Macron n’a toujours pas mis la transparence en marche

Il l’avait promise, mais René Dosière ne la voit toujours pas venir à l’horizon 2022

L’ardoise est-elle
vierge ?

« L’exécutif actuel n’a pas fait de progrès en matière de transparence, » s’impatiente le socialiste, après tout de même plus de quatre ans. Entretien avec Marianne, le 13/05/2021,

Malgré l’avis favorable de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), l’Élysée refuse de communiquer à la chercheuse Lucie Sponchiado les bulletins de paie d’Emmanuel Macron. Le signe d’une « réticence devant la transparence » selon René Dosière, ancien député socialiste, spécialiste des finances publiques.

Au cours de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s’était fait le chantre de la transparence. Mais visiblement pas au point de communiquer ses fiches de paie. Le Monde a révélé ce 11 mai que la chercheuse Lucie Sponchiado, membre du conseil scientifique de l’Observatoire de l’éthique publique, think tank créé en 2018 [et, on peut le dire, présidé par …René Dosière], avait sollicité les bulletins de paie du président, sans obtenir gain de cause.

La rémunération du président de la République, comme celle des membres du Gouvernement, est fixée selon des règles publiques inscrites dans un décret de 2012. Un mode de calcul qui permet de l’estimer actuellement autour de 15.000 euros brut.

« Le régime juridique du traitement et des indemnités du Président de la République, rendu public en 2007, a été clarifié en 2012, explique Lucie Sponchiado dans une note publiée le 11 mai, mais des questions demeurent et dans le cadre d’un travail de recherche portant sur « La rémunération et les avantages matériels des membres du pouvoir exécutif français », publié par l’Observatoire de l’Ethique Publique, il a été demandé à la présidence de la République la communication des bulletins de paie ou « relevés d’indemnités » du Chef de l’Etat. »

Par ailleurs juge assesseure, désignée par le Haut Commissariat pour les réfugiés, auprès de la CNDA (Cour Nationale du Droit d’Asile), la fouilleuse a essuyé un premier refus avant de saisir en octobre la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA). Celle-ci juge dans un avis rendu en décembre que les bulletins de paie du Président sont des « documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande ». En précisant que cela doit se faire en occultant « les mentions relevant de la vie privée, en particulier celles liées à la situation familiale et personnelle et à la situation fiscale du président de la République. »

D’après Le Monde, Patrick Strzoda, le directeur de cabinet du président, a assuré à la chercheuse, dans une lettre, que la rémunération « fait l’objet d’un contrôle annuel de la part de la Cour des comptes » [dont le socialiste Pierre Moscovici est le premier président depuis juin 2020] et qu’ainsi « la communication des documents sollicités apparaît inutile pour vos travaux de recherche ».

René Dosière : "L'exécutif actuel n'a pas fait de progrès en matière de transparence"
« L’absence de transparence ne favorise pas la confiance, »
pointe René Dosière.

Comment interpréter ce refus de l’Elysée ? Marianne en parle avec l’ex député socialiste René Dosière dont le dernier ouvrage, Frais de Palais*, se penchait sur les dépenses de l’Elysée.

Marianne : Le refus de l’Elysée [pour ne pas dire Macron] de communiquer les bulletins de paie d’Emmanuel Macron vous surprend-il ?

René Dosière : Oui, car depuis de longues années l’Elysée avait fait des progrès en matière de transparence, pas nécessairement sous Emmanuel Macron, d’ailleurs. Ce qui est un peu étonnant, c’est moins le sujet lui-même, c’est-à-dire la fiche de paie du président – on la connaît et il n’y a pas de révélations à attendre – que le fait que l’Elysée refuse de suivre l’avis de la CADA qui a estimé qu’il s’agissait d’un document administratif communicable. Bien sûr, l’Elysée n’est pas obligé de le suivre mais, venant de l’institution centrale de la République, il s’agit d’un très mauvais exemple. De nombreuses institutions ou collectivités refusent toujours de suivre les avis de la CADA. Si Lucie Sponchiado a persisté, c’est qu’il y a là le signe d’une réticence devant la transparence.

Comment l’expliquer ?

Nous n’avons pas en France la culture de la transparence sur les fonds publics. Pourtant, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen établit que tout citoyen a le droit de connaître l’usage de l’argent public [L’article 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 stipule que « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. »]. Nous n’avons pas adopté cette tradition de transparence et il faut à chaque fois faire des gains progressifs. Je ne vois pas de la part de l’exécutif actuel de progrès significatifs, même légers, en matière de transparence. On s’en tient à la législation et aux efforts qui ont été faits au cours du mandat de François Hollande. On ne revient pas en arrière, mais on n’innove pas non plus. L’Eysée n’est pas revenu sur la transparence qui existe sur son budget mais n’a pas fait de progrès qui auraient par exemple consisté à mettre en ligne le budget de la présidence. L’anecdote du bulletin de paie du président montre bien que l’on a des réticences à assurer la transparence.« Nous n’avons pas en France la culture de la transparence. »

Patrick Strzoda assure qu’« une fois [l’] occultation protectrice de la vie privée réalisée, seuls subsistent les éléments déjà publics de cette rémunération ». On a du mal à comprendre le refus de communiquer les bulletins de paie si toutes les informations sont déjà connues.

C’est contradictoire en effet car le directeur de cabinet explique qu’il ne communique pas… car il n’y a rien à découvrir ! Mais ce n’est pas à lui de juger de l’intérêt de disposer de ces documents. L’important à noter ici est que lorsque la CADA demande de communiquer un document administratif, l’Elysée refuse.

Pourrait-il y avoir d’autres informations jusqu’ici confidentielles qui apparaîtraient dans le bulletin de paie ? D’après vous, Patrick Strzoda dit-il vrai quand il affirme qu’en retirant les éléments d’ordre privé, il ne subsisterait que des informations déjà publiques ?

A ma connaissance, il a raison. La rémunération est effectivement contrôlée par la Cour des comptes. Mais on voit bien ici que l’absence de transparence conduit à se poser des questions ! Alors même qu’il n’y a, d’après moi, rien à découvrir ici. La transparence est le moyen de rétablir la confiance entre les citoyens et ceux qui décident. Sans elle, le citoyen peut avoir des doutes.

Comment jugez-vous le bilan de la macronie en matière de transparence sur les dépenses publiques ?

Il n’y a pas eu de progrès. Du moins du côté de l’exécutif sur le train de vie des ministres et des cabinets, c’est-à-dire les frais de représentation, de déplacements, etc.,… Du côté de l’Assemblée – je parle de l’Assemblée parce que le parti présidentiel y est majoritaire – il n’y a eu pas eu de recul, mais pas de progrès non plus.

Il y a tout de même eu les lois de 2017 « Pour la confiance dans la vie politique » et la mise en place de contrôles aléatoires des dépenses des parlementaires.

On se gargarise du fait qu’avec la première loi sur la confiance de la vie politique, on a décidé de contrôler les frais des parlementaires. Avant on ne savait pas comment les parlementaires dépensaient leurs frais mais depuis on n’en sait pas plus car il n’y a aucune transparence sur les contrôles. Ils existent mais on ne sait pas comment ils se déroulent. L’absence de transparence ne favorise pas la confiance. Pourquoi voulez-vous que l’on fasse confiance à un contrôle alors que l’on ne sait pas comment il s’exécute ? D’autant que la déontologue de l’Assemblée en charge de ces contrôles, l’universitaire Agnès Roblot-Troizier, a démissionné pour se consacrer à autre chose et son successeur, désigné en catimini, est Christophe Pallez qui était haut fonctionnaire de l’Assemblée. On reste entre soi.

Je dois dire néanmoins qu’il y a eu des tentatives de la majorité parlementaire, notamment pour améliorer la transparence sur les rémunérations de la haute fonction publique. On a fixé le montant de la rémunération de chaque président d’autorité administrative. On connaît désormais ces rémunérations. Là il y a eu un progrès mais c’est un petit point. De plus, une disposition prévoit que chaque année les collectivités locales fournissent le montant des rémunérations des élus. Certains élus essaient de jouer le jeu de la transparence mais ils ont beaucoup de mal car l’administration et le pouvoir exécutif n’ont pas de volonté très forte d’avancer.

*René Dosière, Frais de Palais, Éditions de l’Observatoire, 2019.

Sur le même sujet: lien PaSiDupes

Dupond-Moretti, bourrin sensible à Rolex, Bentley, bateau et ministre de Macron

Ministre de la justice (sociale) et ayatollah de l’écologie paie-t-il l’ISF ?

Le vice de forme est à Dupond-Moretti ce qu’est à Tapie la reprise d’entreprises en difficultés.

Ce mardi 24 novembre, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a dévoilé les déclarations d’intérêts et de patrimoine des membres du gouvernement de Jean Castex. Outre sa rémunération d’avocat, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti dispose de plusieurs biens luxueux.

Peu adepte de ce qu’il surnomme la “transpercence”, Eric Dupond-Moretti craignait que son patrimoine et ses revenus soient dévoilés au grand public. Devenu ministre de la Justice en juillet dernier, la star des prétoires a pourtant dû se soumettre à cette obligation issue des lois pour la confiance dans la vie politique de 2013, à l’instar de l’ensemble des membres du gouvernement Castex. Si ses honoraires d’avocat, 70.000 euros net par mois, avaient déjà “fuité” dans les media, la publication de ses déclarations sur le site de la HATVP, ce mardi 24 novembre, recèle plusieurs autres détails dérangeants.

A commencer par son patrimoine XXL, qui en fait l’un des ministres les plus riches du gouvernement: il a plus riche que lui ! Outre sa maison de 300 mètres carrés à Nice, acquise pour 1,55 million d’euros en 2018, et ses 3,5 hectares de vignes à Collioure (Pyrénées-Orientales), Eric Dupond-Moretti possède un appartement de 200m2 à Paris, acheté 1,8 millions d’euros en 2010, et qui vaut désormais 2,8 millions d’euros. Le ministre de la Justice détient également la moitié des parts d’un autre appartement de 107 m2 dans la capitale, achetées 587.000 euros en 2019, ainsi que 50% d’un pied-à-terre de 40m2 en Italie (acheté en indivision) et une maison dans les Hauts-de-France, la région dont il est originaire.

Un garage bien garni

Amateur de véhicules à moteur, le garde des Sceaux se “déclare” propriétaire d’une Bentley, une voiture de luxe estimée à 83.000 euros, ainsi que d’une moto Harley-Davidson, d’une valeur de 24.000 euros. Il possède également son propre bateau, son « Phocea », acheté d’occasion pour un peu moins de 30.000 euros en 2014.

Autre signe d’une carrière réussie, le ténor du barreau soigne son horlogerie. « Si à 50 ans on n’a pas une Rolex, c’est qu’on a raté sa vie ». A 59 ans, Eric Dupond-Moretti a amplement réussi la sienne. Le fils d’ouvrier métallurgiste et d’une femme de ménage italienne porte alternativement une montre Rolex Daytona, estimée à 13.000 euros, et un modèle de la prestigieuse manufacture horlogère suisse F.P. Journe, d’une valeur de 25.000 euros. Par ailleurs, le ministre de la Justice domicilie l’essentiel de ses avoirs bancaires, 470.000 euros environ, sur des comptes courants et des assurances vie au Crédit du Nord. Enfin, sa déclaration à la HATVP mentionne qu’il possède une somme de 12.000 euros en espèces.

Le théâtre et les livres, une super rente !

Pour se constituer un patrimoine aussi rutilant, Eric Dupond-Moretti a appliqué une recette bien connue des businessmen : ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier ! En marge de ses copieux revenus d’avocats (il dispose de la pleine propriété de son cabinet, dont la valeur est proche de 1,5 million d’euros) “Acquitator” a acheté des parts du bistrot de son fils, à Lille. Il a aussi fait fructifier son énorme célébrité en se produisant au théâtre, l’une de ses nombreuses passions.

Au théâtre, le multi-producteur Jean-Marc Dumontet crie famine, mais certains se gavent. Le succès de son spectacle “Dupond-Moretti à la barre”, joué à la Madeleine, lui a rapporté environ 180.000 euros en 2019, cachets et droits d’auteurs cumulés. Le théatre ne va pas mal pour tous… Enfin, “EDM” a signé un juteux contrat avec l’éditeur Michel Lafon en 2014. L’édition se plaint d’étouffement, mais EDM ne manque pas d’air: la vente de ses petits opus, parfois des succès, lui a permis d’encaisser près de 12.000 euros par an, en moyenne, entre 2014 et 2019.

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