Macron se mettra en scène pour un hommage à Jacques Delors aux Invalides

Promesse de trémolos dans la voix et d’oeil de cocker

Le santon des Invalides

Macron adore la fréquentation de ses contemporains morts et il ne manque donc jamais l’occasion unique d’un hommage national. Jacques Delors lui offrira la possibilité de s’approprier ne serait-ce qu’une parcelle de sa gloire présumée, en prononçant un discours immortel rédigé par une équipe de beaux parleurs rompue à l’exercice.

On n’imagine pas que Macron puisse ne pas se mettre en avant à la faveur des honneurs de la Nation à Jacques Delors: l’homme est réputé humble et le président sera trop tenté de compenser en s’enorgueillissant pour deux. L’ancien ministre de François Mitterrand, président de la Commission européenne (1985-1995) qui est emblématique seulement pour les Français, croulera donc sous un flot de belles paroles vendredi 5 janvier, à 11h00, a annoncé l’Elysée ce vendredi.

A l’annonce de la disparition du grand homme, le chef de l’Etat avait salué un « inépuisable artisan de notre Europe » et « une figure tutélaire de la scène politique depuis 40 ans ». En vérité, depuis trente ans, plus personne n’a su ce qu’il était devenu.

En 1995, il renonça en effet à se présenter à l’élection présidentielle et disparut des radars. Ainsi l’espoir qu’il incarna pour la gauche fut-il éphémère, alors qu’il était le favori dans les sondages. Sa carrière politique avait ensuite marqué le pas: il était resté un défenseur de l’Europe, mais la mise en procès de l’UE contribua fortement â sa mise sous le boisseau. En mars 2020, il avait bien encore appelé les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE à plus de solidarité au moment où ces derniers s’écharpaient sur la réponse commune à apporter à la pandémie de Covid-19, mais le Brexit (31 janvier 2020) avait porté un coup sévère à l’image de la Commission européenne, autoritaire, coupée des Etats-membres et abondamment condamnée pour ses mesures déconnectées, voire néfastes.

Ancien président de la Commission européenne, père du marché commun, de l’euro et d’Erasmus, l’ancien ministre de l’Economie de François Mitterrand a également été salué par les dirigeants européens comme un « visionnaire » et un « bâtisseur » de l’Europe, mais les autres, nationaux et souverainistes, se satisferont d’un simple respect dû à sa mémoire. C »est pourquoi Macron devrait la jouer discret, ce qu’il ne sait pas faire, et bref, alors qu’il travaillera d’abord et avant tout à redorer sa propre image. Un travail de longue haleine depuis sa réforme controversée des retraites, sa loi immigration dénaturée, son abus de l’article 49.3 et sa mobilisation du Conseil constitutionnel pour pallier son défaut de majorité absolue. L’hommage à Delors réussira-t-il là le montage en épingle de l’affaire Depardieu a fait flop ?