Les ministres de gauche défendent leur place menacée par le changement de gouvernement

L’aile gauche de la macronie, préoccupée de son sort ou des intérêts du pays ?

Roland Lescure, Clément Beaune et Elisabeth Borne s’accrochent

Cette aile gauche est passée des manoeuvres aux menaces. Alors que les rumeurs de dissolution du gouvernement se précisent en ce début d’année 2024, plusieurs ministres qui se flattent encore de leur appartenance à l’aile gauche du camp présidentiel font le siège des media pour défendre leur place au gouvernement.

La position de cette poignée de contestataires est particulièrement scrutée depuis qu’ils ont révélé leur déconnection du pays face à la demande des Français d’une loi immigration forte telle que votée mi-décembre. Parmi les ministres déçus par ce texte qui tente de répondre pourtant aux besoins de désendettement et de sécurité, seul Aurélien Rousseau, à la Santé, présenté et obtenu sa démission le 19 décembre, à la différence des velléitaires qui, aujourd’hui, rechignent à faire leurs cartons.

Trois semaines plus tard, et alors que le président de la République pourrait être tenté de renouveler son équipe pour donner un nouvel élan à son second quinquennat, les autres se verraient bien rester.

« Remonter sur le ring »

Dans un entretien publié par Le Parisien ce jeudi 4 janvier, Clément Beaune, l’un des membres du gouvernement qui se targuent d’un profil social et humaniste, assure qu’il a « encore des combats à mener », notamment sur la fin de vie ou la loi immigration. Il espère que seront revues « la mesure sur l’Aide personnalisée au logement (APL) » ou la caution demandée aux étudiants étrangers à l’université, mais ce n’est pas de sa compétence actuelle de ministre délégué chargé des… Transports.

« Est-ce que je pense qu’après avoir beaucoup échangé avec la Première ministre, on a fait évoluer le texte dans la bonne direction ? Oui. Est-ce que c’est terminé ? Non, il y a encore des combats à mener. Est-ce que je veux y participer ? Oui », affirme, ravi, le ministre venu du Parti socialiste.

Clément Beaune, qui avait été organisateur d’un dîner de c*ns avec d’autres ministres en désaccord sur le texte voté démocratiquement, admet malgré tout qu’il y a « des sensibilités, des histoires différentes et des débats compliqués » dans le camp présidentiel. « Mais après un combat difficile », précise-t-il, « mon tempérament c’est de remonter sur le ring. J’ai envie de remonter sur le ring. » Et si les choses n’étaient pas assez claires sur son intention de rester ministre, l’ancien conseiller du président (2017-2020) se dit « heureux de servir » tant que Macron fait appel à lui. Message reçu ?

Dans un autre registre, son collègue Roland Lescure – membre lui aussi du petit groupe de frondeurs-foireux avec Patrice Vergriete (logement) et Rima Abdul Malak (culture) – s’est livré à une opération quelque peu similaire ce jeudi matin dans la matinale de …France Inter.

Les frondeurs en sursis ?

Si le ministre de l’Industrie admet ququ’il a « eu des questions sur le texte lui-même, dès la fin de la CMP », et qu’il a été reçu rapidement par les deux têtes de l’exécutif pour en parler, il fait valoir que le président de la République aussi a révélé « ses doutes » en s’exprimant sur France 5 au lendemain du vote, et en saisissant le Conseil constitutionnel. Donc « le travail continue », selon ses mots. Un travail qu’il « adore », comme le logement et la voiture de fonction, a-t-il pris soin de souligner, dans un moment « exceptionnel. »

Mais cela suffira-t-il ? Le sort de ces ministres est l’un des points sensibles de ce changement de gouvernement présenté comme un simple remaniement, bien qu’on se dirige vers le choix d’un quatrième premier ministre. Pour Macron, l’enjeu se résume ainsi : peut-il sanctionner cette gauche rebelle qui n’a pas hésité à faire lever un vent de fronde inédit dans son équipe gouvernementale, sans mettre à mal sa stratégie controversée du « en même temps » ?

Selon le récit de plusieurs media, le président de la République est agacé par l’attitude de ces ministres qui ont soulevé l’idée d’une démission si était adopté le texte — issu de plusieurs débat, d’une commission mixte paritaire et d’un vote respectueux des procédures constitutionnelles — sans aller au bout de leur menace. Il l’aurait confié aux journalistes du Monde (3 janvier) invités à couvrir son déplacement en Jordanie le 21 décembre pour une fête de Noël anticipée avec les militaires de l’opération Chammal (participation des forces armées françaises à la coalition contre l’Etat islamiste pendant les guerres d’Irak et de Syrie, depuis septembre 2014).

A sa démission, Aurélien Rousseau s’est replié sur le Conseil d’Etat d’où il pourra nuire au nouveau gouvernement.

Loi immigration: pressions de proches de Macron sur les députés pour qu’ils ne votent pas la version du Sénat

Des macronistes de gauche portent atteinte à la séparation des pouvoirs.

A force de braquer sur eux les caméras, Mélenchon et ses affidés – bons clients des chaînes info en continu – réussissent à faire oublier que la France compte chaque jour plus de « nationaux » que d’insoumis. Macron peine à exister et se montre donc aux quatre coins du pays et dicte aux grands de ce monde ce qu’ils doivent faire, par exemple à la Chine de s’impliquer à Gaza.

Macron avait bâti sa campagne en se posant comme meilleur rempart au FN, mais celui-ci a muté en RN et réussi sa notabilisation. De quoi convaincre les électeurs modérés de droite et de gauche de voter pour lui puis de soutenir ensuite sa politique, selon l’idée pleine de bon sens qu’il était dans l’intérêt collectif du pays qu’il réussisse. Avec son projet de loi immigration, Macron craint fort que le coup du Sénat passe si près que son chapeau tombe et que le cheval de la macronie fasse un écart en arrière.

Le 14 novembre, le Sénat a adopté le projet de loi sur l’immigration. A l’Assemblée, son examen commence en commission le 27 novembre et en séance le 11 décembre. Et voici justement que Macron lâche les chiens sur le troupeau bêlant de ses députés.

C’est une lettre comminatoire, par son contenu, mais surtout du fait de l’identité de ses sbires. Un groupe de personnalités a écrit à tous les députés de l’alliance présidentielle pour leur demander de ne pas se laisser séduire par la loi sur l’immigration issue du Sénat : Philippe Aghion, Marisol Touraine, Jean-Marc Borello, Pascal Brice, Daniel Cohn-Bendit, Romain Goupil, Philippe Martin, Thierry Pech et Jean Pisani-Ferry. Tous sont des macronards ou l’ont été. Un nom retient particulièrement l’attention, celui d’un ancien membre de cabinet de Laurent Fabius, un homme d’affaires et président du directoire du groupe SOS, association spécialisée dans l’entrepreneuriat social,  Jean-Marc Borello, proche d’entre les proches, l’un des co-fondateurs d’En Marche. Autre point commun : tous ont une sensibilité de gauche. Enfin, deux d’entre eux (Thierry Pech et Jean Pisani-Ferry) s’étaient déjà dressés contre une précédente loi immigration, celle portée par Gérard Collomb durant le premier quinquennat : le 16 janvier 2018, ils publiaient une tribune dans Le Monde intitulée : « M. Macron, votre politique contredit l’humanisme que vous prônez ! »

Macron foule aux pieds la liberté de conscience des députés de son mouvement minoritaire. A la veille de l’arrivée du projet de loi immigration en commission paritaire au Palais-Bourbon, des intimes ou des proches de Macron appellent les députés de l’alliance présidentielle à « ne pas voter » la version des sénateurs adoptée mi-novembre.

« Le texte adopté au Sénat constitue une rupture. Il fait droit à des mesures proposées de longue date que ni le Sénat ni l’Assemblée n’avaient jamais voulu prendre en compte », écrivent les signataires de cette tribune publiée par L’Opinion.

Cohn-Bendit, Touraine et Pisani-Ferry parmi les signataires

Ils jugent que les nouvelles dispositions introduites par les sénateurs représentent « une hostilité de principe désormais affichée non seulement à l’égard de l’immigration mais des étrangers eux-mêmes, le plus souvent à raison de leur origine et de leur culture« .

Parmi la liste des personnalités qui ont participé à cette tribune, on trouve plusieurs proches de Macron à l’instar de Marisol Touraine, ex-ministre de la Santé sous François Hollande (ré-intégrée au Conseil d’Etat qui désormais pantoufle depuis 2019 à la présidence d’Unitaid, organisation internationale qui vise à réduire le prix des médicaments, mais qui veut faire contrepoids aux ralliés à Macron venus de la droite, bien que battue à la dernière législative ) , ou encore Jean-Marc Borello, l’un de cofondateurs de Renaissance (ex-En marche).

Jean Pisani-Ferry, Philippe Martin et Philippe Aghion comptent également parmi les visages signataires. Ces économistes avaient planché sur le programme présidentiel d’Emmanuel Macron en 2017 et ont depuis pris leur distance.

L’ex-écologiste Daniel Cohn-Bendit, le cinéaste Romain Goupil ou Pascal Brice, l’ex-directeur de l’OFPRA, ont également co-signé ce texte, tout comme Thierry Pech, le président du think tank Terra Nova.

Une version sénatoriale qui prend en compte les réalités de l’immigration nouvelle

Cette tribune de la société civile cherche à peser dans la bataille alors que l’alliance présidentielle doit croiser le fer à l’intérieur même de ses troupes dans les prochains jours. En effet, de très nombreux apports au projet gouvernemental votés par le Sénat ébranlent les modes de pensée de certains caciques de gauche dont la moyenne d’âge est 70 ans. Fin du droit du sol, fin de l’aide médicale d’Etat, disparition de l’article 3 (compensée par une modification controversée de l’art. 4) qui cherchait à régulariser les travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension, autant de modifications qui donnent au projet une ossature en adéquation avec la demande de la France silencieuse…

Les sénateurs, menés par le patron des LR au Sénat Bruno Retailleau, ont considérablement renforcé ce projet de loi porté par Gérald Darmanin, sans bousculer les sénateurs Renaissance qui ont, eux aussi, voté ce projet de loi. La tribune réagit donc en urgence et dans l’outrance. « Ce texte est porteur d’une stigmatisation généralisée des personnes étrangères mais il ne nous paraît comporter aucune garantie de ‘fermeté’ ou à tout le moins d’efficacité« . A priori.

L’impossible équilibre à l’Assemblée

Le locataire de la place Beauvau s’est, lui, félicité, de la version sénatoriale. Le quadragénaire a ainsi salué « un texte co-construit », « enrichi par le Sénat ».

De quoi sérieusement inquiéter l’aile gauche de la macronie qui tient à tout prix à ce que le projet de loi ressemble à la copie promise par l’exécutif, qualifiée d’entre-deux « humanité » et « fermeté », version spéciale du « en même temps » classique et de la stratégie du « pas de vagues », inadaptés à la situation nouvelle créée par l’immigration clandestine de masse incontrôlée, des campements insalubres, de centres d’accueils dépassés par les événements et de mineurs isolés ingérables.

Le président totalitaire de la commission des Lois Sacha Houlié a de son côté déjà exprimé son mépris de la Chambre haute, en promettant de « rétablir le texte ambitieux de l’exécutif ». Ajouté au mépris de la Chambre basse, anesthésiée au gaz 49.3, le parlementarisme est gravement menacé.

Au risque de perdre les voix de la droite qui refuse farouchement un titre de séjour aux clandestins dans les métiers en tension et dont le gouvernement a tant besoin en l’absence de majorité absolue? La tribune des courtisans confirme que l’exécutif s’affole à la perspective des débats en commission dans les prochains jours.

L’espoir d’une alliance entre la gauche et la majorité

Les signataires de ce texte veulent croire, si peu soit-il, à une éventuelle alliance entre une partie de la macronie et un moignon de la gauche pour parvenir à sauver l’équilibre du texte. « Nous saluons l’esprit d’ouverture qui a permis à des élus de la majorité et de l’opposition d’adopter des positions communes sur certains aspects du projet de loi« , écrivent-ils au mépris de la réalité de leur arrogance constitutive, puisque l’alliance présidentielle a pris pour habitude de mettre au panier l’immense majorité des amendements de l’opposition.

Plusieurs figures de la gauche comme Fabien Roussel (PCF) et Julien Bayou (EELV) se sont réunis en septembre dernier aux côtés de Sacha Houlié et la députée apparentée Renaissance Stella Dupont pour faire la Une de Libération et défendre la création d’une carte de séjour pour les travailleurs en situation irrégulière dans le BTP ou la restauration.

Une tribune d’élus MoDem a également été signée début novembre pour défendre le rétablissement de l’aide médicale d’Etat, dont le retour dans le texte à l’Assemblée est défendu par Élisabeth Borne et le ministre de la Santé Aurélien Rousseau.

« Il vous revient de stopper une dérive dangereuse »

« Nous ne sommes pas dans la tonalité des donneurs de leçon. Nous appelons par exemple à une gestion plus ciblée des OQTF. Mais on sent qu’on à un moment de bascule dans le discours politique », nous explique l’un des signataires, Pascal Brice, spécialiste des questions migratoires.

Pour convaincre, les signataires ont prévu d’aller à la rencontre des députés de la majorité ces prochains jours. « Il vous revient de stopper une dérive dangereuse et de mettre le pays sur le chemin de l’efficacité et de l’apaisement. Nous comptons sur vous et restons à votre disposition pour échanger », conclut la tribune, non sans se donner d’importance.

Rappelons-le, deux des signataires, Thierry Pech et Jean Pisani-Ferry, s’étaient déjà opposés dans un appel à Emmanuel Macron en 2018 à la loi asile-immigration portée par Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur de l’époque.

Quelques stats ?

Le candidat du PCF contaminé par l’ « en même temps » du banquier Macron

Un jour, Rous8sel séduit la droite et, l’autre, la gauche

« Un bon vin, une bonne viande, un bon fromage, pour moi, c’est la gastronomie française »: en vantant le patrimoine gastronomique de la France, le 6 février à Marseille, Fabien Roussel a rassuré la droite.

Tant et si bien que que le candidat du PCF a été parfois présenté comme « le candidat de gauche préféré de la droite », au grand dam de ses militants rencontrés à Marseille.

«J’en ai marre de cette gauche qui nous culpabilise de tout»

En meeting à Montreuil, Fabien Roussel devra vanter «le steak …de gauche». Le candidat communiste à la présidentielle a dénoncé à Marseille la théorie du ruissellement de Macron et proposé plusieurs mesures pour augmenter le pouvoir d’achat des Français. Mais on ne retient que son ralliement au nucléaire, au sécuritaire, à la défense du terroir, de la viande rouge [plutôt que le jambon !:] et de la chasse face aux écolos… « 

A Montreuil, Roussel redonne un coup de barre à gauche pour LFI et EELV

Le patron du PCF a créé de vives tensions dans la gauche affaiblie et à couteaux tirés. Le candidat communiste à la présidentielle a donc dû calmer le jeu avec La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon (LFI) et les écologistes de Yannick Jadot, (EELV) mercredi en meeting à Montreuil, assurant qu’il ne visait « surtout pas » à leur « enlever des voix ».

Le 16 février, le candidat du PCF, en hausse dans les sondages après deux présidentielles où sa formation n’a pas fait campagne, imagine une «France des fiches de paye» et vante une écologie positive.

D’autant que les Insoumis lui reprochaient dejà de ne pas les rallier pour permettre à Mélenchon, crédité d’un peu plus de 10%, d’accéder au second tour. 

« Ma candidature ne vise surtout pas à enlever des voix aux autres candidats de gauche et écologistes, mais à en conquérir de nouvelles », a-t-il certifié devant 1.500 personnes dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville de Montreuil, affirmant aller chercher les abstentionnistes et les électeurs populistes passés au RN de Marine Le Pen. Le député du Nord a dit avoir visé, à Marseille, à « additionner, renforcer la gauche pour qu’elle soit de nouveau majoritaire, une gauche sincère, authentique, honnête, une gauche qui ne fait pas dans la langue de bois, qui ne trahira pas ».

Il a aussi souhaité enterrer la hache de guerre avec les écologistes, qui lui reprochent sa défense de la seule viande rouge et ses attaques contre les « leçons » d’une certaine gauche des centres-villes. « Ici à Montreuil, sachant où je mets les pieds, je sais tous les efforts pour manger sain et à sa faim », a clamé le communiste.

Selon Fabien Roussel, « il faut manger du sain, du local, du bio »: « La bonne bouffe, qu’elle soit à base de viande, végétarienne, vegan, elle doit être à la portée de toutes les bourses, et je les respecte toutes », a-t-il dit. Il a aussi assumé « les positions prises sur un certain nombre de sujets », par exemple en faveur du nucléaire, mais « dans le respect de nos différences et de nos appartenances politiques ».

Yannick Jadot avait visé le communiste la veille: « Je ne crée pas de l’enthousiasme en essayant de nier les problèmes [sur le nucléaire, la voiture et la surconsommation de viande] parce que je trouve ça irresponsable ».

Fabien Roussel a aussi envoyé ce message d’apaisement, mercredi, en pensant aux législatives, où il souhaite « faire gagner le plus de députés à gauche: de communistes et dans l’union la plus large ».

Le maire PCF de Montreuil, Patrice Bessac, avait introduit le meeting en semblant donner un conseil à son candidat: « J’aimerais dire à Fabien Roussel qu’il y a aussi des gens qui mangent du tofu, qui sont végétariens et qui vont voter pour lui ! »…

Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent…

Napoléon: hommage de la France honteuse sous influence

La célébration d’une victoire française, à Austerlitz, aurait indisposé les séparatistes, Kurz et Poutine…

La ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, en charge des Anciens combattants, Geneviève Darrieussecq, une inconnue au bataillon depuis cinq ans, a honoré jeudi 2 décembre, jour anniversaire de la victoire d’Austerlitz, la mémoire du général Gudin, mort en 1812 en Russie.

C’est une scène figée pour l’Histoire. En fin de matinée de ce jeudi 2 décembre, jour anniversaire d’Austerlitz, la sonnerie aux morts succède à Tchaïkovski quand un grand soleil apparaît derrière le dôme de l’église et nappe de lumière le cercueil drapé de tricolore qui repose sur les pavés inégaux de la cour. « Le soleil d’Austerlitz ! » s’écrie un amateur, en référence à la célèbre formule de Napoléon le 1er décembre 1805, qui allait augurer d’un de ses plus beaux succès militaires.

Macron, Castex et Parly ont battu en retraite en rase campagne devant les tenants de la culture de l’effacement ou de l’annulation (cancel culture). Paradoxalement, ils rendent les armes en prétendant rendre un hommage. Un « en même temps » de plus, faute de convictions et de force d’âme ! Il n’etait pas question en effet d’honorer la mémoire et les accomplissements de l’empereur, mais celle d’un de ses plus vaillants généraux, Charles Etienne Gudin, un inconnu mort au combat à Smolensk en Russie le 22 août 1812, des suites de ses blessures reçues à la bataille de Valoutina Gora trois jours plus tôt… Sa dépouille aura mis deux siècles à nous revenir, à l’issue d’une véritable épopée archéologique. Et il aura fallu toute l’abnégation d’un hussard de 34 ans, Pierre Malinowski, pour que l’Elysée accepte le principe d’une cérémonie militaire, en présence d’une autre inconnue, Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée, du chef d’état-major des armées (Cema), des gouverneurs militaires et des Invalides, et de diplomates et dignitaires russes.

Le président de la République aurait souhaité organiser cette cérémonie aux Invalides, en présence de son homologue russe, lors de l’inhumation des restes, récemment exhumés, de ce haut gradé de la Grande Armée et condisciple du jeune Bonaparte à l’école de Brienne. La visite en France du président Poutine était prévue le 9 décembre 2019, il y a deux ans, dans une stratégie de rapprochement aussi entre Paris et Moscou: «Le président Macron essaie de remettre les relations franco-russes sur les rails. Il avait déjà relancé la chose d’une manière très intelligente à Versailles. Il s’était emparé du mythe de Pierre le Grand. Le général Gudin était un compagnon de Napoléon, et Emmanuel Macron a le sens des symboles,» selon le Secrétaire perpétuel de l’Académie française, Hélène Carrère d’Encausse.

Une opération de ‘soft power’ à l’attention de la Russie.

L’ambigü Macron a sacrifié à la ‘cancel culture’ et à ses critères non coercitifs de puissance, généralement d’un Etat: un message à la Russie de Poutine qui n’est pas tombé dans le guet-apens du donneur de leçons, préférant tourner le dos à cette opération tordue.

Pour le Kremlin, le projet archéologique, porté par la Fondation pour le développement des initiatives historiques franco-russes de Pierre Malinowski, aura été une belle opération de soft power, dans une période de tensions diplomatiques entre la France et la Russie. Le projet a été suivi de suffisamment près par le Château pour que soit envisagée, à l’occasion de l’inhumation du général Gudin, une rencontre entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine, qui n’aura finalement pas eu lieu ! Les gifles à Macron pleuvent…

Autre camouflet: le grand Napoléon n’aura reçu qu’un hommage discret du petit Macron, cédant encore à la ‘cancel culture’ américaine, qui fait de l’empereur une figure contrastée de notre Histoire moderne.

Installée sur un pupitre dans un angle de la cour d’honneur, Geneviève Darrieussecq, obscure figure du gouvernement, a lu un long discours au nom de Jean Castex, le Premier ministre, absent…

« Peuple russe dont l’héroïsme n’est plus à démontrer »

Sur la restitution de la dépouille du soldat, la ministre a ainsi tenu à adresser ses remerciements au gouvernement russe « pour ce geste plein de noblesse. » Et a tenu à souligner, dans son discours d’hommage au général Gudin, comment la « Grande Nation », en 1812, a soudain vu « la Grande Russie se dresser devant elle », un « peuple russe dont l’héroïsme n’est plus à démontrer ». L’hommage de la France de Macron va finalement au vaincu… Une berézina pour ses premiers de cordée.

Et la ministre de souligner le rôle qu’a eu l’Empire sur l’Histoire. « Cette Histoire dont la gloire, mais aussi les ombres, marquent encore aujourd’hui profondément notre pays et l’Europe. A Eylau, où il voit l’empereur à cheval, le jeune Hegel le désigne comme cette âme du monde sans laquelle le progrès n’aurait pas été possible. Nous sommes aujourd’hui évidemment (?) plus nuancés que le philosophe allemand, mais il serait vain de nier la place que l’héritage de l’Empire occupe aujourd’hui dans notre droit et nos institutions. » Encore un « en même temps »: à nouveau et toujours des zigzags.

Darmanin s’est invité au rassemblement des policiers: choquant ou malin?

L' »en même temps » inédit du ministre de l’Intérieur au côté de manifestants

L’émotion régit le débat permanent des chaînes d’information en continu: colère et indignation, mais elle imprègne aussi la communication politique, compassion et repentance. Apolline de Malherbe parle à Jean-Louis Debré des policiers qui ont la « sensation de recevoir des projectiles »… En fait, un jugement, une banalisation, voire une suspicion… 

Le dire et le faire se mêlent, au détriment de l’action et du progrès, si cher aux progressistes. La com’ résume en effet l’action politique, la réduisant celle-ci à une manipulation de l’opinion, le progrès et la réforme de la société dussent-elles en pâtir. Darmanin et Dupond-Moretti s’affichent main dans la main, tout en menant des politiques antithétiques, une scénarisasion destinée à plaire à tous, sans satisfaire personne et surtout pas l’intérêt général.

Les nouveaux défis en matière de sécurité n’échappent ni au prisme du débat en rond, ni au filtre de l’émotion, sous la pression d’un gouvernement politicien, plus soucieux de retarder la prise de décisions que de ne pas déplaire au plus grand nombre, constamment, et, à plus forte raison, dans ce temps électoral.

L’analyse critique est faussée par les émotions vraies ou affectées qui obligent les diseurs à l’alignement et à l’excuse. A propos des jeunes tueurs de 14 ans, Dominique Rizet parle sur BFM de « gamins » (costauds « de 1,90m », ce qui n’est guère la norme parmi les Européens), de « gosses malheureux » (tout en déclarant par ailleurs qu’ils ont « la tête vide » et manquent donc de repères, de sentiments et de jugement moral), au même plan que de « malheureuses jeunes filles » assassinées, (jetée vivante du haut d’un pont, par exemple), à qui « on » n’a jamais appris le respect ni inculqué le sens des valeurs de la vie. Pendant que la marche blanche se déroule encore, Rizet insiste sur le fait que le meurtrier n’a pas eu de chance: « un seul coup de couteau » (3 fois) a suffi, bien que le geste ait nécessité une force certaine, mobilisée par le « malheureux », « une seule fois » (sic).

La presse relaie dans la bouche de passants les jugements qu’elle a développés de la responsabilité des réseaux sociaux et des jeux vidéo, sans jamais mettre en cause les séries policières télévisées affichant en prime time des scènes effarantes de violences, dont des coups de genou dans les parties génitales et des suggestions claires d’abus sexuels, et des gros plans de corps sauvagement meurtris et d’investigations glauques en salle d’autopsie par des médecins légistes débridés et rigolards dans la routine de leur vie professionnelle, sujet de divertissement familial.

Le débat public est toujours émaillé de réglements de comptes politiques (les couteaux succéderont-ils aux gants de boxe de Paul Amar lors du débat Tapie-JM Le Pen au 20 Heures » de France 2 en 1994, en pleine campagne des élections européennes?), et de bonnes intentions sans suites –hier «solidaire avec les des soignants», aujourd’hui «solidaire avec les des policiers»–, mais débat public rarement étayé par une vision claire de la situation ou de l’avenir. Vide de toute proposition concrète et adaptée à l’époque, dont la population est en cours de renouvellement.

Un site gauchiste d’information évoque pêle-mêle l’assassinat de deux fonctionnaires à leur domicile, par un terroriste islamiste d’abord, une agent administrative au commissariat par un dealer ensuite, auxquels ce site omet d’associer les fanatiques religieux qui manient le couteau de boucher quand les jeunes enracinés de 1,80 m en sont encore à l’Opinel. L’actualité a fait prendre de nouveau (et fugitivement) conscience de la responsabilité des acteurs politiques, élus et journalistes, annonceurs et chaînes de divertissement (émissions pour la jeunesse comme de télé-réalité pour ados décérébrés), de ce que cette presse gauchiste appelle des « périls encourus par les forces de l’ordre aujourd’hui, » les risques du métier »… Tandis que le CSA ne se sent ni coupable, ni même responsable, ce type de medium abaisse quotidiennement son lectorat 30 ans en arrière, au niveau du FN et des « détails de l’Histoire » par son patron, en 1991 et 2015.

Il y a un an, la couverture complaisante de la manifestation du Comité Adama, place de la République à Paris, pointant LES «violences policières», fit apparaître dans le débat public des notions, rampant dans les milieux racisés, de «racisme systémique» ou de «violences systémiques» dont la gauche islamo-gauchiste par ces mêmes forces de l’ordre, globalement, sans détail. Au jeu de l’émotion, les partisans du « pas de vagues » ont la part belle.

Le mythe longtemps entretenu par les gauches d’une police droitière ne résiste pas à la réalité des faits ne tient plus la route. Le principal syndicat de policiers en tenue, la FASP, était marqué à gauche, preuve que les menées idéologiques relayées par cette presse. Pour demander une « réponse pénale » plus ferme face aux agressions à l’encontre des forces de l’ordre, les fonctionnaires de police étaient unis, de droite et de gauche, en intersyndicale rassemblant

SGP Police-FO, Alliance ou UNSA, ex-FASP (SCPN-UNSA) ou indépendant, dénonçant une « individualisation exacerbée des peines » et un « empilage de dispositifs qui vident les peines de leur sens ».

Le rassemblement devant l’Assemblée nationale est aussi une manière de rappeler aux élus qu’ils « doivent prendre leurs responsabilités et au besoin légiférer pour faire en sorte que tout ce qu’on vient de vivre ne se reproduise plus », détaille Fabien Vanhemelryck, Secrétaire général d’Alliance.

« Je suis venu pour soutenir tous les policiers comme les Français », a assuré le ministre Darmanin. 

Que des responsables politiques se rendent à la manifestation d’un groupe social quel qu’il soit semble pour le moins compréhensible, ce qui est très surprenant c’est de voir, sans doute pour la première fois, un ministre de l’Intérieur se rendre à une manifestation de policiers, ce qui peut être une manière de se dédouaner de ses responsabilités politiques en mettant en scènes ses affects et son émotion. Nous y revoilà! Message malin subliminal: les policiers ne manifestent pas contre le pouvoir. Si le ministre est quelque peu hué devant le Palais Bourbon, l’ensemble ne lui est pas personnellement hostile. Les cibles sont la majorité présidentielle et les décideurs de la justice.

Darmanin innove. Et fracture.

Si le ministre de l’Intérieur est «le premier flic de France», dixit Clémenceau, il n’en est pas le premier syndicaliste policier du pays. C’est ce qui fait la différence entre Etat républicain et Etat policier…

Les frères ennemis Darmanin/Dupond-Moretti confirment la fracture d’une majorité factice

Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, et le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, à l’Elysée, à Paris, le 28 avri.
Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, à l’Elysée, à Paris, le 28 avril 2021: se parlent-ils?

La participation, mercredi, du ministre de l’Intérieur à la manifestation de policiers – dénonçant le laxisme de trop de juges – met en difficulté leur ministre qui s’est déclaré celui des détenus. Aujourd’hui, par force, il est question, non des coupables, mais de leurs victimes.

Le premier, décrit comme malin, roublard et ambitieux, incarne l’aile droite de la macronie. Le second, sanguin, grande gueule et spécialiste en boulettes, penche à gauche.

L’arrivée, à l’été 2020, de Gérald Darmanin, ex-« Sarkozy boy », au ministère de l’Intérieur, couplée à celle de l’ancien avocat pénaliste, surnommé « Acquittator », Eric Dupond-Moretti à la Justice, devait faire bouger les lignes. D’un côté, une star des barreaux pour les media buzzeurs, de l’autre, Gérald Darmanin, « le plus beau trophée de Macron à droite », selon le sénateur (Les Républicains, LR) de Paris Pierre Charon. Comment deux personnalités centripètes pouvaient-elles «  étoffer le régalien? De point faible de Macron, la Justice devient le caillou dans son mocassin pour la dernière longueur du quinquennat.

La présence de Darmanin à la manifestation des forces de l’ordre, mercredi 19 mai, au milieu de cadres du Parti socialiste (PS), de ceux de LR et, surtout, du Rassemblement national (RN), que « chasse » Eric Dupond-Moretti, un chasseur «passionné» qui s’en est pris aux «ayatollahs de l’écologie» dans la préface d’un livre du président de la Fédération nationale des chasseurs aujourd’hui en campagne des régionales, est vécu comme une provocation, une opposition frontale, par le garde des Sceaux. 

Que dire en effet du slogan : « Le problème de la police, c’est la justice ! », scandé par les syndicats de policiers ?

« Il n’y a ni laxisme ni angélisme de la part de la justice. C’est Eric Dupond-Moretti qui a raison ». Mais, dans la foulée de Pierre Person, c’est l’avis de Sacha Houlié, député LREM, démissionnaire en septembre 2020 du bureau exécutif de LREM, ainsi que de son poste de responsable des relations avec les acteurs politiques et sociaux.

A en croire l’exécutif, il n’y a ni incohérence ni schizophrénie dans la démarche. Chacun était, mercredi, dans son rôle. « Où est le problème ? », s’interroge un conseiller anonyme de l’exécutif, soulignant que l’épreuve traversée par Eric Dupond-Moretti a pu lui permettre de s’affirmer en défenseur des magistrats, qui, jusqu’ici, se méfiaient de lui. « Il faut que Beauvau tienne son administration. Le ministre de la Justice, lui, n’a pas autorité sur les magistrats, mais doit s’assurer de leur respect », souligne-t-on, compréhensif, dans l’entourage du garde des Sceaux.

Bilan: à malin, malin et demi? Ce psychodrame laisse police et justice face à face. L’émotion ne fait pas monter le dossier de la sécurité au sommet de la pile.

Gendarmes tués : l »en même temps » de Macron contamine Mélenchon

Accusé de démagogie, Mélenchon se dit “ému” après avoir ironisé sur le métier “trop dur” des forces de l’ordre

Alors qu’il ne manque pas une occasion d’afficher son mépris des forces de l’ordre, le député insoumis a fait dans l’émotion après la mort de trois gendarmes, mercredi.

Quand il s’agit d’agents de l’Etat chargés d’assurer la sécurité des Français, Jean-Luc Mélenchon alterne haine et compassion, avec une tendance plus prononcée pour la première. Mais sur Twitter, mercredi 23 décembre, c’est la seconde qu’il a donné à voir, après la mort de trois gendarmes en exercice dans le Puy-de-Dôme, le même jour.

« Après avoir porté le costume de pyromane… »

« Pensées émues pour les familles des gendarmes assassinés. Que ceux qui sous-estiment ce qu’est la violence conjugale et ses auteurs méditent ce que nous venons de vivre là », a écrit le leader de La France insoumise, sur Twitter. Pourtant, sur BFM TV, le 12 novembre dernier, le député des Bouches-du-Rhône tenait un discours bien plus sévère à l’égard des forces de l’ordre, visant, cette fois, les policiers. « La même question se pose pour les militaires. Si le métier paraît trop dur, il faut en faire un autre », disait-il alors, admettant que « les policiers font un métier difficile », mais que « d’autres métiers sont difficiles. Il y a 565 morts par an au travail ».

Le journaliste Robert Namias, également sur Twitter, a attribué à Jean-Luc Mélenchon, après son message, un « 10 sur l’échelle de Richter de la politique politicienne. Et de la démagogie la plus vile ». « Que ceux qui refusent de soutenir nos forces de l’ordre et les jettent régulièrement à la fureur des réseaux sociaux méditent ce que nous venons de vivre », a abondé la députée LREM Aurore Bergé, sur le même média social. Et son collègue de la majorité, Bruno Questel, de dénoncer Jean-Luc Mélenchon, qu’il accuse d’« endosser le costume de pompier après avoir porté celui de pyromane depuis 3 ans ».