Commission d’enquête ‘souveraineté énergétique’ : des auditions accablantes pour les dirigeants politiques français

Entre hypocrisies, mensonges et incompétence

La commission d’enquête de l’Assemblee nationale visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France a auditionné de nombreuses personnalités politiques dont Ségolène Royal, Lionel Jospin ou bien encore Manuel Valls.

Ludovic Dupin

Ludovic Dupin est directeur de l’information de la Société française d’énergie nucléaire.

Valérie Faudon

Valérie Faudon est Déléguée Générale de la Société Française d’Energie Nucléaire (SFEN) et Vice-Présidente de l’European Nuclear Society (ENS).  Elle est enseignante à Sciences-Po dans le cadre de la Public School of International Affairs. Elle a été Directrice Marketing d’AREVA de 2009 à 2012, après avoir occupé différentes fonctions de direction chez HP puis Alcatel-Lucent, aux Etats-Unis et en France. Valérie est diplômée de l’Ecole Polytechnique, de l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, et de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris. Elle est aussi titulaire d’un Master of Science de l’Université de Stanford en Californie.

avec Ludovic Dupin et Valérie Faudon

Atlantico : Certains passages comme celui de Ségolène Royal devant la Commission d’enquête souveraineté énergétique ont fait beaucoup parler. Que retenir de sa prise de parole ?

Valérie Faudon : Ce qui est marquant dans les déclarations, et notamment dans celles de Manuel Valls et de Ségolène Royal, est que la décision de réduire à 50 % notre part du nucléaire est bien politique. Ségolène Royal explique ainsi que ni le parti socialiste, ni EELV n’avaient les moyens de faire une instruction sérieuse en 2011, et qu’elle n’a pas été faite non plus en 2015. Elle est d’ailleurs très honnête sur le sujet. Mais on dirait qu’elle ne se rend pas compte des conséquences que cela a pu avoir sur les employés de la filière ou la sécurité d’approvisionnement énergétique.  

L’autre point marquant, c’est que le débat de ces dernières années a été centré sur l’opposition nucléaire/renouvelable alors que le vrai sujet était les 60% d’énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) qui a été un point aveugle de la politique française. Les efforts pour sortir des énergies fossiles sont passés sous le radar, alors qu’ils sont les grands responsables des émissions de gaz à effet de serre du pays. A noter aussi que, avec la crise actuelle, nos importations d’énergie ont plus que doublé en 2022 et dépassé les 100 milliards d’euros.

Et plus largement quels sont les faits marquants des différentes déclarations devant la Commission ?

Valérie Faudon : Que ce soit avec François Hollande (qui n’a pas été auditionné) ou Manuel Valls, il semble qu’il n’y avait pas de volonté délibérée de leur part de faire du mal à la filière nucléaire, mais qu’ils n’ont pas mesuré ce qu’ils en faisaient. Cédric Lewandowski, directeur du parc thermique chef EDF, l’a bien dit dans son audition, une enquête interne de 2015 montrait que le moral des troupes chez EDF était très bas, il y avait eu des difficultés de recrutement.

Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est aussi le manque de préparation de ces annonces. Les politiques n’ont pas du tout compris que nous nous mettions en situation de difficultés d’approvisionnement. L’un des vrais angles morts des politiques est aussi celui de la consommation d’électricité. La sobriété n’est pas suffisante; pour sortir du fossile, il faudra aussi à long terme augmenter notre production d’électricité pour remplacer certains usages. Un bon exemple, dans les transports, est celui de la voiture électrique. Et nous sommes passés d’une situation de surcapacité au niveau européen à la situation inverse, sans le voir venir. La France a fermé ainsi 10 GW de capacités de production pilotable en 10 ans, incluant Fessenheim. On a vu la même tendance en Europe. Or, même si on développe les renouvelables, on a besoin de capacités pilotables, qui fonctionnent 24h/24 pour équilibrer l’offre et la demande d’électricité sur le réseau. Les auditions de Pierre Gadonneix ou d’Henri Proglio (anciens PDG d’Edf) montrent que ces derniers savaient qu’ils pourraient prolonger les réacteurs plus longtemps que prévu, mais qu’il faudrait maintenir la compétence de construction pour lancer un programme de renouvellement des réacteurs à partir de 2020. Cette idée s’est perdue en 2011-2012 avec l’abandon du projet d’EPR à Penly.

Pour Manuel Valls, la réduction de 50 % du nucléaire « n’était le résultat d’aucune étude d’impact » mais d’une optique « uniquement politique ». Comment l’expliquer ?

Valérie Faudon : La négociation sur le sujet au PS s’est faite entre les équipes de Martine Aubry et de Cécile Duflot, avant la primaire de la gauche. François Hollande est arrivé tardivement dans les négociations. La justification avancée par François Hollande à l’époque était, dans un entretien au Nouvel Observateur : « Je propose de réduire de 75% à 50% la production d’électricité d’origine nucléaire à l’horizon 2025. Exactement le même effort que les Allemands, qui vont passer de 22% à 0% en quinze ans. » Et évidemment on voit bien que l’Allemagne n’y arrive pas. Mais à l’époque il y avait une vraie admiration pour l’Allemagne en matière de politique énergétique.

Yves Bréchet avait taclé l’inculture politique en matière énergétique et un personnel politique qui ne lisait pas les rapports d’experts avant de prendre des décisions. Est-ce que les auditions laissent transparaître ?

Valérie Faudon : CE qui est clair, c’est que la question scientifique est compliquée pour un politique, et on l’a bien vu lors de la crise Covid où des experts donnaient en public des avis divergeants.  La parole scientifique doit être avant tout une parole collégiale, et il est important que des instances scientifiques soient mises en place et donnent des avis publics et documentés. C’est sans doute ce qui a manqué durant toute la période sur la question du nucléaire. Il ne s’agit pas pour le politique d’être scientifique, mais que le scientifique puisse s’exprimer et être une ressource pour le politique. Et cette expression a été mal organisée pendant au moins 10 ans. Le rapport « Futurs Energétiques 2050 », publié par RTE fin 2021, fruit de deux ans de travail et de concertation entre experts de l’énergie, a permis, en créant un cadre commun, les avancées que nous connaissons aujourd’hui.

Ne faut-il pas rechercher les responsabilités aussi lors de la période Jospin/Voynet, eux aussi interrogés ?

Valérie Faudon : Ce qui est étonnant dans le discours de Jospin à l’audition, c’est son explication sur l’arrêt de Superphénix et notamment le très court délai pour prendre cette décision, il explique avoir pu faire l’instruction en 1997 entre son élection et son discours de politique général 15 jours plus tard. Il déclare qu’il s’agissait avant tout d’une  décision industrielle. Mais l’instruction de ce dossier ne peut pas avoir été faite convenablement si rapidement. Superphénix était un projet important sur lequel des fonds étaient avancés, qui comptait pour l’industrie française, pour la recherche, etc.

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Quel bilan tirer de ces auditions ?

Ludovic Dupin : C’est un très bel exercice qui remet en perspective les décisions de ces 20 dernières années. Les intervenants sont de bonne foi, on voit clairement que la parole scientifique n’a pas toujours été écoutée ou qu’elle n’était pas la priorité de l’agenda. C’est une source documentaire incroyable.

Valérie Faudon : Chaque acteur rappelle bien quelle était la situation et sa position au moment où il était aux manettes, c’est un effort de contextualisation qui est important et nécessaire. Mais le cœur de la problématique, c’est la parole des experts, comment elle est orchestrée et prise en compte par le politique.

La taqiyya, concept coranique qui permet aux musulmans de mentir

Le Coran autorise la dissimulation de leurs véritables croyances en milieu étranger

Historiquement, cette pratique devait permettre aux musulmans sunnites de survivre et de conserver leurs convictions dans des régions où ils étaient minoritaires, qu’il s’agisse des morisques, qui vivaient dans la très chrétienne Espagne, ou des chiites, en terre d’islam, alors que le sunnisme est majoritaire.

Atlantico : Utilisée à plusieurs reprises pour planifier des attentats, la Taqiyya est un concept du djihad. Comment cela permet-il à nos agresseurs entre deux assauts ?

Annie Laurent : La Taqiyya est effectivement une technique visant à dissimuler un djihadiste entre deux attentats. C’est une évidence. C’est une pratique de tapis qui consiste à revêtir un masque de modernité pour mieux se mêler à la foule. Ainsi, le djihadiste fera semblant de vivre comme tout le monde, ira danser et boire, s’habillera comme la plupart des gens… C’est une tactique qui implique de faire tapis, de se dissimuler.

C’est une stratégie qu’on a constaté à Montauban mais également à Toulouse : après les attentats et pendant l’enquête, l’ensemble des proches et le voisinage tendaient à dire que rien ne laissait soupçonner une radicalisation, des projets terroristes… Extérieurement, les djihadistes donnaient unanimement le sentiment d’être bien intégrés. A Saint-Denis, par exemple, on entend dire que les djihadistes mangeaient des pizzas. C’est un procédé utilisé régulièrement pour planifier des attentats [attaquer et non pas se protéger] sans être repéré et qui permet, si la cause le justifie, d’enfreindre la loi islamique et les prescriptions concernant l’alimentation notamment. La fin justifie les moyens. Cela ne signifie bien évidemment pas que chaque musulman qui s’est intégré se cache et complote un attentat, loin de là. Mais on ne peut malheureusement découvrir qu’après coup qu’un djihadiste se cachait derrière une façade occidentalisée.

Comment peut-on définir la taqiyya et que dit le Coran sur ce sujet ?

L’islam interdit formellement aux musulmans de renoncer à leur religion, sous peine de châtiments divins et de malédictions éternelles (cf. Coran 2, 217 ; 3, 87 ; 4, 115 et 16, 106). Les musulmans ne peuvent donc en principe dissimuler leur identité religieuse et travestir leurs croyances. Cependant, le Coran et la Tradition prophétique (Sunna) ouvrent la voie à des dérogations quant au caractère absolu de la croyance dans le Dieu de l’islam et surtout quant à l’obligation de son attestation publique, ainsi qu’à l’observance du culte ou de la loi islamique (charia). De tout temps et selon des formes variées, des oulémas (docteurs de la Loi) ont légitimé la pratique de la taqiyya (dissimulation) que l’on appelle aussi ketman (secret ou restriction mentale). Ces agissements se sont manifestés en diverses circonstances historiques et retrouvent une certaine actualité de nos jours.
 
Le Coran contient deux passages sur lesquels s’appuient les théoriciens de la taqiyya. Ils correspondent à deux types de situations particulières.

– « Celui qui renie Dieu après avoir eu foi en Lui – excepté celui qui a subi la contrainte et dont le cœur reste paisible en sa foi -, ceux dont la poitrine s’est ouverte à l’impiété, sur ceux-là tomberont le courroux de Dieu et un tourment terrible » (16, 106).
Dans ce verset, pour notre sujet, c’est l’incise qui compte (italique). La taqiyya est donc autorisée en cas de contrainte extérieure, quelle qu’en soit la forme : persécution, menace sur la vie, absence de liberté religieuse (de conscience et de culte), etc.

– « Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles au lieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion d’Allah, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux. Allah vous met en garde à l’égard de Lui-même. Et c’est à Allah le retour. Dis : Que vous cachiez ce qui est dans vos poitrines ou bien que vous le divulguiez, Allah le sait. Il connaît tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Allah est omnipotent » (3, 28-29).

Deux membres de phrases (italique) sont importants. Comme ailleurs dans le Coran, Dieu recommande ici aux musulmans (eux seuls sont qualifiés de « croyants ») de ne pas entretenir de relations d’amitié ou de sujétion avec les non-musulmans (cf. 3, 118 ; 5, 51 ; 9, 23 ; 60, 13), mais il autorise des dérogations au principe lorsque le fait de s’opposer à ces derniers les met en danger. La sécurité ou le besoin de se faire accepter priment alors sur l’affirmation de la religion.
 
En fait, dans ces situations, ce qui compte, c’est l’intention du musulman ou la réalité intime de sa croyance. Peu importe alors la profession de foi publique, puisque Dieu connaît les dispositions des cœurs et les pensées. Telles sont les sources qui fondent la doctrine de la dissimulation, en matière de religion et de tout ce qui peut lui être connexe. La validité du recours à la taqiyya a été confirmée et précisée par les oulémas (docteurs de la Loi) dès les débuts de l’islam, notamment par Tabarî (m. 923).

Il en résulte qu’un musulman peut abjurer extérieurement ses croyances, professer publiquement une autre religion, accepter d’être réputé non-musulman ou renoncer aux exigences cultuelles et législatives conformes à l’islam, tout cela s’il se trouve dans des conditions qu’il estime être de contrainte justifiant une telle attitude. Si l’on veut comparer avec la position chrétienne sur ce sujet, il convient de se référer à une parole de Jésus-Christ dans l’Evangile : « Qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile la sauvera. » (Mc 8, 35).

Quelles en sont les applications historiques et contemporaines ?

A Montpellier, le 19 avril 2019, une femme joue le rôle de la musulmane intégrée. En dépit de son port d’un voile islamique, le banquier ouvre de grands yeux émerveillés.

mère de famille sur le manque de mixité dans le quartier de La Mosson, où un point de deal a été démantelé en mars.

« Je déplore le manque de mixité dans le collège de quartier, les gens ne mettent plus les enfants dans le même quartier, ce qui est vraiment dommage. M. le président, j’ai mon fils qui a huit ans, il m’a demandé si le prénom de ‘Pierre’ existait vraiment ou si ce n’est que dans les livres, tellement il y a un manque de mixité dans le quartier. C’est vraiment grave. (…) Cette question m’a choquée », a déclaré Naima Amadou au chef de l’Etat, en présence de la presse. Tout est spontané, pas scenarisé le moins du monde: nous avons même ke nom de cette perle…

Cette mère de famille a raconté à Macron que son fils lui avait demandé si le prénom « Pierre » existait en dehors des livres.

La taqiyya a toujours existé dans l’Oumma (la Communauté des musulmans), mais elle s’est d’abord surtout développée en milieu chiite, ceci pour des raisons de nécessité, suite à la « Grande discorde » (Fitna) qui a engendré au VIIè siècle le clivage avec l’islam sunnite.
 
Dans le chiisme :

Depuis cette rupture, les sunnites ont le plus souvent gouverné l’Oumma. Dans ces périodes, les chiites, minoritaires, ont recouru à la taqiyya pour défendre leur identité, souvent niée par l’autorité qui les assimilait au sunnisme, ou pour échapper aux persécutions. Les imams chiites ont justifié, et même conceptualisé, cette pratique, qui a dès lors été comprise comme une obligation de conscience, donc comme faisant partie de la religion. Tous les traités chiites contiennent un chapitre spécial, intitulé  » Livre de la taqiyya« .

Selon Sami Aldeeb Abou-Sahlieh, professeur de droit islamique à l’Université de Lausanne, la tradition chiite rapporte trois cents récits dans ce sens. En voici un aperçu. « La dissimulation fait partie de ma religion et de la religion de mes ancêtres » ;
« Si tu agis par dissimulation, ils ne pourront rien contre toi. La dissimulation sera une forteresse pour toi et servira de digue entre toi et les ennemis de Dieu qu’ils ne pourront jamais percer. Si tu dis que celui qui abandonne la dissimulation est comme celui qui abandonne la prière, alors tu dis la vérité » ; « La dissimulation est le meilleur des actes du croyant parce qu’elle sert à le sauvegarder et à sauvegarder ses frères des impies » (cf. Le secret entre droit et religion, 2004, diffusion Internet).
 
Henri Lammens (1862-1937), jésuite belge, orientaliste arabisant de renom établi au Liban, a écrit à ce sujet :
« Parmi les adversaires de ses croyances, il [le chiite] peut parler et se conduire comme s’il était un des leurs. En agissant de la sorte, en prêtant, s’il le faut, des faux témoignages et des faux serments, quand l’intérêt de la communauté l’exige, ou simplement un avantage personnel, il croit obéir à l’ordre de l’imam suprême.

Et de commenter : »Inutile de relever les conséquences morales de cette théorie, de cette loi du secret, laquelle entretient et légitime une perpétuelle équivoque et rend les chiites impénétrables » (L’Islam, croyances et institutions, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1943, p. 190-191 ; livre réédité en France aux éditions du Trident).
 
A l’instar des chiites, les adeptes de confessions dissidentes du chiisme (alaouites, alévis, druzes, ismaéliens) ressortissants d’un califat ou d’un Etat sunnite, parce que minoritaires, ésotériques, considérés comme hérétiques et donc maltraités pour ces motifs, ont le devoir de pratiquer la taqiyya pour se protéger, en tant qu’individus et communautés. On retrouve cette situation chez les bahaïs dans la République islamique d’Iran, chiite.

Ces minorités recourent par ailleurs à la taqiyya lorsqu’elles ont besoin de légitimer une position dominante qu’elles ont pu acquérir. Ainsi, quand Hafez El-Assad (père de Bachar, l’actuel président syrien), membre de la communauté alaouite, s’est emparé du pouvoir à Damas, en 1970, il a multiplié les gestes destinés à se faire passer pour un musulman orthodoxe aux yeux du monde sunnite (prière rituelle à la Mosquée des Omeyyades à Damas, fatoua de l’imam libanais chiite Moussa Sadr reconnaissant l’appartenance des alaouites à l’islam, construction d’une mosquée à Qardaha, le village natal des Assad, alors que traditionnellement les alaouites ne prient pas dans des mosquées, etc.).La taqiyya existe donc en milieu islamique, et pas seulement en contexte non-musulman.
 
Dans le sunnisme :

Les musulmans sunnites ne rejettent pas la taqiyya, mais elle n’est pour eux qu’une permission. Ils s’appuient sur des enseignements dispensés par certains de leurs oulémas, tel que celui-ci : »El-Chawkani dit que celui qui devient mécréant sous la menace de mort ne commet point de péché si son cœur est tranquille dans la foi » (S.-A. Abou-Sahlieh, op. cit.).
La taqiyya a été observée légitimement par les Morisques vivant sous un pouvoir chrétien en Andalousie. Ainsi, en 1504, le mufti Ahmed Ibn Jumaïra publia une fatoua (avis juridique) donnant des consignes précises à ce sujet. Si les chrétiens obligeaient les musulmans à injurier Mahomet, ils devaient le faire en pensant que cette parole était prononcée par Satan. S’ils étaient obligés de boire du vin ou de manger du porc, ils pouvaient le faire mais en sachant que c’était un acte impur et à condition de le condamner mentalement. S’ils étaient forcés de renier leur foi, ils devaient essayer d’être évasifs ; si on les pressait, ils devaient intérieurement nier ce qu’on les obligeait à dire. De nos jours, les musulmans sont présents sur tous les continents. Vivant en dehors de leurs territoires traditionnels, ils sont donc sur des « terres de mécréance » (Dar el-Kufr) où il leur est permis, voire recommandé, de pratiquer la taqiyya, mais sous une autre forme, à titre individuel ou collectif. Il s’agit de s’adapter extérieurement au contexte en respectant les lois, principes et habitudes des pays concernés tant que les circonstances ne sont pas favorables à l’instauration de l’islam comme religion dominante et à la pleine application de la charia.

Quand on aborde le sujet de la Taqiyya, on entend régulièrement le terme « esquive ». De quoi s’agit-il ?

L’esquive consiste à utiliser un vocabulaire qui plaît aux Occidentaux pour décrire l’islam comme une religion inoffensive, apportant « la paix, la tolérance et l’amour ». Certaines personnalités musulmanes profitent de l’ignorance de leurs interlocuteurs non musulmans pour faire passer des messages tronqués quant à l’enseignement véritable de l’islam, en particulier sur certains sujets sensibles (violence, liberté de conscience, droits de l’homme, statut de la femme, respect des non-musulmans, égalité entre les hommes, etc.). Ces personnalités utilisent dans ce but les tribunes qui leur sont ouvertes dans la presse ou même les rencontres de dialogue interreligieux. Il s’agit en fait de rassurer les non-musulmans quant aux valeurs libérales et pacifiques de l’islam, en présentant des comportements moralement inacceptables comme des dérives, des déformations, voire des trahisons de la religion. On peut comparer cette attitude avec la parole du Christ : « Que votre langage soit : “Oui ? oui”, “Non ? non” « (Mt 5, 37).
 
Il faut enfin souligner que, face aux horreurs commises par des djihadistes, dont souffrent également d’autres fidèles de l’islam, certains intellectuels, dirigeants politiques et responsables religieux musulmans dénoncent aujourd’hui l’utilisation de la taqiyya, demandant un examen lucide des textes sacrés sur lesquels se fondent les adeptes de la violence.

Lorsque les musulmans se sentent suffisamment puissants, ils abandonnent la taqiyya et affrontent l’ennemi:

https://twitter.com/EdwigeDagorn/status/1383761244377686027?s=19