Des restaurateurs affichent leur refus de contrôler le passe sanitaire

«Zone libre» marque la convergence des luttes entre restaurateurs et libertaires

Dans ce restaurant du Sud Essonne, le gérant refuse d’appliquer le passe sanitaire, obligatoire étendu depuis lundi 11 août en France.

Un collectif assume de ne pas avour le souci de la sécurité sanitaire de ses clients. Il ne veut leur garantir que l’accueil sans contrôle du passe sanitaire obligatoire dans certains établissements. Cette petite «pastille verte» commence à faire des adeptes, au risque d’attirer l’attention des autorités.

https://twitter.com/TomSav67/status/1427571189627641856?s=19

Pour ce restaurateur d’une ville de l’est de la France, il était hors de question de contrôler ses propres clients : il n’est «pas leur mère». Avec ou sans passe sanitaire, donc, tous continuent d’être accueillis dans son établissement, et l’entrée en vigueur des mesures estivales n’y a rien changé. Il faut dire que l’irréductible aubergiste n’en est pas à son coup d’essai: pendant le confinement, il continuait de servir trente à quarante couverts par jour, comme si de rien n’était…

Une allusion douteuse à
la ligne de démarcation,
limite entre la zone occupée par l’armée allemande et
la zone libre non occupée,
fixée par l’armistice du 22 juin 40.

Sur fond de contestation grandissante de la profession, ce réfractaire tient là un véritable argument marketing. Et les clients du troquet ne s’y sont pas trompés, qui viennent plus nombreux qu’à l’accoutumée siroter avec leur cervoise le goût savoureux de la liberté. «Les gens me connaissent depuis longtemps, explique-t-il. Ils savent que je ne suis pas dans la conformité… Ils se le disent entre eux, ils en parlent, et la rumeur se répand. Ceux qui viennent boire ici aujourd’hui le font en partie parce qu’ils savent que je ne les embêterai pas.»

L’un d’entre eux ajoute tout de même que la configuration des lieux aide aussi à prendre le risque de s’y attabler, même sans passe sanitaire : donnant sur une petite cour, la taverne offre une confortable «issue de secours» au cas où les forces de l’ordre viendraient effectuer une visite impromptue.

Quant au risque d’une fermeture administrative, le patron le redoute mais le relativise quelque peu: «Avec un référé-liberté , on peut réduire considérablement le temps de fermeture; mais enfin chaque jour compte, et quand je reste fermé je n’ai pas d’argent qui rentre».

Alors, s’il faut en passer par là, il reste toujours les vieilles combines. Comme celle-ci : on peut scanner cinq fois le même QR code pour cinq clients différents. L’application dont disposent les restaurateurs, elle, ne fait pas la différence et le gérant des lieux pourra toujours expliquer s’être fait berner, au cas où la patrouille arrive.

Du reste, la ville assure de son côté n’avoir «pas connaissance» de cette initiative, et poursuivre malgré tout les contrôles dans les établissements de son territoire soumis à l’obligation de vérifier le passe sanitaire. Sauf celui-là…

«Tous bienvenus», avec ou sans

Le passe sanitaire n’est pas un obstacle à l’admission!… Ce restaurant qui clame haut et fort son rattachement à la «zone libre» n’est pas le seul. Et pour encourager à la désobéissance, un mouvement est né sur les réseaux sociaux, tous marqués à gauche et censeurs des propos et actions de la droite, proposant aux récalcitrants d’appâter les clients non-vaccinés au moyen d’un discret petit macaron vert distribué à quiconque en fait la demande. «Ici, on respecte votre liberté, votre dignité et le secret médical», peut-on y lire, au milieu d’un slogan, «tous bienvenus», qui forme une drôle de contrefaçon du célèbre «venez comme vous êtes» d’une enseigne de fast-food bien connue.

A l’origine, l’initiative n’était pourtant pas si insolente que cela: «J’ai eu l’intuition qu’il fallait un message positif pour contrebalancer la morosité des annonces d’Emmanuel Macron», confie l’instigateur du mouvement, dont l’identité est protégée par le « secret des sources » de la presse complice et anti-républicaine sans le savoir. Au lendemain de l’introduction du passe sanitaire, il propose alors à ceux des commerçants de son quartier qui ne sont pas soumis à l’obligation de contrôler le passe d’afficher le petit macaron vert, pour rappeler aux clients qu’il subsiste «quelques espaces de liberté». «C’était une façon de fédérer derrière un message réjouissant, mais je n’avais pas en tête de lancer un mouvement de désobéissance civile», ajoute-t-il.

L’autocollant connaît un vif succès et, l’appétit venant en mangeant, il est vite sollicité par des restaurateurs («une vingtaine en quelques jours») qui y voit une opportunité: faire du beurre sur le refus de l’obligation et afficher leur préférence politique de refus d’appliquer les consignes gouvernementales. Et d’inoffensif qu’il était, voilà le petit macaron vert devenu malgré lui un symbole de rebellion et de dissidence.

Mais être visible est à double tranchant et l’appât immodéré du gain peut conduire à tout perdre et l’idée, un temps imaginée par le collectif, de constituer un annuaire des établissements réfractaires, est la cerise de trop sur le gâteau. Certains y voit une sorte de marché noir à la faveur de l’épidémie de sinistre mémoire et pensent à l’après covid… S’il se «garde bien de communiquer les noms et adresses des restaurateurs» qui lui ont demandé des macarons, le fondateur de «Zone libre», qui s’accommoderait d’une cuisine nauséabonte, admet donc que concilier la volonté de publiciser ces établissements, tout en les préservant d’un contrôle administratif désagréable, constitue un numéro a risques de corde raide. La peur des sanctions administratives est plus oppressante que la contamination. Encore que tous les restaurants concernés n’ont pas le même souci de la discrétion: certains n’hésitent même pas à communiquer auprès de la presse locale, comme ici auprès de La Dépêche .

Aucun passe sanitaire n’a été requis mercredi lors d’un concert à La maison de la halle de Verfeil-sur-Seye, située dans le Tarn-et-Garonne, entre entre Caussade et Villefranche-de-Rouergue (MRG).

Les initiatives anti-passe sanitaire se multiplient:

En Ardèche du Sud, aux Vans, se déroule une opération “Terrasse sans pass”, à l’initiative de Gilles Celadon.

Pour les plus chafouins, le petit rond vert reste néanmoins planqué dans le tiroir-caisse et on ne le sort que discrètement, pour quelques photos avec des clients de connivence. Si on veut recevoir des clients non-vaccinés sans trop attirer l’attention, le plus sûr reste de compter sur le bouche-à-oreille, avouent-ils. Message reçu cinq sur cinq pour beaucoup d’abonnés de la page Facebook du mouvement «Zone libre», qui ne publient que des informations très vagues («Zone Libre à […] chez un restaurateur courageux») et ne communiquent ensuite les bonnes adresses que par message privé. La voix de Radio Londres?

La France est divisée en deux.