Des anti-corruption sanctionnés pour corruption idéologique
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la fracture politique
Comme Transparency International ou Sherpa, Anticor était l’une des trois associations habilitées à porter plainte au nom de l’intérêt général en matière de délinquance financière et de lutte contre la corruption. Avec cette décision administrative, l’association perd la possibilité de porter plainte au nom de l’intérêt général. Et de son idéologie d’extrême gauche vertueuse qui prétend réhabiliter la démocratie représentative (mise à mal par leurs alliés de la NUPES, notamment encore lors du débat parlementaire sur la réforme Macron des retraites), promouvoir l’éthique – rien que ça – en politique et lutter contre la corruption et la fraude fiscale. L’organisation se victimise, sa présidente Elise Van Beneden dénonçant «un coup porté à la lutte contre la corruption et donc à notre démocratie»»… L’avocat d’Anticor dans ce dossier, Me Vincent Brengarth (cabinet Bourdon & Associés), qui publie dans Le Monde, Libération et le Huffington Post, a dénoncé une procédure «abusive, infondée, un non-sens, en ce qu’il risque d’empêcher le combat de l’association contre la corruption». Un combat fléché…
Cet agrément est le sésame qui a permis de porter plainte et de se constituer partie civile dans d’épineuses affaires touchant à l’éthique publique, comme celle impliquant Alexis Kohler, le puissant secrétaire général de l’Elysée, mis en examen pour prise illégale d’intérêts en octobre 2022.
Les demandeurs, des dissidents de l’association, ont saisi en juin 2021 la justice administrative pour contester l’arrêté du 2 avril de la même année, signé par l’ex-premier ministre Jean Castex, qui avait renouvelé après des mois d’incertitude l’agrément d’Anticor. Or, pour les demandeurs, la procédure de renouvellement a été irrégulière et l’agrément n’aurait pas dû être accordé faute de conditions remplies par Anticor: caractère indépendant et désintéressé de ses activités, information de ses membres sur la gestion, etc. Vendredi, le tribunal administratif doit se prononcer sur ce recours.
En 2012, Alain Cohen-Dumouchel (de l’association Gauche libérale) dit pourtant que des démocrates exemplaires d’Anticor qu’ils sont un « sous-marin à peine immergé, de la gauche socialiste et écologiste », refusant par exemple l’adhésion à l’association et la signature de sa charte aux candidats du Front national.
Les partis-pris d’Anticor étaient donc son tendon d’Achille. Ce vendredi 23 juin, le tribunal administratif de Paris a décidé d’annuler l’agrément judiciaire d’Anticor (attribué à l’origine par décision du Conseil d’Etat), qui lui permettait de se substituer à un Parquet parfois «peu proactif», selon la gauche extrême en matière politico-financière. Et avec en plus un effet rétroactif au 2 avril 2021, date du dernier renouvellement triennal accordé à l’association loi de 1901. «Cette annulation constitue une atteinte grave à la démocratie, ainsi qu’aux libertés associatives», a-t-elle réagi sur Twitter. Anticor va bien faire appel, mais comme les délais judiciaires sont longs, l’association partisane avait anticipé la décision du tribunal en préparant d’ores et déjà une nouvelle demande d’agrément auprès de Matignon – la Chancellerie étant de facto dessaisie pour cause de plainte d’Anticor contre le ministre Eric Dupond-Moretti.
La rétroactivité du retrait d’agrément pourrait poser problème sur les plus de 150 procédures pénales actuellement diligentées par Anticor, du moins celles engagées depuis deux ans. A l’audience, la rapporteure du tribunal administratif s’était montrée optimiste à ce sujet, soulignant qu’un réquisitoire introductif du Parquet permettrait de sauvegarder les procédures en cours, nonobstant la perte de pouvoir ester en justice du plaignant. Sauf que le Parquet ne s’est pas toujours prononcé sur toutes les plaintes déposées par Anticor, dont certaines pourraient ainsi tomber à l’eau.
Le vice-président d’Anticor Eric Alt étant à la fois partie civile et magistrat au Tribunal de grande instance de Paris, le dépaysement d’affaires a pu être demandé et accordé par la Cour de cassation pour éviter tout conflit d’intérêts. Eric Alt a par ailleurs été candidat aux élections européennes sous l’étiquette du parti d’opposition Nouvelle Donne, mouvement politique français de gauche relancé en novembre 2013 par Pierre Larrouturou.
Preuve que et Anticor et la magistrature sont neutres, libres et indépendants de toute idéologie ou pouvoir…
Les anti-démocrates organisés en association vertueuse annoncent « la fin de la démocratie»
En interne, on accuse le coup, même s’il était annincé. «C’est la fin de la démocratie», dramatise une dirigeante d’Anticor : «Nous allons tenter de mobiliser les autres associations.» C’est déjà fait, comme l’explique la section française de Transparency International, d’origine allemande, l’une des trois associations agréées pour porter plainte contre toute atteinte à la «probité», terme général qui va de la corruption au blanchiment en passant par le favoritisme ou le conflit d’intérêts. «Nous ne critiquons jamais une décision de justice mais demandons au pouvoir exécutif de renouveler immédiatement l’agrément d’Anticor.» Et de pointer, en sus de ce retrait d’agrément, un «essoufflement de la lutte contre la corruption, où le rôle des associations est essentiel». A entendre Transparency International, «tous les voyants sont au rouge».
Sherpa, davantage dédiée à la corruption internationale, n’est pas en reste : «La décision du tribunal administratif confirme les craintes que nous exprimons depuis des années : l’action des associations étant soumise au bon vouloir de l’administration [une instance institutionnelle], avec des critères flous exposant les associations à des décisions arbitraires.» Et d’en appeler à une réforme en profondeur de la procédure pénale, car «au-delà du frein à la lutte contre la criminalité en col blanc, ce sont les libertés associatives et la démocratie qui sont ici menacées». Pas moins.
Comme Transparency International ou Sherpa, Anticor est l’une des trois ONG habilitées à porter plainte au nom de l’intérêt général [c’est vaste mais c’est flou: il y avait un loup] en matière de délinquance financière et de lutte contre la corruption.
Habituellement, les tribunaux n’ont pas à se mêler de cet agrément triennal, qui relève d’une décision administrative prise par le ministère de la Justice – ou par Matignon. Lors de son dernier renouvellement en avril 2021, le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, avait dû se déporter, car Anticor avait préalablement porté plainte contre lui devant la Cour de justice de la République (CJR). Dans le cas présent, c’est sur recours d’un opposant interne que la justice est saisie : Claude Bigel, ancien vérificateur des comptes de l’association, exclu en septembre 2020, et Yves Sassiaut, retraité, caméraman et chef de production, toujours membre.
Le rapporteur public, dont l’avis est souvent suivi, «a conclu à l’annulation de l’agrément accordé par le premier ministre en avril 2021. Il a suivi nos arguments, donc», s’est félicité Me Frédéric Thiriez, avocat des demandeurs. «
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