Macron à Dole, sans crier gare: le maire Agir ! prévenu dix minutes avant son arrivée

«Vous dites beaucoup de bêtises tous les jours», lance à Macron un homme pris à froid sur le marché

Macron tombe à Dole sur
l’ex-Gilet jaune Fabrice Schlegel

Avant de rendre hommage à Toussaint Louverture, Macron s’est rendu sur le marché de Dole, continuant ainsi de se montrer sous les caméras au contact des « gens », dont il pense l’argumentaire faible a priori. Depuis la promulgation de la réforme des retraites à coups de 49.3, il s’oblige ainsi à donner le change, non plus face à des opposants riches de slogans mais avec des ménagères faisant leur marché. Et elles réclament des selfies comme les adore le Narcisse de l’Elysée, le préfet portant main forte pour complaire au prince.

Mais la police tient les contestataires politisés à 1,5 km

Retraites, pouvoir d’achat, santé : Macron a longuement échangé avec des ménagères lors d’une halte surprise sur un marché ce jeudi 27 avril à Dole, dans le Jura, alors que ses opposants l’attendaient plus loin, dans le Doubs, pour un déplacement consacré à l’abolition de l’esclavage, au château inexpugnable de Joux. Les services de police sont massivement renforcés et les arrêtés préfectoraux restrictifs des libertés pleuvent, pour donner l’illusion d’un courage du président sorti de son bunker parisien pour une bulle mobile de policiers en régions.

Le chef de l’Etat a été accueilli, comme à chaque visite de terrain depuis l’adoption de la réforme des retraites, par un concert de casseroles et de sifflets. Il a discuté avec des personnes présentes, même si certains échanges ont été peu relevés, vifs et directs ou familiers et caricaturaux, le président tentant souvent de s’imposer avec des amalgames et parfois d’embrouiller les badauds.

« Moi je vais au contact. Pourquoi ? Pour entendre les difficultés des Français. Avoir des idées nouvelles, ressentir ce qui est compris, ce qui n’est pas compris », s’est-il expliqué devant des passants. « Et aussi pouvoir traiter des colères, mais de le faire de manière non-organisée artificiellement », s’est-il justifié, jugeant éhontément « inutiles » les déplacements « où tout est arrangé parce que ça se passe trop bien et ceux où tout est arrangé parce que ça se passe trop mal ». Le chat retombe-t-il toujours sur ses pattes dans sa chute ?

La hausse des prix, les fins de mois difficiles, les petites retraites ont dominé les échanges, avec parfois aussi des piques plus personnelles. « Tout est cher. Il y a des gens qui crèvent de faim », lui a lancé une passante, ajoutant : « voiture de fonction, logement gratos, on n’a pas tous ça, nous, hein ».

Macron « choqué » par les salaires de certains PDG

Une commerçante s’est plainte d’être « en retraite et de travailler quand même ». Une autre dame renchérit : « on ne vit pas avec 1.000 euros par mois »« Pour 1.200 euros, je ne me lève pas à 4 heures du matin », gronde un passant. Un autre s’énerve sur les patrons de la grande distribution : « Quand est-ce qu’on va arrêter de permettre à ces gens de s’en foutre plein les poches », dit-il. « Ça choque tout le monde. Moi aussi ça me choque », a admis en retour Macron, épinglant des « écarts » tels qu’on « ne peut plus les expliquer aux gens ». Des commentaires, sans prise d’aucun engagement pour changer ce qui le choque tant…

Macron a rappelé les baisses d’impôts, la suppression de la taxe d’habitation, les chèques énergie ou la hausse des petites pensions avec sa réforme très contestée des retraites. Mais évacue l’endettement record du pays, 3.000 milliards qu’il laisse aux générations futures : l’argent facile obère l’avenir de nos enfants. Les charges, « on n’a pas arrêté de les alléger, je me suis déjà fait engueuler là-dessus », a-t-il fait pourtant valoir. « Maintenant il faut qu’on arrive à recréer une dynamique salariale… c’est pas le gouvernement qui peut le faire », a plaidé celui qui est aux finances depuis dix ans et trois quinquennats, renvoyant la balle dans le camp du dialogue social et la faute aux syndicats.

Un ancien représentant local des Gilets jaunes, Fabrice Schlegel, l’a d’ailleurs vivement interpellé sur le « déficit colossal », la « dépense publique », lui reprochant d’avoir « tué la fonction hospitalière, la médecine de proximité » et de dire « beaucoup de bêtises »« Vous nous enfumez depuis cinq ans », a-t-il accusé. « Vous êtes quand même drôle […] Vous me demandez plus de dépenses en fait », a répliqué le président en contestant les chiffres alignés par son interlocuteur. Lien « Il est là juste pour la communication », réagit un ex-représentant des « gilets jaunes » après son échange à Dole.

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« Vous dites beaucoup de bêtises tous les jours » : Emmanuel Macron interpellé par un gilet jaune #macron #jura #politique #giletsjaunes

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La préfecture du Doubs a renoncé à interdire les manifestations

Dans le même temps, entre 200 et 300 manifestants attendaient Macron près de Pontarlier, retenus au prix de quelques bousculades par un cordon de gendarmerie à plus d’un kilomètre du lieu du discours. Munis de pancartes, casseroles et mégaphones, ils avaient auparavant bloqué des automobilistes en espérant ralentir le passage du chef de l’Etat, note France 3 Franche-Comté.

La préfecture du Doubs avait pris un arrêté visant à interdire les manifestations entre 9 heures et 16 heures ce jeudi dans la commune de La-Cluse-et-Mijoux, en raison de « la prégnance de la menace terroriste sur le territoire national ». Avant de finalement renoncer.

Cet arrêté avait fait l’objet de trois recours en référé liberté devant le tribunal administratif de Besançon, qui devait l’examiner ce jeudi matin en audience publique. Mais le préfet a finalement décidé de retirer son arrêté, a annoncé le tribunal dans un courriel. 

La CGT du Doubs avait annoncé que l’intersyndicale de Pontarlier donnerait « un concert de casseroles au pied du château de Joux »« Prévoyez de quoi faire du bruit pour faire entendre que 64 ans, c’est toujours non ! », a dit le syndicat dans un appel à ses adhérents et sympathisants.

Mardi, le tribunal administratif d’Orléans avait suspendu un arrêté similaire du préfet du Loir-et-Cher interdisant toute manifestation lors de la venue de Macron à Vendôme, alors même que la visite du chef de l’Etat était en cours.

« Ils bloquent les gens, ça décourage du monde de venir à pied, je pense que c’est le but recherché », témoigne Pascal Maillard, 62 ans, retraité d’Enedis. « On n’a jamais vu un président qui se protège de cette manière, et qui nous méprise autant », a-t-il grincé.

Une casserole à la main, Céline, 51 ans et enseignante en primaire, explique : « je suis venue parce que je suis contre la réforme des retraites, qui va pénaliser les femmes particulièrement. J’ai dû marcher 40 minutes pour arriver jusqu’ici. Ce dispositif […] c’est démesuré : on n’est pas des terroristes, on veut juste se faire entendre », déplore-t-elle.

Mille policiers de plus (3.000) au stade de France, samedi soir, pour la finale de Coupe de France de football à Paris, du fait de la présence annoncée de Macron.

Dialogue de sourds entre arrogants, Gabriel Attal et Manuel Bompard: