Macron s’est-il constitué une caisse noire grâce à l’inflation?
Xavier Bertrand, président LR des Hauts-de-France, et la députée RN Marine Le Pen s’accordent pour dénoncer le gouvernement-profiteur de la hausse des prix pour renflouer les caisses de l’Etat. Un fait que réfute le ministère de l’Economie pris le doigt dans le pot de confiture.
«Sur les 30 milliards de surplus de TVA, il faut que l’Etat restitue une partie, c’est-à-dire 8,5 milliards», insiste-t-elle, lundi sur TF1. «Plus il y a d’inflation, plus l’Etat engrange de l’argent. Cette situation est inadmissible : l’Etat ne peut pas s’enrichir en appauvrissant les contribuables. C’est la raison pour laquelle je considère que sur les 30 milliards de surplus de TVA qui ont été encaissés par l’Etat cette année et l’année dernière, il faut que l’Etat en restitue une partie, c’est-à-dire 8,5 milliards, c’est-à-dire ce qu’il reste quand il a rempli ses obligations budgétaires.»
Xavier Bertrand faisait le même constat sur CNews, quelques jours plus tôt, : «Deux euros le litre [d’essence], c’est insupportable pour les Français. Je dis à Bruno Le Maire : monsieur le ministre, vous récoltez un pactole en ce moment, parce que quand le pétrole augmente, l’Etat voit ses recettes fiscales gonfler. Et en plus, la TVA en France, elle s’applique sur le pétrole, mais elle s’applique ensuite sur la TICPE, la taxe [60% du prix du litre de carburant]. Tout ça constitue un pactole. […] Je demande clairement [au ministre] quelles sont les recettes fiscales en plus, car quand vous avez un pactole, vous devez le rendre aux Français, ou alors ça s’appelle une augmentation des impôts.»
L’Etat s’est-il enrichi, avec la TVA, grâce à l’inflation, que ce soit sur l’ensemble de la consommation ou sur les carburants ?
Recettes générées par l’inflation : 10,7 milliards d’euros
Selon l’Insee, les recettes de TVA, après remboursements et dégrèvements par l’Etat, se sont montées, en 2022, à 200 milliards d’euros, contre 185 milliards en 2021. Le montant des recettes induites par la TVA est donc plus élevé avant remboursements… Soit +8 % en un an, alors que la croissance s’affichait à +2,6 % et l’inflation à +5,2 %. En 2023, les recettes étaient attendues, dans le projet de loi de finances, à 215 milliards. Soit environ 30 milliards d’euros sur deux ans (la prévision de comptabilité budgétaire est un peu différente de la comptabilité nationale de l’Insee). Le raisonnement de l’INSEE, succursale de Bercy, est specieux car les recettes réelles de la TVA doivent être chiffrées avant et non pas après retrait des remboursements !…
En 2022, le surplus de TVA lié à cette inflation particulièrement forte correspond à une hausse de la consommation des ménages qui a augmenté, en volume (c’est-à-dire hors inflation), de 2 %, tandis que l’inflation était un peu supérieure à 5 %. On peut donc considérer qu’en 2022, la part de recettes supplémentaires de TVA liée à la croissance de la consommation en volume a été de 4,3 milliards, tandis que celle imputable à l’inflation s’est montée à 10,7 milliards (1). Quelle qu’en soit la cause, croissance ou inflation, elle s’élève à 15 milliards. Le rebond de consommation est dû à la fin de l’épidémie de covid et Bercy profite non seulement de l’inflation, mais aussi de la maladie. Pour Le Maire et Macron, la levée des restrictions sanitaires et la guerre en Ukraine ont du bon.
L’INSEE tente d’embrouiller les Français
L’institut se lance dans des hypothèses, du style « si ma tante en avait », ce qui est adapté, de nos jours, à l’idéologie LGBTQI++, mais en fait destinées à nous enfler le « renflement brun » fantasmé par Bruno-l’érotomane. « Si l’inflation n’avait été que de 1 % (moyenne des dix années précédentes), alors la hausse de TVA liée à la hausse des prix aurait été de 2,1 milliards, et non 10,7 milliards. Soit, schématiquement [sic], un surplus de TVA lié à la forte inflation de 8,6 milliards d’euros. Grosso modo [re-sic] ce que souhaite rendre aux consommateurs Marine Le Pen (qui, selon le député RN Jean-Philippe Tanguy, parlait de l’année 2022 comparée à 2021 et non pas de 2022 et 2023). » Mais l’inflation n’a pas été de 1% et, au final, le RN n’est pas exigeant.
3e pays de l’UE le plus endetté, la France utilise son pactole à rembourser ses emprunts. «Dire que l’Etat s’est enrichi n’a pas vraiment de sens,» pas davantage que de souligner que la TVA en France ne revient pas uniquement à l’Etat. Rien n’appartient en effet à l’Etat, lequel ne dispense jamais ses bontés qu’à nos frais : il ne fait que répartir ses recettes et ses dépenses de manière inéquitable sur l’ensemble de la population.
La moitié, environ, est redirigée vers les organismes de Sécurité sociale et les collectivités locales, qui sont financés par les contribuables, travailleurs et entreprises. Sur ces 8,6 milliards de «surplus» de TVA en 2022, seuls 4,3 milliards iraient donc à l’Etat, pour ses frais de gestion, 4,3 misérables milliards que ne refuseraient pas les SDF négligés par DAL qui n’a d’yeux que pour les clandestins. «Nous n’endossons pas, politiquement, ce partage de TVA entre les différents destinataires», répond sur ce point Jean-Philippe Tanguy qui préconise d’autres impôts, «sur les superprofits ou les rachats d’action».
Concernant 2023, année en cours, le spécialiste en Finances publiques, François Ecalle (ancien rapporteur général du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques à la Cour des comptes et membre de l’Institut Montaigne, libéral) «sur les sept premiers mois de cette année, on est plutôt sur 1 % à 1,5 % de hausse de recettes de TVA, donc très loin de l’augmentation prévue. Au total, on ne sera sûrement pas sur 30 milliards de hausse sur 2022 et 2023».
En vérité, puisque les recettes de TVA ont bondi à 272.812 milliards d’euros en 2022, soit 30 milliards de plus qu’en 2021, ne doit-on pas s’attendre à ce que les recettes de TVA qui, selon BFMTV, ont représenté 170,9 milliards d’euros (+19,2 milliards), en décembre 2022, soient largement dépassées en décembre 2023, puisque l’inflation actuelle est galopante ?… L’Etat peut-il compter sur des recettes de TVA de plus de 200 milliards à Noël 2023 ? Des milliards consacrés au remboursement de la dette… Et la charge de la dette publique tricolore dépassait les 40 milliards d’euros, en juin 2023. A la même période, la Cour des comptes indiquait qu’en 2022 la dette avait atteint 111,8 points de PIB, supérieure de 575 Md€ à son niveau de 2019. Et la dette publique française cumulée a atteint 3. 013,4 milliards d’euros le 31 mars 2023, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques…
Le dénommé Ecalle conteste par ailleurs la notion de de «cagnotte» : «Oui, l’Etat gagne plus de TVA, comme il engrange plus d’impôts sur les sociétés ou d’impôt sur le revenu grâce à l’inflation. Mais en contrepartie, il a lui aussi des dépenses en hausse, notamment liées à l’inflation, comme des dépenses sociales [son misérable chèque de 100 euros de carburant ? Un plein?], les achats de biens, et dans une moindre mesure les rémunérations des fonctionnaires, hasarde-t-il. Surtout, dire que l’Etat s’est enrichi n’a pas vraiment de sens quand il présente un déficit de 4,7 % du PIB la même année…» Si ce pactole est consacré à la réduction de l’endettement de l’Etat, c’est un pactole dont les Français ne profiteront pas, mais qui tombe à pic pour le maintien de la notation financière (abaissée à AA- par Fitch, fin avril) mais attendue, depuis juin dernier, de Standard and Poor’s et en sursis jusque . 17 pays sont mieux notés que la France. L’emblématique « triple A », meilleure note possible, consacre l’excellente gestion des finances d’un petit cercle de pays, selon les trois agences, à l’instar de l’Allemagne, des Pays-Bas et de l’Australie.
«Il n’y a aucun pactole»
Quant à la seule TVA sur les carburants, Bercy a reconnu, jeudi 14 septembre dans un communiqué, que «la hausse des prix des carburants s’est traduite par une hausse des recettes de TVA sur les carburants utilisés par les ménages d’environ 2 milliards d’euros en 2022 et 2 milliards en 2023». Soit 4 milliards sur ces deux années. Avant de rappeler, lui aussi, que seuls 50 % de ces sommes vont à l’Etat, soit 2 milliards d’euros.
Selon Bercy, cependant, l’Etat a mis en place des dispositifs d’aides aux consommateurs, pour asdurer la paix sociale : la remise sur les prix des carburants jusqu’à la fin 2022, pour 7,5 milliards d’euros, et depuis le début de l’année, l‘indemnité carburant pour les travailleurs (10 millions de personnes les plus modestes), pour 500 millions d’euros. Soit 8 milliards en tout. Et donc un coût final pour l’Etat et surtout les contribuables, selon Bercy, de 6 milliards d’euros, entre les aides aux consommateurs et la hausse de TVA générée par la hausse des prix des carburants, que Macron n’a pas eu les moyens de juguler au moyen de réductions de TICPE (Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques). «Sur 2022-2023, l’Etat a dépensé quatre fois plus pour amortir l’impact sur les ménages des prix du carburant qu’il n’a “bénéficié” des prix hauts : il n’y a aucun pactole», se défend ainsi le ministère de l’Economie. Reste que si le surcoût est effectivement important en 2022, il disparaît néanmoins en 2023, le surplus de TVA rapportant cette fois-ci davantage que l’indemnité carburant pour les travailleurs.
Un abaissement d’une note par une agence de notation peut provoquer une perte de confiance des investisseurs envers un Etat, entraînant une hausse des taux d’intérêt d’emprunt. Or, ils ont déjà commencé à remonter, alors que Macron a pourtant décidé la fin des aides énergétiques lorsqu’est survenue la baisse des prix des hydrocarbures, lesquels ont repris leur hausse… Empêché de rogner sur ses 60% de taxes carburants, du fait du poids de la dette publique, Macron a dû supplier les producteurs et distributeurs de vendre à perte, un fiasco, puis à prix coûtant, un autre fiasco: si l’entreprise d’Etat TotalEnergies s’est exécutée, seuls Leclerc et Casino ont consenti.
(1) Ce calcul donne un ordre de grandeur seulement, la consommation des ménages ne représentant que 2/3 (!) de l’assiette de TVA.