David Rachline garde le soutien du RN
Le maire RN de Fréjus David Rachline est en difficulté après la parution d’un livre qui se veut une « enquête sur la mafia varoise de Marine Le Pen » dont il serait le chef de file. Il suffit de cette seule accroche pour comprendre qu’au-delà du maire du Var, c’est bien la tête de son parti qui est en fait visé.
« Pour l’heure, » le Rassemblement national continue de soutenir le maire de Fréjus David Rachline, « proche de Marine Le Pen et Jordan Bardella », sévèrement mis en cause dans un livre pour sa gestion de la commune varoise.
« Je ne crois pas un mot de ce qui est écrit », a déclaré dimanche sur BFMTV Sébastien Chenu, vice-président du RN, mettant en avant un maire « très bien jugé » par les électeurs. « La justice de Fréjus n’a jamais enquêté » contre David Rachline. « Il n’y a aucune raison de douter de (son) intégrité », a abondé sur France Info le député Jean-Philippe Tanguy.
« Une enquête sur la mafia varoise de Marine Le Pen »
La cité balnéaire de 56.000 habitants a été pendant des années érigée en vitrine du projet lepéniste, le parti y organisant souvent ses rentrées politiques. Mais David Rachline, maire depuis 2014, voit son image écornée dans Les Rapaces (édition Les Arènes), paru début novembre.
Cet éditeur parisien fait l’objet d’une critique cinglante dans le livre de Pierre Péan, Noires fureurs, blancs menteurs (Mille et Une nuits, 2006), paru chez une marque de Fayard. L’auteur accuse la maison d’édition de faire partie, en ayant publié un livre d’un militant proche d’ATTAC connu pour ses dénonciations des relations franco-africaines, François-Xavier Verschave (Noir silence, Noir procès, Noir Chirac) et L’Inavouable du journaliste au Figaro Patrick de Saint-Exupéry – poursuivi pour diffamation dans cette affaire de l’été 1994 au Rwanda – d’un « cabinet noir » pro-Tutsi qui aurait manipulé l’opinion internationale à propos du génocide des Tutsi, et prend la défense de Fayard et Claude Durand (son directeur général) dans l’épisode Lorentz et attaque Patrick de Saint-Exupéry. Cependant, le livre de Pierre Péan est controversé dans… Libération.
Des enveloppes d’argent liquide sur fond de marchés publics truqués, non seukement à Fréjus, mais dans le Var, LR : le livre, qui se veut une « enquête sur la mafia varoise de Marine Le Pen », dénonce le train de vie de l’édile, sans rapport, selon la journaliste, grand reporter à L’Obs, filiale du groupe Le Monde, Camille Vigogne Le Coat avec ses indemnités d’élu. Le livre de celle qui se définit en « dénonciatrice » l’accuse aussi d’arrangements avec un puissant entrepreneur local de BTP pour l’attribution de marchés publics, loin de l’image d’exemplarité véhiculée par le parti, et relaye des soirées arrosées du maire, où fuseraient (notons le recours au conditionnel!) remarques racistes et gestes antisémites.
Clientélisme et embarras
David Rachline paie le prix de sa proximité avec les deux dirigeants de son parti, Jordan Bardella et Marine Le Pen, qui ont passé en sa compagnie des vacances sur la côte varoise. « La question est de savoir si le RN va le lâcher ou pas », relève un ex-élu influent mais non identifié du parti. « Marine a tellement peur d’être irradiée (…) si la barque continue de se charger », tout est envisageable, commente l’inconnu sous couvert du secret des sources de la presse.
La candidate arrivée au second tour de la présidentielle défend le maire. « Par principe, je lui accorde ma confiance, sauf démonstration contraire », commentait-elle dans le respect de la procédure, le 8 novembre. « Tout cela n’intéresse absolument personne », balayait quelques jours plus tard le président du Rassemblement national Jordan Bardella, dénonçant le livre d’« une militante politique », salariée de la holding Le Monde libre des hommes d’affaires Xavier Niel, Matthieu Pigasse, Daniel Křetínský, Prisa) et le « pôle d’indépendance » détenu par les salariés, les syndicats et des associations, des milliardaires qui bénéficient de subventions de l’Etat français, en fait le contribuable. « On dit : « Il fait du clientélisme », mais tous les maires ont tendance à le faire. Tous, tous, tous », affirme de son côté un cadre RN.
Figure montante du parti
Elu maire en 2014, David Rachline, 35 ans, a escaladé à grande vitesse les marches du parti. Conseiller municipal de sa ville à 20 ans, il a dirigé le Front national de la jeunesse et été directeur de campagne de Marine Le Pen pour la présidentielle de 2017. Cinq ans plus tard, l’ex-sénateur, réélu à la tête de sa ville dès le premier tour en 2020, est propulsé deuxième vice-président du RN.
« C’est un homme qui symbolise la jeunesse, le travail, le mérite, la fidélité et il faut bien le dire, le succès », louait en 2016 Marine Le Pen.
Le livre Les Rapaces fait aussi part d’ententes entre David Rachline et des responsables varois des Républicains, notamment Jean-Louis Masson président LR du conseil départemental, les conseillers départementaux RN allant même jusqu’à voter le budget. « Moi, je n’ai jamais voté le budget de mes adversaires », assure la députée RN du Var Laure Lavalette.
Le maire porte plainte pour diffamation
« Il n’y a pas un élément factuel qui tend à démontrer que les procédures ne sont pas respectées » pour les marchés publics, s’est défendu l’intéressé sur RTL. Son avocat, Alexandre Varaut, a annoncé vendredi avoir déposé plainte en diffamation.
« Le dépaysement me paraît quelque chose de sain, j’ai décidé d’engager la procédure à Paris », a-t-il expliqué, précisant qu’il attaque « 17 passages » du livre et promettant « de nouvelles plaintes ». Interrogé sur l’éventuelle ouverture d’une enquête contre le maire, le Parquet de Draguignan n’a pas souhaité être transparent.
« Est-ce que (cette affaire) éclabousse l’image du parti ? L’avenir le dira, mais pour l’instant, c’est une tempête dans un verre d’eau », observe une députée RN.