Jean-Paul Delevoye, l’ex-« M. Retraites » de Macron, suspendu de la Légion d’honneur

L’homme de confiance de Macron a eu des «oublis» dans sa déclaration d’intérêts

Il était alors en charge des investitures des candidats LREM aux législatives de 2017

Le haut-commissaire aux retraites démissionnaire Jean-Paul Delevoye (d) fait une (g) déclaration lors de la passation avec Laurent Pietraszewski au poste de secrétaire d’Etat en charge des retraites, en présence de la ministre de la Santé Agnès Buzyn, le 18 décembre 2019 à Paris

Une décision dont le président qui défendait en 2017 « une République exemplaire » se serait volontiers passé : Macron vient de signer un décret qui suspend – pendant deux ans – Jean-Paul Delevoye de l’exercice des droits et prérogatives attachés à sa qualité d’officier de la Légion d’honneur. C’est l’un des premiers cas de non-respect des règles en matière de transparence de la vie publique traité en discipline dans l’ordre de la Légion d’honneur : en 2018, Yasmina Benguigui, ministre de la Francophonie de François Hollande (2012-2014), auprès de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, dans le gouvernement Ayrault I, avait connu un sort comparable.

L’ancien chiraquien, devenu l’un des hommes de confiance de Macron, au point de présider la commission d’investiture de La République en Marche pour les élections législatives de 2017 puis d’être nommé haut-commissaire aux retraites et de participer à ce titre au conseil des ministres, avait dû démissionner en décembre 2019 après des « oublis » dans sa déclaration auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) – une déclaration d’intérêts incomplète et incorrecte. Deux ans plus tard, il avait été condamné à quatre mois de prison avec sursis et 15 000 euros d’amende, sans peine d’inéligibilité à son encontre ni inscription à son casier judiciaire. Il avait choisi le « plaider-coupable ».

« Une faute se paie, c’est normal »

Il y a quelques semaines, Jean-Paul Delevoye a reçu un courrier du conseil de l’ordre de la Légion d’honneur sollicitant sa contre-argumentation. Si une personne condamnée pour crime ou pour une peine de prison ferme supérieure à un an est automatiquement privée de sa décoration, un dossier est instruit, selon une procédure contradictoire, pour toute personne ayant fait l’objet d’une condamnation définitive à une peine en correctionnelle. La sanction disciplinaire peut être de trois niveaux : un simple blâme, une suspension ou une exclusion. Le conseil rend ensuite un avis, mais la décision revient au grand-maître de la légion d’honneur, à savoir le président de la République. L’article 104 du code précise qu’il « ne peut être passé outre à cet avis qu’en faveur du légionnaire » – le président peut atténuer la sanction et non la renforcer. L’Elysée refuse d’indiquer si Emmanuel Macron a suivi l’avis du conseil de l’ordre ou l’a modifié : les délibérations sont confidentielles.

Jean-Paul Delevoye ignorait l’existence du décret présidentiel et n’avait pas été informé de sa suspension. « J’ai moi-même hésité entre rendre ma décoration et suspendre un temps mes droits, explique-t-il. Une faute se paie, c’est normal, et je peux comprendre que le président n’ait pas voulu apparaître comme défendant l’un des siens. Je regrette juste que là où certains ont eu un mois pour rectifier leur déclaration à la Haute autorité quand elle n’a pas été jugée conforme, la mienne a été divulguée dans la seconde. » La Haute autorité pour la transparence de la vie publique a été créée en 2013, dans la foulée du scandale Cahuzac.