L’Assemblée nationale saisit la justice pour un possible «parjure» de magistrate

Catherine Champrenault, procureure générale de Paris, n’est pas tirée d’affaire

L’Assemblée nationale va saisir la justice pour possible «parjure» de Catherine Champrenault, procureure générale de Paris, qui avait assuré devant une commission ne pas avoir été informée d’une enquête en lien avec l’affaire des «fadettes», d’après plusieurs députés.

Le bureau de l’Assemblée, sa plus haute instance collégiale, a décidé cette saisine ce mercredi à l’unanimité. Catherine Champrenault avait déclaré sous serment en juillet 2020 que le Parquet général n’avait pas été «informé» de l’enquête du Parquet national financier (PNF) ayant conduit à éplucher les factures téléphoniques détaillées («fadettes») de nombreux ténors du barreau et de leurs collaborateurs.

La révélation en juin de cette enquête menée par le PNF pendant près de six ans avait provoqué un tollé jusqu’au garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, dont des fadettes avaient elles aussi été examinées quand il était avocat. «Cette enquête n’a jamais fait l’objet d’un suivi par le parquet général, qui n’en était pas informé, en dehors d’une demande de jonction qui a été communiquée. Nous n’avons jamais eu d’informations sur le contenu de cette enquête ou sur les modalités d’investigation», avait-elle déclaré.

Or, un magistrat du PNF, Patrice Amar, avait écrit à Catherine Champrenault début 2019, accusant sa patronne d’alors, Éliane Houlette, d’avoir indirectement permis à Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog de se savoir sur écoutes en 2014, selon un courrier révélé par Le Point fin février. Il évoquait à cette occasion une «enquête sur une violation du secret professionnel». Patrice Amar, vice-procureur du PNF, était chargé du suivi du dossier de Nicolas Sarkozy ainsi que de l’enquête pour identifier l’éventuelle taupe ayant prévenu l’ancien président et Me Thierry Herzog en février 2014.

«Informée de cette enquête et de nombreux détails»

«Contrairement à ce qu’elle a déclaré lors de son audition, Mme Champrenault était donc bien informée de cette enquête et des nombreux détails portés à sa connaissance par M. Amar, dont une note d’analyse», ont écrit Ugo Bernalicis (LFI), président de la commission d’enquête sur l’indépendance de la justice, et Olivier Marleix (LR), vice-président, au président de l’Assemblée Richard Ferrand (LREM), dans un courrier consulté par l’AFP. Ces députés lui demandaient de saisir le bureau de l’Assemblée de ce témoignage, «potentiellement constitutif d’un délit de parjure».

Avant la fin des travaux de sa commission, Ugo Bernalicis avait saisi directement en septembre dernier le procureur de Paris, accusant sept hauts responsables – procureurs, préfet, directeur de la police nationale – de «faux témoignages» et «parjures» devant les parlementaires. Catherine Champrenault était déjà visée pour d’autres déclarations. Mais l’enquête ouverte contre le préfet de police de Paris Didier Lallement et quatre hauts magistrats dont la procureure générale a été classée sans suite par le parquet de Nanterre début avril.

Le faux témoignage est passible de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende mais les condamnations pour faux témoignages sont extrêmement rares, la jurisprudence exigeant de démontrer une intention caractérisée de tromper les parlementaires.

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