Le Burkina Faso juge Radios-France partisan des islamistes

Le Burkina ordonne « la suspension immédiate » de RFI « jusqu’à nouvel ordre »

Le pays reproche entre autres à la radio d’avoir relayé un « message d’intimidation » attribué à un « chef terroriste », dans un contexte de rumeurs de tentative de coup d’Etat au Burkina Faso, ex-Haute-Volta. 

Censure ou avertissement ? Le Burkina Faso reproche à Radios France notamment d’avoir relayé un « message d’intimidation » attribué à un « chef terroriste », a annoncé le porte-parole du gouvernement burkinabé.

En relayant ce message, RFI prend parti et « contribue ainsi à une manœuvre désespérée des groupes terroristes en vue de dissuader les milliers de Burkinabés mobilisés pour la défense de la Patrie », indique un communiqué signé du porte-parole, Jean Emmanuel Ouedraogo.

Au début de la semaine, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, affilié à Al-Qaida), avait diffusé une vidéo dans laquelle l’un de ses chefs au Burkina Faso menaçait de s’attaquer à des villages défendus par des Volontaires de la défense de la patrie (VDP), supplétifs civils de l’armée, qui vient d’en recruter 90.000 en trois semaines pour faire face à la recrudescence des attaques djihadistes.

Au Burkina, RFI participe-t-elle à la désinformation, comme France inter et France info en France ?

Le gouvernement reproche également à RFI, radio publique française, d’avoir repris dans sa revue de presse de vendredi « une information mensongère », indiquant que :  »Le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré, assure qu’une tentative de coup d’Etat a visé son pouvoir » ».

Le communiqué rappelle que « le 3 novembre dernier, le gouvernement avait déjà exprimé son indignation face à l’attitude tendancieuse des journalistes de ce média (RFI) et leur propension à jeter un discrédit sur la lutte dans laquelle le peuple burkinabé est engagé pour plus de liberté et de dignité ».

« Au regard de tout ce qui précède, le gouvernement a décidé de la suspension immédiate jusqu’à nouvel ordre, de la diffusion des programmes de Radio France Internationale sur toute l’étendue du territoire national », ajoute-t-il. Un journaliste de l’AFP à Ouagadougou a constaté en fin d’après-midi qu’on ne pouvait effectivement plus écouter cette radio.

Des « accusations infondées »

La direction de RFI « déplore vivement cette décision et s’élève contre les accusations totalement infondées mettant en cause le professionnalisme de ses antennes », a-t-elle indiqué samedi soir dans un communiqué.

« Cette coupure est intervenue sans préavis [le 3 novembre dernier, c’était quoi ?] et sans que ne soient mises en œuvre les procédures prévues par la convention de diffusion de RFI établie par le Conseil supérieur de la communication du Burkina Faso », affirme-t-elle au nom de Marie-Christine Saragosse, née de parents enseignants à Philippeville en Algérie, il y a 62 ans (après le départ de la France), et présidente-directrice générale socialiste (rocardienne) de France Médias Monde depuis dix ans (2012), nommée par François Hollande.

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La direction de la chaîne ajoute que le groupe France médias monde auquel RFI appartient, « explorera toutes les voies pour parvenir au rétablissement de la diffusion de RFI, et rappelle son attachement sans faille à la liberté d’informer comme au travail professionnel de ses journalistes ». Selon la direction de RFI, la radio est suivie chaque semaine au Burkina Faso « par plus de 40 % de la population et plus de 70 % des leaders d’opinion ».

En 2017, Marie-Christine Saragosse engage un partenariat avec l’AUF (Agence universitaire de la Francophonie) pour contribuer au rayonnement international de la connaissance et de l’expertise scientifique francophone. Du 20 octobre 2020 au 10 avril 2021, France Médias Monde est présente au pavillon « France » de l’Exposition universelle de 2020 qui se déroule à Dubaï, capitale des Emirats arabes unis, accusés de collaboration avec des milices salafistes en Libye ou au Yémen.

Deuxième pays à interdire RFI

Le gouvernement tient néanmoins « à réaffirmer à l’opinion nationale et internationale son attachement à la liberté de presse et d’opinion » et « au droit du public à l’information », sujets tabous visant à museler les détracteurs, mais « invite cependant au respect des règles et principes édictés en la matière dans notre pays ».

Le Burkina, théâtre de deux coups d’Etat militaires en huit mois et en proie depuis 2015 à la violence djihadiste, est le deuxième pays de la région à interdire RFI cette année après le Mali, également dirigé par des militaires putschistes et frappé par les djihadistes, en mars.

« Les nerfs sont à vif, cependant museler ou persécuter la presse ne transforme pas le mensonge en vérité », a estimé Newton Ahmed Barry, journaliste et ancien président de la Commission électorale nationale (CEN), dans une opération de victimisation. En novembre 2014, ce journaliste était candidat au poste de président de la transition, à la suite de la révolution de 2014 au Burkina Faso.

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