socialiste de vives discussions sur le traitement réservé aux Juifs étrangers. L’Auswärtiges Amt plaida en particulier pour que l’on donne suite à ces plaintes. Le droit international garantissait la vie et la propriété aux citoyens des États neutres dans les territoires militairement occupés. À Berlin, on redoutait les effets en retour sur les intérêts du Reich en politique étrangère. Cela valait en particulier pour les États dans lesquels vivaient des citoyens allemands susceptibles d’être touchés par des mesures de rétorsion. Les intérêts commerciaux et stratégiques étaient tout aussi importants.

Par la suite, une division du travail institutionnalisée se mit en place entre le Reichssicherheitshauptamt (RSHA, office central de la sécurité du Reich) et l’Auswärtiges Amt [69]. Les Juifs qui étaient citoyens d’États neutres ou alliés à l’Allemagne nationale-socialiste furent exclus du champ d’action de diverses mesures antijuives et furent dans un premier temps considérés comme « non déportables ». Ces exceptions étaient toutefois temporaires et accordées sans aucune garantie. Les Allemands veillèrent attentivement à ne pas fixer par écrit ces « règles spéciales ». Dans la pratique, les organes allemands chargés de mettre en œuvre les persécutions ne cessèrent de fouler aux pieds ces exceptions. Même des Juifs de nationalité « protégée » furent arrêtés et déportés, par exemple pour remplir complètement un convoi imminent, ou bien parce qu’un commandant particulièrement ambitieux voulait très vite rendre « judenfrei » le territoire qu’il administrait. Les démarches des diplomates étrangers furent ignorées, ou bien traitées au ralenti.

En dépit de ces réserves, on peut constater que les Juifs turcs jouirent d’une relative protection. Le simple fait d’être exemptés du port de l’étoile jaune leur donna une plus grande marge de manœuvre et facilita leur passage dans la clandestinité. L’importance qu’accordait l’Allemagne à la Turquie dans sa politique étrangère [70] procura aux autorités turques d’immenses possibilités de protéger leurs Juifs vivant en Europe. Ses diplomates en poste en France, en Italie et en Grèce le firent à plusieurs reprises et avec succès. Pour les seules années 1942-1943, on a gardé la trace d’interventions de diplomates turcs en faveur d’environ cinquante Juifs turcs qui avaient été arrêtés. Dans la plupart des cas, les consuls turcs purent obtenir la libération de ces personnes et les sauvèrent ainsi de la déportation [71].

En Italie, le consul de Turquie Nebil Ertok intervint avec succès en faveur de plusieurs Juifs turcs qui avaient été arrêtés à Milan après l’invasion allemande, en septembre 1943. À Meina, sur les rives du lac Majeur, Ertok sauva d’une mort certaine Alberto Behar, originaire d’Istanbul, et sa famille : un bataillon SS y commit au mois de septembre une série de massacres et assassina de nombreux Juifs à Meina [72].

Quand la Turquie déchoit ses citoyens de leur nationalité

Les Juifs turcs vivant dans la zone de domination nationale-socialiste reçurent un coup fatal lorsqu’Ankara déchut des milliers d’entre eux de leur nationalité. Dès le mois d’août 1939, lors d’une conférence sur les réfugiés organisée par l’HICEM, les Juifs turcs vivant en Allemagne avaient annoncé que la Turquie avait retiré leur nationalité à des centaines d’entre eux, et que ceux-ci étaient désormais dépourvus de toute protection [73]. Beaucoup des Juifs turcs qui s’adressèrent à leurs consulats à partir de 1940 pour leur demander de l’aide y apprirent aussi qu’ils avaient entre-temps été déchus de leur nationalité.

Ces déchéances de nationalité n’eurent à l’origine aucun rapport avec la persécution des Juifs par les nazis. La fondation de la République de Turquie exigeait un réaménagement de son code de la nationalité, puisque de nouveaux États s’étaient constitués sur le territoire de l’empire ottoman. Dans le cadre de la « politique de turquisation », on encouragea certes l’immigration et la naturalisation des musulmans. En revanche, un faisceau de lois et de décrets donna au gouvernement le pouvoir de déchoir de leur nationalité les personnes indésirables, c’est-à-dire avant tout les non-musulmans, mais aussi les adversaires politiques [74]. Au début, ces mesures étaient sans doute destinées à empêcher le retour des Arméniens et des Grecs.

Lorsque la persécution des Juifs par les nazis eut débuté, les déchéances de nationalité frappèrent en premier lieu les Juifs. Pendant les années 1940-1945, le gouvernement turc retira leur nationalité à des milliers de ses citoyens juifs vivant dans la zone de pouvoir national-socialiste. Ce n’était probablement pas un hasard : une note manuscrite du secrétariat du président du Conseil, en avril 1939, recense sous l’intitulé Yahudi (Juif) trois des lois qui servirent, au cours des années suivantes, à retirer leur citoyenneté aux Juifs [75]. Une autre règle pesa particulièrement lourd : les personnes qui avaient perdu la nationalité turque étaient définitivement privées du droit de pénétrer sur le territoire turc, fût-ce provisoirement ou en tant que réfugiés.

La Turquie ne fut pas du tout le seul pays à déchoir de leur nationalité des Juifs ou autres citoyens appartenant à des « minorités indésirables ». La constitution d’« États-nations » avait produit, après la fin de la Première Guerre mondiale, dans les années 1920, une légion de millions de réfugiés et d’apatrides dont les Juifs représentaient une grande partie. Le retrait de la nationalité, ou l’annulation de la naturalisation, s’inscrivait dans la politique antisémite de nombreux pays.

Conséquences de la politique de déchéance de nationalité pendant la Shoah

Nous avons mentionné plus haut que le consulat turc à Paris avait obtenu la libération de seize des Juifs arrêtés pendant la rafle d’août 1941. Mais plusieurs centaines de Juifs turcs avaient été pris en même temps, pour lesquels le consulat n’intervint pas. À la mi-octobre 1941, on comptait, dans les trois camps de Drancy, Pithiviers et Beaune-la-Rolande, 365 personnes que les Allemands considéraient comme des « Juifs turcs ». Lorsque le RSHA et l’Auswärtiges Amt se furent entendus, début 1942, sur les règles d’exception pour les Juifs ressortissants d’États neutres et alliés, les autorités allemandes envoyèrent aux consulats concernés des listes contenant les noms des citoyens juifs arrêtés, en leur demandant de confirmer leur nationalité. Ce fut aussi le cas pour les représentations turques [76]. Paul Zuckermann, qui fit office de secrétaire à Drancy, signale dans une lettre avoir établi, à la demande de divers consulats, des listes de citoyens juifs détenus [77].

Beaucoup des Juifs turcs emprisonnés à Drancy ou à Compiègne pourraient avoir seulement appris au cours de leur détention que la Turquie ne leur reconnaissait plus leur nationalité. C’est ce qui ressort de quelques lettres désespérées dans lesquelles ils demandent à leurs proches de leur envoyer enfin les papiers nécessaires et précisent que d’autres Juifs ressortissants d’États neutres ont déjà été libérés de Drancy [78].

Le 17 juin 1942, le directeur de la « police aux questions juives », Jacques Schweblin, posa la question suivante dans une lettre à Dannecker : « À Drancy se trouvent encore à peu près 250 internés, dont 150 aptes au travail attendent toujours la reconnaissance de leur nationalité turque par le consulat concerné. Quelle attitude doit-on avoir envers ces personnes pour le transport du 20 juin 1942 [79] ? » Cinq jours plus tard, le troisième train de déportation quittait Paris. Il partit avec 57 hommes nés en Turquie, avec la mention « nationalité non établie ».

L’ultimatum en vue du rapatriement

Au cours de l’été 1942, les autorités turques ne pouvaient pas savoir quelle conséquence mortelle auraient pour les Juifs turcs leur rejet et la non-reconnaissance de leur nationalité. La politique de déchéance de la nationalité fut mise en œuvre par le gouvernement d’Ankara ; une commission du ministère de l’Intérieur décidait en dernière instance de la reconnaissance ou du refus de reconnaissance de la nationalité. Le gouvernement turc poursuivit toutefois cette politique après que l’extermination systématique des Juifs par les nazis et, donc, le risque qu’entraînait la déportation eurent été connus, fin 1942 [80]. La Turquie ne priva pas seulement des milliers de Juifs turcs vivant dans la zone de pouvoir national-socialiste de la protection que leur apportait leur nationalité : elle leur refusa aussi le voyage de retour en Turquie, qui aurait pu les sauver.

On le vit avec une singulière clarté dans la réaction d’Ankara à l’ultimatum allemand demandant le rapatriement des Juifs turcs. Après les accords, mentionnés plus haut, entre le RSHA et l’Auswärtiges Amt, les Juifs des États neutres et alliés étaient en bonne partie exclus du champ des arrestations ; jusqu’en octobre 1943 – si le consulat confirmait leur nationalité –, ils furent considérés comme « non déportables ». Mais ce ne fut qu’un ajournement : en octobre 1942, les autorités allemandes adressèrent un ultimatum, d’abord à la Turquie, puis aux États alliés à l’Allemagne, leur demandant de rapatrier leurs ressortissants juifs présents dans la zone de domination allemande [81]. Dans le cas contraire, ils seraient « intégrés aux mesures générales sur les Juifs » – ce qui signifiait qu’ils seraient déportés et assassinés. Mais dans toute la mesure du possible, ce dernier point ne fut pas explicité aux représentations étrangères.

Les autorités nationales-socialistes remirent aux consulats des pays concernés des listes nominatives de leurs ressortissants juifs qui avaient été enregistrés dans les États occupés par l’Allemagne, en leur demandant de les « rapatrier ». Les Juifs turcs constituaient le plus grand groupe ; pour la seule zone nord de la France, les instances nazies partaient d’un nombre de 4 000 à 5 000 Juifs turcs.

Les consuls turcs dans les zones concernées avaient eux aussi proposé à plusieurs reprises, compte tenu de l’aggravation des représailles contre les Juifs, de lancer des plans de rapatriement organisé [82]. Mais le gouvernement d’Ankara indiqua explicitement à ses représentations diplomatiques qu’il n’effectuerait pas de rapatriements groupés [83]. Le ministre turc des Affaires étrangères avait déjà répondu à cet ultimatum que l’on prévoyait de retirer leur nationalité à une partie des Juifs qui se trouvaient à l’étranger [84]. Dans un premier temps, les autorités turques ne prirent pas d’initiative en vue d’un rapatriement – pas plus que les consulats de la plupart des autres États neutres. En février 1943, le consul turc à Paris informa les instances allemandes que sur plus de 3 000 Juifs figurant sur la liste, seuls 631 seraient reconnus comme citoyens turcs. Mais dans un premier temps (en mars 1943), seuls 114 Juifs turcs furent rapatriés en Turquie [85]. On ignore si, et dans quelle mesure, les consulats turcs informèrent les Juifs turcs de l’ultimatum. Nombre d’entre eux qui demandèrent aux instances diplomatiques leur rapatriement, ou du moins une aide pour leur voyage de retour, furent éconduits [86]. Début 1943, les Juifs turcs de Marseille demandèrent à la section locale de l’UGIF son soutien face aux autorités turques qui leur avaient refusé le retour [87].

Comme, dans un premier temps, plusieurs des États neutres et alliés ne réagirent pas, les autorités allemandes repoussèrent à plusieurs reprises le délai de rapatriement, jusqu’au mois de septembre 1943. Le 21 septembre 1943, quelques jours avant l’expiration de l’ultimatum, le secrétaire de l’ambassade de Turquie à Berlin, Koç, annonça à son interlocuteur à l’Auswärtiges Amt que les consulats turcs avaient désormais l’instruction d’Ankara de rapatrier les Juifs ayant sans discussion possible la nationalité turque, « après examen de chaque cas particulier ». Sous réserve, toutefois, d’« empêcher une immigration massive de Juifs en Turquie », et tout particulièrement de Juifs qui avaient certes des papiers turcs en règle, mais n’avaient plus de contact avec ce pays depuis des décennies [88].

Les Juifs qui voulaient revenir en Turquie durent déposer des demandes auprès des consulats ; leurs noms étaient dans un premier temps vérifiés par le consulat compétent, puis par une instance gouvernementale à Ankara, procédure qui pouvait durer des mois. Ankara rejeta les appels urgents des organisations de secours juives et même de l’ambassadeur américain en Turquie, motivés par la connaissance que l’on avait à cette époque de la politique d’extermination des nazis, à laisser aussi entrer dans le pays, fût-ce à titre provisoire, les Juifs dont l’ancienne nationalité turque n’était pas encore clairement établie, afin de leur sauver la vie. Finalement, entre février et la fin mai 1944, 414 Juifs furent encore une fois évacués en train à destination de la Turquie. Pour la seule période allant de janvier à la fin juillet 1944, c’est-à-dire à la libération de Paris, bien plus de 1 000 Juifs turcs furent déportés à Auschwitz et envoyés à la mort.

Le comportement de diplomates turcs

Pour autant qu’on puisse le voir dans les dossiers accessibles, la plupart des diplomates turcs s’en sont tenus à la direction indiquée par Ankara. En janvier 1944 encore – alors que les diplomates turcs savaient très bien quel risque couraient les Juifs –, le consulat général turc à Paris donna au consulat de Marseille, placé sous son autorité, l’instruction de continuer à ne rapatrier les Juifs de la zone sud que dans des cas exceptionnels. Comme les Allemands ne libéraient les Juifs turcs qui étaient capturés et internés en camp de concentration qu’à condition qu’ils retournent en Turquie, il fallait aussi accepter le rapatriement des Juifs interpellés. [89] En d’autres termes : on acceptait le risque que ces Juifs soient capturés ! Lien Le Point

Initiatives spécifiques de diplomates turcs

On trouva des diplomates pour faire usage de leur marge de manœuvre et agir de leur propre initiative ; ce fut, par exemple, le cas d’Inayetullah Cemal Özkaya, consul général de Turquie à Athènes pendant la guerre. Lorsque le gouvernement turc, en mai 1943, fit savoir par l’ambassadeur allemand Papen que, sur les 39 Juifs turcs de Salonique, il ne « prenait d’intérêt » qu’à neuf personnes, Özkaya télégraphia aussitôt que 22 Turcs juifs étaient enregistrés, ce qui signifiait qu’il les plaçait sous sa protection. En septembre 1943, lorsque les troupes allemandes occupèrent aussi les territoires grecs tenus jusque-là par l’Italie, Özkaya lança immédiatement le rapatriement d’une centaine de Juifs turcs, tandis que le gouvernement d’Ankara répondait, comme d’habitude, à la demande de rapatriement formulée par les Allemands, qu’il devait d’abord vérifier individuellement la nationalité des personnes concernées. Dans la nuit du 24 au 25 mars, la SS arrêta plus de 500 Juifs à Athènes, dont quarante Juifs turcs, et les conduisit au camp de concentration d’Haidari. Özkaya put obtenir la libération de 32 des personnes interpellées [90].

Selahattin Ülkümen, le « Juste parmi les Nations » turc

La plus fameuse opération de sauvetage menée par un diplomate turc pendant la Shoah est sans doute celle du consul Selahattin Ülkümen, à Rhodes. En septembre 1943, les troupes allemandes occupèrent l’île. En juillet 1944, le commandant militaire, Kleemann, organisa la déportation de 1 820 Juifs de Rhodes et de Kos vers Auschwitz. Seuls 179 d’entre eux survécurent. Plus de 40 Juifs de Rhodes furent sauvés par l’engagement de Selahattin Ülkümen. Arguant de la neutralité de la Turquie, il exigea la libération des Juifs turcs, désignant au passage quelques époux et enfants comme citoyens turcs, alors que ceux-ci ne détenaient pas ou plus la citoyenneté turque [91].

Sauvetage d’individus

On mesure de quelles possibilités disposaient les diplomates turcs au fait que, dans quelques cas individuels, on parvint même à sauver des personnes juives qui ne pouvaient pas se réclamer de la nationalité turque.

Les instances turques à Berlin délivrèrent ainsi des papiers à Max et Gertrud Naphtali, un couple juif-allemand. Tous deux avaient travaillé pour l’ambassade de Turquie. Le cabinet turc adopta une délibération spéciale aux termes de laquelle le couple Naphtali, à condition qu’il dispose de certificats pour la Palestine, obtenait un visa d’entrée pour la Turquie. Comme, à cette date (1942-1943), les règles fixées par les nazis interdisaient aux Juifs allemands de quitter le territoire du Reich, le consulat turc à Berlin établit pour les Naphtali des papiers turcs avec lesquels il leur fut possible de quitter l’Allemagne [92].

À Vienne, le consul général turc Behcet Özdoganci plaça un Juif du nom de Bertold Löwenstein sous sa protection personnelle. Löwenstein, qui s’était converti au protestantisme mais qui, aux yeux des nazis, entrait dans la catégorie des Juifs, avait abandonné la nationalité turque en 1938 et s’efforça, à partir de cette date, d’obtenir une renaturalisation. Les lois relatives à la citoyenneté turque ne le permettaient pas, mais le consulat lui délivra une attestation selon laquelle il devait être considéré comme un ressortissant turc jusqu’à ce que son dossier ait fait l’objet d’une vérification à Ankara. Löwenstein fut présenté aux Allemands comme un employé du consulat. Lorsque la Gestapo l’arrêta, en mai 1943, le consul général imposa qu’il soit écarté du convoi déjà préparé et le logea même dans les locaux du consulat. La protection que le consul général Özdoganci accorda à Löwenstein n’était sans doute pas désintéressée. Celui-ci était marchand d’art et conseillait Özdoganci dans ses achats d’objets d’art. Ces exemples montrent toutefois la marge de manœuvre dont disposaient les diplomates turcs.

Même début 1945, le gouvernement d’Ankara resta sur sa position, qui consistait à ne pas laisser entrer dans le pays les Juifs indésirables : le 11 mars 1945, 137 Juifs originaires de Turquie arrivèrent à Istanbul à bord du Drottningholm dans le cadre d’un échange germano-turc de prisonniers civils. Ils avaient été libérés des camps de concentration de Bergen-Belsen et Ravensbrück. Bien que l’arrivée du navire ait eu lieu quelques jours après la libération de Bergen-Belsen et que les récits bouleversants sur l’enfer de ce camp aient occupé aussi une large place dans la presse turque, les autorités turques refusèrent pendant des jours l’entrée en Turquie à 119 des 137 passagers. Seules de laborieuses négociations permirent à des organisations de secours juives d’obtenir que les rescapés puissent quitter le navire et soient internés dans trois pensions à Istanbul, aux frais de l’Agence juive.

Entre 2 200 et 2 500 Juifs d’origine turque furent déportés pendant la Shoah dans les camps d’extermination d’Auschwitz et de Sobibor, entre 300 et 400 supplémentaires dans les camps de concentration de Ravensbrück, Buchenwald, Mauthausen, Dachau, Bergen Belsen et autres, où beaucoup perdirent la vie. D’autres succombèrent aux conditions de détention à Drancy ou Westerbork, furent exécutés ou torturés à mort par la Gestapo. À ce jour, les instances officielles turques ne se sont même pas donné la peine d’inventorier le nom des victimes et d’établir quel a été leur destin. Des histoires inventées ou exagérées à propos de prétendues « opérations de sauvetage » turques alimentent en revanche la propagande politique. Ce n’est pas seulement une falsification de l’histoire, mais un manque de respect pour les victimes.

Notes

  • [2]L’expulsion des chrétiens d’Anatolie se prolongea aussi pendant la phase de guerre des années 1919-1922, désignée en Turquie par l’expression « lutte de libération ». En Anatolie occidentale, les grandes communautés juives furent totalement laminées par la guerre et les occupations successives dans les années 1911-1922.
  • [3]Hâkimiyeti Milliye, 21 mars 1923.
  • [4]Voir Ayhan Aktar, Varlik Vergisi ve « Türklestirme » Politikalari, Istanbul, Iletisim, 2000, p. 101.
  • [5]Lettre de P. Georges, 24 juillet 1934, annexe au rapport de Skinner daté du 2 août 1934 ; NARA 867.4016-Jews 13.
  • [6]Avner Levi, Türkiye Cumhuriyeti’nde Yahudiler, Istanbul, Iletisim, 1998, p. 18.
  • [7]Pour plus de détails, voir Corry Guttstadt, Turkey, the Jews and the Holocaust, New York, Cambridge University Press, 2013, p. 22-23.
  • [8]Ce fut le cas de Hüsrev Gerede (ambassadeur de Turquie à Berlin), de Numan Menemencioglu (ministre des Affaires étrangères à partir de 1942), de Muhlis Erkmen (ministre de l’Agriculture), de Selim Sarper (directeur du service de presse de l’État) et de plusieurs députés.
  • [9]Sur la propagande allemande en Turquie : Johannes Glasneck, Methoden der deutsch- faschistischen Propagandatätigkeit in der Türkei vor und während des Zweiten Weltkrieges, Halle, Martin-Luther-Universität Halle-Wittenberg, 1966 ; Berna Pekesen, Zwischen Sympathie und Eigennutz, Münster, Lit, 2014.
  • [10]Pour plus de détails, voir Rifat N. Bali, 1934 Trakya Olaylari, Istanbul, Kitabevi, 2008 ; Berna Pekesen, Nationalismus, Türkisierung und das Ende der jüdischen Gemeinden in Thrakien : 1918-1942, Munich, Oldenbourg, 2012.
  • [11]Rapport de l’ambassadeur grec Sakellaropoulos en date du 12 juillet 1934, in Photini Constantopoulou et Thanos Veremis (éd.), Documents on the History of the Greek Jews : Records from the Historical Archives of the Ministry of Foreign Affairs, Athènes, Kastaniotis, 1999, p. 243. Plusieurs lettres de l’envoyé diplomatique américain Robert P. Skinner dans le NARA. Propos similaires dans les rapports des consuls allemands, britanniques et français.
  • [12]Il fallut attendre 1936 pour que le traité de Montreux rende à la Turquie la souveraineté sur les détroits.
  • [13]Ce que supposait l’envoyé diplomatique britannique, Percy Loraine. Rapport du 22 juillet 1934 au ministère britannique des Affaires étrangères, cité d’après Aktar, Varlik Vergisi, p. 92.
  • [14]Rapport Ibrahim Talis, CBA, cote 490.01.643.30.1., ici p. 19.
  • [15]Les mémoires et récits des témoins de l’époque laissent ressentir la peur que l’on éprouvait à l’époque. Nombreux récits in Rifat N. Bali, II. Dünya Savasi’nda gayrimüslimlerin askerlik serüveni, Istanbul, Kitabevi, 2008.
  • [16]L’Arménien Sarkis Çekrezyan raconte dans ses Mémoires que son unité a dû accomplir des travaux forcés pendant quatre ans, et qu’on y trouvait même des Arméniens convertis à l’islam : Sarkis Çerkezyan, Bu Dünya Hepimize Yeter, Istanbul, Belge, 2003, p. 113.
  • [17]Sur Varlik Vergisi, Rifat N. Bali, The Varlik Vergisi Affair: A Study of its Legacy. Selected Documents, Istanbul, Isis, 2005 ; Ayhan Aktar, Varlik Vergisi ve « Turklestirme » politikalari, Istanbul, Iletisim Yayinlari, 2000, et Ali Sait Çetinoglu, Varlik Vergisi, 1942-1944 : Ekonomik ve Kültürel Jenosid, Istanbul, Belge, 2009.
  • [18]Dönme (mot turc pour « retourné ») désigne d’une manière générale les gens qui ont changé d’identité religieuse, nationale ou même sexuelle. Au sens strict, Dönme désigne toutefois les adeptes de Sabbataï Tsevi qui, au xviie siècle, se présenta comme le « Messie » et se convertit finalement à l’islam.
  • [19]Aktar, Varlik Vergisiop. cit., p. 229.
  • [20]Çetinoglu, Varlik Vergisiop. cit., p. 167-173.
  • [21]Mehmet Gündem, Lüzumlu adam Ishak Alaton, Istanbul, Alfa Basim, 2012, p. 37 ; Moshe Dana qui, après sa libération de Bergen-Belsen, arriva à Istanbul en avril 1945, raconte des faits identiques. Entretien avec M. Dana le 23 décembre 2005 à Milan.
  • [22]Pour plus de détails, voir Philipp Schwartz, Notgemeinschaft : Zur Emigration deutscher Wissenschaftler nach 1933 in die Türkei, Helge Peukert (éd.), Marbourg, Metropolis, 1995.
  • [23]Horst Widmann, Exil und Bildungshilfe : Die deutschsprachige akademische Emigration in die Türkei nach 1933, Berne et Francfort-sur-le-Main, Peter Lang, 1973, p. 131 et 167.
  • [24]Archives du Service du président du Conseil de Turquie à Ankara (BCA), Archives politiques de l’Auswärtiges Amts (PAAA) et Archives du Verein Aktives Museum (VAM) à Berlin.
  • [25]Quarante scientifiques – au total, avec les membres de leur famille, une centaine de personnes – restèrent moins de deux ans en Turquie.
  • [26]Jan Cremer et Horst Przytulla, Exil Türkei : deutschsprachige Emigranten in der Türkei 1933-1945, Munich, Lipp, 1991, p. 27.
  • [27]Lettre de refus du président du Conseil Inönü à Einstein, 14 octobre 1933 ; BCA, 030.10.116.810.3.
  • [28]PAAA, Ambassade Ankara, 539, lettres diverses.
  • [29]Échange de courriers in PAAA, Ambassade Ankara 539, ainsi que lettre du ministère turc des Affaires étrangères en date du 7 mai 1937, et note du 26 mai 1937 concernant un entretien avec le directeur adjoint au ministère turc des Affaires étrangères, Kemal Aziz Payman, Ambassade Ankara 681.
  • [30]Note du 5 août 1937 et lettre du consul Toepke du 6 août 1937, PAAA, Ambassade d’Ankara, 681.
  • [31]BCA, 030.10/99.641.7. On ignore ce qu’est ensuite devenue Edith Norden.
  • [32]Cette mesure fut atténuée après que Goga eut été démis de ses fonctions.
  • [33]En mai 1938, le consulat général allemand envoya un formulaire en ce sens aux émigrés allemands en Turquie (PAAA, ambassade d’Ankara, 732).
  • [34]Lettre de l’ambassadeur d’Allemagne August F.W. von Keller à l’Auswärtiges Amt à Berlin, le 2 juillet 1938. PAAA, R 49005.
  • [35]Le décret ne fut pas publié dans le bulletin officiel du gouvernement, la Resmi Gazete. Il s’agissait d’un décret secret. Le contenu et le texte partiel résultent de la version revue de janvier 1941 (voir infra).
  • [36]Lettre de F. R. Kraus à Leonie Zuntz du 15 octobre 1938, University Library de Leyde, « brieven », BPL 3273.
  • [37]Dans les archives du président du Conseil à Ankara sont conservées une série de décisions gouvernementales qui accordèrent à des Juifs des permis de séjour à durée limitée en Turquie, en précisant explicitement « par dérogation au décret n° 2/9498 ».
  • [38]Francis Ofner, originaire de Novi Sad et qui fut connu ultérieurement comme diplomate israélien, tenta en 1941 de quitter Budapest pour se rendre en Palestine ou à Istanbul. Pour obtenir un visa d’entrée du consulat turc, il dut présenter des certificats de baptême pour ses quatre grands-parents. Enregistrement vidéo d’Ofner à l’USHMM, Washington, 1995.A.1272.115.
  • [39]La raison n’en était pas seulement la persécution des Juifs dans l’Allemagne nazie, mais l’immigration des Juifs en provenance des pays d’Europe de l’Est. Leur nombre était bien supérieur à celui des immigrés en provenance d’Allemagne.
  • [40]BCA, délibération n° 2/14265 du 25 août 1940, 30..18.1.2/92.85..5.
  • [41]Haim Barlas, Hatzalah be-yemei ha-Sho’ah (Le Sauvetage durant la Shoah), Tel Aviv, Hakibbutz Hameuhad, 1975, p. 24-25.
  • [42]Rapport de Barlas en date du 15 juin 1941 in AJJDC, collection 33/44, dossier 1050/20 F2.
  • [43]Dalia Ofer, Escaping the Holocaust: Illegal Immigration to the Land of Israel 1939-1944, New York, Oxford University Press, 1990, p. 163-164 ; Tuvia Friling, « Between friendly and hostile neutrality : Turkey and the Jews during World War II », in Minna Rozen (éd.), The Last Ottoman Century and Beyond, vol. II : The Jews in Turkey and the Balkans 1808-1945, Tel Aviv University, 2002, p. 309-423, ici p. 332.
  • [44]Lettre du 15 juin 1941, AJJDC, Coll. 33/44, File 1050/20 F2. Les archives du président du Conseil inventorient deux décisions gouvernementales portant sur l’autorisation de transit pour les Juifs ; une décision remontant au 18 décembre 1940 pour 4 687 Juifs (BCA, 30..18.1.2/ 93.117..7) ainsi qu’une décision en date du 30 décembre 1940 pour un groupe de 166 Juifs (BCA, 30..18.1.2/93.120..20). Au total, cela correspond à peu près au chiffre indiqué par Barlas.
  • [45]Leni Yahil, Die Shoah, Überlebenskampf und Vernichtung der europäischen Juden, Munich, Luchterhand, 1998, p. 843. Le tableau le plus global sur les navires de réfugiés est celui de Jürgen Rohwer, « Jüdische Flüchtlingsschiffe im Schwarzen Meer (1934-1944) », in Ursula Büttner (éd.), Verfolgung, Exil, Belasteter Neubeginn, Hambourg, Christians, 1986, p. 197-248.
  • [46]Pour plus de détails sur la Struma : Douglas Frantz et Catherine Collins, Death on the Black Sea: The Untold Story of the Struma and World War II’s Holocaust at Sea, New York, Ecco, 2004 ; Ofer, Escaping…op. cit., p. 147-166 ; interview vidéo de David Stoliar aux archives de l’USHMM, RG 50030-0384.
  • [47]Il s’agissait de cinq personnes dont les autorités britanniques à Istanbul renouvelèrent les certificats périmés, d’une femme enceinte et de M. Segal, le représentant d’une entreprise pétrolière américaine, qui obtint par le truchement de son collègue V. Koç une autorisation spéciale des autorités turques pour lui-même, sa femme et son enfant.
  • [48]Il existe des divergences sur le nombre précis des passagers et des victimes. Une liste établie par Samuel Aroni sur la base des plusieurs listes existantes des victimes décédées cite 781 réfugiés juifs et dix membres d’équipage, dont quatre étaient également juifs. Samuel Aroni, « Who Persihed on the Struma and How Many ? », in Frantz et Collins, Death on the Black Seaop. cit., p. 295-335.
  • [49]Note du ministère des Affaires étrangères turc, 14 septembre 1942, BCA, 30.10.00/99.641.13.
  • [50]Friling, « Between friendly and hostile neutrality », art. cit., p. 338.
  • [51]Yahil, Die Shoahop. cit., p. 841.
  • [52]En détails chez Friling, « Between friendly and hostile neutrality », art. cit. Voir aussi Guttstadt, Turkey, the Jews and the Holocaustop. cit., p. 122-129.
  • [53]Hans-Jürgen Döscher, Das Auswärtige Amt im Dritten Reich : Diplomatie im Schatten der « Endlösung », Berlin, Siedler, 1987, p. 294 et 299.
  • [54]Rapport de Barlas sur « l’immigration par la Turquie » (Immigration via Turkey) du 28 décembre 1943 (voir supra). Selon un rapport de juillet 1944, entre janvier 1943 et juin 1944, ce sont au total 3 153 Juifs qui ont émigré de la Turquie vers la Palestine, tandis que dans le même temps, seuls 3 144 réfugiés juifs en provenance des Balkans arrivaient en Palestine (rapport de Harry Viteles du 23 juillet 1944, in AJJDC, coll. 33/44, dossier 1051/20 F2).
  • [55]Note « fh » du 7 avril 1944, AJA, H 332 -19.
  • [56]Friling, « Between friendly and hostile 0 », art. cit., p. 407 sq. et p. 416 ; Heinz Ziffer, « Rescuing Jews under German Occupation – With Help of the Jewish Community of Izmir (1943-1944) », Los Muestros, n° 50, Bruxelles, mars 2003.
  • [57]Depuis février 1944, Ira Hirschmann se trouvait en Turquie en tant que représentante du War Refugee Board (WRB).
  • [58]Correspondance in PAAA, 100856, ainsi que rapport de Simond en date du 24 avril 1944, ICRC G 95/5-165.03.
  • [59]Selon un rapport de Barlas en date du 24 avril 1944, le gouvernement turc avait renvoyé en février 500 réfugiés arrivés à bord de ces navires. Selon Rohwer, la marine de guerre allemande empêcha le passage des bateaux (Rohwer, « Jüdische Flüchtlingsschiffe… », art. cit., p. 235).
  • [60]Le 23 mars 1944, le président des États-Unis, Roosevelt, avait déclaré qu’aucune personne ayant participé à l’assassinat des Juifs ne resterait impunie, et avait appelé les États neutres à accueillir les réfugiés juifs. L’ambassadeur américain, Steinhardt, considéra que cette déclaration avait pesé sur la politique turque.
  • [61]Liste détaillée parue dans le journal La Boz de Türkiye du 1er mars 1945, p. 243.
  • [62]Ofer, Escaping…op. cit., p. 320. Le nombre total cité par Ofer, 16 474 migrants arrivés en Palestine via la Turquie, inclut 3 234 émigrés juifs turcs pour lesquels la Turquie ne fut pas un pays de transit, mais la patrie qu’ils quittèrent.
  • [63]Moch estime que la moitié des immigrés en provenance de Turquie étaient des Juifs (Maurice Moch, Les Étrangers de religion juive en France, thèse non publiée, Lyon, Documents du Centre d’Études rue Vauban, 1942, p. 10). Le recensement de 1931 décomptait plus de 41 000 Turcs (musulmans et juifs) ; selon Moch, la France accueillait donc à elle seule quelque 20 000 Juifs en provenance de Turquie. D’autres auteurs (Michel Roblin, Sam Levy) citent des chiffres plus élevés.
  • [64]Lettre du consulat général turc à Paris, 28 décembre 1940 (USHMM, Acc. 1995.A.1202).
  • [65]C’est ce que supposa aussi l’ambassade allemande à Paris, lettre du 10 février 1941. PAAA, R 100868.
  • [66]Des notes conservées à l’Auswärtiges Amt citent des protestations en provenance des États-Unis, du Mexique, du Chili, de l’Iran, de la Suisse, de l’Espagne et de la Turquie.
  • [67]Lettre du consulat général turc du 21 août 1942, puis des 5 et 25 septembre 1941. USHMM, Acc. 1995.A.1202.
  • [68]Sur les protestations de la représentation espagnole et des autres États : Bernd Rother, Spanien und der Holocaust, Tübingen, Max Niemeyer, 2001, p. 89-90.
  • [69]Pour plus de détails, voir Guttstadt, Turkey, the Jews and the Holocaustop. cit., p. 139-158.
  • [70]Plus de 2 000 « Allemands du Reich » vivaient en Turquie ; les livraisons de chrome turc revêtaient pour l’Allemagne une importance militaire stratégique.
  • [71]Stanford Shaw a remis à l’USHMM de Washington des copies de quelques dossiers des consulats turcs en France (cote 1995.A.1202) On trouve aussi quelques exemples dans les quelques dossiers conservés par l’ambassade allemande à Paris, au PAAA.
  • [72]Becky Behar, La Strage Dimenticata. Meina settembre 1943, il primo eccidio di ebrei in Italia, Novare, Interlinea, 2003.
  • [73]Mémorandum de Juifs turcs : OSOBI-Archiv Moscou, [phi] 116 k, Onuc 6 5 [sigma] 42.
  • [74]Le caractère partiellement arbitraire de ces décisions apparaît par exemple dans le fait que des milliers de Juifs furent déchus de leur nationalité pour « non participation à la lutte de libération » alors qu’ils n’étaient pas nés ou étaient nourrissons au moment de la guerre, ou qu’il s’agissait de femmes, qui n’avaient pas d’obligations militaires. Le gouvernement pouvait aussi priver de leur nationalité des personnes qu’il ne considérait pas comme turques d’un point de vue « culturel ». Voir Corry Guttstadt, « Depriving non-Muslims of citizenship as part of the Turkification policy in the early years of the Turkish Republic », in Hans-Lukas Kieser (éd.), Turkey Beyond Nationalism, Londres, Tauris, 2006, p. 50-56.
  • [75]BCA, Dossier 94C45, 30..10.0/110.736..5.
  • [76]CDJC : DLIX-12 et 14. Répondant à une demande de la Kommandantur du camp sur 29 personnes de religion juive nées en Turquie, le consulat turc répondit le 24 mars 1942 qu’il ne reconnaissait pas ces personnes comme des citoyens turcs. USHMM 1995.A.1202.
  • [77]Il mentionne explicitement le consulat de Hongrie. Lettre de Zuckermann en date du 6 janvier 1942 ; CDJC, Fond 986 (19)-4.
  • [78]Lettres de Lucien Sabah entre avril 1942 et sa déportation le 14 septembre 1942, in Lucien Sabah, Drancy, derniers mots, Paris, Le Lavoir Saint-Martin, 2014. Également : lettres de Rafaél Eskenazi envoyées de Drancy, visibles dans le dossier : Karine Eskenazi, Avoir treize ans sous l’occupation allemande (1941-1945). Lettres de mon père, transcrit du solitréo et traduit en français par Haim Vidal Sephiha, accessible au musée d’Art et d’Histoire du judaïsme.
  • [79]Lettre de Jacques Schweblin CDJC, XXVb-37. Schweblin sous-entend qu’il vaudrait mieux déporter ces internés turcs aptes au travail plutôt que de faire venir des internés de Pithiviers ou de Beaune, mentionnés plus haut dans la lettre.
  • [80]Voir supra sur la déclaration interalliée du 18 décembre 1942 (voir p. 216) ; en mars 1943, la revue d’État Ayin Tarihi publia une information sur ce point (n° 112, p. 251).
  • [81]Pour plus de détails, voir Guttstadt, Turkey, the Jews and the Holocaustop. cit., p. 146-158, 209-215 et 224-234.
  • [82]Ce que firent le consul général Cevdet Dülger, de Paris, dès le mois de septembre 1941, et le consul général à Marseille, Arbel, aux ambassadeurs turcs, le 30 décembre 1942, cité d’après Stanford Shaw, Turkey and the Holocaust, Basingstoke et Londres, Macmillan, 1993, p. 140, note 158 et p. 141.
  • [83]Behiç Erkin, Hatirat 1876-1958, Ankara, Türk Tarih Kurumu, 2010, p. 542. Erkin retransmit cet ordre le 7 janvier 1943 aux consulats placés sous ses ordres (Shaw, Turkey and the Holocaustop. cit., p. 142 et 153-154).
  • [84]Télégramme du secrétaire de l’ambassade d’Allemagne à Ankara, H. Kroll, le 16 octobre 1942, à propos de son entretien au ministère turc des Affaires étrangères, PAAA, R 100889.
  • [85]Guttstadt, Turkey, the Jews and the Holocaustop. cit., p. 212-213.
  • [86]Plusieurs exemples in Shaw, Turkey and the Holocaustop. cit., et dans les copies des dossiers à l’USHMM, cote 1995.A.1202.
  • [87]Lettre d’un certain M. Habib, en date du 31 mars 1943, et mémorandum non daté « concernant le rapatriement des citoyens turcs de confession juive » dans les dossiers de l’UGIF Marseille. Je remercie Serge Klarsfeld pour la mise à disposition de ces documents.
  • [88]Note après entretien rédigée par von Thadden, 22 septembre 1943 ; PAAA, R 99446.
  • [89]Lettre du consulat général de Turquie, 26 janvier 1944, in USHMM, Sign. 1995.A.1202, box 1, folder 36.
  • [90]Il s’agissait toutefois de personnes dont il avait d’ores et déjà lancé le processus de rapatriement.
  • [91]Selahattin Ülkümen fut distingué en 1989 comme « Juste parmi les Nations ».
  • [92]Lettre de Thadden, 17 juin 1943, PAAA, R 99447 ; BCA, délibération du 27 novembre 1942, 30..18.1.2/100.98..20.

L’auteur – Historienne, Corry Guttstadt a a soutenu en 2009 sa thèse de doctorat intitulée La Turquie, les Juifs et la Shoah. Ses recherches se concentrent sur le nationalisme, la politique des minorités, l’antisémitisme et les droits de l’homme en Turquie. Elle a récemment publié une anthologie de récits littéraires autour des Arméniens, Wege ohne Heimkehr (« Chemins sans retour », Assoziation A, 2014).

« Rien à foutre de la Shoah » (le rappeur Freeze Corleone)

Le ministre de l’Intérieur condamne l’apologie du IIIe Reich. Et puis après ?

Voyage dans l’antisémitisme obsessionnel du rap islamo-gauchiste

Paul Didier analyse comment les textes de rap de Freeze Corleone, dont le premier album est un vrai succès commercial dans les milieux qui n’ont pas les moyens de se payer un livre broché de littérature classique française. Il est au cœur d’échanges obligés sur Twitter, entretenus par la Licra et par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui dénoncent non pas de l’antisémitisme et du complotisme, mais des traces de l’un et l’autre: pas même des « relents ».

L’antisémitisme et le complotisme sont devenus des produits de vente populaires. Cette affirmation n’est pas inappropriée à l’écoute de LMF (La Menace Fantôme), le premier album du rappeur Freeze Corleone, pseudonyme de Issa Lorenzo Diakhaté, né en 1992, en Seine-Saint-Denis, sorti le 11 septembre 2020 et cette date n’est pas choisie au hasard. Provocatrice et indécente?

Si le rappeur des Lilas – voisin du socialiste Claude Bartolone – n’est pas forcément connu par un public très large et plus âgé, les chiffres de vente de LMF en seulement trois jours sont éloquents : 15.325 exemplaires de son album se sont déjà vendus et les écoutes explosent en streaming: la puissance de frappe de la drogue. On croit assister à l’entretien d’embauche d’un choufeur de 14 ans et décrocheur de collège ! Sur le Suédois Spotify, il avait déjà été écouté 5,2 millions de fois en 24 heures (et en boucle, sans personne sous le casque). Il devrait d’ailleurs s’agir du quatrième meilleur démarrage d’un album de rap en 2020, derrière des artistes aussi populaires que Jul, Ninho ou Maes, et devant des mastodontes de la production rap en France, comme Kaaris, rappeur français d’origine ivoirienne. La plupart des titres de LMF sont entrés directement dans le top 50 français, à l’image du morceau d’ouverture, « Freeze Raël » qui culmina à la deuxième place.

Le gouvernement choisit le support d’un réseau social.

Pour dénoncer « l’apologie du nazisme et l’antisémitisme », le ministre de l’Intérieur ne s’adresse pas à la presse, croyant y cibler plus sûrement les jeunes décoloniaux déculturés, en refus d’intégration.

Il emprunte ce réseau social – réduisant tout raisonnement à 280 signes ou émoticons – pour demander « au plus vite des recours juridiques » contre les propos du rappeur Freeze Corleone. La communication ne passe pas avec Eric Dupond-Moretti et son collègue ministre du Parquet ne lit ni Le Monde, ni Libération…

« J’arrive déterminé comme Adolf dans les années 30″, « Monte un empire comme le jeune Adolf déterminé avec de grandes ambitions », « Tous les jours R.A.F (Rien à foutre) de la Shoah », les paroles du rappeur Freeze Corleone fait scandale sur la toile, sans atteindre la presse.

Son dernier album, LMF, sorti vendredi 11 septembre, a fait plus de 5 millions d’écoutes en moins de 24 h sur Spotify. Considéré comme un rappeur underground, Freze Corleone s’est fait connaître avec son collectif, le 667, également surnommé la Ligue des Ombres, qui réunit des rappeurs originaires de Lyon, de région parisienne et de Dakar, où il vit. Le rappeur, âgé de 28 ans, a sorti son premier album en 2010, « A la recherche de la daillance », avant de faire connaître la musique drill en France en 2016. Ses textes regorgent de thèmes relatifs à la théorie du complot et reprend les codes habituels du rap (argent, drogue…). Autant dire que Freeze Corleone est un profiteur du scandale et de la haine. 

https://twitter.com/LICRA/status/1306176672111243264?s=19

La polémique enfle sur les réseaux sociaux

"Rien à foutre de la Shoah" : voyage dans l'antisémitisme obsessionnel du rappeur Freeze Corleone
Capture d’écran du clip « Hors Ligne »

Mercredi, la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) est montée au créneau. Plusieurs messages ont été diffusés sur les réseaux sociaux. « L’impunité doit cesser. Nous demandons à l’ensemble des acteurs partenaires de prendre leurs responsabilités. »

L’association invite les diffuseurs à un boycottage des différentes plateformes commerçantes. Youtube, Googleplaymusic, Applemusic, Spotify (suédoise), Deezer (française !), Amazon, Tidal (suédoise) ont été identifiés. « Antisémitisme, complotisme, apologie d’Hitler, du IIIe Reich et du terroriste Mollah Omar, le rappeur @freezecorleone fait business de son obsession des juifs. »

Des « propos inqualifiables »

Le ministre de l’Intérieur s’est emparé de l’affaire. En retweetant le post de la Licra, Gérald Darmanin a demandé des sanctions à l’encontre de l’artiste. « Apologie du nazisme et antisémitisme… Ces propos sont inqualifiables. À ma demande, le ministère de l’Intérieur étudie au plus vite les recours juridiques pour poursuivre leur auteur. » Il incite lui aussi Facebook et Twitter « à ne pas diffuser ces immondices ». 

D’autres acteurs du monde politique, comme Eric Ciotti député des Alpes-Maritimes, ont aussi demandé la radiation des textes de Freeze Corleone. 

Encore un plan Hollande: contre le racisme et l’antisémitisme, cette fois

Les précédents plans et pactes de Hollande plaident en sa défaveur

Le plan de redressement de Hollande pour désendetter la France est un flop.

Il visait à déléguer aux entreprises la charge de ramener le déficit public à 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2013. Paradoxalement, en 18 mois, il prévoyait 30 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires sur les plus aisés des ménages et sur les entreprises. Présenté le jeudi 26 janvier 2012 par le candidat socialiste à l’Elysée, il supposait une stabilisation en volume de la dépense de l’Etat et une augmentation limitée à 1 % des dépenses de l’ensemble des administrations publiques. Ce devait être un choc fiscal salutaire, supérieur de 10 milliards à l’impact des plans Fillon du 24 août et du 7 novembre 2011, rendez-vous compte, mais chacun sait désormais ce qu’il en est advenu, du fait des incohérences du gouvernement Ayrault.

En mars 2012, à Strasbourg, le candidat PS a aussi sorti un Plan pour les banlieues, histoire de fustiger Sarkozy… Il se proposait plusieurs mesures pour désenclaver les quartiers pauvres, dont un « stage obligatoire » dans ces zones pour les médecins en formation, et des exonérations de charges pour les entreprises embauchant un jeune de ces quartiers. Promesses tenues?

Président, Hollande créa un « ministère du redressement productif » sur mesure pour Arnaud Montebourg. Il lui offrait ainsi l’occasion de donner toute sa (dé)mesure en agissant au lieu de critiquer, mais que fit-il ? Il critiqua, au lieu d’agir !

« Moi président » assuma une rigueur de gauche, sans jamais toutefois faire sien ce terme. C’était le dimanche 9 septembre 2012 sur TF1: il confirmait son choix, pour 2013, d’un choc budgétaire sans précédent, le plus important depuis trente ans, c’est-à-dire depuis le tournant de la rigueur en 1983. On allait voir ce qu’on allait voir!

Et puis, Hollande nous concocta aussi un Plan logement: en mars 2013, il promettait une baisse de la TVA à 5% pour le logement social, un autre choc en vingt mesures pour tenter de relancer la construction de logements en France. Demandez aux sans-abri si le socialiste a amélioré leur situation…

Il faudrait aussi citer le Pacte de responsabilité qui mise sur la mobilisation des entreprises écrasées de charges et rame donc comme un pédalo sur le sable.

Après le « Pacte de responsabilité », place donc au « Pacte de solidarité » en mars 2014. Dans son allocution officielle confirmant la nomination de Manuel Valls au poste de Premier ministre, François Hollande a esquissé un virage de sa politique, avec un nouvel ensemble de mesures censées être le pendant du « Pacte de responsabilité », avec pour objectif de « redonner de la force à notre économie » tout en préservant « la justice sociale ». Bref, c’était beau comme du Attali…

Et puis, pour ceux qui auraient oublié, il y a encore un Plan Alzheimer… Autant de plans qui auraient dû produire un début d’effets en 2015.

Mais « Moi président » est passé à autre chose. Tandis que son ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, nous promet monts et merveilles avec sa loi fourre-tout à son nom et la promesse de créations d’emploi grâce à l’extension du travail le dimanche ou le développement des lignes d’autocars, le squatteur de l’Elysée s’en prend au sociétal, comme si sa loi sur le mariage gay ne suffisait pas.

A chaque occasion médiatique, son plan de circonstance

Hollande annonce maintenant un «plan global de lutte contre le racisme»
blog -Tintin-sorcierCe n’est pas inutile après avoir déclaré jeudi 15 janvier, à l’Institut du monde arabe, que les Français de confession musulmane sont « les premières victimes du fanatisme, du fondamentalisme, de l’intolérance ». Une semaine après les attentats par des djihadistes de France qui ont fait 17 morts athées ou chrétiens, musulmans ou juifs, il fallait oser disculper les tueurs islamistes en les présentant comme des victimes d’un islamisme encore plus radical: des graduations indécentes dans la violence et l’horreur.

« Moi président » a donc décidé de se mêler d’antisémitisme: un plan à sa façon devrait lui régler son compte.
blog -Tintin au Congo-mechants Blancs ts en prisonA l’occasion de la commémoration des 70 ans de la libération – par les signataires du Pacte germano-soviétique avec Hitler – du camp d’Auschwitz (Pologne), à laquelle il compte bien paraître, « Moi président » a annoncé depuis Paris que le gouvernement sortira, dans l’urgence, un plan d’action globale contre le racisme d’ici fin février.

Trois axes de riposte. François Hollande a promis, mardi 27 janvier, que le gouvernement présentera à la fin du mois de février un plan global de lutte contre le racisme et l’antisémitisme. A l’occasion d’un discours au Mémorial de la Shoah prononcé pour le jour anniversaire de la libération du camp d’Aushwitz, le président de la République a confirmé qu’il ferait de ce sujet une cause nationale. Jugeant « insupportable » la montée des actes antisémites et constatant aussi une flambée des attaques contre les musulmans, le chef de l’Etat promet une aggravation des sanctions contre leurs auteurs.

Stages citoyens et enseignement de la Shoah
Reprenant une préconisation de Christiane Taubira formulée le 16 janvier, François Hollande entend généraliser la caractérisation raciste et antisémite comme circonstance aggravante d’un délit. Il veut aussi que la répression de la parole raciste et antisémite soit retirée du droit de la presse, afin de l’intégrer au droit pénal général.
Il souhaite aussique la sanction soit l’occasion d’une prise de conscience par leurs auteurs: cela pourrait passer par des peines alternatives pédagogiques prononcées en supplément. « Des stages citoyens seront prononcés« , indique-t-il également. Le chef de l’Etat veut également de la pédagogie auprès des jeunes générations pour que l’Histoire ne soit pas négligée. « Je vous fais cette promesse: la République française n’oubliera jamais« , a lancé François Hollande qui veut faire de l’école, le lieu de la transmission. « L’un des instruments pour désamorcer cette ignorance, c’est l’enseignement de l’histoire de la Shoah », veut croire le président de la République après des incidents ont émaillé les différents hommages aux victimes des incidents. « (Cette histoire) doit pouvoir être enseignée partout, sans aucune restriction« , ajoute-t-il.

Le complotisme, fléau alimenté par l’Internet ?
blog -theorie du complot encore bis-AdolfFrançois Hollande veut faire de la régulation du numérique un important levier de cette lutte, comme de celle contre la montée de l’islamisme.
Il a en effet pointer Internet comme l’une des causes de la propagation de la haine. « Nous devons agir au niveau européen et même international pour qu’un cadre juridique puisse être défini et que les plateformes internet qui gèrent les réseaux sociaux soient mises devant leurs responsabilités, et que des sanctions soient prononcées en cas de manquements« , a lancé François Hollande, dans le registre du « il faut » et « nous devons »

Bernard Cazeneuve a confirmé de son côté qu’il se rendra très prochainement aux Etats-Unis « pour rencontrer les grands opérateurs du net pour les inciter à lutter contre le terrorisme ».

Dans la ligne de mire du gouvernement, les thèses complotistes qui prennent racine sur la toile« L’antisémitisme a changé de visage. Il n’a pas perdu ses racines millénaires. Certains de ses ressorts n’ont pas changé depuis la nuit des temps: le complot, le soupçon, la falsification. (…) Nous devons nous souvenir que c’est d’abord par le verbe que s’est préparée l’extermination« , a alerté François Hollande qui a eu des morts forts à l’égard des « grands opérateurs ». « <em>Ils ne peuvent plus fermer les yeux, ou alors ils seront considérés comme complices</em> », insiste-t-il.

Bavure de Hollande qui hiérarchise les victimes du fanatisme

Top 5 de Hollande : les musulmans sont les « premières victimes du fanatisme »

blog -Institut du monde arabe Paris affiche soutien a Charlie-15jan2015Chassez le naturel, il revient au galop.

Hollande fait voler en éclats la belle « unité nationale » manifestée lors du show médiatique du 11 janvier dernier à Paris. Les dévots de la presse s’étaient empressés de glorifier Hollande et Valls, se félicitant qu’ils n’aient pas commis d’impair. C’est fait! Après avoir oscillé pendant une semaine entre Musulmans, puis Juifs et encore Musulmans, distribuant belles paroles et caresses à tous dans le sens du poil, M. P’tite Blague n’a pas manqué de se prendre les pieds dans la tapis.

Quelque 50 procédures pour apologie du terrorisme ont été ouvertes depuis une semaine. Sans oublier la multiplication d’actes malveillants dirigés contre les mosquées. Une situation qui a poussé François Hollande à adresser un message à la communauté musulmane, lors de son discours prononcé ce jeudi à l’Institut du monde arabe, à l’occasion de l’inauguration du forum sur « les renouveaux du monde arabe« .

Le président socialiste vibre mieux aux souffrances des Musulmans

A la tribune, le chef de l’Etat a d’abord établi un hit parade, estimant que les musulmans sont les « premières victimes du fanatisme, du fondamentalisme et de l’intolérance ». L’islamisme radical (pléonasme), qui frappe d’abord les musulmans, « s’est nourri de toutes les contradictions, de toutes les influences, de toutes les misères, de toutes les inégalités, de tous les conflits non réglés depuis trop longtemps », a estimé le chef de l’Etat, repris par une nouvelle crise d’anaphores.

« Les Français de confession musulmane ont les mêmes droits, les mêmes devoirs ». Sensible aux inquiétudes actuelles de la communauté musulmane, qui produit pourtant des djihadistes auteurs de carnages sur le territoire national, le culbuto a la tête qui tourne. A la place de ses auditeurs, Il a eu à coeur de répéter sa conviction que « l’islam est compatible avec la démocratie, que nous devons refuser les amalgames et les confusions. Et d’abord en France. Les Français de confession musulmane ont les mêmes droits, les mêmes devoirs, que tous les citoyens. Ils doivent être protégés. La laïcité y concourt car elle respecte toutes les religions« .

VOIR et ENTENDRE un Hollande, l’air inspiré:

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Les réseaux de gauche peuvent-ils décider qui est autorisé au Mémorial de Caen ?

La gauche « vertueuse » est-elle républicaine?

Les manifestants marxistes sont-ils de meilleurs Français?

Les admirateurs de Staline, responsable de la mort de plus de vingt millions de russes, de Léonid Brejnev, envahisseur de Tchécoslovaquie en août 1968 ( Printemps de Prague) et du Khmer rouge, Pol-Pot, tyran sanguinaire des années 70, sont-ils bien placés pour dicter leur loi en France? Combien de divisions aux dernières municipales?

Moins de 200 militants totalitaires, dont des élus du Parti socialiste (PS), du Parti communiste français (PCF) et des syndicalistes, ont manifesté mercredi 7 mai à la mi-journée devant le Mémorial de Caen, contre la présence de la présidente du Front national (FN), Marine Le Pen, en fin d’après-midi. 

Mémorial de Caen pour la Paix

Depuis mars 2014, le FV, c’est 12 villes gagnées, 1546 conseillers municipaux et 459 élus dans les intercommunalités. Les socialistes et communistes peuvent-ils être arrogants depuis leur déroute du 30 mars , avec la perte de villes importantes, comme Angers, ou emblématiques comme Limoges. Ce sont quarante-six villes de plus de 30.000 habitants qui ont basculé de gauche à l’UMP ou au FN. Selon l’institut de sondages BVA, plus de 100 villes de gauche ont été récupérées par la droite ce dimanche.

Les manifestants sont-ils représentatifs de la France?

Fragment du Mur de Berlin (Guerre froide)

Les défenseurs des victimes de la Shoah sont des supporters de la Palestine. « C’est une provocation. On atteint la mémoire de ceux qui sont morts pour la liberté. Cette visite va à l’encontre de ce qu’a dit Jean-Marie Le Pen sur les fameux “détails de l’Histoire”, comme il a dit en parlant des chambres à gaz.  Tous ces extrêmes, qu’ils soient de droite ou de gauche, véhiculent des idées totalitaristes que je n’admets pas », a déclaré Bernard Duval (1925), résistant déporté et ancien du kommando Falkensee à Sachsenhausen, après avoir été arrêté par la Gestapo en mars 1944, alors qu’il avait 18 ans. Lien officiel de la préfecture du Calvados depuis 2013.

Au cours de l’émission du « Grand Jury » RTL-Le Monde du 13 septembre 1987, Jean-Marie Le Pen avait déclaré qu’à ses yeux les chambres à gaz, dans lesquelles des millions de juifs ont péri, étaient « un point de détail de l’histoire de la deuxième guerre mondiale ».

Condamné en justice pour ces propos, il les a réitérés en 1997 en Allemagne, puis à nouveau en avril 2008 dans le magazine Bretons — diffusé en Bretagne et en région parisienne — et en mars 2009 au Parlement européen. Image« Elle [Marine Le Pen] a réussi son coup. On est tous piégés », a estimé un salarié du Mémorial, sous couvert d’anonymat. « On a envie de lui expliquer que la Shoah n’est pas un “détail de l’Histoire” « , a-t-il ajouté.

Faut-il rappeler que le Mémorial de Caen est un musée consacré, ni à la Shoah, ni  aux Grandes Purges staliniennes, ni aux victimes du massacre de Saïgon (1945), ni au massacre de chrétiens libanais par des Palestiniens à Damour en 1976 (etc), mais à l’histoire du XXᵉ siècle?

La gauche combat le FN avec des méthodes totalitaires d’exclusion 

blog -Memorial uniforme soviétique_WWII
Uniforme soviétique (WWII)

Pour sa visite, Mme Le Pen a été accompagnée d’un historien du Mémorial. Exceptionnellement et en raison de cette manifestation discriminatoire, le musée a été partiellement fermé au public à partir de 15 heures.

Le directeur du Mémorial, a en revanche refusé d’accompagner la présidente du FN. Bien que ce ne soit pas le sujet, Stéphane Grimaldi, nommé à l’instigation du député-maire PS de Caen, Philippe Duron, a dit regretter qu’« elle n’a[it] pas démenti 

les propos  de son père sur la Shoah », tout en estimant que le Mémorial serait « par essence un lieu profondément européen, un lieu de défense des droits de l’homme« , alors qu’il a été créé pour promouvoir la paix.

Une autre manifestation, de militants d’extrême gauche,  a rassemblé environ 60 militants, tenus à l’écart par un cordon de forces de l’ordre, devant le Mémorial mercredi vers 16 h 30, au moment où M. Le Pen est arrivée par une porte à l’arrière du bâtiment.

Un musée de la paix où tout le monde a droit de cité

Lors d’une conférence de presse à l’issue de sa visite,  Mme Le Pen a expliqué que c’ést la première fois qu’elle se rend au Mémorial. « C’est vrai que je n’avais jamais eu l’occasion de venir (…) C’était une carence qui est aujourd’hui réparée », a-t-elle admis, avant de saluer la place faite dans le musée aux victimes civiles de la guerre.

Interrogée sur les propos tenus par son père sur la Shoah, Mme Le Pen a répondu qu’elle s’est déjà « exprimée cent fois sur ce sujet, (…) c’est suffisant « .

Au cours de l’émission du « Grand Jury » RTL-Le Monde du 13 septembre 1987, Jean-Marie Le Pen avait déclaré qu’à ses yeux les chambres à gaz, dans lesquelles des millions de juifs ont péri, étaient « un point de détail de l’histoire de la deuxième guerre mondiale ».

Dans le même temps, Cambadélis se dérobe à Marine Le Pen et la contraint à débattre avec Martin Schultz…