Un amendement voté à l’unanimité simplifie désormais l’expulsion des squatteurs

Les députés de gauche ont voté avec les autres le respect du droit de propriété

Le père de famille n’était pas « un jeune mâle blanc diplômé » (Macron, avril 2010) …

Le 17 septembre 2020, sous la pression de l’opinion scandalisée par les situations de deux familles chassées de leur domicile par des squatteurs à Théoule-sur-Mer (Alpes-Maritimes) et Saint-Honoré-les-Bains (Nièvre), l’amendement de Guillaume Kasbarian (LREM) – dont la suppléante, Véronique de Montchalin, est la tante par alliance d’Amélie de Montchalin, députée LREM, puis secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, puis ministre de la Transformation et de la Fonction publiques – a été adopté en commission spéciale avec l’avis favorable du gouvernement. L’amendement prévoit de modifier la loi de 2007 sur le droit au logement opposable (Dalo), en étendant la notion de « domicile » aux résidences secondaires ou « occasionnelles ».

Cet amendement modifie plusieurs législations fondamentalles mentionnant ou garantissant un droit au logement ou un droit à un logement convenable à tous. Le droit au logement est assuré par les 10e et 11e alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui fait partie de textes à valeur constitutionnelle, mais ils ne prévoient aucune sanction juridique.

La loi Besson du 31 mai 1990 visait à la mise en œuvre du droit au logement. Cette loi affirme que « garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation ». Son article 1er – à visée sociale et vertueuse -institue le principe d’un droit au logement opposable garanti par l’Etat aux personnes résidant sur le territoire français de façon régulière et stable et n’étant pas en mesure d’accéder par leurs propres moyens à un logement.« 

Dans le même esprit de compassion sociale du gouvernement Jospin, arriva la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, dite loi Besson II, qui modifie le dispositif de la loi Besson I… Le socialiste Louis Besson, député DVG de Chambéry, était secrétaire d’Etat au Logement. Il est celui à l’origine de l’obligation d’un minimum de 20 % de logements sociaux dans les communes urbaines. En 2000, est votée une seconde loi portant son nom qui oblige les communes de plus de 5.000 habitants à prévoir des emplacements de séjour à destination des gens du voyage.

En 2007, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées – présidé par Xavier Emmanuelli, cofondateur de Médecins sans frontières, puis fondateur du Samu social de la Ville de Paris et secrétaire d’Etat auprès du premier ministre, chargé de l’Action humanitaire d’urgence dans les gouvernements Juppé – proposa de rendre le droit au logement opposable devant les tribunaux. Au-delà de l’obligation de moyens imposée par la loi Besson, il créait une obligation de résultat : les groupements intercommunaux seraient responsables, par délégation de l’Etat, de la garantie du droit au logement, fusse au détriment des propriétaires. Cette idée a été reprise par le gouvernement Raffarin.

Le 17 septembre 2020, en urgence, les députés ont adopté en commission à l’unanimité une mesure qui simplifiera l’expulsion de squatteurs. Un couple de septuagénaires, propriétaire de sa maison de Théoule-sur-Mer, a vu en effet son domicile occupé par une famille de squatteurs maghrébins, contre son gré. Le domicile d’une octogénaire a également été occupé illégalement par un couple avec deux enfants, dans la Nièvre. Il s’agit de « faciliter la protection du droit de propriété » et de « lutter efficacement contre les squats de logement quels qu’ils soient, résidence principale, secondaire ou occasionnelle », selon l’amendement de Guillaume Kasbarian (LREM), adopté en commission spéciale avec l’avis favorable de la ministre déléguée chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, fille de Lionel Stoleru (secrétaire d’État chargé des travailleurs manuels et immigrés de Giscard d’Estaing et Raymond Barre), qui avait commencé par estimer que les squatteurs devaient être protégés. Le couple de squatteurs de la maison de Théoule – qu’ils squattaient depuis trois semaines – n’auraient rendu les lieux (saccagés) ni de leur plein gré, ni dans le respect du droit de propriété, mais à la suite de violences conjugales: le mari aurait frappé sa femme. 

Dans le détail, l’amendement prévoit de modifier la loi de 2007 sur le droit au logement opposable (Dalo), en étendant la notion de « domicile » aux résidences secondaires ou « occasionnelles ». Une fois le squat découvert et les faits dénoncés aux forces de l’ordre, et non plus du moment où les squatteurs prennent possession des lieux, le propriétaire du logement saisira le préfet, qui aura 48 heures pour répondre au plaignant, avant de mettre en demeure le ou les squatteurs de quitter les lieux.

L’amendement ne vise pas « ceux qui ne paieraient pas leurs loyers »

Guillaume Kasbarian est le rapporteur du projet de loi « Accélération et simplification de l’action publique » (Asap). « Nous avons tous été choqués [sauf Emmanuelle Wargon] par la détresse de ces retraités dont la maison a été squattée à Théoule-sur-Mer (Alpes-Maritimes) », a-t-il commenté en référence au squat de près de trois semaines, à partir de la fin du mois d’août, par une famille et des enfants. Le septuagénaire et sa femme ont pu rentrer chez eux et un hébergement a été proposé à la famille occupante, selon Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement.

L’amendement, « équilibré », selon la ministre déléguée à l’lndustrie, ne vise « pas les droits des locataires et de ceux qui ne paieraient pas leurs loyers, » a tenu à préciser Agnès Pannier-Runacher, en commission.

Mathilde Panot (LFI) s’est toutefois inquiétée du flou entourant la notion de « résidence occasionnelle », estimant qu’il existe un risque d’étendre cette mesure aux logements vacants. Présenté comme un texte fourre-tout, le projet de loi Asap vise, selon le gouvernement, à « simplifier la vie » des citoyens et des entreprises. Il a été adopté le 5 mars par le Sénat en première lecture, et sera débattu à l’Assemblée à partir du 28 septembre.