Culture : quand la gauche supprime des subventions, les artistes défilent-ils?

La maire EELV de Strasbourg annonce une baisse de 2,2 millions pour la Culture

Les associatifs ont-ils pour autant manifesté, cassé et brûlé ? Trois mois après la fermeture des musées, la maire écologiste et son premier adjoint d’extrême gauche pénalisent de nouveau la culture. Les subventions ont baissé de 2,5%, en 2023.

A Strasbourg, la fermeture partielle des musées mise en place à la rentrée 2022 a fait scandale, mais la maire EELV Jeanne Barsighian, issue de la communauté des Arméniens de Turquie, et son premier adjoint, de culture irannienne, Syamak Agha Babaei, persistent et signent quatre mois plus tard, soumettant à la délibération des élus une baisse de 2,5% de ses subventions à la culture en 2023. Soit 2,2 millions d’euros.

Cette décision politique concerne l’Opéra national du Rhin, l’Orchestre Philarmonique de Strasbourg (OPS), le théâtre du Maillon, l’Espace Django, Musica mais aussi Pôle Sud, Jazzdor et le Centre européen d’actions artistiques contemporaines. « C’est une baisse contenue, a argué Jeanne Barsighian, elle s’inscrit dans les hypothèses de 1,5 à 2,5% évoquées lors de nos échanges avec les acteurs culturels.»

Pour Alain Fontanel, conseiller municipal (Renaissance), ancien premier adjoint aux finances et à la culture, « la municipalité stigmatise une nouvelle fois la culture. Elle a besoin de chercher des économies mais pourquoi s’en prendre spécifiquement à la culture ? »

Pour rassurer les directeurs des institutions concernées qui voient les subventions baisser parfois jusqu’à 200.000 euros au moment où leurs charges en énergie et en personnel explosent, la maire a organisé un déjeuner. L’occasion pour Jeanne Barsighian d’expliquer la solution trouvée pour réduire l’impact de ses coupes. La maire de Strasbourg va trouver de l’argent ailleurs, en piochant dans le pot commun du contrat triennal « Strasbourg capitale européenne » qui lie l’État, la métropole, la région, la ville et la collectivité d’Alsace. Tous les trois ans, chacun verse de l’argent pour renforcer la dimension internationale de Strasbourg, notamment dans un fonds culturel. « Ce qui aurait dû être en plus va être aussi en moins », soupire Alain Fontanel.

L’enveloppe culturelle de ce Contrat triennal est actuellement de 9 millions d’euros et sert à financer des résidences artistiques comme la production de la série Parlement sur Arte. « Pour fuir ses responsabilités et éviter une nouvelle polémique, la maire ponctionne pour compenser ses propres coupes, s’insurge le conseiller municipal Pierre Jakubowicz (Renaissance, MoDem, Horizons et société civile) et plume de Fabienne Keller, puis de Brigitte Klinkert. Comme Alain Fontanel, Pierre Jakubowicz dénonce «un détournement honteux de l’esprit du Contrat triennal. » Et d’expliquer : « cet argent doit servir à financer des projets nouveaux et non pas de budget de secours à la mairie. C’est également une trahison de la confiance qui nous unit à nos partenaires co-financiers.» Sa crainte ? Que l’Etat, la région et autre métropole se sentent floués et ne réinvestissent pas dans le pot commun. Le 15e contrat triennal qui ira jusqu’en 2025 doit justement être discuté en 2023.

Autres exemples de coupes de subventions culturelles

Une lettre ouverte d’une cinquantaine d’équipes artistiques de Nouvelle-Aquitaine a été adressée en octobre dernier  à Alain Rousset, président de la Région, dénonçant un désengagement de l’institution.

Une cinquantaine de compagnies dénonçaient une baisse de budget : « En 2024, toutes les associations culturelles verront leur subvention de fonctionnement baisser de 5.000 euros, à l’exception de celles qui n’étaient soutenues qu’au niveau plancher de 5.000 euros. »

Les chiffres sont édifiants. Selon une enquête de l’association Lapas (l’Association des professionnels de l’administration du spectacle) réalisée auprès de leurs adhérents, réunissant 272 compagnies, le nombre de représentations entre les saisons 2023-2024 et 2024-2025 devrait diminuer de 54 %…

Sans surprise, le ministère de la Culture figure parmi les plus touchés par cette coupe détaillée dans un décret du 21 février : finalement, le budget de la Culture hors audiovisuel public annoncé pour 2024 par Rima Abdul Malak (4 466 millions d’euros) accuse une baisse de 4,5 %, en se voyant retirer 201 millions d’euros…

Pour entraver le RN, le monde de la culture s’appuie sur les associations professionnelles et ses syndicats

Peu d’artistes se sont exprimés pour appeler à faire « barrage » au parti de droite nationale. C’est plutôt la nébuleuse des organisations professionnelles, des syndicats du secteur culturel ou les festivals qui occupent le devant de la scène dans cette bataille.

La CGT-Spectacle, la CGT Culture, la CFDT Culture, SUD Culture, le Syndeac (syndicat national des entreprises artistiques et culturelles), le Profedim (producteurs, festivals) ou encore le Syndicat national des scènes publiques (SNSP) comptaient parmi les organisations mobilisées le 20 juin.

Une semaine plutôt le Syndeac, Les Forces musicales (Opéras, Orchestres), le Profedim ainsi que les fédérations du monde du spectacle et de la musique de la CGT, de la CFDT et de Sud avaient également appelé à manifester les 13 et 15 juin. Pour cette dernière date, ils ont rejoint un mouvement plus large de  protestation contre l’extrême droite organisée par différents acteurs de la société civile.

L’occasion pour la secrétaire générale de la CG d’extrême gauche totalitaire, Sophie Binet, d’affirmer que « pour l’extrême droite, la culture, c’est la propagande ». Son syndicat appelle à voter Nouveau Front Populaire, aux prochaines élections législatives.

L’Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA), l’association des producteurs d’animation AnimFrance, l’Union des réalisatrices et réalisateurs (U2R) et l’Union des producteurs de cinéma (UPC) sont quelques-uns des signataires de la tribune publiée le 18 juin 2024.

La veille, des acteurs et actrices du livre avaient lancé une pétition où « ils appellent toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans ces valeurs à se mobiliser et à porter leur voix avec détermination contre l’extrême-droite« . « D’ordinaire, je ne m’exprime jamais politiquement et je garde vraiment mes opinions pour moi, je fais très attention à séparer ma vie romanesque, littéraire, de mes opinions politiques », confiait l’un des pétitionnaires, l’écrivain Franck Thilliez, à Franceinfo. « Si je le fais aujourd’hui, poursuit l’auteur, c’est que je trouve que l’instant est grave. L’extrême droite n’a jamais été aussi proche du pouvoir et nous sommes dans un moment critique de notre pays ».

La peur de la démocratie issue des urnes mobilise les intellos figés dans la doxa archaïque de l’extrême gauche.

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