Législatives : « colère » de Bernard Cazeneuve contre « l’alliance conclue à gauche »

L’ancien premier ministre PS prône l’union « entre les formations démocratiques et républicaines de gauche ».

Affirmant qu’il n’a « pas cessé d’être de gauche », à la différence des suiveurs d’Olivier Faure, Cazeneuve qui n’a jamais caché son hostilité aux revolutionnaires de La France insoumise, a dénoncé la nouvelle alliance de gauche, le Nouveau Front populaire, autrement nommée NUPES 2, pour les élections législatives, ce jeudi 20 juin lors d’une réunion publique en Charente-Maritime.

« Si je suis en colère contre l’alliance qui a été conclue à gauche, ce n’est pas parce que j’ai cessé d’être de gauche c’est parce que j’ai considéré que l’alliance devait se faire entre les formations démocratiques et républicaines de la gauche », a-t-il déclaré.

Rejet de « l’extrême gauche »

Bernard Cazeneuve était ce jeudi en déplacement à Puilboreau (Charente-Maritime) pour soutenir le député sortant Olivier Falorni, candidat sous l’étiquette divers gauche, pour se distinguer de la Nupes 2, et qui siégeait dans le groupe MoDem.

« Jamais dans son histoire, même au moment du Front populaire, nous n’avons vu la gauche s’allier avec l’extrême gauche », a ajouté l’ancien Premier ministre, citant « l’union de la gauche » réalisée par François Mitterrand en tenant à l’écart « les forces qui mettaient une ardeur particulière à se tenir à distance des principes de l’Etat de droit au motif que la révolution est toujours plus belle que l’ordre républicain. » Cazeneuve dissimule les quatre ministres communistes de Mitterrand, Charles Fiterman, Jack Ralite, Marcel Rigout et Anicet Le Pors, ou ceux de Jospin, Jean-Claude Gayssot et Marie-George Buffet.

Devant plusieurs centaines de personnes, Bernard Cazeneuve a notamment ciblé la France insoumise, qui « n’arrive pas à considérer que le Hamas est une organisation terroriste ».

Malgré la réussite de ses mairies, le RN reste « l’ennemi » prioritaire

Mais « l’ennemi de cette élection », reste « le Rassemblement national », selon l’ancien ministre de l’Intérieur de 2014 à 2016.

« On dit ‘On les a jamais essayés’. Si, on les a essayés, en… 1939. Le FN, qui est l’ancêtre du RN, est issu de cette histoire-là, de la collaboration, de l’antisémitisme, du refus des principes de l’Etat de droit, de la collaboration, la conduisant à oublier les principes de la Révolution française dans une collaboration abjecte », a fustigé Bernard Cazeneuve, considerant que les petits- enfants sont responsables des actions et idées de leurs grands-parents.

« Ils disent qu’ils n’ont jamais gouverné. Nous nous savons qu’ils ont gouverné et qu’ils sont issus de ce gouvernement là. Je suis venu vous mettre en garde contre la tentation qu’ils ne sont plus les mêmes », a-t-il encore averti.

Le RN gère des villes moyennes comme Perpignan, Fréjus, Bruay-la-Buissière ou Moissac et, aux européennes 2024, 97 % des communes de 500 à 2.000 habitants ont fait confiance au RN en le plaçant en tête.

Des figures de gauche – Cazeneuve, Le Drian, Guedj, Valls, etc – refusent le Nouveau Front populaire

D’autres – Jospin, Ayrault, Faure, etc – s’en arrangent

Anciens ministres, députés ou barons socialistes, plusieurs figures ont pris la parole pour dénoncer l’alliance de gauche, étrangement dénommée Nouveau Front populaire, par rapport a un passé peu glorieux.

La campagne éclair du premier tour des législatives du 30 juin a officiellement débuté lundi et le feuilleton des alliances à droite comme à gauche se poursuit.

Les blocs sont en place dans les 577 circonscriptions. À gauche, la majorité des forces se sont rassemblées derrière l’étiquette du Front populaire. Mais certaines figures refusent de rejoindre ce rassemblement. Tour d’horizon.

Jérôme Guedj, député sortant socialiste

Le député socialiste sortant dans la 6e circonscription de l’Essonne avait expliqué dès la semaine dernière qu’il serait candidat à sa réélection, mais pas sous l’étiquette du Front populaire.

« Par devoir de vérité et de loyauté envers les électeurs, je ne peux pas m’associer à l’investiture de LFI liée à cet accord, en raison des divergences profondes avec la direction de cette formation relatives à la brutalisation du débat public. Je l’ai intimement et violemment subie », avait précisé Jérôme Guedj, revenant sur le conflit l’opposant à Jean-Luc Mélenchon. Sur BFMTV, il a rappelé que le leader insoumis avait eu des « mots indignes » à son égard, l’assignant notamment à son identité.

Le député sortant aura face à lui une candidate Génération.s, Hella Kribi-Romdhane, sa suppléante depuis 2022, qui a annoncé se présenter « au nom du Nouveau Front populaire » avec un suppléant de la France insoumise (LFI). Le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, lui a apporté son soutien, ainsi que l’écologiste Sandrine Rousseau.

Du côté des députés, un autre élu sortant, Bertrand Petit, se représente dans le Pas-de-Calais sans l’étiquette Front populaire. « Je ne m’inscris pas dans ce front populaire, je ne partage pas les idées des extrêmes quels qu’ils soient. J’ai toujours été clair à ce sujet », a-t-il déclaré dans L’Indépendant.

Bernard Cazeneuve, l’ancien ministre

L’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve a également dénoncé ce nouveau Front populaire sur son compte X (anciennement Twitter). « L’extrême droite menace gravement l’unité et la concorde nationale. Il faut pour l’affronter de la clarté sur les valeurs et de la sincérité dans les convictions. Le rassemblement de la gauche de gouvernement ne peut pas se faire avec LFI. Sauf à tout trahir de l’héritage de Blum », écrivait-il dès la semaine dernière.

« Vous pouvez être seul à prendre une décision sans pour autant vous sentir isolé, justifiait-il dans un entretien accordé au Point. Mais il faut aussi parfois accepter d’être seul à défendre une position que l’on sait juste, forgée dans des convictions authentiques et l’expérience de l’action publique. Ce n’est pas la solitude qu’il faut redouter en politique, mais les accommodements nés des arrangements. »

L’ancien député, fondateur du mouvement La Convention, soutient la candidature du député sortant Olivier Falorni, inscrit à l’Assemblée nationale dans le groupe MoDem et indépendants sur la première circonscription de Charente-Maritime.

Autre figure historique de la gauche : Julien Dray, le cofondateur de SOS Racisme et ancien socialiste, a lui aussi dénoncé l’alliance à gauche. Sur son compte X, il fustige « un accord pourri », ajoutant que « des milliers d’électeurs de Glucksmann n’accepteront pas de plier face au hamasland de LFI ».

Jean-Yves Le Drian, ancien socialiste devenu soutien de Macron

L’ancien ministre des Affaires étrangères de Macron, ex-figure du socialisme, a critiqué le nouveau Front populaire, rebaptisé « Nupes version 2 » dans une tribune intitulée « Ami social-démocrate, comment peux-tu ? », publiée dans la Tribune.

Dans ce texte, Jean-Yves Le Drian dénonce un programme qui mêle « démagogie et inconséquence ». Parmi les signataires, on retrouve également d’autres figures sociales-démocrates comme François Rebsamen, maire de Dijon et ancien ministre socialiste.

« Nous savons que les sociaux-démocrates authentiques et les écologistes raisonnables ne peuvent pas, par leur histoire, leurs combats, leurs convictions, partager un programme de gouvernement avec le NPA et LFI. Nous savons que beaucoup parmi eux ont vu leur espoir des élections européennes confisqué par des manœuvres d’appareils », poursuit le texte.

L’art de gouverner ne peut pas se réduire à un plaisir solitaire pyrotechnique, gronde Bernard Cazeneuve

Bernard Cazeneuve aurait aimé échanger avec Emmanuel Macron, en face à face, argument contre argument. Comme Bruno Retailleau à droite, le socialiste travaille le fond, mais, comme le sénateur vendéen, l’ancien Premier ministre socialiste ne sera pas invité à la réunion politique initiée par le chef de l’Etat, puisque celui-ci a limité la liste aux chefs de parti. Bernard Cazeneuve livre aux lecteurs du Point l’exclusivité de ce qu’il aurait pu dire au chef de l’Etat, après avoir lu le long entretien qu’il a accordé à l’hebdomadaire de François Pinault.

Le responsable socialiste, qui essaie de faire vivre à gauche un mouvement raisonnable de propositions dans la perspective de la présidentielle de 2027, délivre un argumentaire implacable mais équilibré. Il reconnaît dans les propos de Macron « une énergie, une conception du monde et de la société qu’il exprime avec clarté et brio souvent, et qui témoignent de ses capacités personnelles ». Mais il y perçoit aussi un exercice du pouvoir « exclusivement pyrotechnique et solitaire ». Le Point profite de son entretien politique du week-end pour lui poser quelques questions sur une gauche qui fait sa rentrée en ordre dispersé, dans un certain flou et perturbée par l’irruption dans le jeu du sulfureux rappeur islamiste Médine, ibvité des Journées d’éte des membres les plus radicaux de la NUPES, EELV et LFI.

Le Point : Le président tend la main aux oppositions. Allez-vous la saisir ?

Bernard Cazeneuve : La réalité, c’est que la main a été tendue à plusieurs reprises au président de la République, par des femmes et des hommes inquiets de la montée des tensions dans le pays et avant tout préoccupés de la cohésion de la nation. Il ne l’a jamais saisie. Au lendemain de sa réélection, en 2022, une grande coalition eut été possible, qui aurait permis aux partis ayant le sens des responsabilités de gouverner, à l’instar de ce qui se produit depuis longtemps en Allemagne. Sur des bases claires, des réformes d’intérêt général dont la France a besoin auraient ainsi pu être engagées, en faisant l’économie d’inutiles divisions, chacun gardant son identité et ses convictions.

La véritable modernisation de la vie politique eut été de franchir le pas, en développant la culture de l’écoute et surtout celle du compromis. Un autre choix a été fait à ce moment-là, consistant à mettre au pas toutes les composantes de la majorité et à spéculer sur la radicalité des oppositions. Il en est résulté une majorité relative à l’Assemblée nationale, un paysage politique dévasté et une progression significative du Rassemblement national, dans un pays de plus en plus fracturé.

La réforme des retraites a illustré la méthode à l’œuvre avec les partenaires sociaux comme avec les formations politiques : le chef de l’État décompose, expose, dispose. Mais tendre la main pour réformer, cela ne veut pas dire réformer à sa main ! Certes, Emmanuel Macron ne porte pas seul la responsabilité de cet état de fait. A gauche, une partie de l’opposition, accrochée sur des positions extrêmes, a également pensé pouvoir tirer avantage de ce jeu dangereux. J’ai suffisamment exprimé ce que m’inspirent ces comportements pour que chacun soit convaincu que je ne les approuve pas.

Aujourd’hui, mon sentiment est que les calculs et les arrière-pensées politiques ont dominé depuis plus d’un an – et davantage, hélas – et que la sincérité peine à se frayer un chemin. La crise de confiance à laquelle le pays est confronté ne peut donc que s’aggraver.

Emmanuel Macron avait annoncé une « initiative politique d’ampleur » avant ses vacances. Ses déclarations dans Le Point vous satisfont-elles ?

On attendait une main tendue. On voit surtout un doigt pointé. Un doigt pointé dans la seule direction qui vaille aux yeux d’Emmanuel Macron : la sienne. Un doigt pointé aussi sur ses prédécesseurs pour expliquer ce qui ne marche pas, tout ce qui fonctionne étant imputable à sa seule action.

Sur le régalien, la démonstration est spectaculaire. Le président sort l’ardoise magique pour effacer la création de 9.000 postes dans la police et la gendarmerie sous le quinquennat de François Hollande, le rehaussement des crédits de fonctionnement des forces de l’ordre, hors personnels, de plus de 20 % entre 2012 et 2017, la remise à niveau du dispositif de formation des forces de l’ordre… Puis, il sort le gourdin pour taper, à juste titre, sur la révision générale des politiques publiques mise en œuvre sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, alors même qu’il gouverne depuis six ans avec nombre de ses épigones. Ce doit être cela, la cohérence du « en même temps ».

Mais ce qui me frappe surtout, ce sont les silences et les carences dans l’interview-fleuve d’Emmanuel Macron : le principal sujet de la rentrée pour les Français est leur pouvoir d’achat rongé par l’inflation, avec une augmentation de près de 20 % de certaines denrées alimentaires en 18 mois, de 15 % du coût des fournitures scolaires, sans évoquer celui des carburants. Or, de cela, il n’est question nulle part. Il en va de même des ratés de la politique du logement, véritable bombe sociale à retardement.

On nous parle d’un monde liquide, pour traduire la dangerosité des temps actuels, alors que la classe moyenne et les plus modestes vivent dans un monde dur et violent, duquel ils désespèrent de pouvoir sortir un jour. Les Français qui travaillent ne sont pas épargnés, qui n’y arrivent plus, alors qu’ils ne ménagent pas leur peine. Cet entretien présidentiel laisse le sentiment inquiétant d’une réelle déconnexion, car les Français attendent plus une conférence sociale sur les salaires et le pouvoir d’achat, que nous demandons depuis plus de six mois, qu’un conclave entre les partis sur des sujets qui ne les concernent que de très loin.

C’est ce que vous retenez de cet entretien ?

Il y a chez Emmanuel Macron une énergie, une conception du monde et de la société qu’il exprime avec clarté et brio souvent, et qui témoignent de ses capacités personnelles. Mais l’art de gouverner ne peut pas se réduire à un exercice exclusivement pyrotechnique et solitaire. Ce qui me frappe dans les propos du chef de l’État en cette rentrée, c’est l’omission des questions centrales dont je viens de parler, mais aussi l’absence de voies et de moyens pour apaiser un pays fracturé et désormais continuellement sous tension en raison de décisions ou de réformes imposées sans concertation.

La verticalité théorisée par le président, l’abaissement des corps intermédiaires qu’il a entretenu, au point de donner parfois le sentiment d’aller jusqu’à l’organiser, son positionnement sur tous les sujets à tous les instants, tout cela, en fait, n’est pas moderne. On a le sentiment d’une gouvernance incapable de se corriger en fonction de ses propres erreurs, alors que l’extrême droite menace. La sortie de la crise démocratique profonde à laquelle notre pays est confronté ne peut pas résulter de la seule combinaison de la verticalité et du tactique.

Trouvez-vous des points de convergence avec lui ?

Oui, bien entendu. Comme lui, je suis européen, ardemment même, avec la conviction que l’Europe doit défendre ses intérêts autant que ses valeurs. Je crois à la nécessité de rétablir un ordre international faisant prévaloir le droit sur la force, la coopération pour éviter les confrontations. Je pense que ses préoccupations sur les questions éducatives sont justes et que le dédoublement des classes pour faciliter les apprentissages est un progrès qui s’inscrit dans la continuité des 60 000 postes créés dans l’Éducation nationale entre 2012 et 2017.

De même, poursuivre le renforcement des moyens des forces de l’ordre est nécessaire si l’on veut rebâtir une police de proximité et consolider le lien entre la police et les citoyens. Le prolongement de la réindustrialisation décarbonée, dans la continuité de la création de la BPI et du soutien aux grandes filières industrielles engagés par la gauche en 2012, est lui aussi justifié. Dans le contexte actuel, le sectarisme n’est pas de mise et l’opposition à une politique doit pouvoir s’exprimer sans démagogie, sans acrimonie et avec la seule préoccupation du pays.

Les désaccords restent profonds. Sur quels points ?

Depuis 2017, Emmanuel Macron mène une politique sociale et fiscale injuste. La recherche de l’efficacité économique ne peut pas être orthogonale à la justice sociale. Gouverner le pays dans l’ignorance des corps intermédiaires et l’affaiblissement des institutions – y compris du Parlement – aboutit à un grave court-circuit démocratique, dont l’extrême droite est la principale bénéficiaire. Une fois encore, la verticalité provoque une atrophie institutionnelle qui ne garantit par ailleurs aucun surcroît d’efficacité.

Enfin, les propos du président sur les enjeux écologiques, qui sont fondamentaux pour les jeunes générations et pour la vie sur la planète, donnent le sentiment d’une ambition sacrifiée sur l’autel d’un pragmatisme destiné à ne gêner personne. Or, s’il est exact que l’on ne parviendra à rien en développant une conception exclusivement punitive de l’écologie, rien ne changera non plus sans bousculer des habitudes et des organisations…

Voyez-vous plus clair dans la ligne macroniste ?

Le macronisme, s’il existe, est un situationnisme qui consiste à prendre des positions successives et parfois contradictoires, en fonction du contexte et des situations, en essayant d’en tirer le meilleur profit politique, en usant de tous les artifices attendus de la communication et en spéculant sur l’amnésie des Français. Emmanuel Macron axe son second mandat sur le projet de « faire nation ».

Ses déclarations vont-elles dans le bon sens ?

Pour faire nation, il faut apaiser, rassembler et éviter les propos qui blessent et qui antagonisent. En France, les valeurs républicaines – dont le principe de laïcité – ne sont pas négociables, comme doivent être respectés le droit et l’autorité de la chose jugée. Faire nation, c’est aussi lutter contre les processus de relégation sociale et territoriale, en plaçant la justice au cœur des politiques publiques. Nous avons donc une marge incontestable de progression car, depuis 2017, des Gilets jaunes au mouvement populaire sur les retraites, en passant par l’affaiblissement du corps préfectoral [outrancièrement féminisé] et du corps diplomatique [Colonna est blessante], l’action conduite a trop souvent abouti à affaiblir l’Etat, dans un pays où l’Etat a préexisté à la nation et où la nation s’est toujours incarnée dans l’Etat.

Au centre de ce projet, l’éducation. Son plan de lutte contre le décrochage scolaire vous semble-t-il à la hauteur ? Raccourcir les vacances scolaires et enseigner l’histoire de façon chronologique, de bonnes idées ?

L’Ecole est le projet par lequel on peut refaire nation en effet, même si on ne peut faire peser sur les épaules des seuls enseignants le sursaut moral et civique attendu. Ce qui a été engagé depuis 2012, avec l’augmentation des moyens de l’Éducation nationale, et qui s’est poursuivi avec le dédoublement des classes, en début de scolarité des élèves, doit être continué et conforté. La revalorisation du salaire des enseignants doit également se poursuivre selon des critères à définir en concertation avec les organisations syndicales. Il en est de même pour le temps des vacances scolaires qui doit être raccourci et l’ajustement des épreuves du baccalauréat pour renouer avec un véritable troisième trimestre d’apprentissage, mais là aussi dans l’écoute des acteurs concernés et non dans leur contournement.

Emmanuel Macron va-t-il assez loin sur l’immigration ?

Quand j’étais ministre de l’Intérieur, Emmanuel Macron – alors ministre lui aussi, c’était en 2016 – considérait que la politique que je conduisais en matière d’immigration était insuffisamment généreuse. Une fois parvenu au pouvoir, il a changé radicalement d’approche. C’est cela le situationnisme. Je pense pour ma part qu’il faut de la constance et de la cohérence.

Ceux qui relèvent de l’asile doivent être dignement accueillis et, pour cela, nous devons pouvoir reconduire à la frontière ceux qui doivent l’être, dans le cadre d’un contrôle efficace des frontières extérieures de l’Union européenne. Je partage par ailleurs la nécessité de renforcer les politiques d’intégration, qu’il s’agisse de l’exigence attendue pour la maîtrise de notre langue ou de la connaissance des valeurs et des lois qui font la France par ceux que nous accueillons sur notre sol.

A-t-il tiré les leçons des émeutes urbaines de juillet ?

Les émeutes ont fait l’objet d’une réaction adaptée des pouvoirs publics, dans un contexte de troubles graves à l’ordre public, mais elles ont aussi révélé les fractures sociales et territoriales, douloureusement vécues, dans ce que l’on a appelé les territoires perdus de la République. Le retour de l’autorité est nécessaire, indispensable, mais il ne suffira pas à corriger des maux profonds, qui font écho à la perte de sens, de valeurs et d’appartenance à la nation. Il faut donc agir sur tous les fronts – la lutte contre les discriminations, le rapprochement police-population, l’éducation, l’aménagement urbain… – pour sortir de la crise. En ayant conscience qu’il faudra de la volonté et du temps.

Emmanuel Macron affirme avoir « redressé la filière nucléaire ». Vous partagez ce point de vue ?

Il a engagé ce redressement, mais trop tard, après avoir trop longtemps hésité.

Sa position sur l’Ukraine est-elle juste ?

Elle me paraît plus ferme et plus juste qu’à l’origine, lorsque le président pensait parvenir seul à ramener Poutine à la raison après avoir fait le constat erroné que l’Otan était en situation de mort cérébrale.

Nicolas Sarkozy a fait sensation en disant qu’il ne fallait pas que l’Ukraine rejoigne l’Otan et l’Union européenne. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que c’est une curieuse manière de soutenir un peuple qui se bat pour la reconnaissance de sa souveraineté et de lui donner de l’espoir. Ce qui est vrai, en revanche, c’est qu’on ne pourra pas intégrer l’Ukraine dans l’Otan et dans l’Union européenne aussi longtemps que nous ne serons pas parvenus à faire sortir la Russie de l’Ukraine.

La gauche fait sa rentrée en ordre dispersé, avec une guerre des chefs et sans ligne précise. Elle rejoue « que le meilleur perde » ?

Il faut d’urgence tourner la page de l’irresponsabilité et de l’outrance, donc reconstruire, à gauche et pour la France, un espace de crédibilité et d’audace, d’alternance et d’espérance. Il se produit aujourd’hui ce que j’avais redouté quand la Nupes a été créée. Pour tourner la page d’un cartel de circonstances où les arrière-pensées ont dominé, il faut désormais rassembler les forces de gouvernement au sein de la gauche et chez les humanistes.

La direction du Parti socialiste m’explique qu’on ne peut pas construire l’unité des socialistes contre l’unité de la gauche. Je lui réponds que pour ne pas avoir compris que l’unité de la gauche suppose une grande force de responsabilité et de gouvernement autour d’une ligne crédible, ils ont réussi à la fois la désunion des socialistes et celle de la gauche. Nous allons donc poursuivre autour de La Convention le travail engagé.

Le cas Médine qui brouille et embrouille une partie de la gauche : une fable politique désespérément contemporaine ?

On ne construit rien de solide, en tournant le dos à un héritage et à des valeurs. Nous sommes les tenants historiques de la laïcité, de l’unité et de l’indivisibilité de la République. Ceux qui ont fait le choix du clientélisme et du cynisme chimiquement pur se fourvoient. Nous devons le dire sans ambiguïté.

Et vous, allez-vous prendre une initiative politique dans les semaines qui viennent ?

Je vais poursuivre avec sincérité et de façon désintéressée ce que nous avons collectivement engagé avec la création de La Convention qui, lors de sa réunion à Créteil en juin, a redonné l’espoir à beaucoup. Avec déjà plus de 10 000 adhérents, le mouvement va continuer à bâtir des propositions et consolider son maillage local. Avec le souci de la refondation de la gauche républicaine dont le pays a tant besoin à la faveur notamment des prochaines élections européennes.

Bernard Mabille décrypte la situation:

Ian Brossat dénonce la participation du PCF à la Nupes

« La Nupes ne nous permet pas de gagner, » déplore l’adjoint à la maire socialiste de Paris

A la mine des « jours heureux », de Fabien Roussel, qui avait eu cette formule un marqueur de sa campagne présidentielle, a succédé la mine des jours déçus des communistes, alors que Roussel est la personnalité préférée des électeurs de gauche, selon un récent sondage Elabe pour Les Echos. Il devance Jean-Luc Mélenchon, François Ruffin et François Hollande, écrasant les pestes vertes Tondelier et Rousseau.

Si le secrétaire national du Parti communiste est placé aussi haut, Parce qu’il incarne « une gauche populaire, authentique, qu’on a bien connue et qui a disparu », selon Ian Brossat, porte-parole du PCF et adjoint à la maire de Paris en charge du logement, le secrétaire national du Parti communiste se détache du lot de la Nupes, qui s’est émue que Fabien Roussel partage sa recette de salade de hareng dans un camping corse.

La polémique aoûtienne est révélatrice d’un « mépris de classe », assène Brossat, qui ajoute qu’« on ne peut pas se faire aimer du peuple si l’on déteste tout ce qu’il est ». La césure entre le PCF et les Insoumis, notamment, semble actée… Pour la première fois, un cadre communiste explique sans ambages que l’union de la gauche ne devra pas se faire sur les mêmes bases qu’en 2022. Comprendre : sans LFI et, si possible, autour du projet de Roussel. Ian Brossat revient aussi sur son vieux combat contre la prolifération d’Airbnb à Paris, l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne (UE) et à l’Otan, l’université d’été du parti à Strasbourg et le refus d’y inviter le rappeur Médine…

Le Point : Partagez-vous l’avis de Nicolas Sarkozy, qui estime, dans un entretien au Figaro, que l’Ukraine ne devrait rejoindre ni l’Otan ni l’UE, mais « rester neutre » ?

Ian Brossat : Nicolas Sarkozy n’est pas une référence pour nous en matière de politique internationale. C’est le moins que l’on puisse dire. Néanmoins, sur le fond, je ne pense pas que l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne ou l’Otan soit une bonne idée. Au Parti communiste, nous ne sommes pas favorables à un nouvel élargissement de l’UE.

Depuis plusieurs décennies, nous n’avons cessé de faire entrer dans l’UE des pays qui n’ont pas du tout le même modèle social que le nôtre. Cet élargissement sans fin nous tire inévitablement vers le bas. Quand vous pensez que la Moldavie frappe à la porte de l’UE alors que son smic est à 46 euros par mois ! Quant à l’Otan, permettre à l’Ukraine de l’intégrer renforcerait une logique de blocs qui ne serait pas propice à la résolution pacifique du conflit.

En cantonnant l’Ukraine à cette neutralité, ne se plierait-on pas aux désidératas de Poutine ? N’est-ce pas une façon de dire « puisque Poutine ne veut pas qu’on le fasse, ne le faisons pas » ?

Il faut être pragmatique. La question essentielle, c’est : comment sort-on de ce conflit ? Or, de fait, l’entrée de l’Ukraine dans l’Otan ne réglerait pas le conflit ; elle l’aggraverait. Notre seule boussole doit être la résolution pacifique de ce conflit.

L’organisation, par exemple, de « référendums strictement encadrés par la communauté internationale » peut-elle y contribuer ?

Oui, je suis favorable à l’autodétermination des peuples.

A la Ville de Paris, où vous êtes adjoint en charge du logement, vous avez remporté plusieurs bras de fer avec Airbnb, notamment la limitation de la location des résidences principales à 120 jours par an. Envisagez-vous de mettre en œuvre d’autres mesures à la rentrée pour renforcer la régulation de la plateforme ?

Il faut d’abord rappeler que nous revenons de loin ! Lorsque je me suis emparé de ce sujet en 2014, personne ne s’y intéressait. Nous avons perçu très tôt que le développement anarchique d’Airbnb risquait de se faire au détriment du logement et du cadre de vie des Parisiens.

Nous avons donc construit tout un arsenal juridique et je constate que toutes les initiatives que nous avons lancées ont porté leurs fruits : la limitation de la location des résidences principales à 120 jours par an, l’interdiction (sauf autorisation exceptionnelle) de location de résidences secondaires sur les plateformes de location touristique, la mise en place d’un numéro d’enregistrement qui fait qu’un loueur doit désormais s’enregistrer auprès des services de la ville… Tout cela fonctionne.

D’ailleurs, sur ce dernier point, Airbnb a été condamné en 2021 à 8 millions d’euros et, depuis, la plateforme ne publie plus d’annonces sans numéro d’enregistrement. Les propriétaires qui fraudent ont été sanctionnés à hauteur de 6,5 millions d’euros depuis deux ans et demi. Sans ces mesures, nous aurions été totalement envahis par Airbnb dans les quartiers touristiques.

Faut-il désormais aller plus loin ? Evidemment. Je pense à la fois à des mesures que la Ville de Paris va prendre et à des revendications que nous portons auprès du législateur. Sur le plan strictement municipal, nous avons voté, il y a maintenant deux mois, un nouveau plan local d’urbanisme (PLU) qui doit nous permettre d’interdire totalement la création de nouvelles surfaces dédiées à la location touristique à l’année.

Elles seront purement et simplement interdites dans les quartiers les plus impactés par le développement de ces plateformes, donc les quartiers les plus touristiques : Montmartre, le Marais, les abords de la tour Eiffel… Le PLU est maintenant soumis à une enquête publique. Il faut donc compter un peu plus d’un an pour que ces mesures puissent être appliquées.

Et sur le plan législatif ?

Nous portons deux exigences. Premièrement, il n’est pas normal que les propriétaires qui louent sur Airbnb ou d’autres plateformes bénéficient d’une niche fiscale. Il faudrait au moins aligner la fiscalité de ces locations touristiques sur la location classique. Je souhaite que, dans le cadre du prochain projet de loi de finances, cette hérésie soit purement et simplement supprimée.

Deuxièmement, il y a la question des passoires thermiques. Ce qui est prévu aujourd’hui, c’est l’interdiction progressive, à la location classique, des logements qui sont des passoires thermiques. Pour l’instant, cette mesure ne s’applique pas aux locations touristiques. Mon souhait est que cela change et que les passoires thermiques soient aussi interdites à la location sur les plateformes de type Airbnb. Juste avant l’été, le gouvernement a annoncé son intention de changer les choses. Il est temps qu’il passe aux actes car, pour l’instant, l’exécutif avance à la vitesse d’un escargot qui aurait perdu le sens de l’orientation…

Vous organisez l’université d’été du PCF à Strasbourg, du 25 au 27 août. Vos partenaires de la Nupes ne figurent pas parmi la liste des intervenants. Vous faites bande à part ?

Non, nous avons envoyé une invitation à l’ensemble des forces de la Nupes, qui ont loisir de participer à notre université d’été. Le PC a également un calendrier particulier puisque le grand moment de débat public, pour nous, reste la Fête de l’Humanité, qui a lieu le deuxième week-end du mois de septembre. En ce qui concerne notre université d’été, elle remplit d’abord un rôle classique de formation des adhérents. D’autres universités d’été ne ressemblent plus à cela mais nous, nous en sommes tenus à cette tradition. Nous n’en faisons pas un moment de grand show politique.

C’est la raison pour laquelle vous n’avez pas invité le rappeur Médine, dont la participation aux universités d’été d’EELV et de LFI a fait couler beaucoup d’encre ?

Il n’a jamais été question de l’inviter.

La Nupes est-elle dépassée ? Est-ce devenu « un boulet, une camisole », selon l’expression de Fabien Roussel ?

La Nupes a partiellement et ponctuellement rempli sa mission il y a un an, au moment des élections législatives. Elle a permis à la gauche, qui aurait pu être rayée de la carte, d’en sortir vivante. Cela dit, l’alliance ne nous a pas permis de gagner. Aujourd’hui, la gauche est encore trop faible : nous ne représentons qu’un quart des députés à l’Assemblée nationale ! Il faut de toute urgence se donner les moyens de remporter des victoires. La Nupes, dans sa configuration actuelle, nous le permet-elle ? Je n’en suis pas certain. Il faut aller au-delà de ce que nous avons fait et arrêter de croire que la Nupes serait une sorte d’œuvre sacrée que l’on n’aurait pas le droit de toucher.

Faut-il l’élargir au reste de la gauche, notamment aux figures qui y sont notoirement hostiles, comme Bernard Cazeneuve ?

Pour gagner, il ne suffira pas d’agréger des forces supplémentaires. Le sujet, c’est notre base sociale. Elle est trop étroite. Nous enregistrons de très bons résultats dans les grandes villes et dans les quartiers populaires, mais nous réalisons des contre-performances dans la France périphérique. Nous ne parlons pas aux classes populaires des campagnes. Or, pendant le mouvement de contestation de la réforme des retraites, il y a eu des mobilisations énormes dans les petites et moyennes villes. Ceux qui ont marché contre le report de l’âge légal de départ à 64 ans ne votent pas tous pour nous, loin de là. Cela doit nous interpeller. Ce n’est pas une question de casting, c’est une question de fond.

Comment analysez-vous le récent sondage qui place Fabien Roussel en tête des personnalités préférées des électeurs de gauche, devant Jean-Luc Mélenchon, François Ruffin et François Hollande ?

C’est la reconnaissance de ce que Fabien Roussel fait depuis des années et le début de quelque chose. Pourquoi est-il à ce niveau de popularité ? Parce que les Français reconnaissent la sincérité de son engagement, sa générosité, ses combats sur la nécessaire revalorisation du travail, sur le partage des richesses, sur la défense des valeurs de la République. Il incarne une gauche populaire, authentique, qu’on a bien connue et qui a disparu.

Comment la gauche peut-elle, justement, renouer avec les classes populaires ? Faut-il s’inspirer des caravanes de LFI, qui sillonnent la France l’été ?

Inspirons-nous d’exemples locaux. La victoire de Jean-Marc Tellier, désormais député du Pas-de-Calais, dans une circonscription où Marine Le Pen était majoritaire à la présidentielle et où le député sortant était RN est, de ce point de vue, éclairante. Pour reconquérir les classes populaires, il faut les prendre au sérieux, ne pas les prendre de haut, accepter de parler de leurs problèmes de la vie quotidienne et ne pas cliver inutilement sur un certain nombre de sujets.

Pourtant, même lorsque vous ne cherchez pas à cliver, vous êtes pris dans des polémiques. Une simple vidéo de Fabien Roussel partageant sa recette de salade de hareng dans un camping a beaucoup fait réagir. Comment s’entendre sur le fond quand on s’invective à propos de telles futilités ?

C’est ridicule mais assez révélateur. On ne peut pas se faire aimer du peuple si l’on déteste tout ce qu’il est. Tout cela suinte le mépris de classe. Si Fabien Roussel atteint ces niveaux de popularité, c’est que les Français savent qu’il ne se fiche pas d’eux. Il n’a pas commencé à fréquenter le camping quand il est devenu candidat à la présidentielle. Il ne joue pas de rôle. Certains devraient arrêter de créer de toutes pièces des polémiques absurdes.

Comment comprendre la stratégie de Jean-Luc Mélenchon, ses outrances, ses remontrances et ses sorties complotistes ? Que cherche-t-il, selon vous ?

Jean-Luc Mélenchon vit sa vie. Notre ambition, c’est de permettre à la gauche de gagner avec tous ceux qui le souhaitent. L’union est nécessaire mais, pour être gagnante, elle ne doit pas se faire sur les mêmes bases qu’en 2022.

Aux sénatoriales, les Insoumis ne font pas partie de l’accord entre écologistes, socialistes et communistes. Aux européennes, chaque composante de l’alliance devrait avoir son propre candidat. Peut-on être unis tout en ayant des listes séparées à chaque échéance électorale ?

L’union prend des formes différentes. Rappelons que même lorsque toute la gauche participait au gouvernement de la gauche plurielle de Lionel Jospin, chaque composante avait sa liste aux européennes de 1999. Nous ne portons pas le même projet sur l’Europe. Il serait insensé que nous nous retrouvions sur une liste de gens qui défendent les traités européens que nous avons rejetés. Une campagne menée sur des bases aussi friables ne tiendrait pas deux semaines.

Emmanuel Macron a annoncé une « initiative politique d’ampleur à la rentrée ». Qu’en attendez-vous ? Y participerez-vous ?

Je n’en attends pas grand-chose. Emmanuel Macron est condamné à annoncer en permanence de grandes initiatives qui ne voient jamais le jour. S’il s’agit de nous demander de monter à bord du Titanic avec lui, il n’en est pas question. On peut toujours discuter, mais cela ne mènera à rien tant que le chef de l’État ne changera pas radicalement de politique.

Philippe Caverivière nous en dit plus sur la Nupes:

L’espace politique de Bernard Cazeneuve est un « no man’s land », selon Clémentine Autain (LFI)

Entre la macronie et la Nupes, l’herbe ne repousse pas sur le territoire socialiste rasé par le fléau de l’Elysée

Ce samedi 10 juin à Créteil, Bernard Cazeneuve, ancien premier ministre du président François Hollande, a organisé le premier meeting de son mouvement « La Convention », en forme de pré-candidature à la présidentielle de 2027. Avec l’objectif de refonder la social-démocratie et constituer une alternative à la Nupes. Accompagné de François Hollande, l’ancien premier ministre a déclaré devant ses militants qu’ils pouvaient compter sur sa « détermination dans cette aventure ».

« Je ne vois pas comment il y a une solution majoritaire dans le pays, en voulant créer quelque chose entre la macronie et la Nupes », a déclaré Clémentine Autain, la députée La France Insoumise, qui appelle à « rompre » avec la sociale-démocratie.

« No man’s land ». L’expression revient à décrire un « terrain abandonné, inhabité », selon Le Robert. Autain l’a employée ce lundi sur France 2 pour caractériser l’espace politique perdu du PS dont Bernard Cazeneuve propose la reconquête.

Ce samedi, Cazeneuve est parti avec un lourd handicap : il est l’un des ex-premiers ministres de François Hollande, pendant cinq mois (décembre 2016-mai 2017). Quatre ans avant l’échéance, il a organisé à Créteil (Val-de-Marne) le premier grand meeting de son mouvement, La Convention, créé en mars dernier, après avoir quitté le Parti socialiste sur fond de désaccord et d’animosité réciproque avec la direction, « toutouisée » par LFI selon lui dans Le Journal du dimanche (JDD), où il lance un manifeste pour « une autre gauche » avec 400 personnalités.

Pas une « solution majoritaire »

Très critique de la Nupes et surtout de La France insoumise, anti-républicaine – qui le lui rendent bien – l’ancien ministre de l’Intérieur se construit, lui, une « avenue large, pour ne pas dire un boulevard », avant la prochaine présidentielle en 2027, même s’il se garde de déclarer officiellement sa candidature pour l’instant. Loin du « No man’s land » donc, ou de « l’impasse » évoquée par Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste. »Je ne vois pas comment il y a une solution majoritaire dans le pays, en voulant créer quelque chose entre la macronie et la Nupes« , lui renvoie Clémentine Autain, à laquelle on prête aussi des ambitions pour 2027.

En retour, Bernard Cazeneuve pointe le « plafond de béton » de Mélenchon, très bien placé lors du premier tour des deux dernières présidentielles, mais jamais perçu comme un potentiel vainqueur du second.

Pour lui, ses détracteurs à gauche n’ont que deux arguments. Le premier: « Si vous n’êtes pas à la Nupes, vous êtes macronistes ». L’ancien maire de Cherbourg défend sa singularité, critiquant par exemple la politique fiscale entreprise par Macron depuis son arrivée au pouvoir en 2017 ou une réforme des retraites « injuste ».

Il décoche aussi quelques flèches sur la méthode avec laquelle le pays est gouverné. Celle, d’après lui, d’une « technoverticalité qui abaisse tout« , au point de transformer le Parlement en « théâtre d’ombres » et le gouvernement en « groupe de collaborateurs, serviles la plupart du temps ».

« Rompre » avec la sociale-démocratie

L’avenir de la social-démocratie

Bernard Cazeneuve en vient ensuite au deuxième argument invoqué par le reste de la gauche, qui voudrait, selon lui, que « si vous avez 60 ans, vous êtes un ringard ». A LFI, des députés se sont en effet amusés des personnalités politiques présentes samedi dernier à son meeting. Parmi elles, l’ancien président de la République François Hollande ou l’ex-patron du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadelis.

« Moi je trouve ça quand même super quand les Ehpad organisent des sorties culturelles », a ironisé la députée LFI (Grand-Couronne et Grand-Quevilly) Alma Dufour, irrespectueuse. Son parti est fort du rapport de force issu de la dernière présidentielle, durant laquelle Mélenchon a très largement écrasé les autres candidats de gauche.

En ce sens, Autain appelle à « rompre » avec le modèle de sociale-démocratie représentée par Bernard Cazeneuve. « Ce qui a été fait avant a conduit à des échecs, il faut en tirer des conclusions », souligne celle à qui on prête des ambitions présidentielles.

Pas en reste, Bernard Cazeneuve renvoie les balles. Les insoumis « ont a leur tête quelqu’un qui a 11 ans de plus que moi, qui était déjà [dans la vie politique] quand j’y suis entré et qui a été élu de tous les Parlements, de tous les territoires et qui les a tous abandonnés », balance l’homme de 60 ans. « Il parait que ça c’est moderne et que nous, nous incarnerions le passé », grince-t-il sur les ondes de France Inter.

La partie de ping-pong continue. Après sa sortie sur la radio, plusieurs insoumis ont tapoté quelques signes sur Twitter pour dire tout le mal qu’ils en pensaient. Nul doute que l’intéressé ne manquera pas de leur rendre la pareille à la prochaine occasion.

La gauche républicaine s’organise contre la Nupes

A Montpellier, pour offrir une alternative à la ligne pro-Nupes défendue par le patron des socialistes Olivier Faure

Le maire PS de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol (d) et la présidente PS du conseil régional d’Occitanie Carole Delga à Toulouse, le 14 janvier 2023

« Mais non, ce n’était pas un rassemblement anti-Nupes, nie le maire PS de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol. D’ailleurs, on n’a prononcé qu’une fois le nom de Mélenchon. » Si son jeune courant, Refondations, a réuni 400 personnes, élus, militants, syndicalistes, politologues, éditorialistes, dans un amphi de la faculté d’économie de Montpellier, mairie PS, pendant trois jours, jusqu’à ce dimanche, c’est pour phosphorer sur les grands sujets : le réchauffement climatique, le pouvoir d’achat, l’Europe, l’incarnation par la gauche d’une « promesse républicaine »… Soit ! Ce n’est pas inutile…

« Nous avons invité tout le monde à gauche à discuter avec nous », souligne la première secrétaire du PS parisien, Lamia El Aaraje, co-porte-parole du courant, qui pèse 30 % au PS. Communistes, écologistes, radicaux de gauche en étaient. Tout comme la cheffe de file de l’autre courant anti-Nupes du PS (20 %), la maire de Vaulx-en-Velin, Hélène Geoffroy. Lors des législatives de 2022, en étroite collaboration avec Carole Delga, Stéphane le Foll, Bernard Cazeneuve, François Hollande et Jean-Christophe Cambadélis, elle soutient les candidats de gauche hors accords pour proposer une alternative, avec le soutien du Parti radical de gauche.

L’ancien candidat à la présidentielle, Benoît Hamon, aujourd’hui directeur général de l’ONG Singa, dédiée à l’intégration des personnes réfugiées et migrantes, et qui « n’avait plus parlé dans des rencontres socialistes depuis 2017 », y a prononcé un discours, samedi matin, sur l’immigration. « Il y a probablement plus de personnes qui se sont levées pour applaudir Benoît que de gens qui ont voté pour lui en 2017 », a ironisé, dans la foulée, le président EELV de la métropole de Lyon, Bruno Bernard, s’attirant des sifflets.

La gauche, ça ne se caporalise pas ! (Michaël Delafosse)

Absents, le président du PRG, Guillaume Lacroix, l’ancien premier ministre, Bernard Cazeneuve et l’eurodéputé Raphaël Glucksmann ont adressé une petite vidéo. Mais LFI n’a délégué aucun Insoumis. « Nous avions invité Clémentine Autain, Manon Aubry et Alexis Corbière », révèle l’un des organisateurs.

Egalement convié, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a ostensiblement boudé le raout de ses opposants. « Un premier secrétaire ne devrait pas être un premier sectaire », tacle Nicolas Mayer-Rossignol, qui assure lui avoir donné toutes les garanties pour venir s’exprimer devant son courant. « La gauche, ça ne se caporalise pas ! s’agace le maire de Montpellier, Michaël Delafosse. On a demandé à certains de ne pas venir. Je trouve ça nul. » Seul membre de la direction nationale à avoir fait le déplacement, le député de Seine-Maritime, Philippe Brun, a été chaleureusement applaudi par les « refondateurs ».

Embouteillage en vue pour 2027

« Notre courant est installé dans le paysage politique. Il a vocation à perdurer et à aller vers des conquêtes internes et électorales », ambitionne Lamia El Aaraje. La concurrence s’annonce rude. L’ex-premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a organisé sa propre réunion à Paris, à la mi-mai. Hélène Geoffroy réunira son courant en juillet, à Lyon. Et Bernard Cazeneuve lancera son propre mouvement, La Convention, le 10 juin. Michaël Delafosse y assistera.

Qui incarnera cette gauche social-démocrate, européenne et antipopuliste en 2027 ? A Montpellier, plusieurs figures ont interprété, tour à tour, leur solo. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a appelé à mettre en place « une offre politique et un chemin qui passe par la coalition », et qui ne soit pas menée – suivez son regard – par « quelqu’un qui dit : je prends tout, je vous laisse le reste, et je règle mes comptes avec l’Histoire ».

Invitée à s’exprimer sur les mobilités, la présidente de la région Occitanie, Carole Delga, a lancé un vibrant appel à « résoudre la question sociale » et à s’adresser à « ceux qui ont du mal à nourrir leurs enfants à la fin du mois ». Gros succès également à l’applaudimètre pour le maire de Montpellier, qui a plaidé pour que « la gauche républicaine parle en clarté » sur les sujets de la sécurité et de la laïcité.

A un moment, il faudra trancher la question de l’incarnation. (Lamia El Aaraje)

Entre toutes ces incarnations possibles, les militants présents n’ont visiblement pas fait leur choix. « Delga a une vision de plus en plus nationale et européenne », estime un jeune militant héraultais. Pour un de ses camarades, c’est plutôt « Nicolas Mayer-Rossignol : il a des qualités de leader, il est capable de fonctionner avec les autres ». Vincent, un quinquagénaire de Clermont-Ferrand, a « beaucoup apprécié l’intervention d’Anne Hidalgo », mais il avoue sa préférence pour « Cazeneuve, qui a une vraie aura d’homme d’Etat ». D’autres disent hésiter entre Delafosse, Delga ou Mayer-Rossignol.

« A un moment, il faudra trancher la question de l’incarnation, reconnaît Lamia El Aaraje. Pourquoi pas par une primaire ouverte à toute la gauche… » Quant à Olivier Faure, ils n’ont pas renoncé à le déboulonner. « Dans pas longtemps, il va y avoir un nouveau congrès. Et celui-là, jurent-ils, on va vraiment le gagner ! »

Des élus d’extrême gauche ont marché sur l’Elysée

Des députés PCF et LFI veulent remettre une lettre appelant le président à retirer sa loi de réforme des retraites

Plusieurs élus de gauche ont décidé de marcher sur le palais présidentiel pour dire à nouveau leur l’opposition à la réforme Macron des retraites. Un cortège « très peu fourni », souligne La Nouvelle République, dirigé par le frère de Nathalie Saint-Cricq, épouse de Patrice Duhamel, mère de Benjamin Duhamel (BFMTV) et belle-soeur de Alain Duhamel, une famille invasive toujours au service des pouvoirs successifs. Un show qui intervient au lendemain des attaques de Fabien Roussel ciblant la Nupes et au moment où les syndicats se rendent à l’invitation de la première ministre pour réitérer leur refus de la réforme Macron des retraites. Du grand spectacle…

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Une vingtaine d’élus tout au plus : rien à voir avec une mobilisation, mais un coup de pub, alors que le RN profite des exactions de l’extrême gauche sur le terrain et à l’Assemblée nationale. La déambulation a démarré ce mardi 4 avril 2023 à l’initiative des parlementaires communistes pour faire marcher la gauche contre la réforme des retraites, sur l’Elysée.

Députés et sénateurs du PCF (parti communiste français) ont annoncé l’organisation de cette marche, lancée depuis l’Assemblée nationale, pour remettre au président de la République une lettre lui demandant de retirer son texte.

Dans le document en question, consulté par BFMTV, les parlementaires demandent à Macron d’organiser un référendum sur la question et de « renoncer » à son « funeste projet en le retirant ». Ils signent enfin en demandant une rencontre au chef de l’État.

250 personnes environ étaient espérées pour cette marche, les parlementaires en attendaient au moins « une centaine » comme le rappelle Public Sénat  : « C’est une manifestation solennelle, je dirais même un cortège républicain. Pour le moment, les réponses des parlementaires sont plutôt favorables. […] Si on est une centaine avec l’écharpe tricolore, l’image sera forte », déclarait alors André Chassaigne, le président du groupe communiste de l’Assemblée.

Mais le cortège était finalement peu fourni au départ de la marche prévu à 10 h 30. Il faut dire que l’organisation de ce cortège fait suite à une sortie très remarquée de Fabien Roussel, allant jusqu’à répandre la rumeur de l’annulation de cette marche, ce que le parti a démenti.

La Nupes « dépassée » selon Fabien Roussel

Le tacle de Fabien Roussel à l’encontre de la Nupes fait bouillir une partie de la gauche.
Le tacle de Fabien Roussel à l’encontre de la Nupes fait bouillir une partie de la gauche.

Dans un entretien avec L’Express ce lundi, le secrétaire national du PCF attaque frontalement la NUPES. Il estime que celle-ci est « dépassée » et qu’il faut rassembler la gauche « bien au-delà », tendant la main à l’ancien premier ministre Bernard Cazeneuve.

Des propos critiqués par les députés de La France Insoumise. « On le sait depuis le début, c’était le moins convaincu de l’attelage », a déclaré Alexis Corbière dans la matinale de RMC/BFMTV ce mardi. Il estime par ailleurs qu’une alliance avec Bernard Cazeneuve signerait une « défaite assurée ».

« La Nupes est dépassée dit Fabien Roussel. Elle l’était moins lorsqu’il avait besoin de son logo pour se faire élire. Maintenant il veut ‘rassembler’ avec Cazeneuve. Et pourquoi pas Valls ? » a réagi Bastien Lachaud sur Twitter.

« La Nupes représente aujourd’hui la seule alternative à la Macronie et à l’extrême-droite. En s’y attaquant, sans autre objectif que d’avancer leurs petites personnes, les Cazeneuve, Delga, Hidalgo, Roussel et cie ont clairement choisi leur camp. Il n’est pas celui de la gauche », tacle Danièle Obono.

« Je propose à Fabien Roussel de se consacrer à l’organisation de son barbecue avec Cazeneuve et de laisser la Nupes tranquille. Son petit jeu de diviseur nous a déjà coûté le second tour de la présidentielle », écrit de son côté Paul Vannier.

La Nupes organise de son côté un rassemblement ce mardi également, à 18 h 30, place du Châtelet à Paris.

« Instaurer un rapport de force direct avec le président », selon Sandrine Rousseau

Alors que les syndicats vont être reçus la semaine prochaine à Matignon, LFI et le PCF veulent organiser une marche de parlementaires vers l’Elysée. Invitée ce vendredi de l’émission « Parlement Hebdo », sur LCP et Public Sénat, Sandrine Rousseau (EELV) fait valoir la volonté de mettre le président de la République face à « ses responsabilités ».

mal !’ » Interrogée pour savoir si des citoyens pourront se joindre aux cortèges de parlementaires, Sandrine Rousseau répond : « Peut-être, pourquoi pas ? » Elle ajoute : « Il y a un rapport de force direct à instaurer avec le président de la République »

Les syndicats, trop longtemps mis de côté

Pour l’heure, les partis d’opposition ne se joindront pas aux discussions que Matignon veut entamer avec les syndicats. « Nous laissons les syndicats y aller en premier. C’est respectueux du combat incroyable qu’ils ont mené ces dernières semaines. […] Mais moi j’aurais vraiment aimé rentrer dans Matignon et demander à Élisabeth Borne de démissionner avec son gouvernement ! », lance Sandrine Rousseau. « On a eu des semaines de manifestations sans la moindre invitation. Quelle est cette Première ministre qui ne reconnaît pas les syndicats alors que, je le rappelle, pour être représentatifs les syndicats sont élus. Ils ont une légitimité à porter la contestation sociale », tacle l’écologiste.

Les « Avengers » du Conseil constitutionnel

Alors que les regards se tournent désormais vers le Conseil constitutionnel, qui rendra le 14 avril ses décisions sur les recours déposés autour de la réforme des retraites, l’élue admet « ne rien attendre » des Sages de la rue Montpensier. « Je ne pense pas qu’Alain Juppé soit sur une position qui rejoigne les manifestants et la Nupes », soupire-t-elle. « Je ne pense pas que les Avengers du Conseil constitutionnel, qui ont une moyenne d’âge qui fait qu’ils sont peu concernés par le recul de l’âge légal de départ à la retraite, vont nous sauver de cette crise sociale », raille encore Sandrine Rousseau.

Bernard Cazeneuve part à l’aventure

Le socialiste lance « La Convention » pour une « nouvelle aventure collective » à gauche

Bernard Cazeneuve photographié en Corrèze lors des élections législatives au mois de juin (illustration)
Bernard Cazeneuve photographié en Corrèze lors des élections législatives au mois de juin

Loin de la bataille de la réforme des retraites, une (petite) partie de la gauche a les yeux tournés sur ce que prépare l’ancien premier ministre Bernard Cazeneuve, qui a quitté le Parti socialiste après l’accord de la Nupes auquel il est particulièrement hostile.

Celui qui martèle qu’une « autre gauche est possible » a décidé de lancer son propre mouvement, qu’il a nommé « La Convention ». Une référence à la Convention des institutions républicaines (CIR) fondée par François Mitterrand en 1964, avant de fusionner avec le PS sept ans plus tard.

Ce proche de François Hollande a expliqué jeudi 9 mars le sens de sa démarche, lors d’un entretien accordé à la revue L’Hémicycle. « Un espace de crédibilité, de respectabilité », décrit Bernard Cazeneuves’opposant (encore) à cette « gauche totalement paralysée par cette alliance » de la Nupes.

« Gauche apaisée »

Souhaitant « créer les conditions d’une nouvelle aventure collective », l’ancien Premier Ministre n’écarte pas l’hypothèse d’incarner lui-même une candidature en 2027. « Si on me demande de prendre mes responsabilités, je les prendrai. Mais je ne serai pas de ceux qui détruiront avec beaucoup d’énergie une hypothèse si ce n’était pas leur pomme qui était en capacité d’incarner les choses », précise-t-il.

Dans un mail adressé à ses soutiens, et consulté par Le Monde, Bernard Cazeneuve se défend de créer une écurie, mais « un espace de réflexion et de proposition permettant à chacun de conserver sa sensibilité ». Pour son fondateur, « La Convention, c’est la maison de repli dans laquelle on réfléchit quand les partis traditionnels ont un peu de mal à trouver leurs repères, (…) c’est la conviction que c’est par le combat pour le droit que progresse l’humanité ».

Chantre d’une « gauche apaisée » soucieuse de se démarquer de la Nupes, Bernard Cazeneuve dénonce « le bruit et l’outrance », ciblant sans la nommer la France insoumise, que l’intéressé juge hégémonique dans l’accord signé avec le PS, EELV et le PCF. En déplacement à Lyon pour acter la naissance de son mouvement, l’ex-maire de Cherbourg entend « décliner partout sur le territoire national » son mouvementafin de bâtir un projet « le moment venu ».

Martine Aubry « appelle les socialistes à valider » l’accord électoral PS – LFI

L’amère de Lille bascule officiellement dans l’islamo-gauchisme

Martine Aubry et Amar Lasfar, président de l’UOIF
(Frères musulmans),
président du lycée privé musulman Averroès,
 ainsi que de Musulmans de France (2013- 2021).

Pour nombre d’éléphants et d’élus du PS, pas question de se ranger sous la bannière de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) – qui rassemble La France insoumise (LFI), le Parti communiste français (PCF) et Europe Ecologie-Les Verts (EELV). Et ce, malgré le score historiquement bas enregistré par leur candidate, Anne Hidalgo, à l’élection présidentielle (1,75 %).

La piscine municipale de Lille-Sud réserve un créneau horaire aux femmes chaque vendredi de 18h30 à 19h30, loin du regard des hommes. La situation existait depuis trois ans, mais n’était pas connue. Elle fait désormais grand bruit à Lille . C’est à la suite d’une demande forte du quartier, où la population musulmane est nombreuse, que la ville a accepté cette mesure dérogatoire, qui va jusqu’à mettre en place un personnel uniquement féminin et bâcher les fenêtres extérieures de la piscine pour protéger les baigneuses de regards indiscrets. Si certains mettent en cause le non respect de l’égalité du service public ou leur crainte d’une forme de communautarisme, la maire, otage des activistes islamistes considère qu’il s’agit d’un dispositif pragmatique de simple aménagement du service public.

« PS ça veut dire Parti Soumis ! assène un trentenaire. Déjà on discute nombre de circo avant les termes de l’accord. De plus, il y a des lignes jaunes à ne pas franchir, l’Europe, l’international, l’exercice du pouvoir… Je ne pense pas que l’on puisse s’affranchir des traités européens. La position de Mélenchon qui ne veut pas qu’on aide l’Ukraine me gêne. Mélenchon admire les dirigeants les plus autoritaires de la planète, ça en dit long sur sa vision de l’exercice du pouvoir… Les valeurs ne sont pas les mêmes, ni sur la laïcité, la République. Il a trop de complaisance vis-à-vis de certains communautarismes, les femmes voilées… Tout ça ne me satisfait pas du tout. Quitter le PS ? Je suis tiraillé mais ce n’est pas exclu… De toute façon, je n’irai pas me consoler chez Macron ! »  

La fille Delors met l’Europe dans sa poche et son mouchoir par-dessus.

La maire de Lille a apporté son soutien à ce compromis, avant le conseil national du parti prévu pour ce soir, même si elle a « des réserves majeures concernant l’Europe »…

La cacique socialiste allume la mèche de l’implosion du parti.

Elle s’oppose ainsi à d’autres figures du PS comme Stéphane Le Foll, Bernard Cazeneuve, Jean-Christophe Cambadélis, Carole Delga, Jean-Marc Ayrault et François Hollande.

A Lyon, Gérard Collomb reste coi. Quant à la fossoyeuse du PS à la présidentielle, Anne Hidalgo tarde à jeter sa dernière pelletée sur le trou ouvert sur le néant. Est-elle retournée en Andalousie ?

Bernard Cazeneuve quitte le Parti socialiste suite à l’accord avec LFI

Les socialistes devront approuver cet accord entre LFI et le PS

Bernard Cazeneuve photographié lors de la Convention d’investiture d’Anne Hidalgo
en octobre 2021 à Lille

L’ancien Premier ministre de François Hollande a annoncé ce mercredi 4 mai 2022 qu’il quittait le Parti socialiste, dans une interview à la « Manche Libre ». La veille, il avait déjà menacé de quitter le parti, se disant en profond désaccord avec l’union des socialistes avec La France insoumise.

L’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve a annoncé ce mercredi 4 mai 2022 à l’hebdomadaire régional La Manche Libre son départ du Parti socialiste après la conclusion d’un accord en vue des législatives entre ce parti et La France insoumise.

« J’ai quitté le Parti socialiste en désaccord avec l’alliance passée avec le parti de Jean-Luc Mélenchon », a déclaré Bernard Cazeneuve, évoquant « une formation politique, La France Insoumise, dont j’ai eu à subir la violence, l’outrance des positions, les insultes aussi quand j’étais au gouvernement, notamment lorsque s’est produite la mort de Rémi Fraisse », un activiste mort lors d’une manifestation contre la retenue d’eau de Sivens en 2014, quand le réchauffement climatique n’était pas encore médiatique et alors que l’ex-socialiste était ministre de l’Intérieur.

La Dordogne, département historiquement socialiste, n’obtiendrait aucune des quatre circonscriptions sur les 70 réservées au PS.  

Et le vote d’approbation interne aux socialistes s’annonce délicat.

Cazeneuve est-il en partance pour LREM ?

Cambadélis appelle le PS à « s’opposer » à un accord électoral avec LFI

Un revenant du cimetière des éléphants pour sauver le PS de Mélenchon

Les camarades Mélenchon et Cambadélis, ex-militants d’extrême gauche venus du courant trotskiste lambertiste

De François Hollande et Anne Hidalgo à « tous les socialistes« , l’ex-premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a lancé dimanche un appel à « s’opposer » à un accord entre le PS et LFI en vue des législatives et à « refonder » le parti.

« Il serait temps de se coordonner pour résister et se refondre. Parlons-nous, les Amis!« , lance-t-il dans une « lettre ouverte à François Hollande, Bernard Cazeneuve, Jean-Marc Ayrault, Anne Hidalgo, Hélène Geoffroy, Stéphane Le Foll, Martine Aubry, Patrick Kanner, Rachid Temal, Valérie Rabault, Patrick Mennucci, Philippe Doucet et à tous les Socialistes« . 

« C’est une question stratégique qui est en cause. Il y a rarement eu dans l’histoire du Parti socialiste de congrès stratégique. Là si une identité propre renouvelée ou une intégration dans un bloc mélenchonisé« , souligne-t-il, en dénonçant « le chemin choisi par l’actuelle direction du Parti socialiste » qui fait que « le premier des battus (Jean-Luc Mélenchon, NDLR) devrait être le premier de cordée« . 

Plaidant pour une « profonde refondation » et une « gauche de transformation responsable, décomplexée vis-à-vis de la radicalité« , il s’interroge aussi sur l’absence de « discussions avec les écologistes » au profit d’une « négociation exclusive avec Mélenchon« . 

Jean-Christophe Cambadélis avait déjà, après l’échec cuisant d’Anne Hidalgo au premier tour de la présidentielle mi-avril, appelé le PS à se dissoudre et le premier secrétaire actuel Olivier Faure à démissionner, pour permettre « la création d’un autre parti« . 

Alors qu’un accord est en train d’être négocié entre le PS et LFI pour les législatives, il juge celui-ci à la fois « dans la forme et le fond (…) pas acceptable en l’état« , et considère qu' »il faut, si un tel accord était confirmé, s’y opposer. Car au bout, c’est la possibilité de se refonder qui est en cause« . 

Un tel accord poserait un problème de « méthode« , car « il ne s’agit pas d’une proposition de coalition mais d’une reddition« . « Le slogan c’est Mélenchon, le Premier ministre c’est Mélenchon, la photo de campagne c’est Mélenchon, le programme c’est Mélenchon, et le sigle commun sera imposé à tous: c’est toujours Mélenchon« , dénonce M. Cambadélis. 

Il évoque aussi « des raisons programmatiques » pour le refuser, citant les velléités de LFI de « sortir des traités européens« , « fonder la VIème République« , ramener la retraite à 60 ans et lancer des « dépenses vertigineuses impraticables« . Et, « des raisons de représentation« , avec des socialistes « sacrifiés » alors le PS a « gagné des villes lors des dernières municipales« . 

Jean-Vincent Placé (EELV): ouverture d’une enquête pour harcèlement sexuel

Baupin, Hulot et maintenant Placé: EELV est-il un parti de déséquilibrés?

JV. Placé, écologiste
à la main baladeuse

Une ancienne collaboratrice de l’ex-sénateur Jean-Vincent Placé a déposé plainte la semaine dernière contre l’ex-secrétaire d’Etat écologiste la semaine dernière, pour des faits de harcèlement sexuel entre 2012 et 2016, lorsque J.-V. Placé était sénateur, a-t-on appris, jeudi 2 décembre, d’une source proche du dossier.

Sollicité, le Parquet de Paris a confirmé avoir ouvert une enquête sur plainte, le 23 novembre, pour « harcèlement sexuel », et avoir confié les investigations à la brigade de répression de la délinquance contre la personne. Contacté, J. -V. Placé a dit « prendre acte » de la plainte.

Conjoint séparé de
Cécile Duflot et de
Eva Sas, politicien migrant (MRG (1992-1994), RAD (1994-1996), PRS (1996-1998), PRG (1998-2001), LV (2001-2010), EELV (2010-2015), UDE (2015-2018), PE (depuis 2015), ce Français d’ascendance coréenne n’envoie pas des messages d’équilibre.

« Je ne souhaite pas à ce stade de la procédure faire un quelconque commentaire. Je répondrai, bien entendu, à toutes les questions qui viendraient à m’être posées par les enquêteurs », a ajouté l’ancien patron des sénateurs écologistes.

Des éléments déjà mis au jour en 2018

En mars, il a été condamné à une amende pour harcèlement sexuel à l’encontre d’une gendarme chargée de sa sécurité.

En septembre 2018, il avait déjà été condamné à trois mois de prison avec sursis et 1.000 euros d’amende pour violences et outrages lors d’une soirée où il avait reconnu avoir été « extrêmement insistant » et « déplacé » avec une cliente.

Un troisième épisode avait déjà été évoqué par la plaignante sur Twitter, et par un article de Libération en 2018. Au siège de l’ambassade de France à Rome, le 14 juillet 2016, le secrétaire d’Etat de Bernard Cazeneuve, puis de Manuel Valls, chargé de la Réforme de l’Etat et de la Simplification, aurait « ordonné » à sa collaboratrice « de danser un slow » avec le sénateur centriste de la Mayenne François Zocchetto (UDI), qui a soutenu François Bayrou (MoDem, macronien) au premier tour de la présidentielle de 2012. A la fin de 2018, elle avait accusé ce dernier sur France 3 de l’avoir « pressée » et d’avoir placé sa « main bas dans le dos ».

F. Zochetto avait renoncé à se représenter aux municipales a Laval, présentant ses « excuses » pour son « manque de retenue » car il n’avait « pas osé résister à l’injonction » de Placé qu’il accompagnait, tout en « démentant tout comportement répréhensible ».

« Les mouvements de libération de la parole et les injonctions amicales des femmes ont déterminé » la jeune femme, âgée de 35 ans, « à parler », selon son avocat, Tewfik Bouzenoune. Car, dès 2012, et sa « première semaine » avec Placé, selon les éléments de la plainte, il aurait ainsi « exigé [le] port de la robe et [d’]escarpins ».

Trois autres collaboratrices dénoncent des gestes déplacés

Elle accuse ensuite Placé de lui avoir « touché les fesses » dans une discothèque à Lille, en marge du rassemblement estival du parti en août 2015. Puis, à la mi-mai 2016, à Séoul, elle assure que celui qui était alors secrétaire d’Etat lui a « touché délibérément la poitrine » dans une voiture dans laquelle se trouvait l’ambassadeur de France en Corée du Sud, Fabien Penone, qui, contacté, a renvoyé l’Agence France-Presse (AFP) vers le Quai d’Orsay.

L’ancienne collaboratrice assure dans sa plainte que Vincent Placé lui aurait aussi mis une « main sur la cuisse » en octobre 2014, lors d’un dîner parisien avec des élus, et une « main dans le bas du dos » en février 2016. Aucun témoin direct ne confirme ces épisodes.

Mais trois autres ex-collaboratrices d’élus ont raconté – à l’AFP et Mediapart – avoir également subi des gestes déplacés de l’ancien secrétaire d’Etat : la première, « à l’arrière d’un taxi en 2011 » ; la seconde, « dans un restaurant en 2015 » et au secrétariat d’Etat un an plus tard ; la troisième, dans la même discothèque de Lille en août 2015.

Deux autres anciennes collaboratrices disent, elles, n’avoir ni subi ni noté de remarques ou de gestes déplacés de Placé. L’une d’entre elles dit cependant avoir été « constamment en alerte » pour éviter « le flou artistique menaçant » : « Toute la charge mentale de protéger l’intégrité d’une relation de travail incombe aux jeunes femmes dans ce milieu-là. » La seconde évoque aussi des scènes de « drague un peu lourde » du ministre de François Hollande.

Les agissements signalés à Matignon et l’Elysée

Selon la plainte déposée, les agissements de JV. Placé ont été signalés à Matignon et à l’Elysée. Au cabinet de François Hollande, son ancien conseiller Frédéric Monteil « n’a pas mémoire d’avoir reçu à ce moment des éléments concernant la plaignante. » Mais il a « eu écho de comportements [de Placé] qui interrogeaient ». Un membre du cabinet de Bernard Cazeneuve a aussi fait savoir que le premier ministre et son équipe avaient bien été informés de la « souffrance » de cette collaboratrice « impeccable », qui avait donc été recrutée à Matignon début 2017. Bernard Cazeneuve a confirmé cette information à Mediapart et à l’AFP.

Depuis l’agression à Rome, en juillet 2016, la jeune femme s’est confiée à des amis : « Je l’ai vue à son retour d’Italie »« humiliée », raconte l’un d’eux. Un « moment de prise de conscience de tout ce qu’elle subissait depuis cinq ans », confirme une autre. Je l’avais vue « dépérir physiquement », abonde une troisième.

Plusieurs témoignages mentionnent une addiction de Placé à l’alcool, qu’il a reconnue en 2018. Plus largement, au moins quatre femmes attestent du « comportement déplacé » ou du « climat d’ambiguïté » entretenu au travail par l’ex-sénateur.

Un « mâle hétérosexuel » qui ajoute les défauts aux défauts: il picole, est jaune de peau et n’adhère pas à LGBTQ+

Clandestins à Calais: Macron rejette les patrouilles conjointes avec Boris Johnson

La France ne veut pas de policiers ou de militaires britanniques sur ses côtes

Cette presse britannique qui accuse les policiers français de laisser partir les clandestins

Bien qu’il ait lui-même des troupes françaises en Afrique sub-saharienne, Macron a invoqué sa « souveraineté » jeudi 2 décembre, dans une lettre de son premier ministre à son homologue britannique Boris Johnson. A l’isolement pour cause de covid, Jean Castex, a rejeté la proposition de « patrouilles conjointes » sur le sol français pour empêcher le passage de clandestins vers la Grande-Bretagne, à travers la Manche.

« Nous avons toujours accepté d’examiner et de discuter de bonne foi des propositions britanniques de renforcement de la coopération. Nous en avons accepté certaines, nous en avons décliné d’autres« , écrit Jean Castex. « Nous ne pouvons pas accepter, par exemple, que des policiers ou des militaires britanniques patrouillent sur nos côtes ; il en va de notre souveraineté« , souligne-t-il. Débutée en 2014, l’opération Barkhane est une opération militaire menée au Sahel et au Sahara par l’Armée française, avec une aide secondaire d’armées alliées, qui vise à lutter contre les groupes armés salafistes djihadistes dans toute la région du Sahel. 

Boris Johnson avait fait cette proposition une semaine plus tôt, lors d’une conversation téléphonique avec le président français le 25 novembre, au lendemain d’un naufrage dans la Manche qui a fait 27 morts.

« And still they do nothing ». Après le naufrage survenu dans la Manche mercredi soir, qui a tué au moins 27 personnes cherchant à rejoindre les côtes anglaises, chacun se renvoie la balle. Les Anglais reprochent aux Français de ne pas réussir à empêcher les tentatives de traversées, tandis que les Français critiquent les Anglais de ne pas coopérer suffisamment.

Le premier ministre britannique a publié sur Twitter une lettre adressée à Emmanuel Macron dans laquelle il propose « un accord bilatéral de réadmission pour permettre le retour de tous les migrants illégaux qui traversent la Manche ».

Boris Johnson avait appelé Macron à reprendre tous les clandestins qui traversent la Manche

Le Premier ministre britannique avait indisposé Macron en publiant sur Twitter une lettre qui lui était adressée, dans laquelle il proposait « un accord bilatéral de réadmission pour permettre le retour de tous les migrants illégaux qui traversent la Manche« . Le premier ministre de la reine appelait la France à reprendre tous les migrants qui traversent la Manche, au lendemain du naufrage de migrants, le 25, au large des côtes anglaises.

Ce que Darmanin était allé négocier avec le Maroc, sans succès… « Renvoyer les migrants, pour nous, ce n’est pas une option, ce n’est pas une manière sérieuse ou responsable d’aborder la question« , a toutefois affirmé une source à Matignon, sous le couvert de l’anonymat.

« Plus de 700 policiers et gendarmes arpentent chaque jour la côte d’Opale pour empêcher des embarcations de fortune de prendre la mer » vers l’Angleterre, indique Jean Castex dans sa lettre. « Une partie de ces opérations est réalisée avec la contribution financière de votre gouvernement, conformément à nos accords de coopération » du Touquet, rappelle-t-il.

« Cependant, ces efforts ne permettent que de contenir le phénomène, non d’y apporter une réponse durable », estime encore Castex, lequel appelle le Royaume-Uni à mener « une politique de retour plus efficace » et à ouvrir « des voies légales d’immigration au Royaume-Uni à ceux (et celles) qui ont des raisons légitimes de vouloir se rendre » dans ce pays.

En 2015 à Calais, Hollande avait accepté une dizaine de policiers britanniques pour lutter contre les passeurs

Londres allait verser 10 millions d’euros supplémentaires pour sécuriser le site de Calais et pour « faciliter les retours volontaires, » apprenait-on, alors que s’achevait l’opération Licorne (2002-2015),  participation des forces armées françaises, sous commandement français, au maintien de la paix en Côte d’Ivoire.

Paris et Londres allaient néanmoins mettre en place un « centre de commandement et de contrôle commun » à Calais (Pas-de-Calais) pour tenter de lutter contre les réseaux de passeurs qui font traverser les migrants dans des embarcations de fortune vers l’Angleterre. C’était, il y a sept ans, la principale annonce faite par le ministre socialiste de l’Intérieur français, Bernard Cazeneuve, et son homologue britannique conservatrice, Theresa May, à l’occasion d’un déplacement jeudi 20 août 2015, dans la ville qui accueille plusieurs milliers de migrants.

Ce nouveau accord de 2018 pour mieux contrôler le flux migratoire visait à « renforcer la gestion conjointe de notre frontière commune avec un traitement amélioré des mineurs non accompagnés demandeurs d’asile« . Ce texte complétait en réalité les accords du Touquet, signés en 2004. Il prévoyait notamment une contribution complémentaire de Londres de 50 millions d’euros au contrôle de la frontière à Calais, où échouent de nombreux clandestins dans l’espoir de franchir la Manche.

Les deux ministres y avaient signé un accord de coopération bilatérale, qui prévoit que ce centre, placé sous double commandement français et britannique, fasse travailler ensemble des policiers. Moins d’une dizaine de policiers britanniques devaient toutefois y travailler, selon les informations du journal Le Monde. Ils s’ajouteraient aux policiers des border force, déjà présents de manière permanente à Calais pour contrôler les frontières. B. Cazeneuve s’était rendu à Calais le 31 août en compagnie du premier ministre Manuel Valls et des commissaires européens Dimitris Avramopoulos (affaires intérieures) et Frans Timmermans (premier vice-président) pour évoquer le sujet des étrangers en situation irrégulière, « mais aussi d’autres [questions] qui renvoient au volet humanitaire ou au volet économique ».

« Jean-Luc Mélenchon doit être combattu, » estime Bernard Cazeneuve

« La gauche des partis s’adresse seulement à des appareils politiques discrédités ou à des clientèles, » observe le socialiste

L'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve repond aux questions des journalistes de L'Express a Paris. Le 29/04/2021. PHOTO Vincent Boisot pour L'Express

à n'utiliser que pour le numero 3644

L’EXPRESS : L’histoire de la Ve République semble nous apprendre une chose : la gauche confrontée à l’exercice des responsabilités se rétrécit. Ce fut le cas sous Mitterrand, sous Jospin, sous Hollande. Pourquoi ? 

Bernard Cazeneuve : Ce ne sont pas les institutions de la Ve qui ont rétréci la gauche. Bien au contraire, elles lui ont permis de gouverner longtemps et d’engager de grandes réformes. Lorsque j’entends des responsables politiques expliquer que nos institutions sont à bout de souffle, je comprends surtout qu’ils se défaussent sur ces dernières, vieux réflexe français, des faiblesses imputables à la médiocrité de certains apparatchiks. Ceux qui rêvent de l’avènement de la VIe nous promettent le plus souvent le retour à la IVe sans les talents. Il y a toujours plus d’exigences à l’égard de la gauche qu’il n’y en a à l’égard de la droite [axiome]. On attend sans doute de la droite qu’elle gère bien les choses. On attend de la gauche qu’elle les change. Or, lorsque la gauche arrive au pouvoir, c’est parce que la crise s’est enkystée et que la droite a échoué à la résoudre. Tel fut le cas en 1981, en 1997 et en 2012 [postulat]. Et chacun conviendra qu’il est plus difficile de ne pas décevoir lorsque la crise s’est installée et qu’il devient urgent d’en sortir, en prenant des mesures courageuses et parfois impopulaires. 

N’est-ce pas là l’un des problèmes majeurs de la gauche : la différence entre ce qu’elle dit ou laisse entendre quand elle est dans l’opposition et ce qu’elle fait quand elle gouverne ? 

Le problème majeur de la gauche, c’est d’assumer pleinement la rudesse et les contraintes de l’exercice du pouvoir. Car on ne transforme jamais une réalité qu’on ne regarde pas en face. La gauche de gouvernement considère que c’est son honneur et sa grandeur d’accepter, quand tout est difficile, de prendre ses responsabilités. Une autre gauche, plus contestataire, pense qu’il vaut mieux s’indigner, dénoncer, tout contester plutôt que de prendre le risque d’affronter les événements : pour elle, mieux vaut cultiver la pureté des utopies, revendiquer toujours l’authenticité plutôt que de se compromettre en gouvernant. Elle parvient le plus souvent à ses fins, en permettant aux conservateurs de se maintenir longtemps au pouvoir. C’est dangereux lorsque les conservateurs deviennent réactionnaires. La gauche d’action est souvent victime du jugement de la gauche de contestation, toujours plus habile à préparer le prochain congrès qu’à construire un projet pour notre pays. A ce jeu dangereux, la gauche tout entière peut finir par se perdre. « La gauche d’action est souvent victime du jugement de la gauche de contestation »

Parlons de l’identité de la gauche en se penchant d’abord sur ses actions passées. 1983 : le tournant de la rigueur, un virage positif ou fatal ? 

Ce moment, pour la gauche et pour la France, c’est celui où les socialistes feront deux choix fondamentaux qui conditionneront leur avenir politique et leur imposeront un aggiornamento qu’ils n’avaient pas été capables d’accomplir dans l’opposition par le passé : le choix européen d’abord et celui de l’économie sociale de marché ensuite, c’est-à-dire l’acceptation du fait qu’il n’y a pas de partage possible des fruits de la croissance s’il n’y a pas, d’abord, les conditions de la croissance. 

1989 : l’affaire du voile de Creil, une erreur historique ? 

Oui. Ce fut pour moi un moment douloureux. Je connaissais bien ce collège de Creil : j’y avais été scolarisé. J’entendais parfois certains responsables de gauche, la plupart du temps germanopratins, me parler de choses qu’ils n’avaient que peu rencontrées. Je me souvenais alors de mon père, instituteur de la « laïque », qui accueillait le samedi, à la maison, certains élèves en difficulté, avec au coeur la passion de transmettre et de donner à chacun sa chance. Certes, il avait de l’autorité et les parents soutenaient ses efforts, ses réprimandes aussi, lorsqu’il s’agissait de rappeler des principes qui, pour certains d’entre eux, étaient la clef du vivre ensemble. Je me souvenais surtout des enseignants expliquant, avec l’approbation des parents, que, aux portes du collège, on déposait toutes ses croyances et tous ses signes religieux, car l’école était le lieu des apprentissages. Elle était la fabrique de citoyens libres. Certains à gauche, à ce moment-là, ont opéré un tête-à-queue idéologique, ils se sont égarés au nom du droit à la différence, en oubliant que c’était l’ambition universelle, héritée des Lumières, qui permettait à chacun d’être en harmonie avec les autres, tout en étant parfois différent d’eux. 

1992 : Maastricht, la mise en exergue de la « polarisation sociale », comme dit Michel Onfray ?

Ce fut un autre sujet de débat pour moi. Autant j’ai toujours pensé que l’ambition européenne était dans notre ADN, autant j’ai très vite considéré que la gauche française devait résister à tout prix à la pente ordo-libérale dans laquelle la droite européenne cherchait à engager l’Europe. Maastricht fut le début d’une concession faite à l’Allemagne et à une certaine conception de la construction européenne. Je connais les raisons historiques qui ont conduit le président Mitterrand à faire ce choix, mais je me suis immédiatement inquiété qu’il n’y ait pas de jalons posés pour donner un sens plus puissant à ce projet et qui ne le réduise pas à un grand marché sans âme et sans citoyens. Les Etats-Unis, la Chine, la Russie, d’autres encore ont un récit et une stratégie dans la mondialisation, ce qui n’est hélas pas le cas de l’Union européenne. La doter d’une véritable ambition et pas seulement d’un fonctionnement est un enjeu crucial des prochaines années. Sous la pression des idées et des mensonges de l’extrême-droite, la Grande-Bretagne a dérivé vers le Brexit [c’est faire injure à nos voisins de les décrire influençables]. Les Européens doivent, eux, construire un nouveau projet et un nouveau récit [Pour cela, ils attendent Cazeneuve].

Prolongeons l’exercice avec le quinquennat de François Hollande… 

Laissez-moi d’abord préciser que ce mandat fut celui de toutes les crises et qu’il ne mérite pas le jugement qu’on porte sur lui. Avec le temps, on finira par faire la part des choses et se rappeler que, entre 2012 et 2017, les inégalités avaient commencé de se réduire et la compétitivité de notre industrie avait entamé son redressement. Qu’une partie de la gauche soit incapable de dire cela – y compris lorsqu’elle a participé à cette action -, cela révèle moins le bilan de François Hollande que la faiblesse congénitale de cette gauche de la contestation, face aux exigences de la responsabilité du pouvoir. 

Cela dit, les désaccords étaient possibles et des erreurs ont été commises. Je pense à la déchéance de nationalité, par exemple. Nous n’avons pas perçu la dimension symbolique ni les effets d’une concession faite à la droite pour l’ensemble du pays et pour la gauche. A chaque fois qu’on préempte des questions qui relèvent des valeurs fondamentales pour réussir une opération politique, on prend le risque de s’abîmer. On a aussi attribué aux orientations politiques du précédent quinquennat ce qui était, en fait, imputable à certains comportements, qui perdurent aujourd’hui encore. Alors que nous étions confrontés à une multitude de difficultés – la crise économique et financière, le terrorisme, la crise migratoire, un contexte international incertain -, les ambitions personnelles, les postures de congrès et l’égotisme médiocre ont prévalu, contribuant à disqualifier la gauche dans son ensemble. Aujourd’hui, la gauche ne gouverne plus, mais ces comportements, eux, demeurent ! 

La gauche a-t-elle perdu les classes populaires ou les a-t-elle abandonnées ? 

La gauche des partis ne parle plus aux classes populaires, ni même aux classes moyennes. Elle ne parle plus au peuple. Elle s’adresse seulement à des appareils politiques discrédités ou à des clientèles. Les Français portent un jugement sévère sur ces jeux de rôles et sur les acteurs qui en sont les complices ou les organisateurs. Une certaine américanisation de la pensée, autrement dit la substitution des communautés au peuple dans son ensemble, conduit à penser la nation comme une juxtaposition de minorités. Tandis que le peuple, lui, aspire à ce qu’on lui parle comme à un tout, désireux d’un avenir meilleur pour tous ses enfants, d’où qu’ils viennent. Les Français sont tolérants. Ils s’accommodent volontiers des différences qui peuvent les traverser mais ils veulent continuer à vivre ensemble. Ils n’entendent pas laisser le communautarisme engendrer des tensions et des haines. Lorsque la gauche radicale théorise la consubstantialité de la discrimination à l’Etat ou s’accommode, par cynisme clientéliste, de la possibilité de réunions genrées ou racisées, elle tourne le dos à cette ambition universelle qui nous a si longtemps unis autour de la République et de la nation, pour dire notre passion de l’égalité et notre détermination à lutter ensemble contre toutes les formes de discriminations ou d’enfermements identitaires. « On ne peut pas, si on est authentiquement républicain, entretenir tous les emportements et cautionner toutes les violences d’une époque. »

On ne doit pas davantage confondre la foule et le peuple. Car on ne peut pas, si on est authentiquement républicain, entretenir tous les emportements et cautionner toutes les violences d’une époque, avec pour seule préoccupation de flatter tour à tour tous les segments électoraux. C’est avec ces comportements qu’on rend impossible l’esprit de nuance et le raisonnement rationnel. Quand le leader parlementaire d’une organisation politique de la gauche extrême dit à des manifestants : « Méfiez-vous des policiers, ce sont des barbares », il crée un climat propice à des affrontements funestes. Il parle alors à la foule, mais sert-il la cause du peuple ? Certainement pas : il la trahit. 

Vous citiez récemment dans La Croix le révolutionnaire Rabaut Saint-Etienne : « Notre histoire n’est pas notre code. » Etes-vous sûr d’être majoritaire aujourd’hui au sein de la gauche ? 

Evidemment, la pensée que j’exprime ici n’est pas prédominante dans les appareils. Elle l’est dans l’électorat, bien au-delà de la gauche, je n’ai pas de doute là-dessus. Le fait qu’il n’y ait pas, dans les sondages sur l’élection présidentielle, de candidat de gauche au second tour qui soit en situation de battre nettement Marine Le Pen est la preuve de l’erreur funeste commise par les appareils politiques sur les questions les plus essentielles. C’est là une faute grave, car l’extrême-droite est contraire à toutes nos valeurs et elle se nourrit des problèmes qu’elle prétend dénoncer. En outre, la gauche ne pourra jamais se rassembler à nouveau aussi longtemps qu’elle fera l’économie de la constitution d’une force politique sincère et crédible, parlant aux Français dans leur ensemble. Si la stratégie retenue consiste à prendre sur tous les sujets les positions les plus radicales, les moins crédibles, les moins responsables, elle sera disqualifiée pour avoir fait le choix de la marginalisation. En prétendant additionner les scores d’organisations toujours plus affaiblies, la gauche ne fera que s’éloigner des aspirations de l’électorat populaire. « Je crois toujours au clivage droite-gauche »

En quoi le clivage gauche-droite resterait-il un clivage pertinent ? Pourquoi ne pas vouloir que la République et la nation, dont vous faites la pierre angulaire du débat, soient une nouvelle ligne de partage ? 

Je focalise mon propos sur la République et sur son lien avec la nation, car il s’agit à mes yeux d’un sujet central, dont la gauche se préoccupe trop peu alors même qu’il lui a donné naissance. Et, quand elle s’en occupe, elle le fait mal. Pour autant, je ne crois pas que ce soit là le seul sujet. La transition écologique est un enjeu majeur pour l’avenir de la planète. Cette transformation doit être adossée non pas à l’idée de décroissance, mais à la volonté de promouvoir une croissance sobre et sûre, seul moyen de garantir plus de justice sociale. Une politique énergétique décarbonée est possible, à condition qu’on ne sorte pas du nucléaire dogmatiquement et qu’on se donne le temps de faire monter en puissance les énergies renouvelables. Une agriculture durable est possible. Je l’ai vue réalisée dans mon département d’élection par certains acteurs de la Confédération paysanne, je pense notamment à François Dufour. Pour moi, la gauche de gouvernement, responsable, retrouvant les aspirations du peuple, incarnerait à la fois une conviction républicaine assumée et ardente, une volonté de transition écologique crédible, le souci de la justice sociale par la possibilité d’une croissance sûre et une réelle politique d’aménagement et de réindustrialisation des territoires associant l’Etat et les collectivités locales. Ce carré doit être l’ADN de la gauche de demain. Face à elle, la droite ne manquera pas de faire valoir sa différence. Elle considérera toujours que le marché est mieux à même que la régulation d’engendrer l’allocation des richesses, que les services publics et la dépense publique sont des maux dont il faut se guérir. Quant à la question républicaine, j’ai vu la droite, pendant les attentats, préconiser trop souvent que l’on s’éloigne de l’Etat de droit sur la question de la rétention des fichés S, par exemple, ou sur celle de la laïcité réinterprétée par elle comme l’instrument d’un identitarisme, suspicieux à l’encontre des musulmans, alors même que cette valeur porte en elle un principe de tolérance et de liberté. Voilà pourquoi je crois toujours au clivage droite-gauche. 

Qu’avez-vous en commun avec Jean-Luc Mélenchon ? 

Jean-Luc Mélenchon doit être combattu. Je ne suis pas de ceux qui considèrent que l’union de la gauche doit se faire dans l’ambiguïté. La gauche humaniste, républicaine, universaliste ne peut pas gouverner avec la gauche de la radicalité et de la complaisance à l’égard de certaines formes de violence. Cela ne signifie pas que la gauche humaniste ne peut pas rencontrer sa majorité. Mais ma conviction est que, pour y parvenir, elle doit d’abord affirmer ce qu’elle est, ce à quoi elle croit, et dire clairement ce dont elle ne voudra jamais. La force de la social-démocratie est d’avoir toujours réussi à réduire les tentations sectaires et le déni de la réalité. La gauche de demain doit également revendiquer la tradition gaulliste, celle du rassemblement et de l’élévation du regard au-dessus des médiocres considérations égotiques ou d’appareils. 

Maintenant que vous avez dit tout cela, pourquoi ne pas porter votre projet en 2022 ? 

Pour le cas où cela vous aurait échappé, il y a beaucoup de gens au milieu de la piste de danse. La plupart d’entre eux s’estiment indispensables. Parmi eux, il y a une proportion significative d’égotiques. Combien, qui se pensent indispensables, peuvent être vraiment utiles ? Je l’ignore mais, ce que je sais, c’est que je ne veux pas participer à tout cela. La France n’a pas besoin de candidats supplémentaires, il y en a déjà trop. Elle a besoin de républicains ardents, dont la pensée libre peut servir à ne pas perdre de vue ce que nous sommes fondamentalement, en tant que peuple et en tant que nation. 

Propos recueillis par Laureline Dupont et Eric Mandonnet