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Jordan Bardella va-t-il laisser une petite place aux membres du Rassemblement national sur sa liste des européennes ? Le parti attire en masse et multiplie les « prises de guerre » recrutées hors de son fonds de réserve. Dernier en date, celui ce mardi 9 avril de Matthieu Valet, ancien chef adjoint de la brigade anticriminalité (BAC) du Val-de-Marne et porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police.
« Marine Le Pen et Jordan Bardella me donnent la formidable occasion de porter les couleurs de mon institution au Parlement européen », a déclaré cet habitué des plateaux de télévision, qui démentait il y a encore quelques semaines sa volonté de rejoindre le RN, malgré les rumeurs insistantes et un discours sécuritaire et migratoire proche de celui de Marine Le Pen.
Avant lui, ont été annoncées dans des conditions similaires les arrivées de l’essayiste Malika Sorel, de l’ancien avocat de la Manif pour Tous Alexandre Varaut et de l’ex-dirigeant de Frontex Fabrice Leggeri. Et selon le parti à la flamme, bien décidé à égrainer les candidats au compte-gouttes pour ménager l’effet médiatique, d’autres noms sont à venir. Car il en va des européennes, mais pas seulement.
Une large place à la société civile
« Pour assumer une alternance qui soit une véritable alternative, l’opinion attend que des fractions de l’élite, on va dire des personnalités éminentes – scientifiques, économiques, administratives, etc. -, annoncent leur disponibilité », théorisait en février dans Le Figaro l’analyste politique Jérôme Sainte-Marie, lui-même recruté par le RN pour assurer la formation de ses cadres, dans une tribune d’encouragement des candidats aux ralliements.
Au mois de novembre, Le Parisien chiffrait à un tiers de la liste la place dévolue à ces nouveaux profils. Auprès du quotidien, une source parlementaire partisane s’en amusait : « Bardella veut faire une liste CNews de gens vus à la télé », ce qu’a fait Macron avec ses porte-parole Prisca Thevenot qu’il a faite ministre ou Maud Bregeon, députée. A sa décharge, il n’est pas le seul, puisque l’animatrice Christine Kelly a été approchée à la fois par Eric Zemmour et Eric Ciotti pour ces mêmes élections. Reste qu’un tiers issu de la société civile, ça représente tout de même 25 places dans un scrutin où, au regard des sondages, le RN peut espérer obtenir 29 sièges.
Or, on imagine bien que c’est une place éligible qui est promise à ceux qui mettent leur carrière entre parenthèses et offrent leur notoriété à un parti qui a le vent en poupe, permettant de donner corps à la promesse de « rassemblement » figurant dans son nom. Et ce, tout en diversifiant ses profils dans le but d’acquérir l’image d’une formation « de gouvernement ». Ce qui, mécaniquement, pose peu la question de la place accordée aux eurodéputés sortants, 23, compte tenu de la dynamique du parti et de sa crédibilité qui le place en tête des sondages, avec 29% d’intentions de vote.
Des précédents historiques
Si Thierry Mariani, envoyé pour remplacer Jordan Bardella lors du premier débat des élections européennes, est certain de rempiler notamment du fait de sa russophilie assumée, tous ne seront pas reconduits. Et pour l’instant, c’est le flou qui domine. « La liste est encore en cours de construction et elle ne sera pas dévoilée en intégralité avant plusieurs semaines », expliquait début mars le directeur de campagne du RN pour les élections européennes Alexandre Loubet, au moment où la presse d’opinion cherchait à savoir si l’eurodéputée RN Virginie Joron, égérie des antivax, serait réinvestie.
En attendant, les partis en compétition ont jusqu’au vendredi 17 mai 18 heures pour déposer sa liste. D’ici cette date, la formation de Jordan Bardella ne manquera pas d’exploiter les ralliements, puisque c’est une véritable tradition au parti de Marine Le Pen. Comme le rappelle Libération ce mardi, la présidente du groupe parlementaire a toujours mis en avant des personnalités de « ralliements » censées démontrer la caducité de des dénigrements politiques.
Du préfet Christophe Bay en 2022 (épinglé par le HuffPost), à l’acteur Franck de Lapersonne en 2017 (qui a claqué la porte du FN) en passant par l’« essayiste » Hervé Juvin en 2019 (condamné pour violences conjugales, comme Adrien Quatennens ou Julien Bayou), le FN (puis le RN) s’est toujours félicité de ces coups médiatiques. A Jordan Bardella de faire mieux que Marine Le Pen en la matière.