Fédéralistes vs. souverainistes aux européennes : Macron s’offre un dernier réquisitoire  

Macron étouffe sa propre liste

En direct du 20h de TF1 et de France 2, à Caen, après les cérémonies pour les 80 ans du Débarquement allié, ce jeudi 6 juin, le président de la République est revenu sur la guerre en Ukraine et a redit sa position sur un Etat Palestinien. Mais il en a encore profité pour revenir sur les dangers d’une victoire de la droite nationale en Europe, selon lui, alors qu’en France, les Français interrogés placent la liste Rassemblement national de Jordan Bardella largement en tête.

Interrogé par Anne-Sophie Lapix sur sa promesse de tout faire pour limiter un raz-de-marée de l’extrême droite dans les urnes après sept années de macronisme,  Macron ne s’en est pas caché : « C’est ce que je suis en train de faire, en parlant, en essayant de convaincre », a-t-il lancé.

Et pour cela, le président défaitiste a agité la peur d’une « minorité de blocage » de l’extrême droite au Parlement européen « si demain la France envoie une très grande délégation d’extrême droite (et) si d’autres pays le font ». Ce qui serait un double désaveu, de sa politique fédéraliste et des contraintes imposées aux états membres par l’UE. Dans la lignée de son discours à la Sorbonne, il a repris son mot d’ordre d’une Europe « mortelle » et qui « n’a jamais été aussi menacée ». Mais dans les dernières 24 heures de la campagne, le président français a ajouté à son discours une dimension patriotique de circonstance très stratégique dans le duel qui l’oppose à la liste de Jordan Bardella.

« Europe des vaccins » vs « chloroquine »

Pr. Raoult et Macron,
à Marseille

Tout d’abord, énumérer les risques d’une poussée de la droite nationale et souverainiste, pour l’Europe mais aussi pour la France. Ainsi, malgré sa visite-surprise au professeur Raoult à Marseille, sur la réponse à la pandémie de coronavirus avec, à la place de « l’Europe des vaccins », « des gens qui vous donneront de la chloroquine ou du vaccin Sputnik » ; sur l’économie avec le refus de voter le plan de relance ; et enfin, sur l’immigration, terrain de prédilection du Rassemblement national et de Reconquête ! « Si vous avez demain l’extrême droite qui a une minorité de blocage en Europe, face à l’immigration clandestine que nous subissons, vous n’aurez plus les textes qui nous protègent parce qu’ils croient à la réponse nationaliste et pas européenne », a-t-il affirmé.

Le chef de l’Etat a aussi évoqué la situation internationale explosive, les « risques terroristes », le développement de l’IA, mais aussi « le défi climatique ». Autant de thèmes de cette campagne européenne susceptibles de toucher des électeurs qui restent peu mobilisés pour le scrutin. « Posez-vous la question, face à chacun de ces défis, est-ce qu’on est plus fort Français, ou Français et européen ? La réponse c’est l’Europe », a-t-il déclaré.

Celui qui nia la culture française appelle à « un sursaut » par « patriotisme »

Début 2017, à Lyon, Macron avait assené: « Il n’y a pas une culture française, il y a une culture en France et elle est diverse Avant d’ajouter, à Londres cette fois: « L’art français, je ne l’ai jamais vu.» Révolutionnaire !

Aujourd’hui, pour les européennes, en revendiquant le « patriotisme » de son appel à « un sursaut », Macron s’est adressé à l’électorat tenté par les partis de droite qui luttent contre la perte de la souveraineté de la France. En témoigne cette séquence du débat face à Gabriel Attal, où Jordan Bardella a évoqué un perte du droit de veto de la France, « le projet caché » de Renaissance et de ses alliés.

Débat Macron-Le Pen pour les européennes : Edouard Philippe diverge de Macron

L’initiative «surprenante» du fédéraliste Macron contredit cet égard apparent pour une souverainiste

Edouard Philippe, chef du parti Horizons et ancien premier ministre de Macron, à Paris, le 6 mai 2024. 

L’ancien premier ministre de Macron n’est pas fan de l’idée d’Emmanuel d’un débat avec Marine Le Pen juste avant les européennes, alors que ni l’un, ni l’autre n’est candidat (éligible). Cette volonté ne cadre pas avec sa décrédibilisation permanente de celle qui est donnée victorieuse en 2024 et en 2027.

Depuis son renvoi de Matignon, Edouard Philippe jure inlassablement de sa loyauté envers celui qui l’avait nommé premier ministre. Mais le curseur philippiste penche plus souvent du côté de la liberté que de celui de la loyauté. En attestent ses multiples sorties ou critiques à peine voilées visant Macron et ses courtisans. Rebelote dimanche 26 mai à propos d’un très hypothétique débat entre le président et Marine Le Pen, à moins de deux semaines du scrutin européen : une instrumentalisation du scrutin du 9 juin prochain à longue portée, dans cinq ans. Briser les genoux de la candidate à la présidentielle dès les européennes ?

Edouard Philippe doute de l’utilité de cette confrontation.

L’idée relancée par Macron de débattre avec Marine Le Pen avant les élections européennes, ne convainc pas Edouard Philippe, potentiel candidat à la présidentielle 2027.

« Débattre, dans une démocratie, c’est bien », a répondu Edouard Philippe sur LCI, d’abord interrogé sur l’opportunité du débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella organisé jeudi soir par France 2. « Que le Premier ministre, qui est le chef de la majorité (…) discute, débatte avec le chef d’un parti politique, ça ne me paraît pas scandaleux, et même assez normal », a-t-il estimé en préambule.

Le président « a le droit de vouloir débattre »

Mais quid d’un débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen ? « Permettez-moi de faire une différence », a poursuivi le maire du Havre. « Que le chef de l’Etat (…) explique que, dans un cadre par ailleurs électoral, il se propose de débattre avec une personnalité, qui d’ailleurs n’est pas chef de parti (…), c’est plus surprenant », a jugé Edouard Philippe.

« Je ne sais pas si c’est nécessaire, c’est un peu plus surprenant », a-t-il déclaré. « Je ne suis pas sûr que j’aurais imaginé spontanément que ce serait une bonne idée ». Mais « c’est une idée du président, voilà. Il a le droit de vouloir débattre », a-t-il concédé.

Marine Le Pen pose ses conditions

Macron a relancé l’idée d’un débat avec Marine Le Pen, dans un entretien avec Le Parisien paru samedi, « Si on pense que c’est une élection où se joue une partie du destin de la France, ce que je crois, il faut débattre. La balle est dans son camp », a justifié le chef de l’Etat.

Marine Le Pen a pour sa part réagi en répétant qu’elle est disposée à débattre à condition que Macron « tire les conséquences » de son entrée « dans l’arène électorale » et qu’il « mette sur la table sa démission ou la dissolution de l’Assemblée ». Une condition rejetée dans la foulée par Macron. « Il faut aller sur les enjeux européens. Pas rester caché. Et c’est pas une élection qui doit changer la Constitution », a-t-il argué samedi,

Par ailleurs, interrogé sur l’hypothèse d’une coalition avec Les Républicains (LR), qui circule jusqu’au gouvernement, Edouard Philippe a répondu : « ça, c’est le Premier ministre qui est le chef de la majorité. Est-ce qu’il veut s’approcher des LR ? Est-ce qu’il a une chance de réussir à construire quelque chose ? » « J’ai dit en 2022 après les élections législatives, immédiatement après les élections législatives, que dans n’importe quelle démocratie dans le monde, la majorité relative se serait tournée vers le parti le plus proche d’elle, susceptible de pouvoir lui apporter la majorité pour créer une coalition », a-t-il rappelé. « Je l’ai dit, en 2022, je n’ai pas changé d’avis ». Mais « en 2024, ça me semble beaucoup plus difficile qu’en 2022 ».

Européennes: Hayer demandera l’exclusion des libéraux néerlandais du groupe centriste Renew

Macron avait accepté les 42% des électeurs de Mélenchon au second tour, sans états d’âme…

Pour les fédéralistes
Hayer et Macron, mieux vaut les anti-républicains
que les nationaux

Les macroniens se croient meilleurs que les trois alliés de Geert Wilders (le parti pro-agriculteurs BBB, le parti libéral VVD et le nouveau parti anti-corruption NSC). Les libéraux néerlandais, qui ont fait alliance avec le parti d’extrême droite PVV dans le cadre d’un accord gouvernemental aux Pays-Bas, ne pourront donc continuer à siéger dans le groupe centriste Renew au Parlement européen, a estimé Valérie Hayer, ce mardi 21 mai sur BFMTV-RMC.

« C’est une option (de rester alliés) qui n’est pas entendable parce qu’ils ne respectent pas nos valeurs en faisant cette alliance », a déclaré la tête de liste de la majorité aux élections européennes qui préside actuellement le groupe Renew.

« Je pendrai mes responsabilités »

« Ma ligne rouge, elle est claire (…) Le cordon sanitaire (contre l’extrême droite), on l’a toujours respecté. Ça fait partie des valeurs absolues du groupe et je prendrai mes responsabilités au lendemain de l’élection pour que ces valeurs-là continuent d’être respectées », a ajouté Valérie Hayer.

L’eurodéputée attend cependant « d’avoir une discussion avec l’ensemble des membres du groupe » Renew le 10 juin au lendemain des élections, « conformément aux statuts du groupe ».

L’accord aux Pays-Bas a été trouvé pour un gouvernement de coalition près de six mois après la victoire électorale du leader du PVV, Geert Wilders, qui ne sera pas premier ministre.

Cet accord lie quatre partis, le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders, le parti pro-agriculteurs BBB, le nouveau parti anti-corruption NSC et le parti libéral VVD. Lequel siège avec Renew au Parlement européen. Le VVD domine la vie politique aux Pays-Bas depuis plus d’une décennie. Macron a-t-il les moyens de le discriminer ?