Loi immigration: le PS n’a pas intégré le vote de la motion de rejet par l’Assemblée

Boris Vallaud accuse Macron « d’écrire une loi sous la dictée d’Eric Ciotti »

Alors qu’Elisabeth Borne tente de trouver un compromis avec la droite qui détient l’avenir du projet gouvernementale de loi immigration entre ses mains, la gauche s’irrite des discussions privilégiées en cours avec les piliers des Républicains.

« Quand on pose la question de ce qui est en train de se passer et de ce qui se passe depuis des mois, eh bien la réalité, c’est qu’Emmanuel Macron écrit une loi sous la dictée d’Eric Ciotti et des Républicains », gronde sur la touche le président des députés socialistes, Boris Vallaud, ancien conseiller de F. Hollande à l’Elysée et père des enfants de Nadja Vallaud-Belkacem, sur France 2 ce vendredi matin.

La droite en position de force

Depuis mercredi, la première ministre multiple les consultations avec les députés et sénateurs LR pour parvenir à sortir de l’ornière dans lequel a versé son gouvernement lors du le rejet surprise de sa loi immigration.

C’est en effet la version sénatoriale du texte, bien mieux appropriée à la situation migratoire préoccupante du moment que la copie initiale du gouvernement, qui sert ďésormais de base aux discussions de la commission mixte paritaire, cet organe parlementaire qui réunit sept députés et sept sénateurs pour aboutir à un accord.

Au risque donc de parvenir à une version finale de la loi immigration, loin de la mouture politique tiède vantée depuis des mois par Gérald Darmanin. Plusieurs dispositions votées par le Sénat n’étaient pas contenues dans le projet de loi du ministre de l’Intérieur comme la suppression de l’aide médicale d’Etat (AME) controversée et la fin de l’automaticité du droit du sol.

« Une forme de cohabitation » avec Les Républicains

L’un des articles clefs de la loi qui voulait la création d’un titre de séjour pour les travailleurs sans-papiers dans les métiers en tension a lui aussi été totalement réécrit pour le transformer en régularisation « exceptionnelle », pour éviter de promouvoir l’illégalité parmi les migrants en situation irrégulière. Autant dire qu’en cas d’accord avec la droite à l’issue de la commission mixte paritaire, le texte qui en sortira sera plus respectueux de l’Etat de droit.

« C’est une forme de cohabitation (avec LR) qui est en train de s’installer, c’est la fin du ‘en même temps’. Et rien n’oblige ce gouvernement à tout céder à la droite sénatoriale », regrette encore Boris Vallaud.

Depuis l’arrêt net des débats sur la loi immigration lundi, la gauche réclame la fin du texte dans l’hémicycle. Elle pourrait avoir gain de cause. La majorité présidentielle est soumise à de fortes tensions ces derniers jours.

La gauche de Renaissance tout comme le MoDem refusent de voter un texte marqué de l’empreinte forte de la droite. Ce jeudi soir à Matignon, une réunion a tourné au règlement de comptes entre Olivier Véran, Bruno Le Maire et Elisabeth Borne.

Olivier Faure, féal confirmé de Mélenchon

Faure doit sa circonscription à Méluche et a perdu toute autonomie. Des 3 députés NUPES, il est le seul socialiste contre 2 LFI.

Le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, a d’abord estimé sur X que Gérald Darmanin est « désavoué » et doit « tirer les conclusions » de l’adoption de cette motion de rejet. « Les étrangers ne peuvent être présentés comme des suspects. Macron a été élu pour être une digue au Rassemblement national », a encore écrit Olivier Faure.

Scandaleuse rhétorique antisémite d’Olivier Faure:

Et le député de la onzième circonscription de Seine-et-Marne (Combs-la-Ville, Mée-sur-Seine et Savigny-le-Temple d’exhorter : « il est temps de travailler à un projet de loi conforme aux principes républicains ». 

Le député PS Philippe Brun n’en voulait pas et a voté la motion de rejet

Philippe Brun
Philippe Brun a été élu
député PS en 2022.

Opposé au projet de loi immigration dont les débats devaient s’ouvrir hier à l’Assemblée nationale, le député PS Philippe Brun a voté la motion de rejet portée par les écologistes.

Le projet de loi immigration a été examiné ce lundi 11 décembre 2023 à l’Assemblée nationale. Les députés devaient débattre d’un texte remanié par les sénateurs et en commission des Lois. Mais le projet de loi a été rejeté par la majeure partie des députés avant la moindre discussion de fond, une première depuis 25 ans.

Le député de la 4e circonscription de l’Eure, Philippe Brun (PS), a voté la motion de rejet déposée par Les Ecologistes, membres de la NUPES, comme le PS et LFI. Celle-ci a été adoptée par 270 voix contre 265 voix, sachant que la majorité absolue était à 268) avec le soutien des gauches, des Républicains et du Rassemblement national (RN). L’examen du texte a donc été interrompu. Un revers majeur pour le gouvernement qui a poussé le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a présenté sa démission au Président, qui l’a refusée.

Le gouvernement doit décider rapidement de la suite a donner, parmi trois options : renoncer au texte, le renvoyer aux sénateurs ou directement à la commission mixte paritaire.

Philippe Brun explique pourquoi il a voté en faveur de cette motion de rejet du groupe écologiste (EELV) contre le projet de loi immigration.

J’ai voté cette motion de rejet, comme l’ensemble des oppositions. Je connais bien le sujet du droit des étrangers. Avant d’être député, j’étais rapporteur public de la chambre du tribunal administratif de Montreuil, consacrée au contentieux des étrangers. J’ai beaucoup écrit sur cette matière. La réforme telle que proposée ne règle aucun des problèmes que soulève aujourd’hui notre droit, et va même aggraver la situation des étrangers sans favoriser leur intégration.

La France n’a pas de politique migratoire aujourd’hui, estime le député Brun. Notre droit des étrangers est réformé tous les deux ans, avec des dizaines de titres de séjour différents aux délais d’instruction variables, et des procédures bureaucratiques qui ont pour effet de harceler juridiquement les étrangers qui travaillent et qui s’intègrent. Combien de travailleurs dans le bâtiment, la propreté ou les services viennent me voir chaque semaine à la permanence, car on leur demande des papiers supplémentaires déjà fournis ? Dans le même temps, les autorités se montrent impuissantes vis-à-vis de ceux qui ne respectent pas les lois de notre pays, trop occupées à gérer des procédures absurdes. Je propose l’inversement de cette logique : une réforme en profondeur du droit applicable, avec des titres de séjours clairs permettant la régularisation des étrangers qui travaillent, et la concentration de nos moyens vers la lutte contre les passeurs et l’expulsion des étrangers qui troublent l’ordre public.

Les ténors Faure et Vallaud sont-ils toujours représentatifs du Parti socialiste ?

Opinion

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