Des magistrats dénoncent un « renforcement de l’Etat policier »

Les policiers ont face à eux des casseurs et des magistrats

Confortés par le soutien de leur ministre de tutelle Gérald Darmanin, les syndicats de policiers continuent de faire connaître leurs revendications, au premier rang desquelles : modifier la loi et assurer un statut particulier aux fonctionnaires de police. Dans un entretien avec Le Figaro, Linda Kebbab, déléguée nationale du syndicat Unité SGP Police FO presse pour « légiférer rapidement ». « Nous voulons des magistrats spécialisés sur l’usage des armes par les forces de l’ordre, qui tiennent compte du fait qu’un policier qui utilise son arme n’imaginait pas l’utiliser cinq secondes avant », explique-t-elle, soulignant la pression qu’impose la délicate réactivité au danger auquel ils sont confrontés face à des délinquants sans foi ni loi, encouragés à la révolte, sous tous les prétextes, par l’extrême gauche politique et la plupart des media soumis à la peur.

La policière justifie sa demande sur RTL, mettant en cause un manque de discernement de magistrats sous emprise de l’idéologie diffusée en Ecole nationale de la magistrature (ENM). « On estime qu’ils n’ont pas toujours conscience des conditions dégradées de stress dans lesquelles les policiers font usage de leur arme et du coup qu’ils ne savent pas toujours bien apprécier les dossiers », affirme Linda Kebbab. Même si elle ne précise pas la forme que prendraient ces « magistrats spécialisés », cela laisse entendre que le syndicat Unité SGP Police FO plaide pour l’instauration d’une juridiction spécialisée. « On en a peu en France, indique Anne-Charlène Bezzina, maître de conférences en droit public et constitutionnaliste à Sciences Po Paris. Il existe des juges spécialisés avec le parquet national antiterroriste (PNA) ou le parquet national financier (PNF), par exemple. Mais en général, cela passe par un domaine de compétence ».

Remise en cause de l’article 6 de la DDHC

La constitutionnaliste juge la demande des syndicats de police singulière : « On accorderait un statut particulier aux policiers, eu égard à la qualité de ses fonctionnaires de police, mais pour des délits de droit commun et non pas par rapport à des délits spécifiques ». Du point de vue constitutionnel, Anne-Charlène Bezzina estime que cela pose « la question de l’égalité devant la loi », garantie par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui figure dans la constitution de la Ve République.

Sur le fond, elle estime que « l’état actuel de notre droit est suffisant ». « Quand on parle de l’usage de l’arme et de la question du positionnement de l’agent au moment de s’en servir, cela relève des circonstances du délit et tous les juges sont déjà obligés de se prononcer en fonction des circonstances », expose Anne-Charlène Bezzina. Le font-ils dans les faits ou cèdent-ils à la pression médiatique et politique traversée par l’émotion ?

De plus, elle précise que pour individualiser les peines, les juges consultent des organismes comme l’IGPN qui « connaissent bien l’exercice de la profession de policier ».

Nécessaire actualisation du droit protégeant les policiers

Lorsqu’elle a pris connaissance de la proposition des syndicats de policiers sur les magistrats, Cécile Mamelin, vice-président de l’Union syndicale des magistrats (USM) qui se revendique apolitique, mais marquée à gauche, n’en est pas revenue : « J’ai l’impression de vivre dans un cauchemar démocratique ». Elle dénonce le « procès en illégitimité » qui est fait aux magistrats : « Nous ne sommes pas dans des sphères dorées, on a fait des stages (!!) à l’école de la magistrature et on échange (!!) régulièrement avec des policiers ». Et on suit les séries policières !

La vice-présidente du premier syndicat de la profession estime aussi que « les forces de l’ordre sont particulièrement protégées. » Ainsi, « les textes de lois sur les violences commises sur des policiers prévoient déjà des peines aggravées. Ils ont une protection par le droit de par leur qualité de policier », développe Cécile Mamelin. La question est de savoir si cette protection reste théorique. Le sujet est précisément « les peines aggravées » contre ceux dont le métier violent est de protéger la population des violences de la racaille et des voyous.

Dans le cadre de leur mission – à la différence des juges qui n’ont de comptes à rendre à personne en cas de faute – les policiers ont aussi des circonstances aggravantes ou atténuantes s’ils sont jugés. « Les sanctions sont parfois plus dures, car il y a la prise en compte des moyens utilisés dans le cadre de ses fonctions. Mais ça peut aussi aller dans l’autre sens et alléger la sanction », rappelle Anne-Charlène Bezzina. Peut-on attendre de policiers insultés ou frappés qu’ils répondent avec des fleurs et frap. « Ils veulent une protection, mais viennent contester les peines aggravées dans l’autre sens », s’agace la syndicaliste Cécile Mamelin.

Si les gendarmes dépendent d’une juridiction spéciale, c’est parce qu’ils sont militaires contrairement aux policiers. « Ils n’ont pas la même hiérarchie et ne sont pas appelés sur les mêmes opérations », détaille Anne-Charlène Bezzina, professeure de droit public. « On pourrait créer une juridiction spécialisée pour la police, mais il faut se demander pourquoi », insiste-t-elle, rappelant que dans le cas des policiers de la brigade anticriminalité (BAC) de Marseille, l’agent placé en détention est mis en examen pour « violence en réunion », un délit de droit commun. « En réunion », mais seul placé en détention: cohérent ?

Policier incarcéré : les syndicats de magistrats s’élèvent contre l’opinion du patron de la police

Les magistrats défendent leur consoeur de Marseille qui donne des gages à la Cimade

Frédéric Veaux, directeur général de la police nationale (DGPN),

Dénoncée par des bénévoles de la Cimade pour justice à deux vitesses, la JLD sacrifie un policier.

Le directeur général de la police nationale a souhaité que soit libéré un policier de la BAC de Marseille incarcéré dans le cadre d’une enquête sur des brutalités policières, au cours des violentes émeutes du début juillet, marquées par des pillages de magasins et des incendies de symboles de la République.

Les deux principaux syndicats de magistrats ont jugé « gravissimes », lundi 24 juillet, la demande du patron de la police nationale selon qui « avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison ». Dans un entretien avec Le Parisien, Frédéric Veaux a exprimé son souhait que soit libéré le policier de la BAC de Marseille incarcéré dans le cadre de l’enquête.

« Le directeur général de la police nationale, sous la tutelle du ministre de l’Intérieur, fait pression sur l’autorité judiciaire dans une affaire individuelle. (…) Le président de la République doit réagir », a par exemple écrit, sur Twitter, le Syndicat de la magistrature.

« Il y a un principe fondamental dans une démocratie : la loi est la même pour tous. Les policiers qui commettent des infractions dans l’exercice de leurs fonctions sont passibles de sanctions pénales », comme les autres justiciables, a également souligné Kim Reuflet, la présidente du Syndicat de la magistrature, classé à l’extrême gauche.

Le souhait du patron de la police nationale serait « scandaleux » et « gravissimes dans un état de droit », a également estimé Cécile Mamelin, vice-présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM). « C’est stérile et dangereux. On attend une réaction au plus haut niveau de l’Etat pour remettre les pendules à l’heure », a-t-elle déclaré.

Typiquement, l’USM cite
le journal Le Monde

« Une détention provisoire répond à des critères précis, légaux », a rappelé Cécile Mamelin. Comme la mise en examen, « c’est une décision de justice qui ne préjuge en rien de la culpabilité et qui peut faire l’objet de voies de recours », a-t-elle ajouté, comme si un emprisonnement préventif était un acte médiatique anodin. Notamment s’agissant d’un fonctionnaire non suspect de fuite à l’étranger… 

Pour sa part, le président du tribunal judiciaire de Marseille, Olivier Leurent, a rappelé dans un communiqué lundi que « l’indépendance de la justice est un principe constitutionnel ». Principe qui s’applique aux jug. Or, la JLD est clairement sous la pression de la Cimade.

Le président du tribunal judiciaire est aussi revenu sur la procédure, qui a suivi un déroulement classique – sans considération du fait qu’un fonctionnaire de police iffre des garanties – et il attend l’examen d’un appel en cours. « Il est de la responsabilité de chacun de garantir la sérénité du cours de la justice », a exhorté Olivier Leurent.

Le respect de la procédure n’est pas en cause, et Olivier Leurent le sait pertinemment, mais la base sur laquelle se fonde le magistrat, à savoir que le placement de détention provisoire ne peut être ordonné que dans les cas suivants :

  • en matière criminelle, pour des faits qualifiés de crimes, quelle que soit la peine prévue : le policier est-il accusé de crime ou de « violences » ?
  • en matière correctionnelle, quand l’infraction constitue un délit avec une peine applicable égale ou supérieure à 3 ans d’emprisonnement: une peine a-t-elle été prononcée ?
  • quelle que soit la peine prévue, quand la personne poursuivie ne respecte pas les obligations mises à sa charge par une mesure de contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance par bracelet électronique. Par exemple : la personne se rend dans certains lieux interdits par son contrôle judiciaire ou s’éloigne de son domicile alors que cela lui est interdit.

Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, membre de la NUPES, a demandé une réunion du parlement « en urgence ».

Les policiers du syndicat Unité SGP Police FO sont, quant à eux, « à l’arrêt ». Il dénonce « un traitement dégradant et dangereux » et appelle tous les commissariats de France au service minimum. 

Macron à Vendôme : un juge suspend l’arrêté concernant son périmètre de sécurité

Un juge libre et indépendant, mais aussi manifestement partisan

Macron a été accueilli par un concert de casseroles à son arrivée à la maison de santé pluridisciplinaire universitaire de Vendôme (Loir-et-Cher) ce mardi après-midi. Alors que des centaines de manifestants ont été tenus à l’écart de la visite présidentielle, en raison d’un arrêté de la préfecture du Loir-et-Cher interdisant les cortèges et rassemblements revendicatifs aux abords de la maison de santé, ainsi que « l’interdiction des dispositifs sonores amplificateurs de son« , celui-ci a été suspendu par la justice, après que plusieurs associations politiques ont saisi le tribunal administratif d’Orléans.

L’arrêté du préfet du Loir-et-Cher, instaurant à Vendôme (UDI) un « périmètre de protection » sur mesures pour le président Macron en visite ce mardi, a été suspendu par le tribunal administratif d’Orléans, après un référé-liberté déposé par plusieurs associations.

Le tribunal administratif d’Orléans indique dans sa décision qu’« en l’absence de circonstances particulières, un déplacement du Président de la République ne saurait être regardé comme justifiant à lui seul, par sa nature, l’instauration d’un périmètre de sécurité ». Avant d’ajouter que « le préfet de Loir-et-Cher, par l’arrêté en litige, a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir ».

Le juge Guével est-il l’auteur d’un règlement de compte syndical?

Depuis mars dernier le président du TA est Benoist Guével (président du corps des magistrats des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel), par arrêté du vice-président du Conseil d’Etat en date du 23 février 2023. Il est ancien élève de l’ENA (promotion Copernic, 2000-2002), Benoist Guével a rejoint le corps des conseillers d’Etat et adhérent à l’USMA (Union syndicale des magistrats administratifs): l’USM est majoritaire (68,4 %  contre 25,2 % au Syndicat de la magistrature:  1 magistrat sur 4 est un « juge rouge ») . Or, l’USMA appelle à la grève suite à l’annonce par Macron, le 8 avril, de la réforme de la haute fonction publique. Les syndicats des magistrats administratifs dénoncent l’instauration d’une obligation de mobilité dans les administrations et le gouvernement exclut de faire une exception pour eux.

Le référé-liberté avait été déposé ce mardi par l’Association de défense des libertés constitutionnelles (militant singulièrement contre les « arrestations préventives »), la Ligue des droits de l’homme (plus internationnaliste que pro-France) et le Syndicat des avocats de France, classés à gauche, souvent radicale (notamment aux côtés des lanceurs d’alerte). L’arrêté du préfet du Loir-et-Cher, publié le lundi 24 avril dans la soirée réglementait l’accès et la circulation des personnes dans un large périmètre autour de la maison de santé pluridisciplinaire où le président de la République s’est rendu à la mi-journée. Il prévoyait un filtrage systématique et « des contrôles d’identité, des palpages [palpations ou fouilles sommaires], une fouille des bagages », « aux fins de prévention d’un acte terroriste ». Preuve qu’une loi précise devient inapplicable.

La loi anti-terroriste détournée, selon les associations

Un concert de casseroles à Nîmes (photo d'illustration)
Un concert de casseroles à Nîmes (photo d’illustration) 

Et c’est bien sur ce point du cas spécifique du terrorisme que les associations contestaient l’arrêté, qui par ailleurs interdit « les cortèges, défilés et rassemblements revendicatifs », ainsi que « les dispositifs sonores amplificateurs de bruit ». On pense bien sûr aux casseroles que les manifestants mobilisés contre la réforme des retraites font retentir à chaque visite présidentielle depuis la validation de la loi par le conseil constitutionnel.

Selon les associations de gauche extrême qui ont déposé ce référé-liberté devant le tribunal administratif d’Orléans, l’arrêté du préfet du Loir-et-Cher « est un détournement de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » adoptée le 30 octobre 2017. Selon eux, cette loi ne peut pas être utilisée pour des motifs d’ordre public. Elle vise pourtant officiellement, à la fois, à renforcer la sécurité intérieure et à lutter contre le terrorisme. C’était tout l’enjeu de l’audience ce mardi 25 avril. En suspendant l’arrêté du préfet du Loir-et-Cher, le juge orléanais des référés indiquent aux autres qu’utiliser l’argument de la menace terroriste pour tenir à distance les manifestants n’est pas justifié.

Les commentaires facebook n’étaient pas une menace terroriste

Dans sa décision, le tribunal administratif d’Orléans reprend les arguments de la préfecture du Loir-et-Cher qui s’appuyait sur des commentaires Facebook sous un article du journal local « La Nouvelle République » annonçant la visite présidentielle à Vendôme. « Armurier de Vendôme dévalisé aussi, » disait l’un d’eux, trahisant un état d’esprit. « Aucun élément ne permet de penser que que ce commentaire relève d’autre chose qu’un sens douteux de l’humour, » dit le juge orléanais, « en tout cas qu’il serait lié à un quelconque projet terroriste ».

Lors de l’audience, la préfecture du Loir-et-Cher avait aussi, pour la première fois, reconnu que l’arrêté visait aussi l’interdiction des casseroles utilisées par les manifestants, considérées comme des armes par destination dans le cadre d’une menace terroriste. « On est dans le plus total délire, dans le ridicule profond » commente Maître Jean-Baptiste Soufron, avocat de de l’association pour la défense des libertés constitutionnelles.

Une première pour les associations

Cette décision du tribunal administratif d’Orléans est une première et une victoire pour les associations de défense des libertés. Le jeudi 20 avril dernier, elles avaient également saisi la justice pour un arrêté similaire pris par le préfet de l’Hérault« Mais le tribunal nous a dit qu’il n’avait pas le temps de juger, vus les délais » raconte Maître Jean-Baptiste Soufron. « Donc cette fois on a déposé notre recours dès que l’arrêté est sorti, tard hier soir, pour qu’il soit effectivement examiné ».

Le président de la République poursuit sa tournée ce 25 avril en se rendant à Vendôme, dans le Loir-et-Cher. Emmanuel Macron est arrivé vers 14h à la maison de santé pluridisciplinaire universitaire (MSPU) de la ville, dans un quartier bouclé par un important dispositif de sécurité pour tenir les manifestants à distance.

Une nouvelle « casserolade » pour Emmanuel Macron

Plusieurs centaines de manifestantEs contestant la réforme des retraites se sont réunis en milieu de matinée le long de la voie ferrée proche du lieu de la visite. Équipés de casseroles, de trompettes ou encore de boîtes de conserves, ils se sont livrés à une nouvelle « casserolade », dans une ambiance bon enfant.Déjà chahuté dans le Bas-Rhin et l’Hérault, où la CGT avait coupé le courant de l’école où le chef de l’État devait se rendre, Emmanuel Macron s’est déplacé cette fois avec un camion pourvu d’un groupe électrogène.De son côté, la préfecture du Loir-et-Cher a publié un arrêté mettant en place un périmètre de protection et prévoyant notamment l’interdiction des cortèges et rassemblements revendicatifs aux abords de la maison de santé, ainsi que « l’interdiction des dispositifs sonores amplificateurs de son« .

Un arrêté contesté

Cet arrêté a été à son tour contesté par plusieurs associations, dont la Ligue des droits de l’homme (LDH), qui ont saisi le tribunal administratif d’Orléans. Ce référé-liberté a été examiné en début d’après-midi, peu avant l’arrivée d’Emmanuel Macron, mais le résultat n’est pas encore connu. Selon le Syndicat des avocats de France (SAF) et l’Association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico), l’arrêté préfectoral est « un détournement de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme« . Sur le fond, la visite a pour but de permettre au président de la République d’échanger avec le personnel soignant sur « les problématiques d’accès aux soins, d’attractivité de la profession et de formation« , selon l’Élysée.Le Centre-Val de Loire est en effet le plus grand désert médical de France, avec de fortes perturbations notamment dans les services d’urgence

Un référé en justice contre le périmètre de sécurité

Plusieurs associations ont déposé un référé-liberté au tribunal administratif d’Orléans contre l’arrêté du préfet du Loir-et-Cher instaurant un périmètre de sécurité à Vendôme dans le cadre de la visite d’Emmanuel Macron ce mardi 25 avril. Elles l’accusent de détourner la loi anti-terroriste.

 Ce mardi 25 avril, une audience est programmée devant le tribunal administratif d’Orléans pour examiner l’arrêté pris la veille par le préfect du Loir-et-Cher, instaurant « un périmètre de protection » autour des lieux dans lesquels doit se rendre Emmanuel Macron à VendômeUn référé-liberté déposé par l’association de défenses des libertés constitutionnelles, la ligue des droits de l’homme et le syndicat des avocats de France.Cet arrêté du préfet du Loir-et-Cher, publié le lundi 24 avril dans la soirée réglemente l’accès et la circulation des personnes dans un large périmètre autour de la Maison de santé pluridisciplinaire où doit se rendre le président de la République. Il prévoit un filtrage systématique et « des contrôles d’identité, des palpages, une fouille des bagages », « aux fins de prévention d’un acte terroriste »

La loi anti-terroriste détournée, selon les associations

Et c’est bien sur ce point que les associations contestent l’arrêté, qui par ailleurs interdit « les cortèges, défilés et rassemblements revendicatifs », ainsi que « les dispositifs sonores amplificateurs de bruit ». On pense bien sûr aux casseroles que les manifestants mobilisés contre la réforme des retraites font retentir à chaque visite présidentielle depuis la validation de la loi par le conseil constitutionnel.Selon les associations qui ont déposé ce référé-liberté devant le tribunal administratif d’Orléans, l’arrêté du préfet du Loir-et-Cher « est un détournement de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » adoptée en octobre 2017. Selon eux cette loi ne peut pas être utilisée pour des motifs d’ordre public. Ce sera tout l’enjeu de l’audience ce mardi 25 avril.Le jeudi 20 avril dernier, elles avaient également saisi la justice pour un arrêté similaire pris par le préfet de l’Hérault« Mais le tribunal nous a dit qu’il n’avait pas le temps de juger, vus les délais » raconte Maître Jean-Baptiste Soufron, avocat de l’association pour la défense des libertés constitutionnelles. « Donc cette fois on a déposé notre recours dès que l’arrêté est sorti, tard hier soir, pour qu’il soit effectivement examiné ». L’audience, malgré tout, se tient au moment même où le Président de la République débute sa visite à Vendôme.

Pourquoi les Français n’écoutent pas Macron et font de la « musique de rue »? Ils en sont à préférer les révélations de maître Gims, le rappeur, ce qui inspire à Philippe Caverivièrd ces réflexions profondes:

Grève des magistrats : manque de temps, surcharge de travail, esprit de vengeance…

En attendant la grève des justiciables qui les condamnent ?

Dupond-Moretti,
l’avocat fait ministre:
le doigt pointé vers le ciel,
geste qu’on retrouve sur toutes les vidéos et photos de djihadistes circulant sur les réseaux sociaux. Il est même devenu le symbole de l’organisation terroriste Etat islamique…

Les justiciables craquent, mais la justice aussi, pour des raisons divergentes.

Le ministre de Macron est très critique de la justice et de la « République des juges »

« En France, il ne faut pas avoir affaire avec la justice », déclarait Eric Dupond-Moretti en 2015 sur France 2. « La justice, avant d’être une vertu, est une administration », expliquait-il. « Elle en a les qualités et les défauts. On peut avoir un mauvais avocat, mais on peut le changer. Mais d’avoir un mauvais juge [comme avoir un mauvais ministre], vous le gardez », poursuivait l’avocat qui a construit sa réputation sur des vices de forme. Eric Dupond-Moretti s’est aussi dit favorable à la suppression de l’école nationale de la magistrature [mais l’ENM continue de formater]. L’Union syndicale des magistrats (USM), principal syndicat de la profession et a peine moins à gauche que le Syndicat de la magistrature (SM, connu pour ses « juges rouges »), a jugé les propos de Dupond-Moretti à son arrivée à la Justice comme « une déclaration de guerre à la magistrature« .

Les juges, non élus,
s’arrogent-ils
des pouvoirs illégitimes ?

Il y a un an, dans une tribune corporatiste publiée dans le journal Le Monde, près de 3.000 magistrats dénonçaient leurs conditions de travail, selon eux intenables, la souffrance quotidienne au travail et un métier qui n’a plus de sens aujourd’hui, malgré les investissements du gouvernement. Alors, 12 mois après, les magistrats décident de passer à l’action et feront grève ce mardi en dépit des promesses

Caesar Augustus

Depuis un an, le gouvernement a augmenté de 8% le budget de la justice. Pour autant, la situation ne satisfait toujours pas les juges: ils se mobilisent à nouveau.

La promesse de créer 1.500 postes de magistrats d’ici à 2027 et le recrutement d’assistants de justice sont insuffisants, selon les juges. Par comparaison avec d’autres pays européens, les moyens alloués par la France à la justice restent faibles : 70 euros par habitant contre 120 euros pour les Pays-Bas ou 130 euros pour l’Allemagne.

Parmi les grévistes, les jeunes magistrats qui se disent touchés par le sentiment d’abandon. Les nouveaux venus assurent ne pas avoir été préparés à la réalité du terrain, malgré 31 mois de formation exigeante en Ecole nationale de la magistrature et en stage. Les élèves magistrats sortent plein d’espoir, malgré la mauvaise réputation de la profession, mais sont gagnés par la désillusion une fois en poste. Ces nouveaux juges se heurtent alors à la réalité du terrain : manque de moyens et de temps pour traiter les dossiers, surcharge de travail… Alors il y a un an, ils ont été nombreux à signer la tribune.

« L’école a honte »

« Quand on est arrivé en stage, on n’imaginait pas l’ampleur des dégâts. Et à l’école, on nous y prépare pas », estime la substitut du procureur à Lille, Manon Lefebvre. « Je pense que l’école a honte, comme nous on avait honte quand on a commencé nos fonctions, de reconnaître qu’on rendait une mauvaise justice, la honte de ne pas exercer notre métier à sa hauteur », confie-t-elle au micro d’Europe 1.

Les magistrats ont toujours manqué de temps, à en croire
« Les gens de justice, »
de Honoré Daumier

Malgré quelques démissions, les jeunes magistrats s’accrochent. Ils comptent bien sur les promesses du garde des Sceaux de créer 1.500 postes d’ici 2027, pour ne plus finir leurs audiences à 23 heures, ou de travailler le soir et pendant leurs congés. 

Justice : la promotion de la conseillère justice de Macron passe mal

La décision du Conseil Supérieur de la Magistrature de bombarder Hélène Davo première présidente de la cour d’Appel de Bastia n’est pas la preuve de son indépendance

L’accession des femmes au pouvoir est-il une avancée, une garantie de changement dans les moeurs politiques ? Choisie le 22 juillet 2019, sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature, pour succéder à Bertrand Louvel en tant que première présidente de la Cour de cassation, Chantal Arens, 68 ans, est de facto présidente de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) réuni en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis formulées par le président de la République, au titre de l’indépendance de l’autorité judiciaire… François Molins est d’ailleurs son suppléant.

Trois jours après la publication d’une « transparence » (projet de nomination) portant sur onze postes de chefs de cour (d’appel), la promotion annoncée de la conseillère justice du président Macron aux fonctions de première présidente de la cour d’appel de Bastia (Haute-Corse) interpelle: Macron a-t-il des femmes une idée si piètre de leur indépendance qu’il en fait des préfètes à tour de bras et des relais soumis de son pouvoir ?

Chantal Arens a validé la candidature d’Hélène Davo.

Ce mercredi 1er juin, le Conseil supérieur de la Magistrature (CSM) a validé les candidatures de plusieurs « chefs de cour ». Parmi elles, celle d’Hélène Davo, actuelle conseillère justice à la présidence de la République auprès de Macron, qui devrait dans les prochaines semaines être officiellement nommée première présidente de la cour d’appel de Bastia, en Corse.

En juillet 2023, Chantal Arens pourra céder la place à Hélène Davo à la tête du CSM, pour quatre ans.

La conseillère « justice » de Macron a été entendue dans l’enquête visant Dupond-Moretti

Hélène Davo, la conseillère justice du chef de l’Etat, a été entendue en octobre dernier par la Cour de justice de la République (CJR) dans le cadre de l’enquête visant le garde des Sceaux de Macron. La CJR qui enquête sur une éventuelle prise illégale d’intérêts du ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, cherchait à savoir qui était au courant de l’ouverture d’une enquête à l’encontre de certains magistrats du Parquet National Financier (PNF).

Les magistrats de la CJR, seule juridiction à pouvoir juger des ministres en fonction, ont entendu très longuement Hélène Davo, la conseillère « Justice » du président de la République. La CJR espérait apprendre de la dame si Dupond-Moretti et Macron ont discuté de l’opportunité de lancer une enquête contre les magistrats du PNF !

Une affaire à tiroirs

Cette enquête n’est qu’une partie de cette affaire à tiroirs qui implique le garde des Sceaux. Il faut revenir en juin 2014 pour évoquer son commencement. A cette époque-là, le PNF enquête sur une éventuelle taupe ayant informé Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog qu’ils ont été mis sur écoute dans le cadre de ce qui devait devenir une autre affaire judiciaire, celle dite « des écoutes ».

Les magistrats avaient épluché les fadettes, les relevés téléphoniques – notamment privés et non pas seulement professionnels – de plusieurs avocats parisiens – protégés, en démocratie, par le secret professionnel – susceptibles d’être à l’origine des fuites, dont Eric Dupond-Moretti, qui portait toujours la robe. Ce dernier avait d’ailleurs déposé une plainte, qu’il a retirée depuis. Quand l’information est révélée, l’avocate de Nicolas Sarkozy, Me Jacqueline Laffont, réclame à la ministre de la Justice de l’époque, Nicole Belloubet, de diligenter auprès de l’Inspection générale de la justice (IGJ) une enquête sur ces magistrats. Ce qui est chose faite en juillet 2020.

Lors du changement de gouvernement Nicole Belloubet cède son bureau ministériel à Eric Dupond-Moretti qui va être destinataire, le 15 septembre 2020, du rapport de l’IGJ. Ce rapport estime que « les nécessités d’enquête ayant justifié ces investigations sont précisées par des PV clairs et factuels ». L’inspection note également que « la rédaction des PV de réception et d’exploitation des données collectées atteste du souci des enquêteurs de ne pas exposer excessivement la vie privée ou le secret professionnel des titulaires des lignes exploitées ».

L’Elysée et Matignon questionnés

Le suspicieux Dupond-Moretti n’en reste toutefois pas là. Le 18 septembre 2020, le ministre ordonne une enquête administrative à l’encontre de trois magistrats du PNF, Patrice Amar, Lovisa-Ulrika Delaunay-Weiss et Eliane Houlette. Sur la base du rapport de l’IGJ, le ministère estime désormais que « les faits relevés seraient susceptibles d’être regardés comme des manquements au devoir de diligence, de rigueur professionnelle et de loyauté. »

Cette nouvelle procédure a mis le feu au poudre, attisant la colère des syndicats de magistrats, déjà vent debout contre leur ministre. Des plaintes ont été déposées, une par l’association Anticor, trois par les syndicats l’USM, le Syndicat de la magistrature et Unité magistrats SNM-FO. Tous estiment que dans cette affaire le garde des Sceaux est juge et partie. Eric Dupond-Moretti, mis en examen en juillet dernier, s’est toujours défendu d’un éventuel conflit d’intérêts.

« Pour qu’il y ait conflit d’intérêts, il faut être juge et partie. Partie, je l’ai été et je ne le suis plus. (…) Juge, je ne l’ai pas été davantage et je ne le serai pas », a-t-il expliqué dans une vidéo postée sur Facebook au moment de cette mise en examen. Il a toujours expliqué avoir suivi les recommandations de ses services concernant l’ouverture de cette enquête administrative.

Dans le cadre de l’enquête menée par la CJR, une vingtaine de gendarmes a perquisitionné les bureaux du ministre le 1er juiller dernier. Un mois plus tôt, le 7 juin, c’est le Premier ministre qui avait été entendu par les juges dans le cadre de cette procédure. C’est d’ailleurs Jean Castex, en vertu d’un décret qui est désormais destinataire des dossiers du ministère de la Justice en lien avec les anciennes activités d’Eric Dupond-Moretti, dont le rapport attendu de l’enquête administrative contre les trois magistrats du PNF.

D’autres auditions récentes ont eu lieu visant également Matignon. Le conseiller « Justice » de Jean Castex, Stéphane Hardouin, 50 ans, a ainsi également été entendu par cette même CJR. Or, il a été nommé à la tête du Parquet de Créteil – un tribunal en ébullition qui a co-signé la publication d’une tribune par 3.000 magistrats français en colère – et le nouveau procureur – dont la candidature a été proposée par le garde des Sceaux, Dupond-Moretti – a pris ses fonctions le 31 janvier, avec pour mission d’apaiser les personnels. Hardouin a déjà occupé des fonctions de magistrat à Laval (Mayenne), Pontoise (Val-d’Oise), puis au… pôle financier de Paris, avant d’être chargé de la mise en place du logiciel informatique Cassiopée (Chaine Applicative Supportant le Système d’Information Oriente Procédure pénale Et Enfants), qui rassemble les informations relatives aux plaintes enregistrées par les adjoints administratifs et les greffiers dans le cadre de procédures judiciaires et qui devait améliorer le délai de traitement des procédures, ce qui, depuis 2008, reste une foirade: « l’usage quotidien de Cassiopée, bardé de bugs, est une plaie » qui pèse particulièrement sur la charge de travail des greffiers. Il a aussi travaillé au tribunal de Compiègne (Oise) et effectué des missions d’expertise et de coopération en Algérie, en Côte d’Ivoire et au Liban.

Les juges de la juridiction cherchent donc à comprendre dans quel cadre cette procédure a été lancée et qui était au courant.

Nomination du juge Serge Tournaire au tribunal de Paris, bloquée par Dupond-Moretti

Une « intervention politique » mettant à mal l’indépendance de la Justice

Dupond-Moretti, ministre et ex-avocat

Le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti est intervenu au dernier moment pour bloquer la nomination du juge d’instruction Serge Tournaire sur un poste au tribunal de Paris, affirme jeudi Le Monde, qui attribue cette intervention à des « considérations politiques ou personnelles ».

Selon le quotidien socialiste, l’actuel juge d’instruction à Nanterre faisait partie des candidats pour remplacer Marc Sommerer comme premier vice-président chargé de l’instruction au tribunal de Paris, et le directeur des services judiciaires de la Chancellerie « avait (…) décidé de proposer Serge Tournaire » à ce poste.

Un juge barré dans sa promotion quelques heures avant publication

Dans la liste de nominations de près d’un millier de magistrats (appelée « transparence ») publiée le 18 février, ce poste ne figurait toutefois pas et, selon Le Monde, « quelques heures avant la publication de la transparence, le nom de Serge Tournaire a été biffé ».

Le nom du juge aurait été rayé parce que « nommer Serge Tournaire aurait pu fâcher Nicolas Sarkozy », alors que cet ancien prédident UMP/LR « semble hésiter entre un soutien à Valérie Pécresse ou à Emmanuel Macron » à la présidentielle, selon un magistrat anonymé – réel ou fantasmé – qui a travaillé avec Eric Dupond-Moretti au ministère.

En poste au pôle financier à Paris entre 2009 et 2019, Serge Tournaire avait notamment instruit l’affaire Bygmalion, qui a valu à l’ancien président de la République une condamnation à un an de prison ferme, dont il a fait appel.

Macron assume son totalitarisme contre l’ indépendance de la Justice

« Deux autres magistrats du siège (…) auraient été également retirés de la liste à la demande de M. Dupond-Moretti », précise Le Monde, alors que « plusieurs présidents de cour d’Appel (…) avaient obtenu 48 heures avant (…) la confirmation, par la direction des services judiciaires, de nominations qui se sont volatilisées ensuite ».

Sollicité, l’entourage du garde des Sceaux a indiqué qu’il ne faisait « pas de commentaires sur les situations individuelles des magistrats » et a invité à ne « pas faire de procès d’intention sur la transparence à venir », un nouveau train d’une quarantaine de nominations étant prévu d’ici quelques semaines.

Serge Tournaire et le CSM ont indiqué ne pas souhaiter faire de commentaire.

L’USM dénonce une « intervention politique »

Pour les postes de magistrat du « siège », statutairement indépendants, le garde des Sceaux dispose d’un pouvoir de proposition. Le candidat choisi fait ensuite l’objet d’un avis « conforme » ou « non conforme » du Conseil supérieur de la magistrature (CSM).

Seuls les postes les plus en vue (chefs de juridiction, chefs de cour et magistrats de la cour de cassation) font exception: dans ce cas, le CSM choisit un candidat, « proposé » au président de la République.

Pour l’Union syndicale des magistrats (USM), « cette intervention politique sur des nominations de juges démontre que le pouvoir de proposition pour les mutations de magistrats devrait être transféré au CSM et non laissé entre les mains du gouvernement ».

« L’indépendance de l’autorité judiciaire et de ses acteurs ne devrait-elle pas commencer au stade des nominations ? », ajoute sur Twitter le syndicat majoritaire dans la profession.

Macron lance les Etats généraux de la Justice pour une réforme… post-2022

Le président-candidat fait trîmer ses collaborateurs pour occuper l’actualité

A Poitiers, Dupond-Moretti essaie de recoller les morceaux avec la basoche, mais tend les relations avec le Sénat

Le président sortant a ouvert lundi des Etats généraux de la justice, qu’il n’est pas assuré de voir aboutir. Une initiative tardive d’ailleurs assez décriée parmi les syndicats de magistrats. Pour chasser cette fois sur le terrain des souverainnistes, il en a également profité pour s’attaquer au droit européen, une « vieille maladie française« . Ce président ne semble pas avoir d’autre souci, sur ces sujets comme les autres, que de pouvoir considérer que ses réformes en cours d’élaboration sont comme réalisées…

C’est un sursaut du réformiste sociétal dans le domaine régalien, après cinq ans et en pleine polémique sur la lenteur et le « laxisme » de la machine judiciaire. 

Macron est arrivé lundi en périphérie de Poitiers pour lancer des « Etats généraux de la justice » devant un parterre de professionnels. Comme pour la santé ou la sécurité précédemment, cette vaste consultation va réunir pendant plusieurs mois tout l’écosystème de la justice (juges, procureurs, greffiers, auxiliaires, avocats, mandataires huissiers, surveillants pénitentiaires…), ainsi que des citoyens volontaires, selon l’Elysée, mais soigneusement sélectionnés pour encadrer, voire infléchir, les travaux.

Pilotés par un comité « indépendant » présidé par le haut fonctionnaire Jean-Marc Sauvé – qui vient par ailleurs de donner entière satisfaction a Macron en lui remettant un rapport sur les abus sexuels dans l’Eglise (plutôt que dans les familles ou l’école) -, leurs groupes de travail devront élaborer des propositions pour une « remise à plat totale » du système judiciaire pour 2022 et au-delà, une contrainte sur le prochain quinquennat. Ils ont « carte blanche », a assuré la présidence, en insistant sur le caractère indépendant du processus.

Macron ne se bouge encore que sous la pression

Ces Etats généraux de la Justice avaient été réclamés il y a quatre mois (début juin) par les deux plus hauts magistrats de France, Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassation, et François Molins, le procureur général près la Cour de cassation, inquiets des « mises en cause systématiques de la justice ». Un malaise exacerbé le 19 mai par la manifestation de dizaines de milliers de policiers devant l’Assemblée, qui avaient scandé : « Le problème de la police, c’est la justice. »

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, était venu soutenir ce jour-là les policiers, ainsi que de nombreux élus LR et RN et même des figures de gauche, dont Anne Hidalgo et Yannick Jadot. Les relations entre le pouvoir et les magistrats se sont encore tendues depuis la mise en examen le 16 juillet du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. Il est soupçonné d’avoir profité de sa fonction pour régler des comptes avec des magistrats avec qui il était en conflit lorsqu’il était avocat, ce qu’il réfute. Le chef de l’Etat avait alors volecau secours de son ministre. « La justice est une autorité, pas un pouvoir. Je ne laisserai pas la justice devenir un pouvoir », avait-il dit en Conseil des ministres, selon des propos rapportés par la presse.

« Du pur affichage », selon le Syndicat de la magistrature

Les syndicats de magistrats sont circonspects, voire méfiants: ces Etats généraux, arrivent en effet après plusieurs lois sur le système judiciaire qui n’ont pas apaisé les tensions. « C’est du pur affichage. On en attend beaucoup de mousse, beaucoup de communication politique, ce qui est pour nous fatigant, voire assez méprisant« , a réagi lundi Sarah Massoud, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature (SM, classé à l’extrême gauche) sur RMC.

Cécile Mamelin, la vice-présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), estime que « le timing n’est pas bon » et que cette consultation « arrive trop en fin de quinquennat pour être prise au sérieux ». « Nous avons été tenus au courant de rien et on ne se fait pas trop d’illusions sur le résultat final », a-t-elle dit. Au procès en lenteur et en laxisme intenté à leur institution, Chantal Arens et François Molins ont répondu en dénonçant une justice « sous-budgétée », très loin du niveau de l’Allemagne. Un argument réfuté par l’Élysée, qui insiste sur la hausse du nombre de magistrats depuis 2017 (+650) et surtout celle de 33% du budget du ministère sur le quinquennat.

Mise en examen d’Eric Dupond-Moretti, ministre de la Justice en exercice

Une première judiciaire pour un garde des Sceaux

Eric Dupond-Moretti a été mis en examen vendredi dans l’enquête sur de possibles conflits d’intérêts avec ses anciennes activités d’avocat, une première contre un ministre de la Justice en exercice, auquel Jean Castex a renouvelé « toute sa confiance ». 

Tout en « (prenant) acte » de la mise en examen inédite du garde des Sceaux, « le Premier ministre lui renouvelle toute sa confiance et lui demande de poursuivre l’action de réforme et de confortement des moyens accordés au service public de la Justice », a écrit Matignon dans un communiqué. 

A l’issue de près de six heures d’interrogatoire par la commission d’instruction de la Cour de justice de la République – seule juridiction habilitée à poursuivre et juger des ministres pour des infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions – Eric Dupond-Moretti a été mis en examen pour prise illégale d’intérêts, sans contrôle judiciaire. 

Le ministre s’était dit « serein », et « particulièrement déterminé », affichant un grand sourire à son arrivée à la CJR, dont il est sorti sans faire de déclaration.

« Cette mise en examen était clairement annoncée. (…) Ses explications n’ont malheureusement pas suffi à renverser cette décision prise avant l’audition. Nous allons évidemment désormais contester cette mise en examen », a déclaré l’un des trois avocats du garde des Sceaux, Me Christophe Ingrain, qui a annoncé qu’il déposerait « une requête en nullité ».

Ni le procureur général près la Cour de cassation François Molins – qui représente l’accusation dans cette procédure-, ni aucun autre représentant du parquet n’a assisté à l’interrogatoire, a indiqué une source judiciaire. 

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La convocation d’Eric Dupond-Moretti pour cet interrogatoire de première comparution lui avait été remise lors d’une rarissime perquisition de 15 heures à la Chancellerie le 1er juillet.

Dans cette affaire, il est soupçonné d’avoir profité de sa fonction de ministre pour régler ses comptes avec des magistrats avec lesquels il avait eu maille à partir quand il était avocat, ce qu’il réfute. 

« Méthodes de barbouzes » : on peut le penser, mais ça ne se dit pas !

La CJR a ouvert en janvier une information judiciaire pour « prise illégale d’intérêts » après les plaintes des trois syndicats de magistrats et de l’association Anticor dénonçant des situations de conflits d’intérêts dans deux dossiers.

Le premier dossier concerne l’enquête administrative ordonnée en septembre par le garde des Sceaux contre trois magistrats du parquet national financier (PNF) qui ont fait éplucher ses relevés téléphoniques détaillés (« fadettes ») quand il était encore une star des prétoires. 

Le PNF cherchait alors à débusquer une « taupe » ayant pu informer Nicolas Sarkozy et son conseil Thierry Herzog – un ami d’Eric Dupond-Moretti – qu’ils étaient sur écoute dans l’affaire de corruption dite « Bismuth », qui a valu en mars une condamnation historique à l’ex-chef de l’Etat. 

Vilipendant les « méthodes de barbouzes » du parquet anticorruption, Eric Dupond-Moretti avait déposé une plainte, avant de la retirer au soir de sa nomination comme garde des Sceaux, le 6 juillet 2020. 

Dans le second dossier, le PNF reproche au ministre d’avoir diligenté des poursuites administratives contre un ancien juge d’instruction détaché à Monaco, Edouard Levrault, qui avait mis en examen un de ses ex-clients et dont il avait critiqué les méthodes de « cow-boy » après que ce magistrat a pris la parole dans un reportage. 

Eric Dupond-Moretti s’est toujours défendu de toute prise illégale d’intérêts, martelant qu’il n’a fait que « suivre les recommandations » de son administration. 

Des appels à la démission

Les soupçons de conflits d’intérêts du nouveau garde des Sceaux, éveillés dès son arrivée à la Chancellerie par les syndicats de magistrats, avaient finalement conduit fin octobre à l’écarter du suivi de ses anciennes affaires, désormais sous le contrôle de Matignon.

Eric Dupond-Moretti accuse ces mêmes syndicats de « manoeuvres politiques » pour « obtenir un nouveau garde des Sceaux ». 

« On ne fait pas de politique, a prétendu l’USM. A aucun moment, d’aucune manière, nous n’avons demandé la démission du ministre », avait rétorqué Céline Parisot, présidente de l’USM, syndicat majoritaire dans la magistrature. Ce n’est pas encore une « obligation« , juste une « incitation« 

« L’infraction de prise illégale d’intérêts est très grave dès lors qu’elle implique que des intérêts personnels du ministre auraient guidé l’action du ministère et non les intérêts de la Nation », a réagi auprès de l’AFP la présidente d’Anticor, Elise Van Beneden, jugeant que « la question du maintien de M. Dupond-Moretti au gouvernement mérite d’être posée » après cette mise en examen. 

Le garde des Sceaux « ne peut tout simplement pas rester au gouvernement », a tweeté Julien Bayou, le secrétaire national d’EELV. Les sénateurs PS ont également appelé à sa démission sur le réseau social. 

« Malgré mon inimitié et le sentiment qu’il (Eric Dupond-Moretti) nuit à la Justice, il n’en est pas moins présumé innocent comme n’importe quel justiciable devrait l’être », a estimé de son côté l’eurodéputé RN Gilbert Collard.

Sur le Tour de France dans les Pyrénées, jeudi 15 juillet, Macron, qui l’avait longuement soutenu mardi en Conseil des ministres, a défendu la « présomption d’innocence » du ministre et s’est posé en « garant de l’indépendance de la justice ». 

Dupond-Moretti accuse un syndicat de magistrats dans la perquisition au ministère

Le ministre de la justice met en cause un syndicat « modéré »

Céline Parisot,
présidente de l’USM

Le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti se dit « extrêmement serein » après la longue perquisition effectuée jeudi dans ses bureaux du ministère de la justice. Mais sa belle sérenité est tout sauf confirmée par l’entretien qu’il a accordé au Journal du Dimanche (JDD) le 4 juillet: il y met en effet en cause, sans le nommer frontalement, le principal syndicat de magistrats.

L’Union syndicale des magistrats (USM) est le syndicat dominant (à 70,8 %, en juin 2016, contre 22,4 % au SM, dit rouge, et 6,8 % pour FO-magistrats).

« L’un des syndicats de magistrats qui a déposé plainte avait déclaré, après ma nomination, qu’elle était une déclaration de guerre. Ce même syndicat a dit jeudi que la plainte n’a été déposée que dans le seul but que je sois mis en examen. Tout est là », a affirmé E. Dupond-Moretti.

« Nommer une personnalité aussi clivante et qui méprise à ce point les magistrats, c’est une déclaration de guerre à la magistrature », avait affirmé Céline Parisot, présidente de l’USM, lors de la nomination de l’avocat Dupond-Moretti comme garde des sceaux en juillet 2020.

Soupçonné de conflits d’intérêt

Eric Dupond-Moretti lors d’une session de questions au gouvernement, le 15 septembre, à l’Assemblée nationale à Paris.
Eric Dupond-Moretti  

« Le but de ce syndicat est d’obtenir un nouveau garde des sceaux. Ce n’est pas ce que prévoit la Constitution… C’est du premier ministre et du président de la République que je tiens ma légitimité, et d’eux seuls », a ajouté le ministre de la justice visé par une enquête des magistrats de la Cour de justice de la République (CJR) sur de possibles conflits d’intérêts entre son action de garde des sceaux et ses anciennes fonctions d’avocat.

E. Dupond-Moretti est soupçonné d’avoir profité de ses fonctions de ministre de la Justice pour intervenir dans des dossiers pour lesquels il était auparavant avocat. « J’ai suivi les recommandations de mon administration », s’est défendu Dupond-Moretti dans le JDD.

Après son entrée en fonction, le garde des sceaux avait saisi l’inspection générale des services pour demander des enquêtes administratives à l’encontre de trois magistrats du Parquet national financier (PNF), dont son ancienne chef, Eliane Houlette, au sujet de l’affaire dite « des fadettes » et à l’encontre d’Edouard Levrault, ancien juge d’instruction détaché à Monaco. Dans ces deux affaires, Dupond-Moretti était avocat de personnes impliquées.

Dénonçant une situation de conflit d’intérêts du ministre dans ces deux dossiers, l’association Anticor, puis les deux principaux syndicats de magistrats, l’USM et le Syndicat de la magistrature (SM, classé « gauche radicale ») ont déposé plainte à l’automne devant la CJR. Depuis, Dupond-Moretti a été écarté du suivi de ses anciennes affaires, désormais sous le contrôle de Matignon. Selon le Canard enchaîné, Dupond-Moretti devrait être prochainement convoqué par les magistrats de la CJR.

Il risque une mise en examen.

Eric Dupond-Moretti, soupçonné de conflit d’intérêt

Le ministère de la Justice est perquisitionné.

Le garde des Sceaux de Macron est soupçonné de conflit d’intérêts dans deux dossiers auxquels il a pris part lorsqu’il était avocat.

Une perquisition est en cours au ministère de la Justice ce jeudi matin, a-t-on appris de source judiciaire confirmant une information du Parisien. Cette opération est menée par trois magistrats de la Cour de justice de la République (CJR) dans le cadre d’une enquête ouverte pour « prise illégale d’intérêt » concernant Eric Dupond-Moretti. Le garde des Sceaux est en effet visé par des plaintes de trois syndicats de la magistratures et de l’association Anticor l’accusant d’avoir usé de ses fonctions de ministre dans des dossiers qu’il a traité en tant qu’avocat

«Nommer une personnalité aussi clivante et qui méprise à ce point les magistrats, c’est une déclaration de guerre à la magistrature», a affirmé Céline Parisot, présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM) qui se dit par ailleurs apolitique.

Les magistrats de la CJR s’intéressent particulièrement à l’affaire d’un policier monégasque poursuivi pour corruption et défendu par Eric Dupond-Moretti qui avait dénoncé les « méthodes de cow-boy » du juge d’instruction. Une fois arrivé place Vendôme en tant que ministre, le ministre avait engagé une procédure contre ce magistrat

Autre point scruté par la CJR: celui de l’affaire dite des « fadettes » dans laquelle les factures téléphoniques d’Eric Dupond-Moretti – entre autres – avaient été épluchées par le Parquet National Financier (PNF) dans le cadre de l’affaire « Bismuth » visant Nicolas Sarkozy. Après avoir dénoncé des « méthodes de barbouzes », l’avocat avait porté plainte. Il l’avait finalement retirée une fois arrivé au ministère de la Justice puis avait demandé l’ouverture d’enquêtes administratives contre les magistrats du PNF. 

Il arrive que le PNF et la CJR puisse avoir des attentions: les magistrats ont attendu la fin des scrutins des 20 et 27 juin derniers, mais se sont-ils enhardis du fait de l’échec d’Eric Dupond-Moretti aux régionales dans les Hauts-de-France ? La liste LREM à laquelle il appartenait n’a pas atteint la barre des 10% et n’a pu concourir au second tour.

Ecole: régime spécial d’accueil des enfants des magistrats et fonctionnaires du ministère de la Justice

Ces enfants-là bénéficieront d’un accueil scolaire au cas par cas

L’Union syndicale des magistrats (USM) réclamait vendredi que les enfants des personnels de justice soient accueillis dans les écoles, au même titre que les enfants des forces de sécurité et des surveillants pénitentiaires.

Un parent à la sortie de l'école avec son enfant, le 1er avril 2021 à Saint-Etienne. (R?MY PERRIN / MAXPPP)

« Les enfants des magistrats et fonctionnaires du ministère de la Justice pourront être accueillis dans les écoles, en fonction des places disponibles, en lien avec le préfet et le rectorat », a appris franceinfo vendredi 2 avril auprès du ministère de la Justice. « Une approche locale via les chefs de cour est privilégiée », précise le ministère.

Quid des enfants de détenus?

La chancellerie répond ainsi à une demande notamment exprimée par l’Union syndicale des magistrats (USM). Dans un communiqué diffusé ce vendredi matin, l’USM s’était agacée que « les enfants des personnels de justice, magistrats et fonctionnaires » ne soient pas accueillis dans les écoles, contrairement aux enfants des forces de sécurité et des surveillants pénitentiaires qui avaient la possibilité d’être accueillis malgré les fermetures liées à l’épidémie de Covid-19.

La chancellerie précise que « lors de la première période de confinement, en moyenne moins de 9% des agents des services judiciaires (magistrats et greffiers), soit environ 3 000 personnes, étaient quotidiennement déclarés indisponibles du fait de la garde d’enfant. »

Dans son communiqué diffusé ce vendredi matin, l’USM dénonce par ailleurs le fait que « les personnels de justice qui accueillent quotidiennement des publics nombreux et divers dans des salles parfois exigües ne sont pas prioritaires pour la vaccination. » Pas plus que les policiers (pas avant la mi-avril, précise Darmanin, après trois mois de campagne de vaccination), à la différence « dès » la mi-mars, des pompiers…