Comment en finir avec la dictature des sondages

Le pouvoir des enquêtes d’opinion en période électorale est en effet une menace pour la démocratie

Il serait républicain de limiter les enquêtes politiques d’opinion. La période sensible de trois ou quatre semaines avant le scrutin devrait être gelée, de même que ces « enquêtes » devraient être limitées aux programmes des candidats et fermées à leur personne (traits de caractère, popularité, confiance,…) et aux qualificatifs qui étiquettent leur positionnement. Dans 1984, George Orwell n’offre à ses personnages que « deux Minutes de Haine « . Voyez où en sont, sans les sondages, les réseaux sociaux ouverts 24/24…

Dans Droit électoral (titre original : Franchise, parfois traduit par ‘A voté » ci-dessus), une nouvelle écrite dans les années 1950, le maître de la science-fiction Isaac Asimov imagine un nouveau genre de système politique dans lequel un ordinateur géant a la faculté de calculer la tendance de l’opinion à partir de millions de paramètres et de désigner un seul électeur – le plus représentatif de tous, déterminé par Multivac, nom inspiré par l’UNIVAC I, le premier ordinateur commercial produit aux Etats-Unis – qui a seul le pouvoir d’élire le prochain président.

La campagne présidentielle 2022 montre que nous ne sommes plus très loin d’un tel système, puisque les sondages sont réalisés généralement sur la base d’un «échantillon représentatif» de plus ou moins 1.000 personnes et que, sur la durée, ils continuent de ne donner qu’un seul candidat assuré d’accéder au second tour: trois mois avant, l’élection est pliée.

La puissance de ces prédictions est exorbitante, interpellant sur leur légitimité, d’autant qu’elles sont présentées comme scientifiques, puisque certaines de ces entreprises commerciales seraient des « instituts », comme l’institut Pasteur, lequel n’a d’ailleurs pas été apte à produire un vaccin tricolore anti-covid. Nous sommes immergés dans une vaste escroquerie où les robots dirigeants affichent encore de la compassion à profusion, mais qui passent déjà à la vitesse supérieure en distribuant des milliards aux alphas et des centimes aux autres, illettrés, fainéants, cyniques ou extrémistes, populistes et nauséabonds, sous les applaudissements des « acteurs politiques », collabos du pouvoir et des salles de redaction.

Baromètre des présidentiables sondage ViaVoice 10 mars 2017.

On peut juger du risque démocratique au poids des sondages sur l’opinion, que ce soit les chroniqueurs et les électeurs, ou les candidats eux-mêmes qui feraient coller leurs programmes aux éléments mis en exergue par les enquêteurs, alors que les données techniques n’en sont pas communiquées, pas plus que les conflits d’intérêts éventuels des actionnaires ne sont révélés.

En amont de l’élection, les sondages sont de formidables propulseurs de candidatures et on leur connaît désormais cet incroyable pouvoir de faire émerger des candidats dont la crédibilité électorale ne tient qu’à leur score virtuel (leurs ‘likes’ ?), lui-même incroyable. Au moment de l’élection, évidemment, avec cet incontournable «vote utile»… l’utilité en question n’ayant d’autre instrument de mesure que le baromètre établi par les instituts de sondage. Certains prêtent même aujourd’hui aux sondages la faculté d’inspirer le retrait d’un candidat au profit d’un autre ! Le danger de manipulation est immense dès lors que soit la prophétie devient auto-réalisatrice au détriment d’une pleine et entière liberté de choix des électeurs, soit les sondages se trompent et qu’ils faussent le calcul des citoyens. Et l’avenir du pays dont on dira du peuple qu’il est souverain.

Prétendu caractère scientifique

La menace est en marche et le peuple, s’il n’était chloroformé, serait en droit d’exiger sans plus attendre que l’activité sondagière soit particulièrement encadrée par la loi. Que soient par exemple connues les méthodes de calcul, qui à partir de «résultats bruts» permettent d’en arriver aux «résultats nets» au prix d’ajustements dont on espère qu’ils ne sont pas purement arbitraires. Las ! Présentant leur activité comme «scientifique», les instituts refusent de rendre public ce qui constitue, à leurs yeux, des «secrets de fabrication». Un équivalent dans la presse serait le sacro-saint « secret des sources » qui remet notre confiance entre les mains d’une déontologie professionnelle, dont nul ne connaît le visage et l’adresse mail. Le seul contrôle prévu est exercé par une Commission des sondages atone, que l’on n’entend jamais et dont, à vrai dire, si souverain soit-il, aucun citoyen, si souverain soit-il, ne connaît l’existence. Ni donc le coût.

Depuis la loi du 20 janvier 2017, la Commission des sondages est composée de neuf membres désignés pour six ans parmi lesquels on compte deux membres du Conseil d’État, deux de la Cour de cassation et deux de la Cour des comptes et trois membres désignés par le Président de la République, le Président du Sénat et le Président de l’Assemblée nationale. Qui préside cette instance indépendante? Mystère…

Un encadrement légal plus strict apparaît démocratiquement nécessaire et juridiquement possible. D’une manière générale, toutes les informations concernant les méthodes utilisées devraient être rendues publiques afin que leur prétendu caractère scientifique puisse être soumis à la critique de la communauté scientifique, comme c’est le cas de tous les travaux qui se parent des vertus de l’objectivité et de la rigueur.

Critères évanescents

La loi aurait vocation à mieux anticiper les périodes électorales en encadrant les activités souterraines de ces pseudo-instituts, avec toute la rigueur républicaine dont serait capable la démocratie. A cet égard, une proposition a été formulée qui consisterait à interdire les sondages deux mois avant l’élection. Outre que cette mesure aurait pour effet de cristalliser l’opinion à ce moment précis, ce type d’interdiction se heurterait à la résistance des profiteurs du système, tout à la fois au nom de la liberté d’entreprendre des societés commerciales de sondages et de la liberté de la presse, qui s’aroge tous les droits sur la base de ce principe antithétique de la démocratie, dès lors qu’elle rogne sur les droits et libertés du peuple dont le droit de vote libre et la liberté de conscience de chacun. Telles qu’ils empiètent, les sondages n’ont aucune valeur constitutionnelle.

Une autre voie semble pourtant envisageable : celle d’une interdiction relative où ne seraient prohibés durant cette période que les sondages portant sur les personnes pour ne conserver que ceux portant sur les propositions. Ainsi, le pouvoir d’influence des instituts de sondages serait-il contenu au moment où il est le plus évidemment palpable. Ainsi pourrions-nous échapper à cette période assez malsaine de la vie politique où notre attention est focalisée sur les courbes de popularité fluctuant au gré de critères évanescents. Sans oublier qu’une telle mesure aurait au demeurant pour effet secondaire mais vertueux d’inciter les électeurs à s’intéresser davantage au contenu des programmes qu’à la personne des candidats.

Dix maires Macron-compatibles caricaturent Zemmour dans une tribune

Les dix appellent à « un sursaut populaire » face à Eric Zemmour

Une tribune d’élus anti-démocrates cible pareillement Eric Zemmour: menace de mort à …Nantes,
plus que lynchage

La tribune dans Le Monde égratigne la presse.

« Il est temps de nous réveiller collectivement », pour « que la campagne électorale ne soit pas noircie par le mensonge et l’hypocrisie », écrivent ce jeudi dix élus de grandes villes dans une tribune publiée sur le site du Monde, accusant l’essayiste Eric Zemmour d’être « à la tête » d’une « prédation médiatique ».

Ces élus favorables à Macron et Hidalgo dénoncent ce qu’ils qualifient de « raisonnements simplistes » de l’historien. « Nous appelons à un sursaut populaire. Les raisonnements simplistes et trompeurs ne sauveront personne », clament-ils, se disant « consternés par les débats caricaturaux qui s’étalent sous nos yeux depuis plusieurs semaines ».

Ces dix signataires sont la maire PS de Rennes Nathalie Appéré, le maire PS de Montpellier Michaël Delafosse, qui assure que « Castex sera perçu un jour comme l’un des meilleurs premiers ministres de la Ve République tant il est à l’écoute », le maire PS de Nancy Mathieu Klein, adhérent au mouvement  et s’avouer « Macron-compatible », la maire PS de Périgueux Delphine Labails, féministe, écolo, interco-sceptique et inspectrice au ministère de la Jeunesse et des Sports (actuellement positive à la covid: vaccinée ?), la maire PS de Nantes Johanna Rolland, directrice de campagne présidentielle d’Anne Hidalgo, le maire de Reims Arnaud Robinet, porte-parole de La France audacieuse du macronien Christian Estrosi, puis membre d’Horizons d’Edouard Philippe (sa grand-mère paternelle est oranaise de confession juive et son grand-père, catholique, tandis que son grand-père maternelle est kabyle) , le maire macronien d’Arras Frédéric Leturque, rallié au président depuis 2020, le maire LR de Toulouse Jean-Luc Moudenc, La France audacieuse, comme Estrosi, le maire LR de Saint-Etienne Gabriel Perdriau, soutien de Bruno Le Maire, et la présidente LR du Grand Reims Catherine Vautrin, ancienne ministre de Chirac, battue par la franco-malgache Aina Kuric, LREM.

Le modèle de « 1984 » (George Orwell) qu’évoque Zemmour irrite Macron et ses dix affidés

« La volonté de M. Zemmour est très claire. Il l’a dit lui-même : son modèle, c’est 1984, de George Orwell. Il veut contrôler le passé pour contrôler les esprits », affirment-ils, détournant le texte et la pensée d’Orwell, comme celle de Zemmour à l’ENA: les bien-pensants réussissent particulièrement aisément dans certaines grandes écoles, telle l’EHESS (sans parler des universités rouges). Lien

Ils accusent aussi l’historien d’« utiliser » l’Histoire de France « en n’hésitant pas à mentir » pour « revisiter les problèmes d’aujourd’hui et faire croire, impuissant sur les réponses, que les solutions sont faciles ». Commentaire subjectif d’esprits qui ne sont pas autant critiques de la pensée unique. Ce sont des suiveurs, comme l’indique le parcours de la plupart des signataires, louvoyeurs et caboteurs au plus près de la pensée dominante.

Ce qu’Orwell a écrit est en vérité plus complexe et n’est pas réductible : «Celui qui contrôle le passé contrôle l’avenir ; celui qui contrôle le présent contrôle le passé, » slogan du parti au pouvoir de l’Etat totalitaire d’Océania dans 1984. L’Histoire est plus que l’Histoire. Plus qu’un récit, plus que des événements, plus qu’une mise en perspective. C’est une arme d’éducation collective pour le moins, d’endoctrinement le plus souvent. C’est ce qu’ont compris tous les pouvoirs à toutes les époques et sur tous les continents. C’est ce qu’ont compris rois, empereurs, Républiques. L’Histoire, c’est l’arme suprême de la politique. C’est ce que dénonce Zemmour chez Macron. La bande des dix s’y reconnaît et s’offusque à son image.

Ils vantent leur expérience politique, ce que Macron n’avait pas

Ces dix maires opposent leur expérience du « terrain » – pas des « dîners mondains » (du banquier Rothschild ) – pour souligner leur connaissance de « la France réelle » et « demand(ent) à ce [en français] qu’on parle enfin d’elle ».

Faisant référence aux interprétations dans la presse de propos sur les femmes du candidat qui inquiète Macron, plutôt dans une stratégie de duel avec Marine Le Pen, ils l’accusent de « refuse(r) sa chance à la moitié de la France » et interrogent : « pourquoi penser qu’il s’arrêtera là ? ». Une projection suspecte de subjectivité partisane. Haineuse ?

« La France réelle n’est pas la France de Vichy », soulignent-ils aussi : « Notre pays sait que Philippe Pétain l’a trahi. »

DEVOIR de MEMOIRE: Mitterrand : pétainiste ou résistant? LIEN PaSiDupes

« La France réelle est diverse », ajoutent-ils, et « la France n’a pas de prénom attitré », enchaînent-ils, après la polémique sur les prénoms née des déclarations d’Eric Zemmour.

Pourtant, si les dix polémistes veulent bien rafraîchir leur mémoire sélective, Martin Hirsch considéra que l’intégration sera réalisée quand les Catholiques donneront à leurs enfants le « prénom Mohamed » (déclaration sur Canal +, époque gauchiste, le 1er juillet 2010) – lien PaSiDupes:

Combien d’entre eux signeront demain une tribune pour dénoncer le « fascisme » du patron christianophobe de l’AP-HP ?

Onfray dénonce le « journalisme orwellien » actuel

Le journalisme orwellien

EDITO. Lundi, Michel Onfray a reçu un texto d’un journaliste de Libération…

Le journalisme orwellien

Auteur

Michel ONFRAYCo-fondateur de Front PopulairePublié le 21 avril 2021OFFRE SPECIALE: ABONNEMENT 1 AN (PAPIER + WEB) + HS1 59€ Abonnez-vous pendant un an à Front Populaire (site + 4 numéros de la revue) et recevez chez vous en plus le Premier Hors Série: l’abécédaire du souverainisme.J’EN PROFITE!

Lundi 19 avril, je reçois ce message d’un numéro inconnu. « Bonjour, Journaliste à Libé, je prépare le portrait de Sonia Mabrouk. C’est Johanna Luyssen qui m’a donné votre numéro. J’aurais aimé revenir quelques minutes avec vous sur vos interactions en plateau avec elle, et plus généralement vous donner l’occasion de lui répondre vu qu’elle vous cible ouvertement dans son dernier livre. Bien à vous, Guillaume Gendron ».

Je ne connais ni d’Ève ni d’Adam cette Johanna Luyssen, journaliste dans le même journal, son nom n’est pas dans mon agenda téléphonique et je n’ai pas souvenir de l’avoir jamais rencontrée. Mais passons.

Ce texto dit clairement les choses : comme un sniper, Sonia Mabrouk me « cible » dans son livre et, généreux, amical, charitable, serviable, bienfaisant, le journal Libération, qui me couvre de boue régulièrement – et c’est tant mieux, leurs éloges me déprimeraient -, me donnerait l’occasion d’une vendetta bienvenue ! Elle me « cible », Libé me propose de la tuer… C’est une bonne et belle conception du journalisme.

Il se fait que Sonia Mabrouk fait partie des rares journalistes que je respecte car elle fait un travail remarquable et courageux à contre-courant des facilités qui permettent de faire carrière. Je suis allé sur La Chaîne parlementaire, c’était au temps où je n’y étais pas blacklistéquand elle y travaillait. Mais je n’ai pas souvenir d’avoir participé à l’un de ses plateaux sur CNEWS depuis qu’elle y travaille, ni d’avoir été convié à l’une de ses matinales sur Europe 1. Ce qui me dispense de jugements flagorneurs. C’est une belle personne et c’est en même temps une journaliste comme on en rêve – juste et cultivée, travailleuse et informée, pertinente et efficace. Tenace aussi et ne lâchant pas qui pratique la langue de bois et ne veut pas répondre à ses questions, on l’a vu il y a peu avec Jack Lang ou la patronne de l’UNEF.

Nous nous entendons bien et je la respecte en tout. Elle écrit en plus de bons livres.

Étonné, je sollicite ma garde rapprochée à Front Populaire pour savoir en quoi consiste le coup de fusil que m’aurait destiné Sonia Mabrouk. Réactive, elle me donne l’information dans le quart d’heure. La voici :

Dans ce livre, Insoumission françaiseau chapitre intitulé « Les islamo-compatibles » pages 82 et 83, on peut lire ceci :« Cette confrontation sur un même territoire a été théorisée par le célèbre anthropologue Claude Lévi-Strauss. Selon lui, de ce face-à-face résultera inévitablement une nouvelle civilisation. Mais laquelle ? Depuis quelques années, le philosophe Michel Onfray annonce avec constance et sans en faire un drame la fin de la civilisation judéo-chrétienne. Drapé dans un manteau de noblesse tragi-romantique, il répète : « Le bateau coule, restez élégant. Mourez debout. » Lucidité supérieure ou défaitisme morbide ? Le philosophe se place dans la peau d’un médecin pour livrer un diagnostic clinique de la situation. Sommes-nous alors condamnés à la disparition de la civilisation judéo-chrétienne ? Sommes-nous condamnés à une confrontation sans merci entre deux civilisations dont il ne restera que des cendres ? Comment conjurer un tel risque ? Je milite pour ma part en faveur d’un rééquilibrage de la place des religions dans le strict respect des principes de laïcité. Une chrétienté davantage affirmée permettrait de contrecarrer l’offensive d’un Islam politique conquérant. Il faut bien se rendre compte que le danger n’est pas tant la force de l’Islam que la faiblesse pathologique du christianisme. Si la civilisation judéo-chrétienne se meurt, c’est avant tout faute de combattants au sens de défenseurs. Le salut de cette civilisation passera par une renaissance décomplexée de la chrétienté. » Et Sonia Mabrouk de citer mon Décadence. De Jésus à Ben Laden. Vie et mort de l’Occident, Flammarion, 2017.

Plus ciblé que ça, tu meurs, si je puis me permettre…

Ce que je dis est vrai, rien n’est déformé, il n’est pas déshonorant de se retrouver « drapé dans un manteau de noblesse tragi-romantique », puisque c’est mon vêtement. J’y suis présenté comme un médecin qui diagnostique puis pronostique la fin de notre civilisation. Sonia Mabrouk manifeste son désaccord avec courtoisie et élégance, c’est bien dans son style, et fait savoir que, probablement croyante, de toute façon animée par une véritable spiritualité, elle croit quant à elle qu’il existe un remède à cette pathologie de la civilisation sous forme d’une renaissance portée par un christianisme décomplexé. Nous pourrions en débattre, car ce n’est bien sûr pas ma thèse, mais elle ne ressemble en rien à un ciblage de tireur qui veut tuer. Ce différend fournit juste l’occasion d’un débat, sûrement pas celle d’un pugilat ou d’un règlement de compte.

Le texto du journaliste en appelle au plus bas en l’homme : la réactivité ressentimenteuse de qui, ciblé, réagirait illico en décrochant son téléphone pour se répandre lui aussi en poudre.

Ce jeune homme me prend pour un perdreau de l’année…

Dans les années 90 du siècle dernier, j’ai le souvenir d’un appel téléphonique de Jean Lebrun, un journaliste qui tenait alors l’antenne de France-Culture le matin. Il m’avait contacté pour me demander de réfléchir à la représentation du philosophe en tout – histoire, peinture, littérature, cinéma, poésie… J’avais sérieusement effectué des recherches et il m’avait rappelé plus tard pour m’enregistrer. J’avais donc déroulé mon topo : le philosophe chez Barrès et Guilloux, chez Poussin et Fromanger, chez Lucrèce et La Fontaine, etc. On enregistre ; puis, sous la forme d’un faux repentir mielleux sinon fielleux, le catho de gauche ajoute : « quelle image associez-vous au philosophe ? » ; je réponds : « Nietzsche, seul, marchant autour du lac, à Sils Maria, habité et requis par ses intuitions philosophiques ». « Bon très bien » me dit-il avant d’ajouter : « ah oui… et que pensez-vous de BHL ? ». J’étais à l’époque auteur Grasset et j’aurais estimé inélégant de critiquer ce personnage en publiant dans la même maison. Il n’eut pas, lui, de ces élégances et me cibla un jour dans Le Point lors de la parution de mon Freud. Il ouvrit des hostilités qui m’ont rendu ma liberté. J’ai alors dit qu’au-delà de ses chemises blanches, il avait contribué à restaurer la ligne claire en philosophie dans un temps de sabir structuraliste. « Très bien me dit-il, ça ira, ce sera diffusé demain matin ».

Le lendemain, à sept heures, dans ma voiture pour Caen où je donnais mon cours une heure plus tard, j’entendis sur France-Culture Jean Lebrun annoncer que l’heure était consacrée à BHL. Vers 7h30, il annonça : « nous avons demandé à votre ami (sic) Michel Onfray ce qu’il pensait de vous ». C’est bien sûr la seule chose qui fut diffusée de tout le travail qu’on m’avait sciemment demandé de faire en vain.

Depuis, je sais ce qu’est un journaliste.

Sonia Mabrouk ne mange pas de ce pain-là.

Note de la rédaction : Le journal Libération n’est pas à son premier coup au-dessous de la ceinture concernant Front Populaire. Alors que notre revue n’était pas encore sous presse, en mai dernier, ce journal, sous la plume de Laurent Joffrin, parlait sans en avoir lu une ligne de « dérives d’extrême droite » et nous comparait à Marcel Déat et Jacques Doriot, deux collaborateurs dont on rappellera que l’un porta l’uniforme nazi et l’autre travailla activement à Vichy puis à Sigmaringen avant d’être condamné à mort par contumace à la Libération. On saluera l’esprit de nuance ! Libération n’a jamais ensuite cru utile de nourrir son « argumentaire ». En revanche, une nouvelle attaque devait avoir lieu au sujet du succès de Front populaire qui avait alors le tort d’avoir engrangé des abonnés et des lecteurs et donc – si on suit leur raisonnement – de ne rien couter aux finances publiques ! Chacun sera libre d’apprécier qu’en revanche, et depuis des années, des dizaines de millions d’euros d’aides publiques ont été versées à ce quotidien, le journal ne pouvant vivre du seul désir de ses lecteurs.