Des sociétés de journalistes s’opposent à l’allongement, pour les élus, du délai de prescription de la diffamation

Contre la désinformation et la diffamation, les élus éprouvent – pour la première fois en 2024 – l’impérieuse nécessité de garantir leur protection par la loi

Les sociétés de journalistes déplorent l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement visant à allonger le délai de prescription des infractions de diffamation et d’injure publique, quand celles-ci visent des personnes élues ou briguant un mandat électif. En faisant passer ce délai de 3 mois à 1 an, les députés (comme les sénateurs qui ont voté cet amendement) cherchent à s’octroyer une protection exorbitante [!] du droit commun, au prix d’une atteinte dommageable à la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Cette loi accorde des libertés mais définit aussi ses limites pour les garantir. Il existe des délits de presse (provocation aux crimes ou aux délits : meurtre, pillage, incendie, etc., ce qui s’est vu lors du mouvement des Gilets jaunes ou encore celui des écoterroristes contre les réserves d’eau, par exemple) qui instaurent des responsabilités individuelles et collectives à la fois (depuis le distributeur jusqu’à l’éditeur de publication). Il faudrait aussi évoquer la loi du 29 juillet 1982 (telle que modifiée par la loi du 30 septembre 1986) sur la communication audiovisuelle. Le tribunal d’instance du 11e arrondissement de Paris a considéré, le 3 août 1999, qu’une publication sur l’internet relevait bel et bien du même régime que la publication de presse pour décliner sa compétence au profit de celle du tribunal de grande instance. Les sites web signataires (Arrêt sur images, Mediapart, etc) doivent savoir qu’ils peuvent être qualifiés de services de communication audiovisuelle. 

Cet allongement du délai de prescription permettrait à n’importe quelle personne élue ou candidate à une élection d’attaquer des journalistes pendant un an après la publication ou la diffusion de leur travail. Il est normal que la presse rende des comptes sur ce qu’elle produit, ce que prévoit déjà la loi de 1881, mais une telle disposition ferait peser une menace juridique et financière supplémentaire sur les rédactions, et ce, pour une durée excessivement longue, sans aucune justification sur le fond. A priori…

L’introduction d’un tel amendement dans une loi «renforçant la sécurité des élus locaux» est de surcroît un symbole déplorable. Elle laisse penser que le travail de la presse est un facteur d’insécurité pour les personnes élues ou qui cherchent à l’être. Ce qui ne peut être exclu, notamment de la part de la presse révolutionnaire. Tout au contraire, selon les signataires, le libre travail des journalistes, sans pression d’aucune sorte, permet et sécurise l’exercice par les citoyens de leurs droits politiques.

Nous réclamons que la commission mixte paritaire écarte cet amendement pour ne pas qu’il porte une énième entorse inutile et arbitraire à la liberté d’informer et d’être informé.

Les sociétés des journalistes de : AFP, Arrêt sur images, Arte, BFMTV, Challenges, les Echos, Elle, l’Express, le Figaro, France 24, France 3 rédaction nationale, France info, France Télévisions rédaction nationale, Franceinfo.fr, l’Humanité, LCI, Libération, l’Informé (site d’investigation économique libre et factuel), M6, Marianne, Mediapart, le Monde, NRJ Groupe, l’Obs, le Parisien, le Point, Radio France, RFI, RMC, RTL, Télérama, TF1, la Tribune (Rodolphe Saadé via CMA CGM Médias, dont La Provence), dont plusieurs du service public.

Seuls les journalistes partisans, malveillants et mal intentionnés ont signé… Tous sont eux-mêmes protégés par le secret des sources. Et leur statut leur permet d’exercer leur métier sans crainte d’être tués, arrêtés ou encore intimidés. Mais les élus pourraient-ils être intimidés par la presse ?

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