Niger : la junte dénonce des accords militaires avec la France

Seules « les autorités légitimes » peuvent dénoncer les accords avec la France, riposte Paris

Pancarte hostile à la présence française au Niger lors d’une manifestation à Niamey,
le 3 août 2023.

« Face à l’attitude désinvolte » de Paris, les militaires à l’origine du coup d’Etat au Niger ont remis en cause le « stationnement » et le « statut » des militaires français dans le pays.

Les putschistes au Niger ont déclaré jeudi soir dénoncer plusieurs accords militaires conclus avec la France, qui concernent notamment le « stationnement » du détachement français et le « statut » des militaires présents dans le cadre de la lutte anti-djihadiste, dans un communiqué lu à la télévision nationale.

« Face à l’attitude désinvolte et la réaction de la France relativement à la situation » du Niger, « le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP, militaires au pouvoir) décide de dénoncer les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec cet Etat », a déclaré l’un des putschistes.

Rappel de l’ambassadeur du Niger en France rappelé

Par la même occasion, les militaires auteurs d’un coup d’État au Niger ont annoncé mettre « fin » aux « fonctions » d’ambassadeurs du Niger en France, aux États-Unis, au Nigeria et au Togo, dans un communiqué lu à la télévision nationale, au moment où les pressions pour rétablir l’ordre constitutionnel se multiplient internationalement.

« Il est mis fin aux fonctions des ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires de la république du Niger (…) auprès de la république française », du « Nigeria », auprès de « la république togolaise » et « auprès des États-Unis », a déclaré un des putschistes.

Ils ont également assuré qu’ils riposteront « immédiatement » en cas d' »agression ou tentative d’agression » contre leur pays par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), trois jours avant la fin de l’ultimatum décrété par l’organisation pour un retour à l’ordre constitutionnel.

« La Cédéao étant impersonnelle, toute agression ou tentative d’agression contre l’État du Niger verra une riposte immédiate et sans préavis des Forces de défense et de sécurité nigériennes sur un de ses membres, à l’exception des pays amis suspendus », a déclaré un des putschistes, faisant allusion au Burkina Faso et au Mali.

« Le cadre juridique de [la] coopération avec le Niger en matière de défense repose sur des accords qui ont été conclus avec les autorités nigériennes légitimes« , a souligné le ministère français des Affaires étrangères. Ces autorités « sont les seules que la France, comme l’ensemble de la communauté internationale, reconnaît », a-t-elle ajouté, tout en « prenant note » du communiqué de la junte. 

La France appelle par ailleurs « de nouveau au rétablissement des institutions démocratiques du Niger ».

« Le Niger est le dernier bastion pour le respect des droits », prévient Bazoum, le président déchu, ancien président du PNDS, membre de l’Internationale socialiste. Le coup d’Etat au Niger pourrait avoir des conséquences « dévastatrices » pour le monde et faire passer la région du Sahel sous « influence » de la Russie, via les mercenaires du groupe Wagner, écrit le président élu (le 21 février 2021), Mohamed Bazoum, 63 ans, dans une tribune parue jeudi dans le Washington Post. Le 24 février 2023, la junte au Mali soutenue par le groupe Wagner a fait partie des sept Etats membres de l’ONU (Russie, Bélarus, Syrie, Corée du Nord, Nicaragua, Erythrée) qui ont voté contre une résolution appelant à l’arrêt des combats en Ukraine et le retrait des forces armées russes d’Ukraine.

Séquestré depuis que son gouvernement a été renversé le 26 juillet par les putschistes, il prévient : « Dans la région trouble du Sahel, au milieu de mouvements autoritaires qui se sont imposés chez certains de nos voisins, le Niger est le dernier bastion pour le respect des droits ». L’ex-président serait-il sous l’influence maléfique du président démocrate Joe Biden ? En effet, le principal danger vient plutôt des groupes armés islamistes alliés à Al-Qaïda et à l’Etat islamique déjà établis à Bamako, Mali, et à Ouagadougou, Burkina Faso. Un an après le départ du Mali des soldats français de l’opération Barkhane, la région de Ménaka est passée sous le contrôle de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS). Malgré le soutien du groupe paramilitaire russe Wagner, l’armée malienne ne semble pas en mesure d’assurer la sécurité. Egalement présents dans la ville, les casques bleus ont tenté d’apaiser les tensions, mais leur mandat est arrivée à terme le 30 juin dernier. A la même date, au Burkina Faso, les djihadistes contrôlaient environ 40% du territoire burkinabé.

Les putschistes au pouvoir depuis huit jours à Niamey ont également annoncé qu’ils mettent fin aux «fonctions» d’ambassadeurs du Niger dans quatre pays, dont la France.

D’où vient le sentiment anti-français ? Des réseaux sociaux ? D’un candidat à l’adhésion à l’UE, peut-être aussi, un peu…