Macron cherche à exister: il s’est encore installé sur France 2 en prime time

Retour du service public à l’ORTF ?

Décor lugubre de la décroissance

Macron est dans l’émission politique «l’Evénement» tous les quinze jours. Cette émission semble être la sienne: elle n’a encore pas connu d’autre invité ! En Russie, Poutine n’en fait pas tant… Peut-être le nord-coréen Kim Jong-un l’envie-t-il d’avoir une presse à sa botte ?

Après le mercredi 12 octobre, le mercredi 26. En permance en arrêt au milieu du gué, le président a tenté, à l’aide de graphiques sortis du sac, de se faire passer pour l’homme d’action qu’il n’est pas. L’ex-James Bond hélitreuillé sous les caméras, le pseudo Tom Cruise en blouson de cuir de Top Gun, le champion de tennis au Touquet ou en vedette de « Plus belle la vie », relooké en lunettes de soleil et en sneakers inappropriées pour les obsèques de la reine Elisabeth, a tenté mercredi 26 d’apparaître en capitaine au milieu de la tempête, présent en temps de crise mais inflexible, notamment sur l’âge de départ à la retraite ou l’indexation des salaires sur l’inflation. La coiffure avait encore changé de coupe et de couleur, mais Le Redoutable, premier sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE), c’était lui. Problème: il a été désarmé en décembre 1991.

Les Macron, vedettes d’opérette,
sous protection à Londres,
la veille des obsèques de la reine Elisabeth II…

A peine six mois de mandat passés, ses seconds cent jours derrière lui, pas la moindre annonce dans sa besace, mais déjà le besoin de rappeler «le cap» de son quinquennat. Hollande, le capitaine de pédalo, ne quittait pas le port, mais le navire de ce capitaine-là ne l’atteint jamais. Macron voyage dans sa tête et, hier soir, il nous a présenté « Tempête sous un crâne, » car le président va mal: rien ne bouge et il aurait un coup de mou.

Il a vu de la lumière à France 2 et il s’est donc encore invité mercredi soir pour un second grand oral en deux semaines. Impuissant en tout, il compte sur le verbe pour faire à la France un enfant dans le dos: l’inflation a enflé et va exploser et l’approvisionnement en énergie va manquer cet hiver. «Nous sommes en train de traverser une crise. Des crises, même», lapalissade lâchée en préambule par notre « protecteur », développant dans les foyers un climat de peur propice à tous les abus. Il en est ainsi à son troisième recours à l’article 49.3, en une semaine, pour effacer le Parlement, les élus du peuple.

En baisse dans les enquêtes d’opinion, avec à peine 35 % (?) de Français satisfaits de son action dans le dernier baromètre du Journal du dimanche, le chef de l’Etat espère embobiner les Français à la télé. Il cherche donc à enrailler la spirale et de répondre à ce que la presse aux ordres appelle un sentiment, au pire, un procès, en déconnexion qui lui serait intenté par l’opposition au moment des pénuries d’essence, comme si sa politique n’était pas en cause, pour ne pas avoir anticipé les conséquences de la guerre en Ukraine et de son hostilité à Poutine, derrière un autre déconnecté, le va-t-en guerre américain d’un autre âge, Joe Biden, resté bloqué dans les glaces d’une Guerre froide terminée depuis trente années. «Ça touche nos vies. Ça touche la vie de beaucoup de compatriotes qui ont du mal», compatit l’histrion Macron en évoquant les conséquences de l’inflation, allant même jusqu’à citer le pourcentage («50 %») de hausse des prix du poulet ces dernières semaines. Seuls les flics n’y ont pas droit.

«La France du travail et du mérite» opposée à celle des fainéants

Sans surprise, ni nouvelle dépense, il tente d’endosser les guenilles du président protecteur et raisonnable. «Protecteur» – à très court terme – du pouvoir d’achat des Français, à qui il rappelle au passage que leur situation – avec 5,6 % d’inflation en rythme annuel – est moins délicate -provisoirement – que les 10 % en moyenne dans le reste de la zone euro: quznd nous seront à 10% en décembre, nos voisins seront peut-être à 5,6%… «Un peu plus de la moitié de ce choc a été pris en charge par l’Etat», ose-t-il avancer, en rappelant les divers boucliers tarifaires et ristournes sur les prix du carburant déjà mis en place. Car, pour cet ancien ministre de F. Hollande, « ça ne coûte rien, c’est l’Etat qui paye ». Or, depuis novembre 2014, les Français ont appris que ce sont leurs enfants qui paieront les primes, ristournes et boucliers tarifaires de Macron. Celui qui n’a pas touché à la « taxe intérieure de consommation des produits énergétiques » (TICPE) a effetcimmédiat: l’effet retard sera supporté par les générations à venir.

Raisonnable (?), en se disant soucieux des équilibres budgétaires. Non sans piquer à la droite la rengaine de la «France du travail et du mérite», il rappelle son opposition à l’indexation des salaires sur l’inflation : «Si je vous disais [cela] ce soir […] alors nous détruirions des centaines, des milliers d’emplois,» assène-t-il, glaçant la population, avant de revenir très rapidement sur ses «méthodes musclées» de négociation de Total. Il a ainsi rappelé qu’il prévoit, ce qu’il n’a pas anticipé, dans le cadre de son Conseil national de la refondation (CNR), de mettre en place «une grande conférence sur le partage de la valeur» qui pourrait aboutir à sa proposition de campagne de «dividende salarié». On a déjà eu le « grand débat national » (et sa tournée en terres amies), avec les résultats que l’on sait, mais il remet ça, car, s’il se dit innovant, ça ne se voit pas; il est sec comme une figue de trois ans. «Quand on crée de la valeur, la première chose c’est d’investir, dit-il en direction des grandes entreprises sans, pour autant, annoncer de mécanisme contraignant. En ménageant la chèvre et le chou, celui qui ne contrôle rien, reste au milieu du gué. « Ça ne marche pas si on donne trop aux actionnaires et que les travailleurs n’en voient pas la valeur.» Empathie populiste qui le mouille aux chevilles.

Après avoir accusé les Français de manquer de « calme » dans les files d’attente aux pompes à essence, Macron tente maintenant de se valoriser en assurant que son gouvernement «fait» payer les grandes entreprises qui ont réalisé des «superprofits» durant la crise. «Ces profits, on les reprend et on vous les distribue dans les aides», ajoute-t-il, précisant très (trop ?) rapidement que cette «contribution» se fait à l’échelle européenne. C’est pas moi, c’est elle, disent les gamins !…

Une nouvelle fois armé de petits graphiques choisis par l’Elysée pour appuyer son propos, Macron est surtout venu sur France 2 pour faire la retape de son projet de réforme des retraites. Loin de renoncer à son objectif de faire travailler les Français plus longtemps et d’une entrée en vigueur à l’été 2023, dans huit mois, à la faveur des congés payés, il esquisse toutefois un geste de remerciement en direction de la fidèle CFDT en évoquant la possibilité de reculer progressivement l’âge légal de départ à 64 ans – et non 65 ans, comme dans son projet initial – une concession sous condition que la mesure soit accompagnée d’un allongement de la durée de cotisation de quelques trimestres. Et quatre trimestres, ça fait toujours un an… «Moi, je suis ouvert [sic]. Le tout c’est que notre modèle retombe sur ses pieds», fantasme-t-il. Façon de donner du grain à moudre dans les concertations menées par le gouvernement cet automne.

Ouvert, mais pas trop: le pied dans la porte. «Il y a une concertation, mais pas pour ne rien faire», menace-t-il, comme s’il souhaitait « en même temps » convaincre l’électorat de droite qu’il ne cède pas à l’immobilisme.

Mélenchon et la Nupes, ennemi public n°1

La réforme peut-elle être votée à l’Assemblée nationale sans recourir à l’article 49.3 ? «Je souhaite que des accords soient trouvés», hasarde-t-il. Une main tendue vers Les Républicains, et quelques bourre-pifs pour Jean-Luc Mélenchon et la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), qu’il accuse de collusion avec l’extrême droite après le vote par le Rassemblement national de la motion de censure de la colition héteroclite des quatre groupes de gauche, lundi. «Vous pensez que nos compatriotes qui ont voté pour un député socialiste ou écologiste, ils lui ont demandé de porter une majorité avec des députés du Rassemblement national, lance-t-il dans une tentative de désolidariser l’électorat de gauche modérée de la Nupes.

Contrairement à ce qu’il avait laissé entendre à huis clos devant les dirigeants de la majorité, le 28 septembre, Macron refuse de confirmer qu’il pourrait dissoudre l’Assemblée nationale en cas de vote d’une motion de censure. «Pourquoi voudriez-vous ce soir que je me lie les mains ?» minaude le stratège de pacotille, faisant mine de s’interroger… « en même temps » qu’il laisse planer le doute: «II y a des instruments qui sont dans la main du président de la République», ajoute-t-il, laissant aussi entendre qu’il pourrait user du référendum : «Croyez moi, je connais la Constitution !,» assure-t-il, en réponse aux accusations d’amateurisme. Macron se place dans «le camp» de ceux qui «résist [ent] dans les crises, [veulent] bâtir un pays plus fort, plus juste […] plutôt que [dans] le camp de celles et ceux qui croient dans le désordre». Ca ne mange pas de pain! Il en fait son «cap»«un guide». Balivernes !