Adecco a-t-il offert à Sibeth Ndiaye un emploi-écran?

« Au moment où je bascule dans le privé, mon engagement militant devient citoyen, privé, derrière l’engagement professionnel.» 

La menteuse a « traversé la rue » pour préparer la campagne présidentielle de Macron 2022.

En juillet 2007, Adecco et L’Oréal ont été condamnées à 30.000 € d’amende et condamnées  à payer solidairement 30.000 € à SOS Racisme pour discrimination raciste, suite à leur refus de recruter des jeunes femmes d’origine africaine, arabe ou asiatique.

Or, le 14 janvier 2021, la multi-nationale suisse Adecco annonça le recrutement de l’ancienne porte-parole du gouvernement, la franco-sénégalaise Sibeth Ndiaye, au poste de secrétaire générale d’Adecco France. Sans aucune compétence reconnue en intérim ou formation, ni même dans la vraie vie, l’apparatchik socialiste est en charge «  des affaires publiques, du juridique, de la communication et des solutions emploi  » et membre du comité exécutif. » Malgré (ou à cause de) son aptitude assumée au mensonge.

Certaines personnes y voient du pantouflage, d’autres, un emploi-écran sur-payé.

Celle à qui Gabriel Attal a succédé avait préparé les esprits à sa reconversion, exprimant son intention de “retourner à la vie civile” après le remaniement de juillet. Un virage professionnel qu’un familier de l’exécutif a raillé dans les colonnes du journal Le Parisien: Son boulot, c’est d’être payée pour préparer 2022.” Un intérim.

Le conflit d’intérêts, balayé d’un revers de main

Face aux accusations d’exportation de données, l’eurodéputé, conseiller du président et compagnon de Gabriel Attal, Stéphane Séjourné, n’a rejeté qu’une partie  des charges, racontant que la nouvelle fonction de Ndiaye “ne peut pas être du pantouflage”. Avant de rétorquer : “On peut être des pros en politique, mais pas forcément des professionnels de la politique.” Comprend qui peut cette « pensée complexe »…

Si Sibeth Ndiaye “avait besoin de se refaire une santé”, selon un camarade, réussira-t-elle à se détacher de ses anciennes fonctions ?

Le “oui, mais” du gendarme de la transparence

A la tête de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), le socialiste Didier Migaud a émis un avis… favorable à sa reconversion professionnelle. Néanmoins, cet aval reste soumis à quelques avertissements, en raison de la place de choix qu’occupe le groupe Adecco dans le secteur de l’emploi en France. Le risque “dans certaines hypothèses, de remettre en cause le fonctionnement normal et impartial de ses anciens services a été pointé, comme l’a relaté Capital, ce lundi 25 janvier. Pour éviter tout conflit d’intérêt, Sibeth Ndiaye devrait être déchargée des dossiers qui pourraient être en lien avec ses anciennes prérogatives.

Afin d’anéantir tout risque de conflits d’intérêts, l’institution présidée par Didier Migaud a donc demandé à Sibeth Ndiaye de se déporter de plusieurs catégories de dossiers traités par Adecco, qui pourraient être en lien avec ses anciennes attributions. Pendant les trois années qui suivent la cessation de ses fonctions à la présidence de la République et au gouvernement — soit jusqu’au 31 mars 2022 et au 6 juillet 2023 — elle devra s’abstenir de “toute démarche, y compris de représentation d’intérêts (lobbying) auprès du cabinet du président de la République, ainsi qu’auprès de tout membre du gouvernement qui était en fonction en même temps qu’elle”. Par ailleurs, l’ex-secrétaire d’Etat devra s’astreindre à la même obligation de réserve “auprès des membres de son ancien cabinet, dès lors qu’ils occuperaient toujours des fonctions publiques”.

Une mère si attentive

L’Elysée a saisi l’occasion du départ d’Edouard Philippe et du changement de gouvernement de  juillet, Sibeth Ndiaye s’est cherché une virginité morale. Un départ que la maman de trois enfants avait soudain justifié par sa vie de famille. “J’ai beaucoup réfléchi et je me suis rendu compte que mes gamins grandissaient vite et que je passais à côté de trop de choses. » Adecco lui permettrait-il de dégager du temps à loisir ?

Le Président dit souvent qu’il faut ’savoir prendre son risque’. C’est fait pour moi”, déclarait-elle au Canard Enchaîné, le mercredi 8 juillet 2020. Depuis quand les multi-nationales suisses prennent-elles leurs risques? Sibeth Ndiaye n’a d’ailleurs pas totalement refermé la porte de la politique pour autant. L’ex-conseillère presse et communication de Macron n’a jamais entendu rompre avec l’exécutif, bien que l’exercice du pouvoir ait essoré sa complicité avec le locataire de l’Elysée.

Ndiaye prend les Français pour des billes

De l’hôtel de Rothelin-Charolais aux étages élevés d’Adecco. Après deux décennies en politique – elle fut syndicaliste UNEF, militante, collaboratrice, ministre – Sibeth Ndiaye – éreintée par les critiques – affiche un besoin de vie familiale et de « vie civile ». « Elle a payé cash ses maladresses », ses sottises, observe un macronard. Et sa vie de famille attendra, car la voilà en charge d’« un très gros job ».

Certains y voient un pantouflage – « son boulot, c’est d’être payée pour préparer 2022 », égratigne un familier de l’exécutif. Il lui a été proposé de prendre la tête d’une grande institution publique. Elle a dit non. « Elle avait besoin de se refaire une santé hors de ce système-là », raconte un autre de ses camarades. N’a-t-elle pas en effet été rattrapée par son passé de ministre, lorsqu’en octobre, d’octobre, à 6 heures du matin, des policiers sonnent à la porte de son appartement familial pour une perquisition dans le cadre d’une enquête sur la gestion gouvernementale de la crise de la Covid-19.

Ses convictions sociales manquent d’ancrage.

L’intérim apparaît bien loin en effet de l’engagement à gauche de ses jeunes années à l’UNEF. Ses anciens camarades expliquent aujourd’hui que cette fille de ka haute administration sénégalaise naviguait alors sur l’aile sociale-démocrate, « l’aile droite », du syndicat étudiant, opposée par exemple à un revenu universel étudiant… Elle défend son choix professionnel en ces termes : « Si au bout de la chaîne, il n’y a pas une entreprise pour embaucher, cela ne marche pas. Là, je vois des gens en agence qui se battent pour trouver du boulot à des intérimaires qui ont parfois peu de qualification. » Macronarde un jour…

Sibeth Ndiaye a peut-être tourné une page, elle n’a pas refermé le livre. En septembre, le patron de LREM, Stanislas Guerini, est venu chercher cette membre de la Commission nationale des talents, au Pôle idées avec Clément Beaune où elle veut plancher sur l’égalité des chances et la lutte contre les discriminations, tout en assistant aux bureaux exécutifs. « L’idée, c’était de faire bloc », confie un membre de ce commando. Guerini apprécie « le sens politique » de l’ex-porte-parole. Sa fidélité à Macron, avec lequel le lien ne se serait pas distendu, à l’équipe des débuts, son attachement au parti, et « le virus de la politique » font le reste.

Naturellement, dans le désert des possibles, se pose la question de son implication dans la campagne de 2022. Pour l’heure, « cela dépend beaucoup de la nature de la campagne, de l’équipe. Je ne sais pas de quelle manière, mais elle restera toujours engagée dans ce mouvement. Ça, ça ne disparaîtra pas », affirme Clément Beaune. Quand elle est entrée chez Adecco, ses amis en ont plaisanté : « Elle nous trouvera un job en 2022