«Marie-France Garaud, la femme la plus importante de la Ve République» (Sarah Knafo)

Avant la parité obligée et le féminisme aigri, Madame Garaud en imposait sans aggresser

Dans un texte très personnel, la candidate Reconquête! aux Européennes raconte sa rencontre avec l’ancienne conseillère de Georges Pompidou et Jacques Chirac, morte mercredi à l’âge de 90 ans. Une femme libre et exigeante, se souvient-elle.

    C’est sans doute la femme la plus importante de la Ve République qui nous quitte. A 30 ans, on trouve Marie-France Garaud aux côtés de Jean Foyer, Garde des Sceaux du Général de Gaulle. On la retrouve à l’Elysée, sentinelle de l’esprit gaullien auprès de Georges Pompidou. On la retrouve encore en grande ordonnatrice du RPR de Jacques Chirac. On la retrouve enfin inspiratrice du combat souverainiste depuis le «Non» à Maastricht.

    J’ai eu la chance de connaître Marie-France Garaud. Elle avait 80 ans, j’en avais 20. J’étais étudiante à Sciences Po et, un jour du printemps 2015, je l’ai appelée pour l’inviter devant notre petite association. «Alors ça existe ? Des jeunes qui pensent encore à la France ?». Oui, madame, ça existe. Elle est venue. Devant une salle comble, elle a tenu pendant trois heures une conférence brillante, ciselée, magistrale. Elle s’est moquée des questions et du thème de la conférence. Elle a parlé de ce dont elle voulait parler. De son dégoût des politiciens, de la chute du niveau par rapport au monde de géants qu’elle avait connus, conseillés, façonnés même.

    A la fin de la conférence, elle m’a demandé si je pouvais marcher avec elle jusqu’à son domicile. «Venez prendre un thé à la maison, dimanche». Et me voici, quai Anatole France, heureuse et intimidée dans ce salon où tant d’autres avant moi ont patienté, écouté, travaillé : Charles Pasqua, Philippe Séguin, Philippe de Villiers, Henri Guaino, Eric Zemmour, aussi. J’ai appris depuis que tous ces hommes à la réputation de «grands machos» avaient été aussi intimidés que je le fus devant cette dame au strict chignon.

    Par la fenêtre, on voit la Seine et la Concorde. Nous sommes dans un grand salon du XIXe siècle. Lui fait face un tout petit bureau, minuscule et encombré, dans lequel elle a travaillé toute sa vie, presque jusqu’à la fin. Elle ne porte pas son habituel tailleur Chanel, mais un col roulé clair. Chignon impeccable. Parfum distingué. Je suis bien chez Marie-France Garaud.

    On ne peut pas vraiment dire qu’elle mette à l’aise au premier regard… Dans la pensée comme dans l’action, il y a en elle un classicisme aux antipodes de la fausse sympathie à la mode américaine. Elle aurait pu vivre au XVIIe siècle.

    Elle me demande de lui expliquer pourquoi les «vieilles idées» qu’elle a défendues, la souveraineté, l’indépendance de la France, reprennent soudain des couleurs au sein d’une certaine jeunesse. J’essaie de dire quelque chose d’intéressant… Tout lui a donné raison. Elle se demande si ma génération la connaît encore.

    Altière, cassante, égale des grands hommes, elle reste une femme. Et quelle femme ! Une femme libre, une femme de caractère. (Sarah Knafo)

    Elle me raconte ses relations avec Jean Foyer, Georges Pompidou, Pierre Juillet. Je lui demande s’ils se sont aimés avec Chirac ? Elle pointe un doigt menaçant vers moi : «Ah non, Sarah, ne m’insultez pas. Pas Chirac !». Et elle donne l’impression de gronder sa petite-fille.

    Conseillère et compagne d’Eric Zemmour, Sarah Knafo est candidate aux élections européennes pour le parti Reconquête!

    Je suis au spectacle. Elle me réinterprète ses classiques : «Mitterrand a détruit la Ve République par orgueil. Giscard par vanité. Et Chirac, par inadvertance».

    Elle en impose. Elle a cette manière très personnelle d’être à la fois glaçante et malicieuse. Elle tue en une phrase, mais elle a un sourire au fond des yeux. C’est un mélange de Comtesse de Boigne et du Diable s’habille en Prada.

    Nous nous reverrons encore et encore. Des dimanches, quai Anatole France, pour «prendre le thé». Il y aura ses petits-enfants, parfois. Elle réclame leurs livres scolaires : «Vous vous rendez compte Sarah ? Il y a plus d’images que de mots dans ces machins !». Je ris. Elle me demande : «Sérieusement, vous avez déjà appris quelque chose à l’école, vous ?».

    J’ai beaucoup appris auprès d’elle. Elle a contribué à mon éducation politique et intellectuelle. Je lui enverrai mes manuscrits, et même mes copies de droit public, qu’elle corrigera avec bien plus de sévérité que mes professeurs !

    Altière, cassante, égale des grands hommes, elle reste une femme. Et quelle femme ! Une femme libre, une femme de caractère. Conseillère de l’ombre, elle a refusé les postes de ministres et d’ambassadeur. Elle est devenue magistrate à la Cour des comptes. Elle m’a incitée à prendre la même voie et je l’ai écoutée. Elle reviendra en politique justement comme troisième sur la liste de Pasqua et Villiers aux élections européennes et sera élue. Je ne pourrai jamais lui raconter la suite de l’histoire.

    Elle s’est présentée en 1981 à l’élection présidentielle, pour une authentique candidature de témoignage – comme Michel Debré, candidat la même année, on l’oublie, et qui obtiendra le même score qu’elle. Quand on pense à ces deux monuments de la Ve à moins de 2% ! Lorsqu’on lui demande, quelques semaines avant l’élection, si elle va arrêter cette course perdue d’avance, elle répond, impérieuse : «Je ne pense pas qu’on ait jamais vu l’exigence se retirer devant la facilité».

    Cette femme, qui était toute exigence et intransigeance, a dû rester forte et digne jusqu’à son dernier souffle. Je suis une anecdote dans la vie de cette grande dame, mais j’aurais tant aimé lui dire au revoir et merci. Je le fais ici.

    Adieu, Madame.

    Européennes 2024 : Bellamy déroule le programme de LR

    Pour les oppositions politique et médiatique affirmant qu’il n’en a pas…

    Il est le seul candidat du « vote utile. En dévoilant son programme pour les élections européennes, François-Xavier Bellamy fait sa place dans une campagne jusqu’ici prise en tenailles entre les listes de Jordan Bardella et celle de Raphaël Glucksmann, entre mirages socialistes, d’un côté, et dénonciation de la politique fédéraliste européenne de Macron, de l’autre. Aux journalistes qui lui demandent ce qui le différencie des deux listes de droite radicale, François-Xavier Bellamy répond en tapant volontiers sur le Rassemblement national et rappelle que Les Républicains a un bilan. « J’entends, partout, en France, des gens me dire qu’ils ont essayé la gauche, la droite, le centre, mais qu’ils n’ont pas essayé le Rassemblement national. A l’échelle européenne, c’est inexact : cela fait 10 ans que les Français font confiance au Rassemblement national aux élections européennes. Ils sont arrivés en tête en 2019 et en 2014. Mais qu’est-ce qui a changé pour la France, pour les Français ? », demande François-Xavier Bellamy, avant de dénoncer les « changements de pied » du parti de Marine Le Pen « sur la Pac, sur l’Otan, sur le Brexit ».

    Souverainisme

    Pour se distinguer encore de Jordan Bardella, l’ancien professeur de philosophie, fort de cinq années réputées actives et sérieuses entre Strasbourg et Bruxelles, répète à l’envi son principal argument : voter LR, c’est voter utile. « Nous sommes la seule liste qui peut permettre aux Français de faire demain la décision », martèle le Versaillais. Le parti de droite siège en effet au Parlement européen sous la bannière du PPE, le parti majoritaire. Il est donc en mesure d’influencer la politique communautaire, contrairement notamment au Rassemblement national de Jordan Bardella dont le chef de file LR assimile les votes à des « voix perdues », car sans influence sur le cours des choses à Strasbourg.

    Et pour affirmer l’argument du vote utile, François-Xavier Bellamy a présenté mardi un programme destiné à séduire l’électorat conservateur, autour d’un mot-clé : le souverainisme, décliné aux thèmes économiques, agricoles, énergétiques, militaires, et bien sûr au sujet de l’immigration, structurant dans le discours des Républicains depuis de nombreuses années. Ce programme, destiné à « sortir des crises que traversent la France et l’Europe » permet aussi à François-Xavier Bellamy de dénoncer le bilan de Macron, synonyme, selon lui, d’un « affaiblissement ». « Notre continent tout entier traverse une crise très profonde », insiste la tête de liste LR, déplorant « le décrochage de l’Europe dans le monde, et le décrochage de la France en Europe ».

    Eric Ciotti, président du parti, présent au côté de son candidat pour présenter le programme, évoque « un projet responsable et sérieux » et compare la campagne des Républicains à « un chemin que nous empruntons avec nos valeurs, nos convictions, sans rien concéder ».

    Quid d’Ursula von der Leyen ?

    Reste que le parti de droite va devoir faire des choix, s’il ne veut rien concéder. Peut-il continuer à faire partie du PPE, principal force politique européenne – et principale arme de l’argument du « vote utile », tout en étrillant régulièrement le bilan d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, issue du même parti ? A la fin de l’hiver, en pleine crise agricole avaient même annoncé ne pas soutenir Ursula von der Leyen dans sa quête d’un second mandat à la tête de la Commission, l’accusant d’avoir cédé « aux sirènes de la décroissance » avec le Pacte vert européen. Les Républicains font d’ailleurs de la « souveraineté alimentaire », et donc de l’agriculture, l’un des piliers de leur programme. Augmenter le budget de la PAC, inscrire l’agriculture dans le droit européen comme étant d’intérêt général européen majeur, et surtout « abroger les textes européens qui nuisent à nos agriculteurs en prônant la décroissance ». Mardi, François-Xavier Bellamy persiste et signe : « Nous souhaitons une alternance à la tête de la Commission européenne », promet le député européen, assurant qu’Ursula von der Leyen est loin de faire l’unanimité au sein des députés PPE.

    Libérer l’économie et réarmer les Etats

    Pour sortir l’Union européenne du marasme économique, Les Républicains mettent en avant un programme libéral, prônant « une mandature de la déréglementation » et la lutte contre « le délire normatif européen ». « L’Europe ne se reconstruira qu’en rendant la liberté à ceux qui travaillent », insiste François-Xavier Bellamy, pour qui « c’est la prospérité qui doit guider notre travail en matière économique ». Les Républicains trustent par ailleurs des positions plus dures en matière d’immigration, proches de celles du Rassemblement national ou de Reconquête : dix mesures censées « maintenir la cohésion du continent européen » qui visent à renforcer le contrôle au frontière, transférer la gestion des demandes d’asile dans des centres d’accueil fermés situés aux frontières extérieures de l’UE, ou encore à rendre plus difficile le regroupement familial. Pour se distinguer des partis d’extrême droite, Les Républicains misent en revanche sur la géopolitique : tandis que le Rassemblement national adopte une position ambiguë face au régime de Vladimir Poutine et la guerre qu’il mène en Ukraine, le parti de François-Xavier Bellamy propose d’apporter « un soutien massif à l’Ukraine pour repousser l’agression russe », ou encore d’imposer « à chaque Etat membre de l’Union européenne de consacrer chaque année au moins 3 % de son PIB et la défense et consolider l’Otan ».

    Se montrer dur sur l’immigration, inflexible avec la Russie et renvoyer dos à dos les bilans européens des macronistes et du Rassemblement national : telle semble être la recette employée par François-Xavier Bellamy pour exister dans cette campagne. En 2019, son score de 8,48 % était paru comme un échec cuisant pour le parti de droite. Cinq ans plus tard, le même score pourrait être perçu comme un succès, tant les sondages se montrent pessimistes.

    Face à Louis Boyard:

    Européennes: un descendant de Napoléon 1er, candidat sur une liste souverainiste

    Restaurer le pouvoir des nations et des peuples d’Europe

    Joachim Murat
    avec sa femme,
    la princesse Yasmine Murat

    Un arrière-petit-neveu de Napoléon 1er, Joachim Murat, sera candidat aux élections européennes sur une liste souverainiste, a-t-il annoncé vendredi 19 avril dans un communiqué de presse.

    Agé de 50 ans, Joachim Murat se présente comme descendant du maréchal d’empire et roi de Naples Joachim Murat (1767-1815), qui fut le beau-frère de Napoléon Ier par son mariage avec sa sœur de Caroline Bonaparte.

    Joachim Murat figure en 3e position sur la liste « inspirée par l’esprit du Conseil National de la Résistance »,  « Nous le peuple », menée par Georges Kuzmanovic, un ancien porte-parole de Jean-Luc Mélenchon qui avait quitté La France Insoumise en 2018 pour fonder son mouvement, « République Souveraine ».

    Georges (Djordje) Kuzmanovic, né à Belgrade en Serbie (RFS de Yougoslavie, il y a 50 ans), est ancien combattant et officier de réserve.

    Il intègre le Parti de gauche dès sa création et devient membre de son bureau national. Il rejoint ensuite La France insoumise et devient conseiller de Mélenchon sur les questions internationales et de défense durant la campagne présidentielle de 2017.

    Invoquant des divergences, il quitte La France insoumise en 2018, puis fonde son propre parti, République souveraine, dont il est le président. Il est candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2022 mais ne parvient pas à réunir les 500 parrainages nécessaires pour s’y présenter.

    Son positionnement pro-Kremlin sur les guerres en Syrie et en Ukraine est contraire à la propagande macronienne et de sa presse.

    Ancien officier parachutiste

    8ᵉ prince Murat,
    Joachim Murat,
    descendant de Caroline Bonaparte, sœur de l’empereur Napoléon Ier,
    et d’un autre Joachim Murat, maréchal d’empire
    et roi de Naples.

    Selon Joachim Murat, cette liste comprendra aussi Philippe Grégoire, un éleveur président du « SAMU social agricole », une association qui défend les paysans en difficulté, et l’écrivain Olivier Delorme.

    Ancien officier parachutiste qui effectua son service militaire comme élève officier de réserve à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr, puis au 14e régiment parachutiste de commandement et de soutien, à Toulouse, versé dans la réserve du 1er régiment de parachutistes d’infanterie de marine, qui participa à un déploiement en opérations extérieures au Kosovo, Joachim Murat se décrit en  » passionné de la France et de son modèle social qui ne supporte plus sa destruction programmée par les tenants de l’Europe fédéraliste« .

    « Il est temps de redonner le pouvoir aux nations et aux peuples, face à une bureaucratie européenne oppressante et à une élite politique qui a trahi les principes fondamentaux de la démocratie, de la souveraineté et de la liberté, » insiste-t-il.

    Il estime que « le bonapartisme est un courant politique d’essence républicaine qui vise à assurer l’autorité de l’Etat et qui garantit le respect de la souveraineté populaire par l’exercice du référendum. Le bonapartisme peut réconcilier les Français avec la classe politique car il favorise mécaniquement l’émergence d’une élite au service de l’intérêt général. ». Restaurer la souveraineté populaire et l’adhésion citoyenne par l’exercice du référendum, restaurer l’autorité de l’Etat sur l’ensemble de la France avec fermeté, renégocier les traités européens, repenser la gouvernance de l’Euro, relancer une nouvelle construction européenne, reprendre en main les leviers de souveraineté économique et unir les Français en rassemblant autour de l’idée de grandeur et de fierté nationale sont autant de points que défend Joachim Murat lors de ses interventions.

    Pologne: la Convention européenne des droits de l’Homme, clairement « incompatible » avec sa Constitution

    La Cour constitutionnelle polonaise moins accommodante que le Conseil constitutionnel en France

    La Cour constitutionnelle polonaise a jugé une nouvelle fois que la Convention européenne des droits de l’Homme est en partie incompatible avec la Constitution du pays, lançant un nouveau défi à la justice européenne.

    Le Figaro avec AFP
    Mis à jour hier à 18:06

    La Pologne reste ferme sur ses convictions face à la justice européenne.

    SudOuest.fr avec AFP
    Publié le 10/03/2022 à 18h14

    Le Tribunal Constitutionnel du pays, une république parlementaire dénigrée par les gauches sans colonne vertébrale, n’est pas  » « nommé en majeure partie par le pouvoir nationaliste populiste polonais, » comme caricaturé par l’AFP, dont les organes de presse ne vérifient pas les assertions (malveillantes) et que les fact checkers ne désintoxent pas.

    Les 15 membres du tribunal constitutionnel sont élus individuellement par la Diète (chambre basse) pour un mandat unique non renouvelable de neuf ans parmi les personnes ayant une expérience et d’excellentes connaissances juridiques. En France, Macron a nommé une ex-professeure d’histoire-géographie, Jacqueline Gourault (MoDem), ci-dessous, au Conseil constitutionnel, malgré un vote défavorable de la commission des Lois du Sénat où elle recueillit 12 voix pour et 16 contre: ce n’est pas une juriste. Mais les avis de la CEDH s’imposeraient aux sénateurs élus.

    Le Tribunal Constitutionnel de Pologne a remis en question la compatibilité à la loi suprême de l’article 6 de la Convention qui assure à toute personne le droit à un jugement équitable, par un tribunal indépendant et impartial. A voir…

    La Pologne refuse la suprémacie européenne en matière de droits de l’Homme

    L’hypothèse d’une sortie de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a été formulée de la manière la plus claire. Si Nicolas Sarkozy et Alain Juppé ont clairement pris leurs distances vis-à-vis de certains arrêts de la Cour, c’est sans doute François Fillon qui a été le plus radical, estimant qu’il faut que « la CEDH soit réformée pour qu’elle ne puisse pas intervenir sur des sujets qui sont des sujets essentiels, fondamentaux pour des sociétés » et se disant même prêt à la rupture : « S’il y a un refus de nos partenaires européens d’accepter cette réforme de la CEDH, alors, oui, je propose qu’on en sorte. »

    Le Royaume-Uni l’a dénoncée et rejetée lors du Brexit et les partisans du « Frexit » multiplient les remises en cause françaises du droit européen des droits de l’homme. Certaines émanent de personnalités politiques de premier plan, témoignant d’une légitimité politique inédite de la possibilité d’une dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme. D’autres, plus discrètes, prennent la forme d’initiatives législatives attestant également du crédit croissant d’une rhétorique juridique-souverainiste. La montée en puissance de cette hypothèse d’un « Frexit » des droits de l’homme mérite d’être interrogée, pour elle-même mais aussi parce qu’elle repose sur l’instrumentalisation de certaines affaires européennes et qu’elle est lourde d’enjeux, juridiques mais aussi politiques.

    Le tribunal constitutionnel polonais, à Varsovie

    Jeter la pierre à la Pologne est injuste. A la différence de la France, la Pologne met ses actes en adéquation avec ses convictions et le tribunal constitutionnel a ainsi opposé un refus à la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) le droit de « contrôler la compatibilité avec la Convention des lois relatives à l’organisation du pouvoir judiciaire ». Il s’oppose aussi à la loi fixant l’organisation, les procédures et le mode d’élection des membres du Conseil national de la magistrature, un organe clé du système juridique polonais.

    Une justice partiale ?

    En novembre, la Cour constitutionnelle polonaise avait déjà rejeté un arrêt de la CEDH, qui remettait en cause la légalité de la nomination de juges à ladite Cour constitutionnelle. Supranationale et illégitime, la CEDH a pris récemment l’initiative de prononcer plusieurs jugements critiques relatifs à la réforme controversée du système judiciaire polonais, qu’elle accuse de saper l’indépendance de la justice.

    La CEDH s’est notamment prononcée contre une « chambre disciplinaire » pour les juges polonais, créée par le gouvernement de Varsovie classé « conservateur populiste » par la gauche. Elle ne serait pas un « tribunal indépendant et impartial établi par la loi au sens de la Convention européenne » des droits de l’Homme, selon l’institution. C’est comme si la charia s’imposait au droit français… Le droit d’un accusé d’avoir un procès équitable serait violé, estime cette « ONG » juridique.

    Bras de fer

    Partiale et corrompue

    Le gouvernement polonais, qui a pris des engagements auprès de ses électeurs, fait valoir souverainement que ses réformes sont nécessaires pour combattre la corruption des juges, critiquant les « interférences » de Bruxelles. L’UE, en tout cas la CEDH, estime que ces réformes nuisent à l’indépendance de la justice et à la démocratie.

    Dans une décision qui a fait du bruit dans l’UE, la Cour constitutionnelle polonaise avait déjà dénoncé la primauté du droit européen sur le droit polonais, provoquant un bras de fer avec Bruxelles qui a bloqué l’approbation du plan de relance économique de Varsovie.

    Justice européenne: Michel Barnier séduit le groupe LR du Sénat

    Le souverainisme n’est pas tabou à LR

    Rentree Parlementaire des Deputes Les Republicains.

    Le candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle, qui souhaite un moratoire sur l’immigration, prône une « souveraineté juridique » de la France, pour éviter les condamnations de la part des instances judiciaires européennes.

    Les détails de sa proposition étaient relativement passés inaperçus dans la torpeur de l’été. Dans une tribune au Figaro le 28 juillet, Michel Barnier défendait la nécessité d’un « moratoire » sur l’immigration. Les modalités n’avaient pas été commentées outre mesure. Les journées parlementaires LR à Nîmes le 9 septembre ont changé la donne. Promettant un référendum pour que la France retrouve sa « liberté de manœuvre » en matière d’immigration, l’ancien ministre des Affaires étrangères a nommé les obstacles à contourner. « Nous ne pouvons pas faire tout cela sans avoir retrouvé notre souveraineté juridique, en étant menacés en permanence d’un arrêt ou d’une condamnation de la Cour de Justice européenne ou de la Convention des droits de l’homme, ou d’une interprétation de notre propre institution judiciaire. »

    L’ancien commissaire européen et ex-négociateur du Brexit s’est retrouvé méconnaissable aux yeux de certains. « Comment une telle phrase peut-elle avoir été prononcée par un Européen aussi engagé ? », s’est exclamé, bien dans son rôle d’opposant, le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes Clément Beaune, ancien collaborateur au cabinet de Jean-Marc Ayrault, alors premier ministre, et cité par la lettre d’information Politico.

    L’eurodéputée LREM, Nathalie Loiseau, a, elle aussi, fait part de sa surprise, mais aussi, implicitement, sa fiabilité. « Comme négociateur européen du Brexit, Michel Barnier défendait bec et ongles la primauté de la Cour de Justice de l’UE et de la Cour européenne des droits de l’homme.  » Avant de distiller ses soupçons: « Ou du moins on l’espère. Comme candidat à une primaire, il renierait ce qu’il a défendu ? »

    A Bruxelles, les propos de l’Européen Michel Barnier ont été accueillis avec « consternation », selon le journal socialiste Le Monde.

    Autant de critiques qui stupéfient ses soutiens. « Il connaît suffisamment bien l’Europe pour étudier toutes les possibilités juridiques. S’il a sorti cela, ce n’est pas sans l’avoir bordé juridiquement », défend la sénatrice Catherine Deroche. La sénatrice, présidente de la commission des affaires sociales, fait partie de ses soutiens au Palais du Luxembourg, et balaie les accusations d’euroscepticisme visant l’ancien commissaire. Selon la tribune de Michel Barnier, un « bouclier constitutionnel » devra garantir que « les dispositions prises durant ce moratoire ne pourront être écartées par une juridiction française au motif des engagements internationaux de la France ».

    Les relations entre droit européen et droit national abordées au Sénat il y a trois mois

    Le sénateur LR André Reichardt, qui ne soutient pour l’heure aucun candidat dans la primaire, n’est « pas loin de partager la même position ». « Je me demande de temps en temps quelle est la marge de manœuvre du législateur, quand on voit les carcans internationaux qui s’appliquent à nous », approuve le sénateur du Bas-Rhin.

    Michel Barnier a précisé ses intentions. Son « bouclier constitutionnel » ne s’appliquera qu’à la politique migratoire. « Pourquoi avoir limité ça au phénomène migratoire ? J’ose espérer que ce n’est pas juste à des fins électorales », soulève le sénateur Reichardt. Fin août, la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, s’est aussitôt alignée sur sa thématique en promettant de « rompre avec l’impuissance ».

    Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes au Sénat, est aussi convaincu qu’il sera « compliqué » d’aborder la proposition de Michel Barnier sous la seule question de l’immigration. Le sénateur, proche de Xavier Bertrand, reconnaît néanmoins qu’il y a « lieu de s’exprimer sur le sujet » des décisions de la Cour de Justice de l’UE qui vont à l’encontre du droit français. En juin, sa commission avait d’ailleurs réuni une table ronde intitulée « pouvoir régalien et droit européen ». Un mois plus tard, la Cour de Justice de l’Union rendait un arrêt retentissant sur le temps de travail des militaires (relire notre article). « Si on n’agit pas, on n’arrivera jamais à retrouver de la sérénité entre le droit français et les instances européennes », admet Jean-François Rapin.

    Quant à l’accueil glacial qui a pu être réservé aux propos de Michel Barnier, le sénateur spécialiste des affaires européennes les localise davantage à Bruxelles. « C’est plus eu égard à la stature qu’il avait à la Commission, qui était beaucoup plus européenne. »

    A grand renfort de tribunes – en faveur d’une taxe carbone aux frontières de l’UE, puis de l’éducation qu’il érige au rang de « grande cause du prochain quinquennat », Michel Barnier continue d’occuper le terrain.Publié le : 13/09/2021 à 18:21 – Mis à jour le : 13/09/2021 à 18:38